12. La Noël 1742
Guillaume a quatorze ans. Il travaille
chez ses cousins daudou de Ste Eulalie. Jean-Pierre Combes daudou à
69 ans; il a bien besoin de quelqu'un pour aider la servante, d'autant
que Jean, le grand frère de Guillaume qui apprend le métier
depuis quelque temps, est remonté à Malescombes aider sa
mère. Dans la pièce sombre, éclairée la journée
par une petite fenêtre et par la porte entrouverte, le vieux cabaretier
trône sur son siège, l'oeil comptable et la lippe sobre. Le
soir de Noël on va en groupe à la messe de minuit. L'abbé
Burguière parle des bergers qui ont froid, qui ne savent pas qu'à
quelques pas va naître l'Espérance du monde. Il parle d'un
ange qui leur annonce la venue du roi du monde dans une lumière
plus forte que le soleil à midi. Et dans la nuit noire, alors que
sonnent les cloches, on rentre en chantant, en riant, en s'interpellant.
Guillaume se réchauffe à la cheminée, lumineuse comme
la lumière de l'ange. Dans le "cantou", le feu danse sur une grosse
bûche bien noueuse. Ce soir, la nuit ne fait plus peur, plus personne
ne lui obéit, on s'installe pour se parler et pour manger quelques
châtaignes dans la lumière de Noël.
Deux jours plus tard, les consuls de
St Geniez traversent le village en questionnant les habitants. A-t-on vu
passer un homme en fuite ? C'est un déserteur de l'armée
du roi qui est revenu au pays. Le premier consul Pierre Joseph Couret et
ses collègues sont chargé de le rattrapper. Mais sur le chemin,
à la sortie de Ste Eulalie, les hommes tombent dans un guet apens
: des pierres pleuvent, des branches les renversent de cheval. Toute la
famille du déserteur s'est postée pour empêcher les
recherches. Mais en voyant d'autres cavaliers rejoindre les consuls, toute
la famille se met à crier pour appeler à l'aide les habitants
de Ste Eulalie. Et, surgissant des prés et des bosquets, une foule
hurlante fait rebrousser chemin aux chasseurs d'homme.
13. Le fil ténu de la vie
C'est à cette époque que
Joseph Lacan et sa femme viennent s'installer au village de Malescombes.
Ils rejoignent le reste de leur famille : Jean-Pierre, Pierre et Guillaume
Lacan. Ils ont avec eux une fille, Marianne, qui vient d'avoir 19 ans.
Dans la maison des Combes, Guillaume
en a 21. Le rapprochement se fait selon une logique où apparaissent
les nécessités du quotidien, la solidité et la santé
apparente de chacun, l'attirance et pourquoi pas l'amour ? Le 30 novembre
1752 ils se marient.
Jean, le grand frère de Guillaume,
est là avec sa femme Marianne . Il a tiré profit de
son apprentissage chez le cousin daudou, il est maintenant cabaretier à
Ste Eulalie, bien petitement pour l'instant .
Guillaume aime beaucoup son frère
aîné Jean, aussi, c'est le prénom qu'il donne à
son fils qui naît deux ans plus tard. Le baptême du bébé
de Guillaume se déroule dans la petite église de Malescombes;
il y a bien sûr Jean, le parrain qui, en tant qu'aîné,
remplace son père, Louise, la mère, Bernard Costes et Guillaume
Lacan.
En plus de la taille qui pèse presque exclusivement sur les paysans, après l'impôt du 1/10e, en 1749 l'impôt du 1/20e vient s'ajouter aux charges trop lourdes qui accablent les gens de la terre.
1754 : Mandrin, le brigand contrebandier venu des Alpes avec une troupe de 30 hommes, va à Rodez, oblige l'entrepreneur de tabac à acheter un lot de tabac de contrebande à son prix. Il continue ses brigandages jusqu'à Mende le 3 juillet.
Cette année-là, Jean Combes, fils de Guillaume et Marianne, naît à Malescombes.
Guerre de sept ans (1756-1763), perdue pour la France qui devra abandonner presque tout son empire colonial à l'Angleterre.
L'année 1767 une nouvelle épidémie
frappe : à Ste Eulalie, le grand frère Jean et Marianne perdent
quatre de leurs enfants âgés de 1, 2, 8 et 10 ans.
Guillaume à Malescombes perd cette
année-là deux enfants, l'un de six mois, l'autre d'un an.
Avec sa femme Marianne il aura plus de
treize enfants connus. Elle accouchera du dernier à cinquante ans.
1774 : mort de Louis XV, avènement de Louis XVI
Le 3 mars 1780, Jean Combes épouse une fille de Malescombes : Catherine Delous.
16 août 1784 : l'abbé
Carnus professeur de physique s'élève d'une des cours du
collège de Rodez dans une montgolfière de 52 pieds de diamètre
qu'il a fait construire à ses frais. Il monte à 8500 pieds
, reste une demi-heure en l'air et redescend à 7000 toises
de Rodez.
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