Visite du musée du Bon Pasteur et de la Résidence Lemay
(Crèche St-Vincent de
Paul) de Québec.
Nous sommes le 5 octobre 2002. Avec
quelques participants de mon groupe Adoption,Émotions,
Retrouvailles, nous avons rendez-vous à l'Hôtel de
Ville du Vieux Québec à 9:30 heures. C'est toujours avec une immense
joie que j'attends mes parents
biologiques pour serrer très fort dans mes
bras ma douce maman.
Le groupe est enfin réuni et nous partons en direction de la rue Couillard
vers le musée du Bon Pasteur, où Sr Marie-Berthe Bailly nous attend.
Après
quelques présentations, Sr Bailly nous explique que si le musée devait
être
visité seulement par les personnes touchées par l'adoption, il vaudrait
la peine
d'être ouvert.
Nous débutons la visite par le premier étage. Nous y trouvons des
objets
très anciens, dont une splendide horloge vieille de 250 ans et toujours
fonctionnelle.
Sr Bailly nous raconte l'histoire passionnante d'une dame
très courageuse,
Marie Fitzbach qui due affronter de terribles épreuves pour en venir à
fonder cette communauté que sont les Srs du Bon Pasteur. Cette communauté
se
donnera pour mandat de recueillir les femmes dans le besoin, les pénitentes
comme
on les appelait à l'époque. Il faut dire que c'était la grande misère pour
les
femmes dans ce temps-là. Si elles étaient trouvées seules dehors dans le
soir,
elles étaient arrêtées pour prostitution. Une fille mère était
emprisonnée.
Le besoin était donc criant pour aider les femmes en
détresse.
Mais la misère était grande à Québec et les immigrés très nombreux.
Dans les débuts de leur oeuvre, cette communauté n'avait pour toute nourriture
que 3 livres de viande par semaine pour 10 personnes.
On nous montre une vidéo explicite venant compléter l'histoire que Sr Bailly
nous a raconté.
Nous accédons par la suite au deuxième étage. Cet endroit se veut des
plus
captivants pour notre groupe car on y retrouve des objets et mobilier ayant
appartenu à la Crèche St-Vincent de Paul.
Sr Bailly nous invite à nouveau à
nous asseoir pour visionner un reportage
très intéressant. Nous y voyons
comment était la vie dans cette crèche.
Les soins apportés aux bébés, les
médecins, les dossiers ( je crois qu'à cet
instant précis, ceux qui recherchent
sans relâche leurs origines auraient bien
aimé être à la place de la religieuse
préposée au classement de ces fameux
dossiers et aller y jeter un coup d'oeil).
Nous y avons vu aussi comment se
déroulait une adoption. Les parents adoptifs
regardaient par la fenêtre les
petits enfants. Une personne leur montrait
les enfants qui étaient libre pour
l'adoption. Sur le mur du dortoir, un liste
des enfants était affichée avec
comme code à côté de leur nom la lettre R pour
RÉSERVÉ et la lettre A pour ADOPTION.
Une fois l'enfant choisi, on le faisait examiner par un médecin afin de
s'assurer
que tout allait bien. On remettait ensuite l'enfant aux nouveaux
et heureux
parents. Cet épisode m'a beaucoup touchée, car je me rappelle
de mon adoption.
J'avais très peur de quitter la crèche, je me rappelle
combien je pleurais et que
ma nouvelle maman me consolait tout en douceur.
Grâce à cette vidéo, je découvre un volet de l'histoire qui m'étais tout à
fait
inconnu. Pour les enfants en difficulté d'apprentissage, ce qui était
commun
dans les crèches, une maison était ouverte dans la banlieue de Québec afin
d'offrir à ces enfants un meilleur support. On comprendra qu'avec tout le
travail à abattre, les médecins, les infirmières et les religieuses n'avaient
guère
le temps de stimuler et d'éduquer les enfants. Donc, la communauté des
religieuses du Bon Pasteur mettait vraiment tout en oeuvre pour nous aider.
Nous continuons notre visite et s'est avec émoi que tous ont découvert les
petits lits blanc. Peut-être y avons nous dormi!!!
Sur le mur de droite, nous pouvons voir des photos des bébés à la
crèche
dans les années 1950-1960. Je suis attirée par une petite binette
qui me ressemble
comme deux gouttes d'eau. En fait, tous ceux qui ont vu
mes photos d'enfants
ont aussi convaincu qu'il s'agit bien de moi. Maman la
regarde attentivement et
en est également convaincue. D'ailleurs, en
entrant dans cette partie du musée,
elle l'avait remarqué et un sentiment très
fort lui est monté au coeur. Elle me
reconnaissait et revoyait cette même
façon de placer ma petite bouche que lors
de mes premières photos prisent quand
j'avais 2 jours.
Sr Bailly me dit
que, puisqu'on croit que c'est moi, elle me fera parvenir cette
photo
chez-moi... quelle gentillesse!!!
Plus loin dans la pièce se trouve quelques bureaux pour l'école et de vieux
accessoires, livres d'école, aiguisoir et instruments de musique.
Entre temps, Linda, une jeune femme qui nous accompagnait à cette visite
avait
emmené des photos d'elle à la crèche, une dans les bras d'une religieuse
et l'autre,
dans les bras d'une infirmière. Elle avait emmené ces photos
dans le but de mettre
un nom sur ces visages inconnus. Elle commença donc
à montrer ces photos et
quelle ne fut pas sa surprise et sa très grande joie
lorsqu'en la montrant à une
religieuse, celle-ci se reconnue et dit:" Ben c'est
moi!!!" Nous avons donc assisté
à une retrouvaille ce matin-là. Tous
étaient profondément touché par cet événement
des plus surprenant. Cette
religieuse aime beaucoup les adoptés et avait demandé
une permission spéciale
pour assister à cette visite pour pouvoir nous parler. Linda a contacté sa mère
adoptive afin de lui dire ce qui venait de se passer et de lui permettre
à son
tour de discuter avec cette religieuse.
Voici son témoignage
Le 5 octobre 2002, je
suis allé visiter le musée et la crèche
St-Vincent de Paul de Québec, avec
d'autres membres de la communauté, adoptés et mères biologiques.
J'avais apporté avec
moi, une photo prise lorsque mes parents adoptifs sont venus me chercher à la
crèche. Et sur cette photo, j'étais dans les bras d'une sœur. Et à la visite
du musée, il y
avait 2 ou 3 sœurs présentes. J'ai demandé à l'une d'entre
elles,
si elle connaissait cette sœur qui me tenait dans ses bras, sur cette
photo. Et que fût ma surprise, quand elle m'a répondu: Mais,
c'est moi…
Je croyais plutôt
qu'elle me dirait peut-être le nom de la sœur et qu'elle était décédée.
Difficile de dire l'âge de cette sœur dans ses vêtements. Je ne m'attendais pas
du tout à cela. Elle est en
pleine forme, beau sourire et contente, elle aussi,
de me rencontrer. Cela fait quand même 42 ans de cela. Ce n'est pas qu'elle me
reconnaissait ou se souvenait de moi, mais, de m'avoir tenu dans
ses bras et de
m'avoir remise à de bons parents adoptifs, cela
faisait son bonheur. Je l'ai
étreinte dans mes bras en guise de reconnaissance, et la joie que cette
rencontre m'a apportée, et la présence des autres qui assistaient à ce beau
moment, me faisait
chaud au cœur, qu'ils puissent assister avec moi à ces
moments inoubliables.
Sœur Gilberte Dubé,
c'est son nom actuel, elle portait le nom
de Sœur Marie-Lionel, à l'époque, est
venu me faire visiter le
2ième étage de la crèche où j'étais durant
mon cours séjour,
moins de 3 mois. Elle m'a expliqué où se situait le bureau du
médecin, là où il y avait la salle des bains, m'a montré les salles
où étaient
les bébés, et les procédures lors de la visite des futurs parents adoptifs.
Je vous dis que de voir
ou de revoir ces lieux avec mes yeux
d'adultes (je n'ai aucun souvenir), était
très émouvant et en
présence de cette soeur qui a fait partie de mon passé, ouffff…
Je manque de mots pour vous exprimer tout ce que j'ai ressenti
à ce
moment. C'est comme dans un rêve. Et je me dis qu'après
cette rencontre tout
est possible, maintenant, pour retrouver
ma mère naturelle.
Bien entendu, il y a eu
prises de photos, dans ces mêmes lieux
avec Sœur Gilberte, devant les petits
lits qui nous ont accueillis,
dès nos premiers jours. Des souvenirs qui seront
ajoutés à mon
album photo. Il ne me manquera plus que celles avec ma mère
naturelle pour combler cette album… Prochaine étape…
Linda Gagnon
(nom fictif, Constance
Thibault)
13 avril 1960
Nous quittons le musée pour nous rendre à la Résidence Lemay où Sr Bailly
nous a
réservé une salle pour le dîner.
Ma soeur Guylaine vient nous rejoindre ainsi que quelques autres personnes du groupe
adoption. Je me sens très heureuse de visiter ces lieux avec Guylaine.
Nous sommes
nées là toutes les deux et de s'y retrouver ensemble dans notre
première maison me remplissait d'émotions et d'un sentiment de fierté.
C'est avec une grande émotions que j'accueille Denyse,
l'infirmière que j'ai retrouvée.
Quel bonheur de visiter ces lieux en
compagnie de ma mère et de mon infirmière. les 2 témoins de mes premiers jours.
Nous commençons la visite par la salle
d'accouchement. Nous nous assoyons afin d'écouter Sr Bailly qui nous
raconte, non sans une certaine passion, ces expériences d'antan. Elle nous
explique qu'il y avait une rampe vitrée devant l'estrade, nous
raconte que
l'éclairage était tamisé et les soins apportés aux mamans.
Elle nous montre ensuite une
chambre derrière la salle d'accouchement, juste
derrière la salle de réveil.
Cette porte était fermée lors de notre première visite.
Cette chambre se
trouve être la salle des douleurs. Connaissant l'histoire de maman,
je m'y
précipite pour mettre enfin une image sur son récit. Elle me suit et me dit:
" Si
c'est vraiment ici..." - "Oui maman, c'est vraiment ici" -" J'étais placée là"
me désignant le côté droit de la salle. Son émotion était palpable. On peut la
lire dans son regard.
C'est ensuite dans une longue
étreinte que nous nous laissons aller aux larmes.
Ma soeur, remplie de
délicatesse, demande aux autres de sortir et nous laisser
seule pour vivre
ce moment très intense. Maman et moi lui sommes très
reconnaissante de
cette attention.
Les souffrances que ces mères ont
traversé sont incroyable et les suivent des
années durant. Malgré qu'à la crèche St-Vincent de Paul, ces mamans
étaient
traitées avec égard, des religieuses nous ont dit que, pour elles, ces jeunes
filles
étaient comme leur propre filles, rien ne peut leur faire oublier cette partie
dramatique de leur vie.
La visite se continue.
Passant par une buanderie et les cuisines, Sr Bailly
nous conduit ensuite vers la
chapelle où nous étions baptisé.
Nous accédons par la suite à différentes
salles de cours qui étaient autrefois des
dortoirs. Nous y distinguons les
fenêtres par lesquelles les parents adoptifs venaient
nous observer pour nous
choisir. (Voir à droite par dessus les tableaux)
Les souvenirs montent en mémoire
de Denyse qui en a de belles choses à
nous raconter.
Nous trouvons un vrai trésors d'antiquités
qui nous font rêver de ce qu'était la
vie autrefois en ces lieux si bien
préservés.
Nous accédons maintenant à
une ancienne salle de jeux
Et finalement retourner du
côté des dortoirs des mamans. Et là, maman nous
explique comment
c'était placé dans le temps, tentant de retrouver le dortoir où
elle avait
séjourné.
Nous passons par la salle
de couture, salle où maman a passé des heures
et des heures à actionner ces
machines à pédales
Nous terminons notre visite
dans l'aile l'école de puériculture. Des centaines de
photos de
puéricultrices s'y trouve... si elle pouvait nous raconter tout ce qu'elles
ont vu pendant ces années!!! Elles resteront à jamais les témoins
silencieuses d'une
partie de notre histoire.
Cette visite, c'est main dans
la main avec maman que je l'ai effectuée.
Quel différence d'avec la
première fois où je visitais ces lieux, la cherchant
encore de toute mes
forces. Voilà plus de 40 ans, elle quittait cette maison les
bras vide et le
coeur brisé et aujourd'hui, c'est main dans la main que nous
l'avons fait.
Quelle sentiment merveilleux. Comme si on pouvait dire au monde
d'alors qui séparait les mamans de leurs enfants :" Vous n'avez plus aucun
pouvoir
sur nous, nous avons gagné car nous sommes à nouveau réunies!!!"
Je réalise à quel point je
suis privilégiée d'avoir trouvé ma douce et belle maman
d'amour et d'avoir
trouvé aussi cette personne tout à fait extraordinaire qu'est cette
infirmière qui a prit soin de moi, Denyse, et qui a su me raconter une autre
page
de mon histoire jusqu'ici inconnue pour moi. Merci infiniment Denyse.
Mon souhait le plus cher est
que mon histoire vous donne espoir et le courage de
continuer vos
recherches. Évidemment, j'aimerais que tous puissiez vivre une histoire
d'amour aussi intense.
Croyez-moi, votre vie ne sera
plus jamais la même.
Je tiens à remercier tout
spécialement Sr Bailly qui nous a
servi de guide avec grande générosité et
patience. Je retiens particulièrement de cette visite tout l'amour qu'on
recevait de
la part des gens qui nous entouraient à la crèche... rien qu'à
penser à l'émotions des religieuses quand un groupe va visiter
ces lieux et
la retrouvaille de Linda et Sr Gilberte Dubé, ainsi
que la passion de Denyse.
Malgré que je suis consciente
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