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MODELES DIDACTIQUES DES LIVRETS PEDAGOGIQUES VIDEO
D'ALLEMAND
Tableau des dominantes possibles et de leurs caractéristiques: 1.Dominante culturelle, 2. dominante linguistique, . 3.Dominante psychopédagogique, 4. Dominante filmique, 5.Dominante formation générale
Les modèles découverts dans les livrets : 1. Modèle à dominante civilisationnelle . 2-Modèle à dominante culturelle/artistique . 3.Modèle à dominante télévisuelle/filmique . . . . 4-Modèle à dominante linguistique (MLS) . 5-Modèle à dominante "Texte de base", 6-Modèle à dominante psychopédagogique
1.Tableau des dominantes possibles et de leurs caractéristiques Par "dominante", nous entendons ce qui fait l'objet principal des activités sur le document vidéo.
L'étude des préfaces et des introductions (des livrets pédagogiques vidéo) a révélé les préoccupations dominantes des auteurs. En les comparant au contenu des livrets, nous verrons si elles sont réellement traduites dans les activités didactiques, c'est-à-dire dans la manière d'utiliser le DTA pour l'enseignement de l'allemand. Ensuite, dans le processus d'élaboration des modèles didactiques des livrets, nous dressons le tableau de toutes les formes possibles d'utilisation des films ou de DTA en cours de langue, rencontrées dans l'étude d'articles et d'ouvrages en français, en allemand et en anglais , selon leur dominante didactique.
Nous avons choisi de classer ces modèles selon leur préoccupation (ou leur orientation) didactique dominante et de signaler le livret dont ce pourrait être la dominante.
1.Dominante culturelle . . . sous-dominantes:
- artistique: le film est une uvre d'art étudiée dans le contexte de l'histoire de l'art (ex. l'expressionnisme pour Nosferatu ou le romantisme pour Der müde Tod,
- littéraire: l'étude de films comme Effi Briest ou Lotte in Weimar Erziehung vor Verdun, Der Zauberberg, voire Himmel über Berlin qui ont pour point de départ un texte écrit de grand auteur peut se centrer sur le texte et devenir une étude de roman qui prend plus ou moins en compte la mise en scène cinématographique,
- civilisationnelle: le document intéresse parce qu'il montre (parfois de manière symbolique) la vie dans le pays sous les aspects les plus divers,
- communicationnelle: l'art de communiquer dans la langue étrangère devient l'aspect focalisateur de l'étude, et l'on s'intéresse tout particulièrement à la communication non verbale.
2.Dominante linguistique . . . sous-dominantes:
compréhension orale (du MLS): l'étude consiste à comprendre ce que disent les personnages ou la voix off. Dans ce cas, le DTA est plutôt un exercice de discrimination auditive sur un thème étudié. Il est utilisé pour la révision, le rappel de vocabulaire, l'entraînement, la consolidation ou même le contrôle des connaissances,
lexicale: l'attention est portée sur le vocabulaire ; les activités consistent surtout à comprendre et réemployer ce vocabulaire (Setzt auf Video, Gummi)
grammaticale: le document est retenu pour l'introduction d'éléments grammaticaux sur lesquels porte ensuite l'entraînement,
expression (déclencheur de parole): c'est la forme qui semble la plus fréquemment utilisée, en particulier dans le post-baccalauréat. Un débat s'installe après la projection du document.
3.Dominante de type psycho-pédagogique . . . sous-dominantes:
multiréférence didactique: le document est choisi principalement parce qu'il permet une étude de la langue à plusieurs niveaux et de manière différenciée (Gummi, Fahrerflucht)
motivation (effet incitateur, gratification ou ludique): la présentation du document permet de relancer la motivation des élèves pour l'apprentissage de la langue, ou bien, il s'agit d'un document facile qui a pour fonction de récompenser la classe qui a bien travaillé, tout en lui présentant des dialogues en langue étrangère. Mais il pourrait s'agir aussi d'un jeu dans la langue étrangère dans lequel les élèves sont mis en concurrence pour trouver des indices dans les images, les paroles ou les bruitages, relever des détails, etc. Cette possibilité semble encore inutilisée dans les livrets. Notons cependant que la nature des activités et leur variété est un excellent moyen de motiver les élèves: en alternant les moments de vision/écoute, d'activité écrite et de débat, on rend le travail plus dynamique et les élèves ne voient pas le temps passer alors qu'ils n'ont pas cessé de travailler dans la langue étrangère. Nous en trouvons de nombreux exemples dans les " 68 types d'exercices "
interculturelle: comme le propose I. Schwerdtfeger dans son livret (1996), et dans les exemples qu'elle donne dans son livre (1989),l'étude d'un film ou d'un DTA peut donner lieu à une approche interculturelle, tout spécialement en travaillant sur les symboles.
formation aux techniques d'apprentissage: l'étude d'un DTA se prête aussi à la présentation et l'entraînement aux techniques d'apprentissage des langues. En effet, le contexte filmique donne l'environnement du lexique et des tournures grammaticales
4.Dominante filmique . . . sous-dominantes:
compréhension de la diégèse (sens général): sans tenir compte du langage cinématographique, les élèves tentent de comprendre la diégèse, c'est-à-dire l'histoire racontée. On en reste à l'histoire sans chercher à l'analyser.
les techniques et leurs effets: c'est la situation qui contraste avec la précédente, c'est-à-dire que la classe analyse les signifiants cinématographiques pour mieux comprendre les informations qu'ils transportent et que n'ont pas perçus ceux qui en restent à la diégèse. Der amerikanische Freund en est un bon exemple quand les auteurs font réfléchir au sens que donnent les symboles (que les élèves doivent d'abord déchiffrer et comprendre)et permettent de trouver une autre histoire dans le film, une interprétation psychanalytique en l'occurence.
analyse analogique du film (ou d'un texte): C'est ce que proposent certains auteurs de LP quand ils ne prennent pas réellement en compte les symboles qu'a placés le réalisateur
le film dans l'histoire du cinéma (genre Cahiers du cinéma). Dans le livret de Chevillard ('Le film '), certaines études relèvent plutôt d'un travail sur l'histoire du cinéma allemand.
5.Dominante formation générale . . . sous-dominantes:
formation à l'image: c'est ce qui est relevé par la plupart des auteurs de livrets. Certains cependant donnent une importance primordiale à l'étude de photos extraites du film. Dans le cas, le langage cinématographique est largement ignoré, mais cet 'arrêt sur image' permet de mieux observer le décor et la construction du plan, donc de percevoir l'origine technique de certains effets (Livret du CRDP de Grenoble, par exemple).
formation à l'analyse de document : Les auteurs de Jeder für sich assimilent l'étude d'un film à celle d'une uvre littéraire et privilégient donc l'analyse du document selon des techniques littéraires, comme la narratologie, jouant ainsi sur l'analogie avec la réalité. Le premier livret d'Yves Chevillard (CRDP Toulouse, 1993) proposait quelques études semblables en vue d'une présentation aux épreuves orales du baccalauréat
formation au repérage d'informations par le canal audiovisuel (éléments linguistiques ou civilisationnels/communicationnels ou relevant de la technique du cinéma, etc.). Cet aspect est souvent passé sous silence, mais devient important dans le contexte de l'information par l'image qui remplace parfois le document écrit. On le voit dans certains magasins de bricolage, mais c'est aussi le cas en sciences de la nature, en histoire ou en géographie. Cette dominante se retrouve principalement dans les documents qui proposent de travailler sur les informations télévisées (CRDP de Dijon) ou sur des films informatifs comme Gummi .
2. Correspondances des sous-dominantes et des livrets
Rappel des numéros de livret :
1-CRDP Rouen 1991: Angst essen Seele auf, M. Bouf et al.2-CRDP Nancy 1988: Der amerikanische Freund + Nosferatu + Die letzten Jahreder Kindheit B. Hamille P. Schott.
3-CRDP Strasbourg 1988: Die Spitzenklöpplerin , C.Bischoff.
4-CRDP Toulouse 1993: Le film en classe d'allemand: 7 films, Chevillard
5- CRDP Montpellier 1995: Jeder für sich Line Dettmar.
6- CRPD Toulouse 1996 L'allemand par la publicité. Chevillard
7- Bande vidéo et livret "So gesehen" Didier, 1996
8-CRDP Grenoble 1988 Die verlorene Ehre der K. Blum
9-CRDP Amiens 1993: Traumauto, C. Decocqman et T. Wolff.
10- Europa, Europa oder Hitlerjunge Salomon (CIEP Sèvres 92)
11 CRDP Paris 1989 Der blaue Engel
12-CRDP Amiens 1990: Loriot Herr und Frau Hoppenstedt im Restaurant
13-CRDP Strasbourg 1992: Setzt auf Video, Y. Bleichner.
14- MAFPEN Strasbourg 1992: Gummi + Fahrerflucht, A. Verreman.
15-CRDP Dijon 1988-1996: Vidéo et télévisions étrangères (H. Piper)
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Correspondances : DOMINANTES et NUMERO de LIVRET 1.Dominante culturelle . . . sous-dominantes :artistique: 1, 2, 4littéraire 14, 11
civilisationnelle (histoire, manière de vivre) 5, 6, 7, 8,10, 15
communicationnelle (débats sur un thème?) 15
2.Dominante linguistique
sous-dominantes :
compréhension orale (du MLS) 7, 13, 14, 15lexicale 12, 13, 14
grammaticale 13, 14
expression (déclencheur de parole) 3, 5 ,6
3.Dominante psychopédagogique . . . sous-dominantes :
activités différenciées 13, 14motivation (incit., gratif. ou lud.) tous
interculturelle livret allemand: Traumauto de I.Schwerdtfeger
formation aux techniques d'apprentissage 14 (un peu)
4.Dominante filmique . . . sous-dominantes :
la compréhension de la diégèse 3, 4, 10les techniques et leurs effets 1, 2, 7 (un peu)
l'analyse analogique du film 6, 8, 9, 11, 12,15
le film dans l'histoire du cinéma 4 (Alice)
5.Dominante formation générale . . . sous-dominantes :
formation à l'image 1, 2, 11formation à la compréhension de l'oral 14,15
formation à l'analyse de document 5
f. au repérage d'informations 15
Il est parfois difficile de cerner les modèles qui seraient sous-jacents á certains documents : Europa, Hitlerjunge Salomon par exemple, ne propose pas de travailler avec la vidéo pour les arrêts sur image, ni l'étude du langage cinématographique. Il donne de nombreux documents annexes, écrits, même lorsqu'il s'agit d'un débat avec l'acteur: extrait de Faust, Deutschlandlied, lettre de Perel, son autobiographie, Le film est une référence en tant que souvenir que les élèves et étudiants en ont gardé après une séance de cinéma. En fait, il s'agit de l'étude d'un thème, introduite par le film. Le livret propose une interprétation socio-philosophique du film, c'est-à-dire des thèmes abordés. Nous le classerons donc dans la dominante culturelle/civilisationnelle.
Nous constatons que de nombreuses utilisations ne requièrent pas de livret pédagogique. D'autres n'en ont pas alors qu'elles devraient ou pourraient en avoir. D'autres se retrouvent dans des méthodes de langue telles que celles qui sont présentées à la télévision (par exemple les méthodes "Viktor", et "Anna, Oskar und Schmitt"). Enfin, quelques-unes pourraient voir le jour en fonction de besoins particuliers.
L'analyse interne des livrets nous a permis de les classer selon diverses dominantes, tout en concédant qu'un livret pouvait avoir plusieurs dominantes. Pour parvenir à des modélisations satisfaisantes, nous allons, d'une part, devoir schématiser les tendances didactiques et, d'autre part, devoir recourir à des schémas de modèles existants, en les adaptant à notre situation.
B. Les modèles réels
1- Les modèles découverts dans les livrets Les modèles théoriques que nous avons élaborés seraient vains si nous ne nous appuyions sur un corpus. L'analyse des livrets nous a permis de reconnaître les dominantes didactiques, mais aussi diverses sous-dominantes.
A partir de ces éléments qui montrent tout autant l'éclectisme des choix méthodologiques que les tendances lourdes, nous nous proposons de définir des modèles qui font apparaître les contours de systèmes méthodologiques les plus cohérents possibles, c'est-à-dire les moins éclectiques.
Comme nous l'avons vu en début de chapitre, les 9 éléments constituants des modèles à dominante s'appuient à la fois sur les points forts des approches et des méthodologies, mais aussi sur les points de passage obligés de toute séquence didactique. C'est ainsi que l'on retrouve dans chaque livret:
1- des objectifs didactiques liés à la matière : on privilégie la compréhension du document soit de manière globale, soit de manière approfondie, ou alors on recherche certains types d'information, ou bien on en retient les éléments linguistiques
2- des principes, le plus souvent non exprimés, et des méthodes (de choix et de gestion des activités), adaptées au support. Ces méthodes prévoient certains types d'activités concernant le support (présentation, objet, variété, enchaînement, ), ainsi que les supports complémentaires: extraits d'uvres, de dialogues, interviews, dessins, photos, statistiques ),
3- des techniques d'apprentissage de la langue (réactivation, introduction, consolidation )
4- des activités de type langagier, s'appuyant sur le support, enchâssés dans des procédures de cours, des 'mises en scène didactiques' ,
5- des formes sociales de travail pour chaque activité, selon les types de rapports sociaux privilégiés,
6- des activités cognitives plus ou moins complexes, selon les modèles,
7- des matériels: fiches de travail, illustrations, magnétoscope, rétroprojecteur, comprenant des corrections modèles et un système d'évaluation formative et/ou sommative.
8-des objectifs de formation, c'est-à-dire des finalités privilégiées: formatives (former au savoir, au beau, au bien), culturelles (culture générale, dans la langue, en français), linguistiques (langue française, langue étrangère, langue en général), souvent précisés dans les introductions ou dans les préfaces des livrets.
9- et surtout l'objet de la centration, la dominante du modèle.
Nous évoquerons pour chaque modèle les prolongements didactiques possibles et les principaux écueils liés au modèle.
1. Modèle à dominante civilisationnelle (et interculturelle)
1-Objectifs didactiques
On cherche à savoir comment vivent les gens du pays, quels sont leurs codes sociaux de référence, comment ils pensent et sentent les choses, dans le but de savoir " ce qui se cache derrière les mots ", puis de les utiliser à bon escient et admettre les différences. C'est ce que permet entre autres le travail sur les publicités (Chevillard 1996).
De manière plus générale, cette façon de travailler vise à ouvrir l'esprit, développer les capacités d'interprétation et à faciliter la communication avec l'Autre qui est ainsi mieux respecté (formation à l'altérité et à l'humanisme).
2-Principes et méthodes
Dans l'approche civilisationnelle, le principe est de prendre conscience de sa propre culture, puis de celle du pays-cible et ensuite de jeter des ponts entre les deux cultures. La méthode consiste à rechercher les informations civilisationnelles contenues dans le document, en particulier dans le lexique, les images et les symboles, et d'en parler.
3-Principales activités sur le document (compréhension)
Cette préoccupation demande le travail en groupe et la circulation des informations. Plus précisément, les techniques concernent :
- le repérage de situations et d'expressions (les " routines ")
- l'étude précise de certains passages du DTA pour la richesse de leurs informations civilisationnelles.
- la comparaison de ce qui est trouvé dans le document à ce que connaissent les apprenants pour la recherche de correspondances.
4-Activités linguistiques privilégiées (techniques d'apprentissage de la langue)
La compréhension de la civilisation étrangère exigera des travaux de décodage de la langue et de la culture : les activités linguistiques seront en majeure partie globales, davantage axées sur le lexique que sur la grammaire.
L'expression orale ou écrite sera plus favorisée dans l'approche interculturelle pour laquelle il est important de découvrir les composantes de sa propre culture qui reste souvent diffuse ou inconsciente
5-Formes sociales (Formes de communication)
On peut retrouver soit le cours frontal de civilisation, soit la découverte par activités individuelles ou groupales. On favorise les rencontres par les médias (l'Internet est devenu un moyen avantageux de communication en direct comme en différé), par les échanges scolaires et les voyages.
6-Activités cognitives privilégiées
La connaissance de la civilisation demande le développement de capacités d'interprétation. Dans l'approche interculturelle, l'analyse par auto-observation ou par introspection s'ajoutera aux activités précédentes.
7- Objectif de formation
L'étude de civilisation et l'approche interculturelle font prendre conscience de l'altérité. Quand on découvre que l'autre n'est pas réductible à soi-même, on prend conscience de ce qui différencie, mais aussi de ce qui ressemble et rassemble.
8-Prolongements didactiques, ouvertures.
La découverte sur le terrain par des échanges scolaires se situe dans la droite ligne de ce modèle. Mais le cours peut se prolonger aussi par la lecture de documents plus directement civilisationnels et d'uvres qui dramatisent ces faits de civilisation.
9-Problème majeur
Le piège de ce modèle, c'est l'oubli de la nécessité d'une progression lexicale et grammaticale qui assure la révision systématique demandée par l'ancrage mémoriel.
2.Modèle à dominante culturelle/artistique
Il donne la priorité à la découverte du film en tant qu'élément artistique, témoin de la vie culturelle du pays. Il exclut les autres DTA, car ils ne sont pas reconnus comme éléments du patrimoine artistique.
Cette option donne lieu à deux types d'activités didactiques principales:
1-Soit le film est étudié dans sa globalité et donne lieu à des activités proches de l'étude de texte ou de roman (Chevillard 94)
2-Soit le cours donne lieu à une analyse filmique comparable à ce qui peut se faire pour l'étude de texte, mais en partant du langage cinématographique comme dans le livret Der amerikanische Freund.
On distinguera encore des procédures plus ou moins différenciées, plus ou moins holistiques c'est-à-dire avec des textes de lecture, des exercices grammaticaux.
1-Objectifs
Sensibilisation à l'uvre et au thème: découvrir le sens profond des choses, percevoir l'émotion de la beauté artistique.
2-Principes et méthodes
Activités de recherche des éléments artistiques
3-Principales activités sur le document (méthode)
Repérage des techniques au service de l'uvre, déconstruction de l'uvre, de sa construction narrative, de ses symboles. Travail sur l'image et sa polysémie (Nosferatu, Dr Mabuse).
4-Activités linguistiques privilégiées
Dans ce modèle, la langue n'est plus objet d'apprentissage, mais outil de réflexion, et d'analyse. Le réemploi est donc la forme de travail linguistique privilégié. Les activités de compréhension du MLS jouent un rôle important quand le texte le demande (Himmel über Berlin).
5-Formes sociales (Formes de communication)
Le professeur détenant la majeure partie du savoir, il semble normal que l'enseignement frontal soit encore la règle. Il est cependant envisageable de laisser les élèves " découvrir " et " former eux-mêmes leur jugement " dans des activités variées et attrayantes.
6-Activités cognitives privilégiées
L'approche culturelle demande une étude par l'abstraction de phénomènes souvent extra-linguistiques et parfois non-figuratifs.
7-Matériels, prolongements didactiques, ouvertures.
L'approche culturelle et artistique demande tout naturellement la comparaison à d'autres uvres, l'étude de l'auteur, la référence à l'histoire du cinéma et aux arts en général.
8- Objectif de formation
La formation à la culture classique est privilégiée ici ; il en est de même pour la formation aux capacités d'abstraction, d'analyse de l'art et d'expression discursive sur ces sujets.
9- Problèmes majeurs
Le danger majeur qui guette ce modèle, c'est l'ignorance de la langue de tous les jours et de l'autre culture dont parlait Galisson, la 'culture courante' ou 'culture ethnographique'. La notion de progression linguistique est également absente de ce modèle.
3.Modèle à dominante télévisuelle/filmique (réception)
1-Objectifs
Entraînement à la compréhension du film par la prise en compte du langage du cinéma
2-Principes et méthodes
Recherche du sens par des approches diversifiées du langage cinématographique
3-Principales activités sur le document (compréhension)
Etude des techniques cinématographiques et de leur sens: image (cadrage, éclairage, gestuelle ), bande-son, montage
Etude des personnages, de l'intrigue (étude narrative)
Etude des symboles.
4-Activités linguistiques privilégiées
Débat oral, ponctué par des recherches écrites, individuelles ou en groupes.
5-Formes sociales (Formes de communication)
Elles sont toutes possibles
6-Activités cognitives privilégiées
Activités liées à la compréhension et l'analyse du langage cinématographique
7- Objectif de formation
" L'art du spectateur " promu par Bertolt Brecht peut s'interpréter aujourd'hui comme " l'art du téléspectateur " qui saura apprécier la qualité artistique sans se laisser envoûter par l'image. Dans ce modèle on vise la formation à l'interprétation du média cinéma-télévision, du point de vue artistique, mais aussi la prise de conscience des manipulations possibles de l'image et du téléspectateur. Il s'agit donc d'un objectif culturel.
8- Piège
La découverte de l'uvre peut faire perdre de vue la finalité linguistique du cours de langue.
4-Modèle à dominante linguistique (MLS)
L'aspect linguistique apparaît sous différentes formes:
1-Soit le film est réduit au MLS qui fait l'objet d'une étude audio-orale, le professeur donnant des extraits du script à un moment ou un autre de la séquence pédagogique et s'y réfère prioritairement durant les activités,
2-soit le film est considéré comme déclencheur de parole et ce qui compte, c'est que les élèves parlent le plus possible dans la langue étrangère
3-soit il est axé sur le vocabulaire et la grammaire: dans ce cas, le document ne présente pas d'intérêt culturel-cinématographique et l'aspect civilisationnel est réduit, tout est prétexte à travailler le vocabulaire et les formes morpho-syntaxiques.
1-Objectifs
Il s'agit en priorité d'approfondir la compréhension de la langue parlée et l'expression surtout orale, ainsi que la connaissance du système linguistique.
2-Principes et méthodes
Le film est déclencheur de parole dans un premier temps, mais il fournit aussi des exemples de langue authentique en précisant les contextes d'utilisation par l'image.
3-Principales activités sur le document (compréhension)
Tous les moyens sont bons pour faire connaître ces MLS : les exercices comme les QCM, les résumés tronqués (lacunaires), mais aussi la distribution du script.
4-Activités linguistiques privilégiées
Cette approche privilégie l'étude des MLS par rapport à celle du document et à son message. Il en va plus de l'expression à propos du document qu'à la compréhension de celui-ci. On favorise donc les activités de réemploi, de commentaire, d'explicitation, de réflexion personnelle sur le sujet. On peut penser aussi aux jeux de rôle qui reprennent les paroles du document.
5-Formes sociales (Formes de communication)
Dans la tradition et les habitudes des lycées, l'étude linguistique est réalisée sous la conduite du professeur, et plus généralement au cours de l'entretien oral. L'expression orale et écrite ne nécessite pas de situation de communication authentique, mais la communication sera plus efficace si elle a lieu en petits groupes.
La multiréférence didactique augmentera l'efficacité de l'apprentissage de la langue, puisque chaque groupe travaillera à son niveau.
6-Activités cognitives privilégiées
Ce sont les activités d'entraînement dans la langue et de mémorisation lexicale et grammaticale qui priment dans cette approche.
7- Matériels
Dans l'étude de documents, on a recours au scripts et à des documents écrits sur le film ou le thème abordé.
8- Objectif de formation
La formation linguistique prime sur la culture et la formation générale
8-Prolongements didactiques, ouvertures, finalités.
La lecture ou l'étude de textes qui traitent du même sujet que le DTA ainsi que l'entraînement grammatical seront préférés, de même que l'étude ou la relecture du script. La formation à la langue étrangère prime sur les autres finalités quand le MLS fait l'objet quasi exclusif de toutes les attentions.
9- Problèmes majeurs
On constate, dans ce modèle, que le document n'est pas approfondi puisque le linguistique occulte les autres aspects filmiques. Il y a une réduction du cinéma à l'analogie au réel, ce qui peut avoir une conséquence grave : c'est d'ancrer un peu plus l'idée que la télévision, c'est la présentation authentique de la réalité, alors qu'elle en est une interprétation subjective, celle de l'équipe de réalisation.
Un autre danger consiste à faire croire que le sens s'épuise dans le linguistique en omettant tout le vaste domaine de la communication non verbale, celle-ci étant généralement prise pour une évidence, alors que ses modes diffèrent d'un pays à l'autre.
Remarques préalables
Pour ce modèle, nous avons la référence des Instructions Officielles. Avec le 'Texte de base', le document est lu une première fois aux élèves qui doivent ensuite réagir. Quand le film est utilisé ainsi, on dit qu'il est "déclencheur de parole". La procédure consiste à présenter un film ou tout autre document télévisuel (parfois dans une autre langue que la langue étudiée) et à faire réagir la classe à ce qui a été vu. Le film est dit "déclencheur de parole" parce que les élèves ont très souvent envie de communiquer à la classe leurs réactions et leurs interrogations. Ils ont aussi besoin de se rassurer quant à leur interprétation des signes cinématographiques, car certains MLS restent indéchiffrables.
Le modèle du texte de base recèle une difficulté majeure quand il est retenu pour l'étude de film, c'est la difficulté du lexique. En effet, peu d'élèves ont un niveau linguistique suffisant pour reprendre des éléments lexicaux du document . Si les élèves n'ont pas reçu de formation dans l'analyse et la compréhension du langage cinématographique, leur interprétation restera au niveau de l'analogie avec le réel, leurs réactions affectives ne seront pas exprimées et les aspects esthétiques ne seront guère perçus, mais parqués dans un subconscient diffus.
Le modèle dans les livrets
Comme il n'y a pas obligatoirement de didactisation du document, nous ne trouverons que peu de livrets pédagogiques qui répondent très clairement à ce modèle (Traumauto du CRDP d'Amiens en est un exemple quelque peu didactisé). Certains manuels citent ainsi des titres de films ou d'émissions de TV qu'il est intéressant de regarder pour prolonger l'étude du thème abordé par le "Texte de base". Dans l'avant-propos du livret pédagogique "Die Spitzenklöpplerin", l'inspecteur Geoffroy met en garde contre la présentation de films sans l'aide d'une mise en scène didactique, car la difficulté posée par la langue étrangère démotive très vite les élèves qui perdent alors leur temps.
Quelques livrets pédagogiques proposent une véritable étude cinématographique qui ressemble à celle d'un texte d'auteur, mais en tenant compte, pour une certaine part, de la spécificité du langage cinématographique. De même que le texte littéraire demande une étude des procédés de style pour être justement compris et interprété, l'uvre télévisuelle ou cinématographique ne peut être vraiment comprise qu'à travers les effets dus aux techniques du cinéma. Cette façon d'analyser un film comme on analyse un texte suppose un public de bon niveau (Jeder für sich ), voire d'un très bon niveau en langue étrangère (Europa ). L'accent est mis sur la compréhension et l'analyse de l'uvre et non plus sur l'apprentissage de la langue. Ici encore, c'est l'uvre qui est centrale et les différentes activités ont pour but d'en approfondir la compréhension et l'interprétation. Très souvent, les auteurs joindront des textes complémentaires qui permettront d'approfondir la compréhension de certaines scène ou du thème abordé. Dans la présentation de Jeder für sich , par exemple, Line Dettmar souligne que l'étude d'un film est, en de nombreux points, comparable à celle d'un texte littéraire. Si les auteurs de livrets en restent là, ils reprennent le modèle didactique du "texte de base", profitant du fait que le cinéma et la télévision sont des facteurs de motivation pour les élèves.
Eléments du modèle :
1-Objectifs
Dans l'esprit de l'épreuve orale du baccalauréat, l'étude du document doit permettre d'apprendre la langue, mais aussi et surtout préparer la confection d'un compte-rendu oral de type "discursif" (monologue devant l'examinateur)
2-Principes et méthodes
Le principe étant que le film s'étudie comme un texte, on privilégie la compréhension analogique et le document inspire toutes les activités, il en est l'élément intégrateur, tant pour la compréhension écrite et orale que pour l'expression écrite et orale et pour les activités liées à l'apprentissage de la grammaire. Le travail s'effectue généralement en plénum dans un dialogue professeur-élèves.
3-Principales activités sur le document (compréhension)
Durant le cours, il y a essentiellement des échanges sur la compréhension globale du film, pris dans le sens analogique, sans référence marquée aux codes du cinéma.
4-Activités linguistiques privilégiées
Conformément aux Instructions Officielles et à leurs Compléments, le travail oral d'élucidation et d'entretien sur le texte se donne comme objectif " l'expression orale discursive ". Dans notre cas de figure, il s'agit de parler sur le film ou le DTA présentés en classe. En règle générale, le style est celui de l'écrit 'oralisé' et non celui de l'oralité authentique. Les documents de référence (Sept films: Chevillard) et n° 11 (Traumauto, Amiens) recèlent ainsi des travaux d'élèves " présentés au baccalauréat ".
5-Formes sociales (Formes de communication)
Les élèves sont invités à intervenir 'librement', sous la houlette du professeur. De fait, il s'agit souvent d'un dialogue entre le professeur et quelques élèves de la classe, toujours les mêmes.
6-Activités cognitives privilégiées
L'analyse, suivie de la synthèse des découvertes de la classe, et les réflexions de type abstrait sont considérées comme la seule forme de travail au lycée, dans le modèle du 'Texte de base'. Nous avons vu ailleurs que cela ne peut concerner qu'une partie des élèves les autres ne sont pas réellement pris en charge dans ce modèle.
7- Objectif de formation
Il s'agit de former en priorité à l'abstraction et à la prise de parole en continu. Dans la pratique, ce modèle favorise les élèves fortement motivés, d'un bon niveau et doués pour l'apprentissage traditionnel par l'abstraction.
8-Prolongements didactiques, ouvertures.
Les autres documents appelés à la rescousse pour compléter l'étude du document considéré comme " Texte de base " et pour élargir le débat thématique, sont généralement des textes d'auteur, parfois des documents écrits informatifs et plus rarement des tableaux, des statistiques.
9- Problèmes majeurs
Nous les rappelons pour mémoire : il y a le danger d'oublier que le film est un artefact, qu'il utilise des modes particuliers de représentation du monde. Comme dans le modèle à dominante linguistique, il y a le danger de croire que le sens ne vient que du verbal. Du point de vue didactique, il y a méconnaissance des phénomènes d'apprentissage et de la variété des voies d'accès au savoir. Enfin, qui dit texte de base, dit formation aux quatre compétences avec le même document, et comme nous l'avons vu plus haut avec les IPR (Pernet 1994), celle est une incongruité.
6. Modèle à dominante psychopédagogique
Nous pouvons repérer enfin une méthode qui consiste à amener l'ensemble des élèves à bien comprendre quelques passages du document à travers une série d'activités de déchiffrage des différentes composantes du film. Comme le but est de prendre en compte les différents niveaux et les différentes manières d'apprendre des élèves dans les classes fort hétérogènes, nous l'appelons modèle à dominante psychopédagogique. Généralement, les auteurs des livrets concernés proposent tout d'abord des exercices pratiques sur la compréhension du langage cinématographique, puis des recherches différenciées sur les aspects iconiques ou sur le montage, ou sur les MLS, etc. Des listes de termes traduits, des QCM, des résumés en désordre et autres documents écrits constituent autant d'aides et de bouées de secours pour les élèves qui en auraient besoin. Les documents écrits sont parfois différents d'un groupe de niveau à l'autre dans la même classe. La mise en commun des résultats permet à tous de profiter des recherches des autres.
A travers ces formes variées d'étude du DTA, qui peuvent comprendre aussi l'étude des dialogues d'une scène que le professeur aura retranscrite, chacun des élèves de la classe est constamment en activité, car les images, les bruitages et la musique sont accessibles à tous, sans préalables de connaissances linguistiques.
Ainsi les auteurs de ces livrets proposent-ils de tirer parti de ce qui fait la singularité des DTA - l'image en mouvement et le son - pour motiver les élèves. Ils les engagent à utiliser leurs connaissances générales et leurs capacités linguistiques, si maigres soient-elles, pour faire part de leur savoir à toute la classe. Nous retrouvons dans cette manière de procéder une centration sur les apprenants et les activités (le support est secondaire), avec le souci d'adapter les activités au niveau des différents groupes d'élèves de la classe. Alors que dans sa "Typologie des exercices" (Übungstypologie) M.Neuner avait présenté une trentaine de catégories d'activités linguistiques, nous avons vu ci-dessus, en un rapide tour d'horizon les 68 types d'activités liées à l'étude d'un DTA qu'il était possible de prendre en considération, - ce qui offre un choix considérable quand on veut répondre aux besoins différenciés des élèves d'une classe donnée.
1-Objectifs
En l'occurrence, ce modèle vise la formation à la langue étrangère, mais en s'appuyant sur le médium cinéma-télévision. En second lieu, on espère que les élèves apprendront à utiliser personnellement la télévision pour garder le contact avec la langue étrangère.
2-Principes et méthodes
Le principe de base de ce modèle est la prise en charge didactique de tous les élèves, c'est-à-dire de l'hétérogénéité. C'est dans ce modèle que la multiréférence didactique prend tout son sens.
3-Principales activités sur le document (compréhension)
La méthode privilégiée consiste à proposer des activités variées et graduées ainsi que des aides différenciées à la compréhension du document.
4-Activités linguistiques privilégiées
Les techniques linguistiques relèvent de ce que propose l'approche communicative avec des réemplois linguistiques en situation de communication, favorisés par des jeux de rôle créatifs et autres travaux de groupes.
5-Formes sociales (Formes de communication)
Il y a alternance des formes sociales : binômes, équipes, plénum, ce qui induit une grand disponibilité du professeur pour le conseil individualisé.
6-Activités cognitives privilégiées
Dans ce modèle, on prend bien soin de ne pas épuiser les élèves trop tôt en alternant les activités cognitives simples (classer, structurer ) et les activités cognitives plus complexes (analyse, synthèse ).
7- Matériels
Les fiches de travail et les aides différenciées (listes de vocabulaire traduit ou expliqué) jouent un rôle essentiel, à côté des tableaux, des grilles, des diagrammes, des bilans individualisés et des fiches de remédiation.
8- Objectif de formation
La formation générale et linguistique sont visées pour la totalité des élèves, quel que soit leur niveau.
9- Piège
La difficulté vient du fait que ce modèle n'est pas encore très répandu, que les techniques se sont pas bien connues et que l'on a l'impression que le temps passé avec les plus faibles est enlevé aux plus forts qui progresseraient donc moins vite.
Les modèles didactiques que nous avons déployés à partir des dominantes sont des structures qui donnent une logique, une cohésion aux activités proposées dans les livrets. Il devrait donc être possible de retrouver cette logique dans les livrets et de vérifier comment les différents modèles, surtout les plus forts, se retrouvent dans la conception des livrets et comment plusieurs modèles parviennent à agir de concert sans créer le chaos. Si c'est le cas, alors nous rendons compte des principaux aspects didactiques et faisons état des choix effectués par les auteurs des livrets, remplissant la condition posée en début de chapitre.
Voyons donc comment agissent dans les livrets le modèle psychopédagogique, le modèle filmique dans ses différentes variantes, et le modèle du texte de base.
2.1. Le modèle psychopédagogique
Le modèle psychopédagogique est caractérisé par la prise en compte des principes de la multiréférence didactique. Nous avons remarqué que les préoccupations didactiques des auteurs de livrets pédagogiques de document vidéo changeaient en fonction du niveau en langue de la classe concernée. Plus la classe est faible (classe de 4è ou de Seconde LV2 pour Setzt auf Video, Troisième ou Seconde pour Gummi, classes de lycée professionnel pour Die Spitzenklöpplerin), plus la multiréférence didactique se situe à l'intérieur des activités qui comportent ainsi des aides lexicales importantes et des exercices grammaticaux. A un niveau linguistique plus avancé, c'est la nature des activités qui joue un rôle de multiréférence didactique. Par la variété des formes sociales de travail, des capacités cognitives sollicitées, des stratégies d'apprentissage qu'elles demandent de mettre en uvre, les activités didactiques permettent à tous les élèves de trouver leur motivation dans la variété, la possibilité de s'investir et de connaître le succès de temps à autre.
Les auteurs du livret Traumauto du CRDP d'Amiens relèvent qu'ils proposent 'une série de démarches possibles' et celui de Internationes fait remarquer qu'il offre un choix que le professeur adaptera au niveau de ses classes. Cette multiréférence didactique des démarches qui consiste à placer des activités avant le visionnement (parfois répété deux ou trois fois), pendant, ou à la suite de celui-ci, constitue un démarche didactique originale que l'on rencontrait rarement dans l'enseignement des langues avant l'arrivée du support vidéo.
Le livret de Yves Chevillard, consacré aux spots publicitaires, représente un bon exemple de la variété des démarches. Tantôt les élèves parlent du produit et de la publicité qu'ils imagineraient, tantôt ils entendent le son et imaginent des images ou le produit qui peut être ainsi vanté, tantôt ils voient les images et inventent une bande-son (Ce sont les points 1 et 2: Sehen und beschreiben, et Kommentieren, traduction: Voir et décrire, Commenter). Souvent les élèves sont appelés à imaginer la suite ou la fin du spot, parfois à en analyser les éléments (position de la caméra et cadrage, mouvements, description de l'image et de la bande son) et les effets produits soit séparément, soit dans leur constellation. La démarche reste cependant globalement déductive dans le point 3:'Nach dem Sehen' ('Après le visionnement') qui comprend 5 à 10 activités d'approfondissement de la compréhension et de lexique-grammaire, puis d'expression.
On peut y voir un retour à l'aspect langagier, d'étude de la langue étrangère, avec reprise du vocabulaire dans des contextes différents (utile à la mémorisation) et à la distanciation grammaticale en rapport avec le thème d'étude.
Nous avons vu au premier chapitre que les disciplines fonctionnent selon une matrice disciplinaire qui permet d'intégrer tous les éléments de l'enseignement d'une discipline. C'est ainsi que nous pouvons interpréter ce qui s'est passé avec l'enseignement de l'allemand, il y a cent ans, quand on a voulu réglementer, voire "discipliner" les méthodes et procédés (Puren 1988: 170). A l'époque, Wolfromm et Sigwalt n'ont pas manqué de dénoncer "la doctrine" ou "le système" qui avaient ôté aux professeurs la liberté de rechercher librement ce qui à leurs yeux était le plus efficace dans l'enseignement. Le texte littéraire, qui devait être l'aboutissement du travail de classe, en est bien vite devenu le point de départ et le cours de langue une séance de "lecture expliquée (id.:168) "comme notre collègue expliquerait un texte français à des enfants de sept ans" (A.Godart).
Dans plusieurs livrets on relève la tentation d'intégrer l'ensemble des activités de la classe autour du film ou du DTA, ce qui risque de mener aux mêmes difficultés qu'avec le "texte de base". A ce moment-là, l'enseignement avec DTA serait similaire à celui qui s'appuie sur l'explication de texte évoquée ci-dessus et prendrait la forme de l'explication de film ou de commentaire de DTA.
Il est évident que le DTA pourrait devenir l'élément central et intégrer toutes les activités de cours. Plus riche par l'apport civilisationnel, plus intéressant à suivre et plus accessible grâce à l'image, plus apte à donner des modèles linguistiques de type fonctionnel, le DTA qui garde une certaine accessiblité par les signes iconiques déchiffrables quel que soit le niveau linguistique des élèves, serait à même de séduire beaucoup d'enseignants. Mais l'inspecteur Geoffroy cité ci-dessus avait raison de mettre en garde, car le danger guette à nouveau de ne travailler qu'avec une partie de la classe, celle qui possède les vocables et tournures pour exprimer ses impressions et réactions.
Si toute la classe doit travailler activement, c'est-à-dire s'il y a lieu de mettre en place une véritable multiréférence didactique, alors le DTA peut constituer un auxiliaire pédagogique de grande qualité. Mais il ne sera qu'un auxiliaire . L'élément fédérateur, c'est la multiréférence didactique des tâches, des stratégies d'apprentissage mises en branle à travers les activités variées.
Nous avons vu que le travail sur DTA pouvait prendre des formes extrêmement diverses, car c'est le média le plus complet dont on dispose à l'heure actuelle. Il offre une entrée dans la langue étrangère sans passer par l'écrit grâce au langage quasi universel des signes iconiques et du cinéma. Pour être efficace envers tous les élèves, le travail sur DTA se limite à un travail oral bref à partir du document, ou alors revenir régulièrement à un support écrit. Un travail purement oral sur DTA serait aussi néfaste pour les plus faibles que le travail sur texte d'auteur. C'est dans la variété des supports et des activités que se manifeste le souci de multiréférence didactique. Même dans les bonnes classes, les plus faibles ont besoin d'alterner l'oral et l'écrit, car ils veulent être rassurés, pouvoir mieux fixer les vocables nouveaux en les visualisant et faire le point sur les situations, la trame et les personnages.
2.2. Le modèle filmique
Nous en venons maintenant au second modèle fondamental, le modèle filmique. Certains modèles élaborés à partir d'éléments divers ne se retrouvent dans aucun livret, comme nous l'avons déjà remarqué. Ils ne correspondent pas aux demandes actuelles et aux préoccupations des auteurs ou des éditeurs. Cependant, nous avons quelques livrets qui correspondent à des modèles bien précis. S'adressant à des élèves de Première LV1, c'est-à-dire à des élèves de bon niveau qui ne travaillent pas dans la perspective du baccalauréat, le livret consacré au film " Der amerikanische Freund " relève du modèle filmique. Des activités diverses sont proposées qui tendent toutes à une compréhension profonde, à une véritable réception du document. Les activités ont lieu en langue étrangère, après que les lycéens ont été initiés aux techniques cinématographiques et à leurs principaux effets. Par des fiches de travail judicieusement conçues et agencées dans une progression remarquable, les auteurs amènent doucement les élèves, qui réfléchissent seuls ou en équipes, à mesurer l'importance et la signification des choix effectués par Wim Wenders, le metteur en scène: choix des lieux, du décor, des couleurs, des objets, des gestes et mimiques des acteurs. Ils se rendent compte bientôt que ces objets, ces lieux ne sont pas choisis pour eux-mêmes, pour l'histoire policière, mais pour leur sens symbolique aux yeux des allemands cultivés: la Hafenstrasse de Hambourg, c'est la rue des squatters, des marginaux, du mouvement alternatif qui refusait la civilisation de l'argent, le rideau rouge qui s'ouvre sur le fleuve et la mer symbolise une naissance, celle de l'amitié.
Comme dans d'autres uvres de Wim Wenders et comme chez l'écrivain Thomas Mann, tous les signes cinématographique prennent une valeur de symbole, de symboles liés à l'histoire ou la culture allemandes, mais aussi symboles qui naissent dans la diégèse. Les élèves finissent par se rendre compte que l'auteur raconte ainsi une autre histoire derrière l'affaire policière, car, comme pour le petit prince de Saint-Exupéry, "L'essentiel est invisible pour les yeux", phrase illustrée à plusieurs reprises dans le film policier, en particulier quand les experts ne "voient" pas que les tableaux sont des faux, alors que Jonathan, le cadreur, restaurateur à ses heures, qui est marqué du signe de la mort (la leucémie, il mourra au bord de la mer, comme dans un tableau du peintre romantique allemand C.D. Friedrich) et qui voit dans les curs, l'a remarqué immédiatement. Par les activités qui les amènent à ces rapprochements et à cette autre lecture du film, les élèves entrent dans la compréhension profonde du document.
Ce modèle correspond à celui de l'étude littéraire par les textes d'auteur, dans lequel les activités sont toutes centrées sur le document. De plus, les activités sont les mêmes que dans une classe allemande qui étudie un film: étude narrative, étude du style, des figures de style, des effets sur le lecteur, etc. On peut ramener cette procédure à l'approche communicative. En effet, nous sommes dans une situation de communication authentique dans la langue étrangère. Nous sommes même à l'opposé de l'approche scolaire (centrée sur la progression linguistique au détriment de la langue authentique et du communicatif) et fort éloignés de l'approche linguistique. S'il y a des aides lexicales, elles viennent des exercices où il faut choisir l'une des réponses. A aucun moment les élèves ne disposent du script, le professeur peut tout au plus distribuer le résumé par séquence (Sequenzenplan), ce qui sera une aide lexicale appréciée des plus faibles. Seule l'image en mouvement, c'est-à-dire la pellicule alliée à la bande-son, est la référence des réflexions et des échanges. Aucune activité n'est consacrée directement aux MLS, mais le déchiffrage en équipe de tous les éléments d'une scène brève induit que l'un des élèves retranscrit les paroles prononcées pendant que les autres notent ce qu'apporte la bande-son, les mouvements de caméra et le cadrage, le jeu des acteurs, les symboles, etc. Nous avons une centration totale sur la réception du document et la formation des élèves à cette capacité de maîtrise de l'audiovisuel qui fait tant défaut dans le système scolaire français.
Le prolongement naturel de ce type d'étude est l'ouverture sur l'uvre du réalisateur, la recherche de ses thèmes (souvent récurrents) et de ses techniques particulières. C'est ce qu'ont proposé les auteurs de Der amerikanische Freund , film de Wim Wenders, de Angst essen Seele auf, film de R.M.Faßbinder et de Nosferatu.
Le schéma de cours de l'étude filmique est normalement bâti sur le principe déductif: l'uvre est regardée dans son ensemble, après une brève préparation, puis on la reprend par passages pour tenter de la comprendre en profondeur, selon le modèle traditionnel, dit " Texte de base ". Les livrets de Der amerikanische Freund, de Angst essen Seele auf et de Jeder für sich. Il est cependant envisageable de l'aborder par petites touches de difficulté progressive, dans une démarche inductive. C'est ce qu'a proposé Inge Schwerdtfeger (Traumauto de Internationes), dans une optique interculturelle sur laquelle nous reviendrons ci-après. Mais c'est également la démarche de Die Spitzenklöpplerin, Setzt auf Video, Gummi.
Variantes de l'étude filmique
Il existe des variantes de l'étude filmique, ce sont tous les modèles où il n'est pas, ou peu, fait appel à l'interprétation du langage cinématographique. Dans ce cas, le sens de l'image est réduit à ce qu'elle montre, tout au plus interprète-t-on la gestuelle, la mimique. C'est le cas de livrets comme Die Spitzenklöpplerin, Die verlorene Ehre der Katharina Blum, Loriot. On en reste à une lecture superficielle, souvent au premier degré, tout au plus à une lecture de type littéraire ou théâtral. Nous avons plusieurs livrets où ce type de lecture mène à un compte-rendu de la facture " oral du baccalauréat ".
Parfois, les techniques cinématographiques jouent un rôle réduit et ne permettent guère d'interprétation rentable. C'est le cas des informations télévisées proposées par le CRDP de Dijon et de reportages comme le document Gummi de la MAFPEN de Strasbourg.
Entre le modèle linguistique et le modèle filmique: le film 'déclencheur de parole'
Bien qu'à rapprocher du modèle linguistique, puisqu'il s'agit d'expression en langue étrangère, ce modèle peut être vu sous l'angle filmique quand, ainsi que le proposent les auteurs de Die Spitzenklöpplerin, les nombreuses activités linguistiques mènent à l'approfondissement de l'uvre cinématographique et à sa meilleure réception.
Dans la plupart des livrets de l'ouvrage publié par Yves Chevillard au CRDP de Toulouse, les films sont l'objet d'une brève étude technique portant sur quelques séquences, puis il donnent lieu à des échanges oraux sur divers aspects de l'uvre et du thème traité.
Dans ce modèle mixte, les enseignants ne cherchent pas à faire apprendre de la grammaire, ni parfois même du vocabulaire, mais à motiver les élèves à l'expression orale et/ou écrite. L'étude du film se situe au stade du réemploi libre de tout ce qui a été appris. Selon les principes de l'approche communicative, c'est la phase essentielle de l'apprentissage, la communication vraie et libre dans la langue étrangère. Ce fait explique le recours de plus en plus fréquent au cinéma dans les classes de langue de lycée. Ainsi que le signalent plusieurs auteurs, le cinéma " donne envie de parler ".
2.3. Le modèle du " Texte de base "
Le principe fondamental du modèle du " Texte de base ", c'est l'entretien d'élucidation avec toute la classe qui doit aboutir à 'l'expression discursive' sur le texte d'auteur, travail qu'une partie de l'inspection appelle désormais " Artifice scolaire qui autorise, interdit et contrôle le discours, " dans lequel la parole est " une activité orale de commande vouée à la répétition et à la reformulation ( ) en raison de contraintes didactiques que s'impose le meneur de jeu " (Pernet et al. 1994:8).
Le livret qui fonctionne sur le principe du texte de base et ne retient du film que le MLS est celui du CRDP d'Amiens publié en 1990: Loriot: Herr und Frau Hoppenstedt im Restaurant. Dans ce modèle, ce n'est pas la dominante qui l'emporte mais une exclusivité. Bien que ce document n'en fasse pas partie, l'étude qui y est proposée ne prend pas réellement en compte les signifiants cinématographiques autres que les paroles, si bien que le livret fonctionne selon un modèle unique, alors que professeur et élèves interprètent le document en fonction des signifiants cinématographiques, mais à des degrés divers, dans l'implicite. Nous rencontrons donc ici la situation d'un clivage malheureux entre le linguistique et le cinématographique dû à un manque de maîtrise didactique des possibilités du DTA en cours de langue et à un attachement dans la lettre plus que dans l'esprit au modèle officiel du Texte de base.
L'attachement à ce modèle a aussi conduit les auteurs du livret Die verlorene Ehre der Katharina Blum à se contenter d'effleurer le film en question pour se rabattre très tôt sur l'étude de textes concernant la presse à sensation. Cependant ce livret constitue une évolution par rapport au document précédent, dans la mesure où certaines scènes font l'objet d'étude. C'est tout le film qui se retrouve relégué au second plan, comme illustration d'un thème.
Dans le même ordre d'idée, nous avons déjà signalé le cas du livret qui propose un texte écrit comme " Texte de base " vers l'étude duquel convergent toutes les activités, y compris le film Traumauto dont on n'a retenu que certains extraits. C'est une position originale, car le modèle relève de la méthode inductive, mais dans laquelle le film est une activité introductrice comme une autre. Mais il n'en est présenté que quelques extraits, ce qui laisse professeurs et élèves sur leur faim et maltraite quelque peu le document. En reprenant le même film, Inge Schwerdtfeger a montré dans le livret publié chez Internationes qu'il était digne d'une étude approfondie pour ne pas dire intégrale, et convenait tant au travail différencié qu'à l'approche interculturelle. Néanmoins, les professeurs de Picardie ont présenté l'une des utilisations possibles du DTA, rassurant les collègues que sécurise le " Texte d'auteur ", mais que la nécessité d'intéresser et de faire progresser tous les élèves contraint à des tentatives de variation des activités.