Pourquoi ?

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Ce texte, écrit par un de nos confrères de la région lyonnaise résume bien la situation

Comment en est on arrivé là ?

Prenons le cas du Dr X., médecin spécialiste libéral ayant ouvert un cabinet dans une grande ville française :

lors de son installation, à la fin des années 80, convaincu de l'importance de l'accès aux soins pour tous sans ségrégation financière, le Dr X. choisit le secteur conventionné à honoraires opposables dit "secteur 1", c'est à dire qu'il signe une convention avec l'assurance maladie et s'engage à respecter les tarifs conventionnels sur la base desquels ses patients sont remboursés.

Il aurait pu lors de son installation choisir le secteur conventionné à honoraires différents dit "secteur 2". Dans ce cas, bien qu'encore conventionné (!) le Dr X. aurait pu fixer librement ses honoraires sous réserve toutefois de le faire " avec tact et mesure " au sens de l'article 53 du Code de déontologie médicale.

Mais il avait parié sur un partenariat avec la Sécurité Sociale qui s'engageait à prendre en charge une partie de ses cotisations sociales et à réévaluer périodiquement le montant des tarifs opposables.

En 1995, le tarif d'une consultation chez un médecin spécialiste était de 150 francs et les charges annuelles totales du Dr X s'élevaient à environ 275000 francs (42000 euros).

En 1998, la convention entre l'assurance maladie et les médecins spécialistes ne fut pas renouvelée et les médecins spécialistes découvrirent alors une nouvelle notion : le Règlement Conventionnel Minimum (dit RCM)

Entre autres conséquences, cela provoqua pour le Dr X. la diminution de la prise en charge de ses cotisations sociales d'environ 15 %.
Or depuis 1990, le passage du secteur 1 en secteur 2 n'est plus possible (sauf pour les anciens chefs de clinique des Universités ou anciens assistants des Hôpitaux ou praticiens hospitaliers plein temps), alors qu'au moment de son installation, on lui avait expliqué qu'il aurait périodiquement le choix de changer de secteur ...

Cela n'empècha pas le Dr X. de continuer à se conformer consciencieusement aux directives de l'assurance maladie : informatisation du cabinet, investissement pour la télétransmission ... sans compter les obligations déontologiques : renouvellement du matériel d'examen, utilisation d'instruments à usage unique, stérilisation, abonnement à la collecte des déchets médicaux, formation continue etc ...
Suite à la maitrise comptable des dépenses de santé, certains actes furent mème décotés !
Debut 2002, le Dr X. eu la désagréable surprise de voir sa prime d'assurance en responsabilité civile professionnelle multipliée par 6 !

En 2002, le tarif d'une consultation chez un médecin spécialiste était de 22,87 euros (150 francs) et les charges annuelles totales du Dr X s'élevaient à environ 78000 euros (512000 francs).

CHERCHEZ L'ERREUR !

Et comment croyez vous que le Dr X. fait pour payer des charges 2 fois plus élevées ? Il travaille 2 fois plus !!!

Le Dr X. commence alors à s'interroger sur le devenir de son beau métier. Il s'aperçoit que l'on parle toujours de déficit et de consommation de soins qui augmentent mais jamais de ses honoraires. Il pose la question d'une réévaluation de ses honoraires à son interlocuteur à la CPAM, mais on lui fait comprendre qu'il faudra être patient. Il écoute les discours des syndicats et il comprend qu'il est seul face à ses difficultés (il faut savoir que jusqu'à présent, les médecins spécialistes que l'on entend dans les médias sont presque tous en secteur 2 et leurs préoccupations sont ailleurs ...).

C'est alors qu'il en parle à ses confrères et qu'ensemble ils décident de réagir :

Ils s'organisent en association et commencent à pratiquer des « Dépassements Economiques », tout simplement parce qu’ils ne peuvent faire autrement. (Le D.E., dépassement exceptionnel, est prévu en cas d'exigences particulières du patient, c'est-à-dire dans des circonstances exceptionnelles de temps et de lieu).
Ils en informent la CPAM et demandent à en débattre avec le directeur.

Et que croyez vous que fut la réaction de la CPAM ? Et bien on informa les médecins qu'ils entraient dans l'illégalité et qu'à ce titre ils seraient forcément sanctionnés. A aucun moment il ne fut question de discuter des conditions d'exercice et des moyens d'améliorer celles-ci.

Et depuis, les lettres de menaces sont arrivées puis enfin le courrier tant attendu qui informe le Dr X. que bientôt il lui faudra payer et peut être mème se voir déconventionner.

Et pendant ce temps, ses confrères installés en secteur 2 augmentent régulièrement leurs honoraires "avec tact et mesure" pour faire face à l'augmentation inéluctable de leurs charges, entretenir et rénover leur matériel. S’installe donc un double exercice de la médecine :
une médecine remboursée mais faiblement rémunérée, condamnant les médecins secteur 1 à travailler avec du matériel rapidement obsolète, et à prendre en charge un maximum de patients, en leur accordant de moins en moins de temps.
Une médecine moins bien remboursée, où des médecins secteurs 2, en prenant des dépassements d’honoraires parfois importants, peuvent continuer d’assurer des soins performants en gardant un rythme de travail satisfaisant.
Or, l’injustice flagrante, est que ces deux types de médecine sont exercées par des médecins ayant rigoureusement même diplômes et même compétence. Seuls ceux ayant fait le choix social du secteur I à leur installation sont privés de faire évoluer correctement leur outil de travail, au détriment des patients.

Précisons enfin qu'en cas d'utilisation d'un matériel obsolète ayant retardé un diagnostic, le Docteur X peut faire l'objet d'une plainte d'un patient et se retrouver devant les tribunaux où il sera condamné pour n'avoir pas investi dans un matériel récent sans pouvoir se retourner contre la CPAM qui lui interdit toute majoration des honoraires pour en financer l'achat.

 

 

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Dernière modification : 06 avril 2003.