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Le Bauhaus

Ecole allemande d'architecture et d'arts appliqués qui a, au début du 20è siècle, boulversé le domaine de l'architecture.


Le Bauhaus 1919-33


Introduction

 

Fondé en 1919 par Walter GROPIUS à Weimar, le Bauhaus (littéralement: " maison du bâtiment " ) étendit ses recherches à tous les arts majeurs et appliqués, en vue de les intégrer à l'architecture. Selon le dessein de son fondateur, tous ceux qui participaient à l'édification du bâtiment devaient être pénétrés des principes du maître d'oeuvre et créer en harmonie avec lui, la partie complétant le tout. Appelés par Walter GROPIUS, les plus grands artistes du moment y enseignèrent. Le Bauhaus suscita un vif intérêt dans le monde, mais provoqua de fortes réactions dans les milieux politiques allemands. Transféré à Dessau en 1925, puis à Berlin en 1932, il fut définitivement fermé sous l'oppression des nazis arrivés au pouvoir en 1933.

 

I. De l'idée à la réalisation : le Bauhaus de Weimar

 

Henry Van de Velde, souhaitant quitter la Grossherzogliche Kunstgewerberschule de Weimar ( l'école des arts et métiers de Weimar) fondée par lui en 1906 et dont il était le directeur, pressentit Walter Gropius pour lui succéder. En 1915, Gropius accepta, à la condition de pouvoir réorganiser à sa guise l'enseignement des beaux-arts à Weimar. Au printemps de 1919, il réunit la Grossherzogliche Kunstgewerberschule et la Grossherzogliche Hochschule für bîldende Kunst (l'académie des beauxarts de Weimar ) en une Hochschule für Gestaltung ( école supérieur du design ) sous le nom de Das Staatliche Bauhaus Weimar, qu'il installa dans les bâtiments construits par Van de Velde. Le Bauhaus était donc né, avec pour principes fondateurs ceux de William Morris, poète, dessinateur et réformateur britannique du 19è siècle, et du mouvement Arts and Crafts : l'art se devait de répondre aux besoins de la société et la distinction entre les beaux-arts et la production artisanale était désormais jugée caduque. Appelés par Walter Gropius, furent professeurs au Bauhaus, dès 1919, Johannes Itten, Lyonel Feininger, Gerhard Marcks, Adolf Meyer, Georg Muche les suivit en 1920, puis Paul Klee et Oskar Schlemmer en 1921 ; Wassily Kandinsky vint en 1922 et Làszlô Moholy-Nagy en 1923.

La naissance du Bauhaus s'inscrit dans la période de la préfabrication et de l'invention, en effet durant cette période on construit en série des éléments répétitifs qui vont faire de l'architecture un jeu de construction. Le préfabriqué permet d'engendrer une production en série et donne une grande importance à la fois à l'ingénieur et à l'artiste, et c'est en associant la technique et l'art que naît la sérialité. La société de masse était donc organisée autour de la production en série accessible grâce au préfabriqué qui n'est autre que la multiplication de l'unité à l'identique.

Parmi ses principes, l'école soutenait que l'art et l'architecture devaient savoir s'adapter tant aux nécessités qu'à l'influence du monde industriel moderne, et que la qualité d'une création dépendait de l'harmonie entre l'esthétique et la technique. C'est pourquoi le Bauhaus proposait non seulement des classes de sculpture, de peinture et d'architecture mais aussi des cours d'arts décoratifs, de typographie, d'arts appliqués à l'industrie et au commerce ainsi que des cours consacrés à la symbolique formelle. L'association de toutes ces disciplines va permettre de créer, selon Kenneth Francton, la " construction du futur " comme il nous l'explique dans son livre " histoire critique de l'architecture moderne " où il montre la vision de la cathédrale du futur de Feininger ( voir ci-dessous ).

Ce rapport entre l'enseignement du Bauhaus et la " construction du futur " est conforté par les conditions culturelles du début du siècle. En effet le 20è siècle s'ouvre sur une très grande confiance dans l'avenir c'est-à-dire dans le progrès, les sciences et la technique, mais aussi, au plan social, sur une très grande confiance en l'égalité. De plus des organisations urbaines d'une nouvelle échelle sont mises en place comme Inflation de la métropole urbaine avec des chemins de fer et des industries mais aussi la normalisation de la production architecturale qui va entraîner la standardisation. Enfin une culture internationale va permettre des échanges assez rapides entre les milieux artistiques de chaque pays par l'intermédiaire de congrès. L'aventure du Bauhaus ne se conçoit donc guère dans le climat artistique très particulier de l'Allemagne du début du 20è siècle. En effet, pour tenter d'établir une coopération entre les artistes et les artisans d'une part, l'industrie et la technique de l'autre, Hermann Muthesius avait déjà fondé le Deutscher Werkbund ( littéralement " union de l'oeuvre allemande "), dont Henry Van de Velde faisait partie, qui avait pour but d'ennoblir le travail artisanal en réalisant la collaboration de l'ait de l'industrie et du travail manuel. Malgré de nombreuses réticences, le Werkbund avait fini par s'imposer chez les artistes et surtout chez les industriels. En revanche, la peinture, déjà dominé par l'expressionnisme s'inposait même au théâtre et au cinéma, Dada apparut, qui prétendait répondre aux événements que le monde venait de subir. En fondant à 36 ans le Bauhaus, en lui permettant de traverser révolutions, putschs et crise financière, Gropius apportait une réponse différente et combien plus humaniste.

La réflexion de Gropius a la même origine que celle de Le Corbusier : la " révolution machiniste " du 19è siècle a amené la civilisation à un point de non-retour et nécessite un changement intellectuel profond. Nier la machine équivaut à se condamner, mieux vaut en être le maître et donner à ses produits un " contenu de réalité " : éliminer chaque désavantage de la machine, sans sacrifier aucun de ses avantages.

S'il commence à exister une architecture, une peinture, une sculpture modernes, Gropius constate que les objets usuels ne participent pas à ce mouvement : l'artisan, qui a le savoir-faire, plagie les époques révolues, tandis que l'artiste, qui a l'esprit créateur, dédaigne ce travail " subalterne ". D'où le principe : créer le compagnonnage de la main et de la machine dans la production, ne pas faire imiter par la machine des produits faits à la main, mais créer des objets, faits à la main, qui pourront ensuite être manufacturés.

Walter Gropius, en réunissant les deux écoles d'arts de Weimar, précisera le programme du Werkbund : artisans et artistes créeront de concert leurs oeuvres dans le Bauwerk, qui comprendra la peinture, la sculpture, les arts appliqués, intégrés dans l'architecture, sans que celle-ci soit privilégiée, pour créer un art de vivre accordé au 20è siècle.

A cause se son originalité d'enseignement par rapport aux écoles traditionnelles, le Bauhaus et plus précisément ses étudiants sont considérés comme des hippies, des bohémiens. Au début de l'année 1920 la bourgeoisie de Weimar s'insurgent contre le Bauhaus qui prend des positions politiques et ce fait se confirme par le concours de monuments aux morts pour ouvriers assassinés. Ce concours est décisif pour l'évolution artistique et c'est un projet abstrait qui le remporte. Par ce projet une décision politique est matérialisée et le Bauhaus est alors insulté de communiste, de bolchevique.

Parmi les professeurs du Bauhaus on retrouve Johannes Itten qui se détache par rapport à ses collègues. En effet le Bauhaus durant ses six premières années fut marqué par la personnalité de Itten considéré comme une sorte de gourou qui organise un mode de vie draconien en effet c'est lui qui sélectionne les élèves entrant au Bauhaus.

Ayant suscité l'opposition des autorités conservatrices de la ville et du gouvernement provincial de Thuringe, le Bauhaus de Weimar, institution d'Etat, ferma ses portes - professeurs et élèves solidaires de leur directeur - au terme de son contrat de sept ans sous la montée du nazisme.

De nombreuses villes dont Darmstadt, Francfort, Mannheim étaient disposées à le recevoir, mais c'est Dessau qui l'emporta.

 

II. L'évolution : le Bauhaus de Dessau

 

Arrivée à Dessau, la municipalité demanda à Gropius, assisté de professeurs et d'élèves de l'école, de concevoir un ensemble de bâtiments pour accueillir le Bauhaus. Commencés à la fin de 1925, les travaux furent achevés en décembre 1926. Construit en verre et en béton, l'édifice illustre un fonctionnalisme rigoureux, dans un langage architectural proche du néoplasticisme ( voir images ci-dessous ). En effet ces bâtiments ont une architecture moderne décomposée en deux parties : une structure intérieure en béton qui soutient le bâtiment et des murs extérieurs en verre qui ne sont pas porteurs. Cela procure un effet de force soutenant le toit mais aussi un effet de transparence. Le verre est alors très peu répandu dans l'architecture en effet il n'est apparu que vers les années 1850. C'est d'ailleurs l'ingénieur et architecte anglais Sir Joseph Paxton qui réalisa la première expérience du verre dans l'architecture et ce à Londres en 1851 : la construction du Crystal Palace ( le palais de cristal pour l'exposition universelle. Le Crystal Palace ( voir image ci-dessous ), une des oeuvres célèbres de l'architecture moderne, fut entièrement réalisé avec des éléments préfabriqués en verre et en métal et couvrait une superficie de plus de 70 000 km². Démonté et reconstruit à Sydenham, il fut détruit par un incendie en 1936. Cette première expérience du verre engendra un vif succès auprès des visiteurs et à travers cela une grande émotion dans le monde entier, mais à l'époque ce type d'architecture était considéré comme quelque chose de temporaire. A Dessau, les bâtiments du Bauhaus avec leur prééminence extérieure du verre vont acquérir leurs lettres de noblesse.

 

Comme le déclare Paul Scheerbait théoricien du verre, : " le verre amène une ère nouvelle ", " nous avons pitié de la culture de la brique ", " le verre coloré détruit la haine ". On attribue alors au verre des vertus éthiques, morales, le verre va désormais amener une véritable révolution. La réflexion de Bruno Taut, architecte et urbaniste allemand (1 880-1938), s'inscrit dans la même optique, en effet il a organisa en 1919 la " Glâseren Kette " ( littéralement la " chaîne de verre " ), cercle qui rassemblait des architectes et des artistes de même conviction qui communiquaient entre eux par les célèbres lettres " boule de neige ". Chacun signait ses lettres de pseudonyme, par exemple : " Glas " pour Bruno Tant, " Map " pour Walter Gropius. L'objectif commun à tous les membres de la chaîne était de parvenir à surmonter une architecture académique pétrifiée grâce à des formes fondamentalement neuves prises dans la nature vivante ou amorphe. Le forum de leurs pensées prit également la forme de la revue publiée par Taut " Frühlicht " dans laquelle Ludwig Mies Van der Rohe, architecte allemand naturalisé américain qui fut professeur et directeur du Bauhaus, publia son premier projet de gratte-ciel en verre. Adolf Behne participait aussi à la chaîne de verre, il expliqua dans son livre " Wiederkehr der Kunst " ( littéralement " le retour de l'art " ) paru pendant la guerre, qu'on en avait " assez de la forme comme il faut, du ton sec ". C'était un anarchiste qui avait pour idée que le verre allait provoquer une révolution et que ce nouveau matériau de l'architecture allait tout bouleverser. L'architecture expressionniste que l'on retrouve dans les projets utopiques de la chaîne de verre s'incarne beaucoup plus librement dans certains bâtiments de Bruno Taut, Hans Poelzig et Fritz Hôger. Aujourd'hui le verre dans l'architecture se retrouve dans des bâtiments tels que les banques, en effet on a une opposition entre la transparence du verre et le monde assez caché des finances. En fait le verre est une manière d'aller au bout de la création.

L'époque moderne dans laquelle s'inscrit le Bauhaus va être marquée par ce dernier, en effet cette école était une sorte d'extériorité lyrique, où seul l'association de l'art et de l'artisanat intéressait les professeurs et les élèves, qui a marqué la civilisation dans la société du 20è siècle. Le Bauhaus se situait entre une école traditionnelle et un ordre religieux, en effet il y régnait une sorte de discipline permettant une expression personnelle artistique qui devait engendrer un culte du nouveau pour permettre au 20è siècle de rentrer dans une ère nouvelle. L'architecture moderne était donc en train de naître en Allemagne grâce au Bauhaus mais cette naissance était déjà en cours à Chicago aux Etats-Unis dans les années 1880 à travers les travaux de Louis Sullivan, architecte et théoricien américain, qui fut le premier à résoudre les problèmes des gratte-ciel en intégrant des poutres métalliques et des murs extérieurs en brique référence à la renaissance. Avec l'invention de l'ascenseur par Otis en 1880 la construction ne se ferait plus désormais en largeur mais en hauteur. L'enseignement dispensé au Bauhaus, en plus d'être original, était international en effet les professeurs y enseignant comme Johannes Itten (suisse), Paul Klee (autrichien), Wassily Kandinsky (russe) ont des nationalités différentes ce qui permet d'avoir une vision plus internationale de l'art. De plus dans la fin des années 1920 le monde assiste à une révolution de l'art, une rupture s'opère avec le passé, on fait table rase du passé et des habitudes académiques. Le Bauhaus veut instaurer un nouvel ordre où le monde serait différent de celui proposer par la société bourgeoise qui est trop conventionnelle : l'Avant-garde se veut révolutionnaire.

Parmi les professeurs du Bauhaus on retrouve Wassily Kandinsky, peintre russe naturalisé allemand puis français, qui fut l'un des grands initiateurs de l'art abstrait. D'après lui, en peinture, seul compte la manière dont le sujet est représenté : jeu des couleurs et des formes. Dans son premier livre " Vu spirituelle de l'art ", Kandinsky justifie les couleurs par leur musique, il assimile les couleurs à des sons. Son second livre " Point-Ligne-Plan " publié en 1926 alors qu'il est enseignant au Bauhaus, est un véritable manuel pour ses étudiants, il leur permet de construire des objets et des éléments géométriques.

Johannes Itten avant d'être remplacé par Làszlô Moholy-Nagy en 1923, avait saisi les préceptes des membres de la chaîne de verre : lumière, structure artistique diffuse. Il fut l'un des plus importants enseignants du Bauhaus.

Les raisons du départ de Itten peuvent être trouvés dans le fait que les anciens élèves du Bauhaus devenus alors professeurs pratiquaient tous un art abstrait et géométrique, ainsi que le montrent les affiches de Joost Schmidt ou les travaux de Josef Albers, peintre américain d'origine allemande, et c'est donc cette évolution vers le constructivisme qui a poussé Johannes Itten à partir du corps enseignant du Bauhaus. Dans la peinture de Paul Klee on retrouve l'évolution du Bauhaus vers le constructivisme à travers des tableaux comme Ville italienne (1928) ou Incomposé dans l'espace (1929). Le Hongrois Làszlô Moholy-Nagy, peintre, sculpteur, architecte d'intérieur, cinéaste, photographe mais avant tout théoricien de l'art, est un excellent pédagogue. Au carrefour du suprématisme, de Dada et du constructivisme, la pensée de Moholy-Nagy est complexe et prolixe et elle se rapproche de la pensée des autres professeurs du Bauhaus.

Le constructivisme, mouvement au coeur de l'enseignement du Bauhaus, fit son apparition en Europe vers 1920, notamment grâce à l'action et aux voyages d'El LissitAy, peintre, architecte, décorateur et typographe russe, qui fut l'un des pionniers du constructivisme, à l'occasion de la première exposition d'art abstrait russe organisé par ce dernier en 1922 à Berlin. Lors de cette exposition il rencontre Theo Van Doesburg, Gerhard Richter et Làszlô Moholy-Nagy, avec lesquels il fonda le Groupe G. Le constructivisme russe n'est également pas sans points de convergence avec le groupe De Stijl, que Lissitzky rallia, apparu en Hollande, autour de Theo Van Doesburg et de Plet Mondrian. Ses conceptions se diffusèrent également en Pologne, en Hongrie, en Roumanie et en Tchécoslovaquie, etc. Cette convergence européenne se traduisit, dès 1922, par l'organisation du congrès international des artistes progressistes à Düsseldorf, puis par le congrès international des constructivistes dadaïstes à Weimar.

Le constructivisme en est venu à désigner le style qui regroupa dans les années 1920 et 1930 toutes les tendances de l'art abstrait géométrique, que l'on préfère désigner aujourd'hui par le terme générique d'" art constructif ". Le Bauhaus a aussi permis à ses anciens élèves d'enseigner à leur tour comme l'a fait Josef Albers de 1923 à 1933, qui explora les relations des couleurs entre elles dans leurs abstractions géométriques. Ses cours furent en particulier fondés sur le fonctionnalisme dans la conception moderne. Le Bauhaus, voulant depuis ses débuts associer art et technique comme l'indique son slogan : " Art et technique une nouvelle unité ", a permis, en rejoignant fonctionnalisme et esthétique, de créer des produits que des fabricants allemands adoptèrent comme modèle pour leur production en série, et qui influencèrent aussi le dessin industriel à l'étranger. On peut prendre comme exemple de ces produits : une lampe, verre opalin et mat, aluminium, qui fut l'un projet de l'atelier des travaux en métal de l'école de 1927 à 1928 , des modèles de chaises tubulaires conçus par Marcel Breuer en 1926.

En 1928, lassé, Gropius abandonna la direction de l'établissement et, sur sa recommandation, le suisse Hannes Meyer, directeur de l'atelier d'architecture depuis 1927, lui succéda. Il devait démissionner à son tour en juin 1930, laissant le Bauhaus déchiré par des querelles intérieures. Gropius, sollicité de nouveau, recommanda Ludwig Mies Van der Rohe qui, comme lui, avait travaillé chez Peter Berhens. Organisateur de l'exposition du Weissenhof en 1927 à Stuttgart, alors qu'il était vice président du Werkbund, Mies était l'auteur du très célèbre pavillon allemand de l'exposition de Barcelone. Quoiqu'il eût, en 1926, érigé à Berlin le monument à la mémoire de Karl Liebknecht et de Rosa Luxemburg, il brisa les grèves politiques des élèves et rétablit l'ordre au sein du Bauhaus, plus ou moins mené, depuis le départ de son fondateur, par des groupes d'extrême gauche.

En 1932, les nazis prenaient le pouvoir Saxe-Anhalt et le Bauhaus de Dessau allait s'établir à Berlin dans une usine vide que Mies Van der Rohe fit repeindre en blanc.

 

III. La fin du Bauhaus : la migration vers Berlin

 

Le Bauhaus déplacé à Berlin et sous la direction de Mies Van der Rohe n'avait plus du tout la force qu'il possédait à Dessau de part les bâtiments spécialement construits pour cette école mais aussi à cause de l'absence de Walter Gropius, son fondateur, à sa tête. Dès lors les choses allèrent très vite, en effet la montée du nazisme en Allemagne depuis le début du siècle était en opposition avec les convictions politiques des membres du Bauhaus et la volonté de l'extrême droite de canaliser les pensées ne permettait pas de dispenser un enseignement tel qu'il était au Bauhaus à ses débuts. Hitler, chancelier du Reich, et Mies eut une entrevue avec l'un des " experts culturels " nazis, Alfred Rosenberg, à l'automne de l'année 1933 , il obtint l'autorisation de continuer mais, considérant que le Bauhaus ne pouvait poursuivre son oeuvre dans " cette atmosphère ", il prit la décision de fermer l'institution. De plus il fut aussi déclarer " antigermanique " et " dégénéré " et cessa donc toute activité en 1933.

Pourtant, il continua et continue encore aujourd'hui à avoir une influence dans tous les milieux artistiques ( et industriels ). De nombreuses écoles européennes ont adopté ses méthodes : l'Académie Mu'hely à Budapest, avant-guerre , la Hochschule für Gestaltung ( école supérieure de design ) fondée par Max Bill à Ulm, après-guerre. En recevant les principaux animateurs de Dessau, les Etats-Unis ont recueilli l'héritage du Bauhaus : Gropius fut nommé à la Haward University et Mies Van der Rohe à l'Illinois Institute of Technology ; Moholy-Nagy, en 193 7, créa à Chicago le New Bauhaus, repris après sa mort par Serge Chemayeff sous le nom d'Institute of design. Josef Albers enseigna au Black Moutain College, puis à la Yale University.

Pour sa part, l'industrie comprit le profit qu'elle pouvait retirer de l'idée du Bauhaus, selon laquelle un objet bien dessiné se vend mieux ; les nombreux objets produits au Bauhaus (tissus d'Anni Albers, luminaires de Marianne Brandt... ) n'ont rien perdu de leur actualité, les meubles tubulaires de Marcel Breuer - notamment ses chaises en cantilever - qui furent les premiers sont encore édités aujourd'hui et copiés sans vergogne.

Enfin le Bauhaus a largement favorisé le développement de l'art abstrait par la publication dans la remarquable série des Bauhausbücher ( littéralement " livres du Bauhaus " ) des écrits de peintres tels que Theo Van Doesburg, Gleizes, Klee, Mondrian, etc...

Moholy-Nagy, Albers par leur oeuvre et leurs recherches sur le mouvement, la couleur, la lumière et les illusions d'optique, ont posé tous les principes de l' " art cinétique " qu'un Schôffer et un Vasarely développèrent, parmi d'autres, quelque 25 ans plus tard. Les architectes Breuer et Bayer, entièrement formés au Bauhaus, ont depuis confirmés leur valeur ; avec Gropius et Mies Van der Rohe, ils ont, de travaux en travaux, en formant des disciples comme Paul Rudolph et Phihp Johnson, contribué à répandre partout dans le monde le " style international " ( connu aussi sous le nom de " style bauhaus " ) qu'ils avaient crée avec les architectes français et hollandais vers les années 1920.

 

Conclusion

 

Pour chaque siècle, il est quelques moments privilégiés qui résolvent les questions et déterminent l'avenir : tel apparaît le Bauhaus. Il a contribué, pour un temps, à débarrasser l'art allemand de son angoisse romantique et de son pathos mystique. Par-delà, sur le plan international, il a fait prendre conscience des problèmes posés à l'art de notre époque et établi quelques-unes des réponses les plus fécondes. En ce sens, on peut même voir dans son action l'affirmation d'une morale. Souhaitant rapproché théorie et pratique, et retrouver une unité entre l'art et les diverses activités humaines, le Bauhaus rejoignait l'ambition de tous les grands mouvements de pensée novateurs de l'histoire. A ce titre, il se présente bien comme le Grand Atelier du 20è siècle.