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NTCD Mistral et
Tonnerre
Le ministre de la Défense a récemment
souligné l'importance que la commande en l'an 2000 de deux
bâtiments de conception nouvelle représentait pour
les capacités amphibies de la Marine, clairement mises en
évidence lors des opérations récentes au Kosovo
et à Timor. La nouvelle donne stratégique
internationale a conduit, en moins de dix ans, à une mutation
de grande ampleur dans l'emploi des forces armées qui n'a
pas épargné les forces amphibies. En effet, les opérations
extérieures récentes, que ce soit en Afrique occidentale,
en Haïti, en Adriatique, au Timor oriental ou ailleurs, ont
montré tout l'avantage de disposer de capacités suffisantes
pour mener des opérations interarmées vers la terre
à partir de la mer et la nécessité de renforcer
les capacités des forces amphibies. Ce mode d'engagement
particulier semble avoir été redécouvert après
la guerre froide, mais l'histoire montre qu'il a toujours été
une constante des relations internationales.
Un moyen bien adapté à la projection
de forces Les forces amphibies
sont un moyen bien adapté à cet objectif de projection
: elles peuvent participer efficacement à la prévention
des crises, au contrôle de l'escalade de la violence et à
l'imposition, si nécessaire par la force, de la volonté
nationale ou internationale. C'est pourquoi la France a été
conduite à définir de nouveaux besoins en matière
d'amphibie à travers le concept national des opérations
amphibies (CNOA), approuvé par le chef d'état-major
des Armées en juin 1997. Parallèlement, un contrat
opérationnel formalisé dans une instruction a été
fixé à la Marine et traduit la nécessité
de pouvoir accueillir une structure de commandement embarqué
dans un cadre interarmées et interalliés.
Pour répondre à ces besoins, la Marine a mis sur pied,
en 1997, le programme NTCD qui prévoit la construction de
deux navires d'opérations amphibies. Ce programme, qui s'inscrit
dans le modèle d'armée 2015, a vocation à remplacer
les TCD Ouragan et Orage, âgés de près de quarante
ans. L'admission au service actif du Mistral , le premier bâtiment
de la classe, est prévue en 2004, celle du Tonnerre en 2005.
A cet horizon, ils rejoindront les TCD Foudre et Siroco au sein
de la flotte amphibie. La notification de la commande des deux
navires doit intervenir dans les jours qui viennent. La maîtrise
d'œuvre industrielle d'ensemble de la réalisation de ce programme
est confiée à DCN. L'activité de définition
et de construction de la plate-forme propulsée est partagée
entre DCN et les Chantiers de l'Atlantique. La réalisation
du système de télécommunications est confiée
à Thomson/CSF. Des navires
polyvalents aptes à l'exécution de missions variées L'approche globale des opérations amphibies,
telle qu'elle découle du CNOA, a présidé au
dimensionnement des NTCD. Il était demandé de répartir
le Groupement interarmées embarqué (GIE composé
de quatre compagnies de combat et de trente hélicoptères)
et sa logistique initiale sur une flotte composée des deux
TCD de la classe Foudre et de deux navires de la classe Mistral.
Par ailleurs, une priorité forte était accordée
à l'aéromobilité : celle-ci confère
à la force amphibie de bonnes capacités de surprise,
d'élongation, d'anticipation et de vitesse d'exécution
indispensables aux opérations d'aujourd'hui. D'autres
missions de projection peuvent être demandées à
ces navires : des opérations aéromobiles, le transport
d'unités opérationnelles (des escadrons de chars Leclerc
par exemple), le soutien logistique des forces débarquées,
le soutien santé, le support d'un commandement de théâtre.
Mais on peut citer aussi les opérations humanitaires et le
transport de matériel. Ces missions sont souvent
exécutées dans un contexte de crise, avec de longues
périodes d'attente pouvant atteindre plusieurs mois et nécessitant
de prépositionner les forces. Grâce aux navires de
la classe Mistral, le concept de prépositionnement dynamique
pourra être appliqué avec souplesse. Une plate-forme aux standards civils adaptés, interopérable,
modulaire et évolutive
Avec un déplacement proche de 20
000 tonnes, une vitesse de 18 nœuds, l'architecture générale
du NTCD se caractérise en premier lieu par un pont d'envol
continu pour la mise en œuvre simultanée de six hélicoptères
de type NH90 TTH ou Tigre de l'armée de Terre avec un îlot
déporté sur tribord ; en second lieu, par un radier
immergeable capable d'accueillir quatre chalands de transport de
matériels (CTM).
La terminologie OTAN classe ce type d'architecture
dans la catégorie des LHD (landing helicopter dock) à
laquelle appartient notamment l'USS Wasp. La comparaison avec ce
navire, deux fois plus lourd et construit selon des standards militaires,
s'arrête là puisque le NTCD, pour des raisons budgétaires,
sera fabriqué aux standards civils, tout comme l'ont été
le LPD néerlandais Rotterdam (TCD) ou le LPH britannique
Ocean (porte-hélicoptères d'assaut sans radier). Une
inscription du NTCD au registre du Bureau Veritas a été
demandée. Ces navires conçus pour des opérations
interarmées ou interalliées posséderont un
excellent niveau d'interopérabilité : une quinzaine
d'hélicoptères de l'armée de Terre pourront
être embarqués ainsi qu'une soixantaine de véhicules
blindés actuels ou de la génération future,
sans oublier les camions logistiques. Les hélicoptères
alliés "moyens lourds" comme le EH101 Merlin (16
tonnes) pourront se poser sur le pont d'envol, et les hélicoptères
"super lourds" comme le Super Stallion (35 tonnes) ou
l'Osprey V22 auront un spot dédié. Systématiquement
intégré dans un groupe aéronaval dès
la présence d'une menace aérienne, de surface, sous-marine
ou côtière, le bâtiment disposera de moyens d'autodéfense
limités à une artillerie de petit calibre et à
des affûts SIMBAD mettant en œuvre le missile Mistral.
Des capacités de commandement
accrues Les télécommunications
sont particulièrement développées, compte tenu
des besoins en nombre de liaisons simultanées et en débit
imposés par les missions de commandement de théâtre
ou de commandement des opérations amphibies. Le système
de télécommunications, dérivé de celui
du programme de frégates Horizon, intégrera un ensemble
de moyens dans toutes les gammes de fréquences et la liaison
de données tactiques. Il offrira des communications intérieures
et extérieures modernes avec des services à forte
valeur ajoutée (phonie, données, images). Les moyens
satellitaires hauts débits seront nombreux et variés
et une forte capacité d'évolution est demandée.
Une zone dédiée d'environ 800 m2 et des
infrastructures précâblées et modulaires sont
définies pour accueillir cent cinquante opérateurs
d'un poste de commandement (PC) de théâtre. Ces dispositions
faciliteront le raccordement des moyens informatiques et de commandement.
Une extension du PC est également possible par l'adjonction
de shelters installés dans le hangar à véhicules.
Les systèmes d'information et de commandement (SIC) spécifiques
à chaque armée, les SIC interarmées, et les
SIC interalliés, pourront être exploités à
bord.
Un navire tout électrique
La manoeuvrabilité est un aspect important des
qualités nautiques d'un bâtiment. S'agissant de navires
ayant vocation à évoluer par petits fonds et à
proximité de la terre lors des manœuvres d'embarquement ou
de rembarquement d'engins, les capacités manœuvrières
à basse vitesse sont essentielles. Ces capacités,
avec l'aide d'un propulseur d'étrave, seront également
très utiles lors des manœuvres de port et des prises de quai
sans concours extérieurs, dans des ports faiblement équipés.
C'est ce qui a conduit à choisir une propulsion par Pod (propulsion
drive) et une architecture de navire tout électrique
(NTE), l'ensemble des besoins en énergie du bord étant
assuré par les mêmes diesels alternateurs.
L'absence d'appareil à gouverner et de
lignes d'arbres simplifie notablement l'architecture générale
et l'appareil propulsif, et apporte une grande flexibilité
dans les emménagements. Cette flexibilité est mise
à profit pour améliorer les conditions de maintenance
des compartiments : il est désormais possible de prévoir
les volumes et les moyens de manutention nécessaires aux
démontages d'auxiliaires ainsi que leur cheminement à
travers le navire. Parallèlement, il en résulte une
réduction du nombre de types d'équipements et de générateurs
et, par conséquent, une réduction de la logistique
et de la maintenance, ainsi qu'une amélioration de la disponibilité,
grâce notamment à la fiabilité des installations
électriques. L'optimisation du nombre et de la puissance
de chacun des diesels alternateurs permet de limiter les phénomènes
d'encrassement. Le léger surcoût initial d'acquisition
lié au concept NTE devrait être rapidement amorti par
la diminution du coût d'entretien. Enfin, pour répondre
à la politique volontariste de la Marine dans le domaine
de la protection de l'environnement maritime, les NTCD sont des
navires " propres ", c'est à dire qu'ils ne
rejetteront aucun déchet à la mer.
Un équipage réduit et une disponibilité
technique maximale
Les NTCD bénéficieront des
fonctionnalités et des automatismes de conduite de plate-forme
habituels sur les navires marchands. Il en est de même pour
les conditions de confort, d'habitabilité et, de façon
générale, de vie courante à bord. Les conditions
de maintenabilité sont également celles requises habituellement
sur les navires civils. Le coût d'un équipage
représentant environ 40% du coût du cycle de vie d'un
bâtiment, la réduction de ce poste a donc un impact
direct sur le coût de possession. L'objectif de plan d'armement
est ici de cent soixante personnes pour un navire 60 % plus lourd
que le TCD Siroco armé par deux cent trente marins. La réalisation
de cet objectif suppose un niveau d'automatisation très poussé,
en particulier pour la conduite, ce qui est réalisable dès
aujourd'hui, avec des technologies sur étagère, et
en usage dans la marine marchande. Parallèlement,
la Marine a fixé un objectif de disponibilité très
élevé de trois cent cinquante jours par an. Cet objectif
est ambitieux par rapport aux standards actuels mais correspond
à des pratiques courantes dans le monde civil. Il devrait
pouvoir être atteint grâce à des dispositions
architecturales facilitant la maintenance, une organisation du travail
rationalisée incluant le recours à la sous-traitance,
et une polyvalence accrue du personnel.
Des locaux vie fonctionnels et confortables
Pour tenir compte de la professionnalisation
des Armées et de l'évolution des modes de vie, l'équipage
et les troupes embarquées sont logés dans des cabines
modulaires avec blocs sanitaires intégrés de une,
deux, quatre ou six personnes, regroupées en deux zones vie
autonomes. Les avant-postes sont remplacés par des zones
de détente. Ce mode de logement facilite la prise en compte
de la féminisation ainsi que l'évolutivité
de la pyramide des grades. Le niveau de confort des troupes embarquées
a été sensiblement amélioré en raison
des séjours prolongés qu'elles auront à passer
dans le cadre des missions de prépositionnement.
Par ailleurs, , les pôles d'activité sont regroupés
pour une meilleure efficacité : zone vie équipage,
zone vie passagers, zone administration, zone aviation, zone hôpital,
etc. Le mode de restauration a été revu :
regroupée sur un même pont, elle est organisée
autour d'une cuisine centrale unique qui dessert plusieurs rampes
et salles à manger mixtes (équipage et passagers).
Un programme à vocation interarmées bien affichée
La crise du Kosovo a confirmé l'intérêt
pour les armées de disposer de navires aux capacités
renforcées de projection de forces et de maîtrise de
l'information. Le programme NTCD contribue à ce double objectif.
Instruments essentiels de la stratégie d'action de la France,
le Mistral et le Tonnerre constitueront la pièce maîtresse
du groupe amphibie et permettront à la marine d'apporter
un soutien majeur aux opérations interarmées, interalliées
et multinationales.
Caractéristiques
Plate-forme : - dimensions
: 199 x 32 x 28 m - radier : 57,5 x 15,4
x 8,2 m - déplacement : 19 500 tonnes à pleine
charge - autonomie / vitesse : 6000 Nq à 18 nds
- équipage :160 personnes - 6 spots hélicoptères
16 tonnes - 1 hôpital type Siroco - 1 zone PC
dédiée précâblée (800m2)
- Capacités d'emport :
- radier
: 4 CTM troupe embarquée longue durée : 450
- hélicoptères : 16 Tigre et NH90 - véhicules
: 60 véhicules blindés, un escadron de chars Leclerc
- Capacité de télécommunications
un système intégré comprenant les transmissions
intérieures, les transmissions extérieures (y
compris par satellites) et une liaison de transmission de données
(liaison 11)
- Systèmes d'aide aux opérations
un système de veille comprenant un radar 3D, deux radars
de navigation et d'appontage, un système SIC 21 un système
GESVOL
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