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Texte d'archive
pampre
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Posté le 26-10-2003 à 15:27:06
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Peut-on considérer le libertin comme un ascète du siècle des lumières ou comme un débauché intelligent dont la rhétorique ne sert qu'à justifier les vices ?

Atil
1604 messages postés
Posté le 26-10-2003 à 22:28:01
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Si les libertins cachaient leurs vrais motifs sous de faux prétextes, comment pourrait-on faire pour le savoir, puisque que nous sommes émoignés d'eux par plusieurs siècles ?

Leur but était-il simplement le plaisir ?
Était-ce plutôt la curiosité de tout pouvoir expérimenter ?
Ou alors voulaient-ils braver les interdits pour gagner la liberté ?
Je suppose qu'on trouvait ces diverses motivations, dosées différemment selon les personnes.

Certains étaient libertins dans les plaisirs, et d'autres dans les idées.


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...à mon humble avis.

#Atil


pampre
6 messages postés
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Posté le 27-10-2003 à 10:00:47
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Ce n'est pas parce qu'on est éloigné de plusieurs siècles d'un courant philosophique et d'une société donnée que l'on en ignore tout.

A ma connaissance, le libertinage n'est pas une philosophie du plaisir. Le libertin est d'ailleurs étymologiquement un affranchi et lorsque la société du 18ème siècle l'appelle "dépravé" ou "débauché" c'est souvent moins dans un sens sexuel que dans un sens d'être régi par des codes de conduite différents, qui vont à l'encontre de la morale et de la religion établies.
Au 18ème siècle, le "libertinage dans le plaisir", pour reprendre ton expression finale, est un comportement licencieux (de nos jours on dirait pornographique) et le libertinage en tant que tel reste un courant philosophique (le monde des idées donc) sur lequel on règle sa conduite.

Ma question initiale ne consiste pas à "sonder le cÏur et les reins" des protagonistes d'une époque mais plutôt à essayer de trouver une réponse à un point précis. Je vais donc la reformuler : "Doit-on considérer le libertin comme un ascète ou, au contraire, comme un tartuffe ?"


Startijen
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Posté le 28-10-2003 à 06:32:03
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Etant donné mes faibles connaissances su le sujet, pourrais-je poser une question d'ordre général sur le libertinage ?

La doctrine libertine est-elle définie en termes "universels" ou au contraire est-elle directement construite contre le rêgles "morales " en vigueur au XVIIIème siècle ?
Cela me parait un point interessant pour répondre à la question de l'opportunisme possible du libertin.

Enfin, le libertinage n'est-il pas dans les faits réservé à une certaine élite (y compris intelectuelle, ce qui exclu les avatars modernes de la noblesse oisive de l'ancien régime) ?


Atil
1604 messages postés
Posté le 28-10-2003 à 08:04:51
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"Ma question initiale ne consiste pas à "sonder le cÏur et les reins" des protagonistes d'une époque mais plutôt à essayer de trouver une réponse à un point précis. Je vais donc la reformuler : "Doit-on considérer le libertin comme un ascète ou, au contraire, comme un tartuffe ?" "

-----------> Je persiste à penser qu'on ne peut pas juger des hommes sur ce qu'ils disent mais sur leurs vraies motivations. On ne connait des libertins que leurs paroles et leurs actes mais leurs véritables motivations leurs restent personnelles. surface des choses nous apparait.
Le libertin peut être un simple jouisseur des plaisirs de la vie (plaisirs sensuels ou intellectuels) ou un rigolo qui s'amuse simplement à choquer les gens, ou alors un homme sérieux qui recherche la vérité à travers la liberté de penser.
Tout dépend de la trempe intérieur de chaque libertin.
Certains ne cherchaient que des excuses pour pouvoir faire tout ce qu'ils voulaient (les tartuffes) alors que d'autres voulaient dépasser les préjugés intellectuels et moraux de leur époque afin d'évoluer (les ascètes).

Le mot "ascète" sonne assez bizarrement dans cette affaire. Selon mon dictionnaire il désigne une personne austère qui pratique la mortification. Cela semble à l'opposé de ce que faisaient les libertins.
Cependant le mot "ascèse" désigne une technique permettant de progresser spirituellement. selon cette 2ème acceptation on pourrait dire effectivement que les libertins les + sincères pratiquaient effectivement une ascèse consistant à penser par eux-même en se dégageant des préjugés.

Je doute cependant que les paysants de l'époque, qui devaient probablement être écrasés de travail, aient eu le temps de s'occuper du libertinage. Il fallait faire partie des privilégiés pour avoir le temps de jouer au libertin (et pour prendre le risque de choquer les bien-pensants).


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...à mon humble avis.

#Atil


pampre
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Posté le 29-10-2003 à 13:16:21
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"Je persiste à penser qu'on ne peut pas juger des hommes sur ce qu'ils disent mais sur leurs vraies motivations."

Lorsque j'entreprends la lecture d'une Ïuvre philosophique, je discute des idées défendues par l'auteur et ne m'intéresse pas à sa conscience ou à ses desseins. Avec une vision comme la tienne, il me semble que l'on reste justement toujours en surface puisque l'on ne peut préjuger de rien et si on ne peut préjuger de rien, autant s'abstenir d'émettre une opinion.

"Tout dépend de la trempe intérieur de chaque libertin."

Si je reprends ton raisonnement : les écrits laissés par des auteurs ne sont pas fiables car on ne connaît pas leurs motivations véritables, donc un auteur est un menteur. Dans le même temps, tu te livres à une énumération des raisons motivant le choix d'un individu à adhérer au libertinage. C'est un tantinet paradoxal comme démarche.
De deux choses l'une : ou tu considères que les auteurs mentent et tu te gardes d'émettre un jugement faute de pouvoir sonder leur âme, ou tu considères que leurs écrits reflètent bien leurs pensées et tu ne peux alors pas procéder à un classement de leurs motifs personnels, à moins de prouver tes dires textes à l'appui.

Dans mon affaire, le mot ascète sonne parfaitement. ;-) Je ne vais pas m'engager avec toi dans une querelle de dictionnaires mais je tiens toutefois à te préciser que je retiens l'étymologie grecque du mot ascète du verbe dont il est tiré, à savoir "askein" et dont le sens premier est "façonner, travailler (un matériau)" puis "exercer (une profession), s'exercer". Il me semble logique, puisque je parle d'un point précis à une époque précise, de retenir d'un mot le sens qu'il avait durant cette période. Le discours de Madame de Merteuil dans Les Liaisons Dangereuses est à ce titre parfaitement représentatif du libertin en tant qu'ascète.

Pour Startijen>

Je commence par répondre à ta seconde question.

Il est évident que le libertinage ne s'adressait pas aux paysans, pas plus que la Philosophie d'une manière générale puisque cela incluait pour y accéder de savoir lire.

En ce qui concerne ta première question, je ne pense pas que les auteurs libertins aient eu des prétentions d'universalité. En fait, les idées libertines commencent à apparaître à la fin du 17ème siècle, ce qui se comprend dans le contexte historique français. Le règne de Louis XIV subit en effet l'influence de Madame de Maintenon et il s'achèvera dans une grande austérité religieuse. Après la mort de Louis XIV s'installe la Régence et avec elle, le retour des fastes et de la "liberté". Mais le libertinage continue malgré tout à se développer.
Cependant, je pense que le libertinage - en élargissant sa définition - peut s'appliquer à n'importe quelle époque dès l'instant où il y a volonté de s'affranchir de certains codes moraux et/ou religieux ressentis comme des obstacles à un épanouissement personnel, avec ce que cela peut parfois engendrer de perversion.
Startijen

52 messages postés
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Posté le 31-10-2003 à 21:55:51
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En effet, ma seconde question n'était pas des plus pertinentes... Je jetterais donc un voile pudique sur celle-ci. ;0)

Si l'on donne au libertinage le sens assez général d'affranchi de la morale de son époque il me semble que justement il perd ainsi toute singularité. Peut-être peut-on malgré tout en dégager quelques règles spécifiques ?

A propos, en quoi au juste consiste l'ascèse du libertin ? Le contrôle de soi et de ses sentiments ? Si tel est le cas, dans quel but transgresser la morale de l'époque.
Ce qui me gène un peu, c'est que les deux axes fondateurs du libertinage ma paraissent sans véritables rapports l'un avec l'autre.


Manu Lupin
109 messages postés
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Posté le 01-11-2003 à 20:33:32
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La difficulté de votre propos vient de la définition du mot libertin, semble t il à Manu.

Paul Valéry, 1938, Regards sur le monde actuel : "A Rome, les hommes libres, s'ils étaient nés de parents libres, s'appelaient "ingénus" ; s'ils avaient été libérés, on les disait "libertins". Beaucoup plus tard, on appela libertins ceux dont on prétendait qu'ils avaient libéré leurs pensées ; bientôt, ce beau titre fut réservé à ceux qui ne connaissaient pas de chaînes dans l'ordre des moeurs. Plus tard encore, la liberté devint un idéal, un mythe, un ferment ..."

Bref, le mot libertin recouvre un certain nombre de sens différents.

Le terme apparaît en français pour la 1ère fois en 1544 dans un texte de Calvin. Le terme désigne alors des dissidents anabaptistes de Flandres. Calvin leur reproche de mal user de la liberté en considérant les religions révélées comme des impostures humaines, en soutenant que la seule morale est celle de la nature, en pratiquant une liberté des moeurs reposant sur la négation du pêché et en appelant à la communauté des biens, ce qui faisait beaucoup pour l'époque.
Ils étaient donc libertins sur 2 aspects, sur le plan intellectuel et sur le plan des moeurs, et le terme "libertin" a évidemment un aspect péjoratif, car il désigne des personnes dangereuses pour l'ordre social.

Au 16ème siècle, un certain nombre de courants vont se développer contre le catholicisme et contre le calvinisme, poussant de plus en plus vers l'athéisme. Les termes "athée" et "libertin" vont alors devenir synonymes, la liberté de moeurs (donc le pêché) étant considéré comme la conséquence de l'impiété.
Le mot libertin entre alors dans le langage courant.

Au 17ème siècle, le concile de Trente renforce l'othodoxie, la répression se durcit et l'absolutisme s'unit au catholicisme. Sont alors désignés comme "libertins" ceux qui contestent les dogmes imposés par l'Etat.
A la Cour, les jeunes nobles s'exposent à cette accusation.
Exemple : Théophile de Viau provoque le scandale en se moquant des prédicateurs, en lisant des poèmes licencieux et impies et en rejetant l'abstinence.
Cyrano de Bergerac, le vrai, fit lui aussi partie de ces jeunes libertins, puisant dans la renaissance italienne son inspiration (notamment avec Giordanno Bruno ou Cremonini).

Selon eux, l'immortalité de l'âme est une stupidité, l'homme étant un animal comme les autres. Le libertin revendique alors le plaisir immédiat contre un hypothétique paradis post mortem. Le développement des sciences dures aident ce courant à se développer.
Théophile de Viau est arrêté pour le recueil Parnasse des poètes satyriques, qui fera rougir les jeunes filles.

C'est le début du combat entre la philosophie et la religion qui va animer les Lumières, et qu'on retrouvera pendant la révolution, quand Maistre et Bonald, théocrates contre révolutionnaires, lanceront la charge contre les prétentions du Tiers Etat à vouloir renverser l'ordre religieux.

A la fin du 17eme siècle, Pierre Bayle va montrer que les Etats chrétiens peuvent être corrompus, et qu'un athée peut être vertueux malgré son absence de foi, ce qui est une petite révolution. Le terme libertin va alors pouvoir désigner 2 types de personnes, le libertin par la raison, et le libertin dans les moeurs. Le premier devient le philosophe des Lumières, et revendiquera la moralité. Le 2nd reste libertin, et le libertinage va de plus en plus désigner uniquement le débauché (ce sont les libertins de la Régence après la mort de Louis XIV).

Toutefois, le libertin, à partir du 18eme siècle, n'est pas un pilier de rugby : il y a un certain raffinement qui est revendiqué (Crébillon, Laclos), nous restons aristocratique même dans la débauche. Le libertinage conserve une partie de son aspect intellectuel originel.

Jusqu'à Sade, où le raffinement passe à la trappe, mais où est conservé la volonté de produire une philosophie.

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Pour répondre à la question posée, nous contestons la rédaction de cette question, qui ne propose que 2 réponses : "ascète" ou "débauché intelligent". Le libertin n'est surtout pas ascète et il n'est pas qu'un débauché malin. Le libertin fait partie d'un courant philosophique, il est , à l'avis de Manu, le cousin des Lumières (d'ailleurs Diderot fut les 2 dans les Bijoux indiscrets). Le libertin est un philosophe qui ne revendique pas la morale, la considérant comme issue de la religion.
Le philosophe et le libertin combattent tous les 2 la religion, mais le philosophe a conservé la morale religieuse.


Pour plus d'informations, on se reportera à R. Trousson, Romans libertins du 18è siècle, collection bouquin, qu'on trouvera bien camouflé avec la littérature érotique dans sa librairie.


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Le commandement des anciens despotismes était : "Tu ne dois pas". Le commandement des totalitaires était : "Tu dois". Notre commandement est : "Tu es".


Tao
998 messages postés
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Posté le 01-11-2003 à 22:08:16
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Ah! V'là Manu qui se parle à la première personne du pluriel... comme mon maitre Tao...


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Je ne suis pas un sage.


Manu Lupin
109 messages postés
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Posté le 01-11-2003 à 23:24:39
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Et après ce genre de remarque, on demandera encore à Manu d'essayer d'exprimer une pensée sérieuse dans ce forum. Faut il qu'Il soit patient.


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Le commandement des anciens despotismes était : "Tu ne dois pas". Le commandement des totalitaires était : "Tu dois". Notre commandement est : "Tu es".


Roger Lesboules
196 messages postés
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Posté le 02-11-2003 à 02:04:07
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Tu es sûr que tout va bien, Tao ?

Sinon, à part que de t'intéresser au cas personnel de ceux qui émettent des propositions qui te déplaisent, il existe une manière plus constructive, comme par-exemple apporter des éléments nouveaux, mmm ?


Tao
998 messages postés
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Posté le 02-11-2003 à 08:14:00
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Non roger. Tout ne va pas bien.
Mais je me soigne... moi
Je vais t'avouer un truc: Je n'ai encore rien compris à ce sujet.
Je vais donc faire l'effort surhumain pour un petit cerveau comme le mien, de comprendre déjà les mots spécialisés que vous employez, puis j'essaierais de donner mon opinion gneu-gneuesque.


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Je ne suis pas un sage.


Atil
1604 messages postés
Posté le 02-11-2003 à 14:29:43
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Rejeter la morale comme le font les libertins peut se faire de deux facons :
Soit on ne veut plus du tout de morale et on ne la remplace par rien... et cela n'est qu'une excuse égoïste pour faire tout ce qu'on veut.
Soit on veut remplacer la morale actuelle par quelque chose de plus intelligent.


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...à mon humble avis.

#Atil


Fee des Arts
601 messages postés
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Posté le 02-11-2003 à 23:06:47
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3ème option........c'est à souhaiter


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Fée des Arts!