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Lundi 1er avril 2002

Rechute

 

 

Sabrina  a rechuté aujourd'hui. Elle est restée couchée presque toute la journée, m'a reproché des trucs à la con, alors qu'hier, lorsque Clint et sa femme sont venu manger à la maison, elle était adorable.

Elle m'a reproché de ne pas la faire sortir (décidemment, c'est une constante chez elle, ce type de reproche) et qui plus est, un lundi de Paques. Je lui ai simplement fait remarquer qu'elle s'était levée à 12h15, et que, comme d'habitude, j'étais prêt à l'emmener ou elle voulait. Il y a eu d'autres petits incidents de ce type, tellement mesquins que je ne prends même pas la peine de les noter ici, ce serait vraiment trop ridicule.

Je ne parviens toujours pas à me détacher de ses réactions, à les considérer comme le fruit d'une maladie et comprendre que tout va redevenir normal dans quelque temps. Lorsqu'elle m'interroge sur mon emploi du temps, qu'elle me demande une multitude de détails et qu'elle met en doute ma bonne foi, je souffre. Oui, ça peut paraître excessif comme réaction, mais je n'y peux rien, je ne peux pas relativiser et cela prends des proportions énormes chez moi. Cela fait tant d'années que je supporte ça, tant d'années que j'essaie d'ignorer sa jalousie. J'ai beau savoir qu'elle n'en est pas totalement responsable, je ne parviens pas la tolérer. Cette putain de jalousie nous bouffe de l'intérieur, petit à petit, sournoisement, sans faire de bruit... 

 

 

 

 

Vendredi 5 avril 2002

Tenter à nouveau

 

Nous avons visité un appartement hier dans une résidence magnifique. Petit à petit, nous nous engageons vers un achat immobilier. Evidemment, je reste inquiet et prudent vis à vis de Sabrina. Un tel achat semble risqué au vu de nos relations actuelles. Aussi j'ai voulu discuter avec elle hier soir sur la façon dont elle envisageait notre avenir. Il lui semble qu'il n'y ait que trois solutions :

1) Nous restons ensembles et nous parvenons à régler nos problèmes

2) Nos relations se dégradent mais nous restons ensembles et nous sommes malheureux

3) Nous nous quittons et sa vie est fichue, elle meurt

 

En discutant, elle a un peu nuancé ses propos et a avoué que si nous nous quittions, elle serait extrêmement malheureuse, même en ayant des amants.

Elle souhaite évidemment que nous restions ensemble, et veux que nous essayions au moins jusqu'à la fin de sa thérapie.

Elle m'a avouée qu'elle était consciente que les reproches qu'elle me fait sans cesse et sa jalousie ne sont que la conséquence de son état, que je ne suis absolument pas la cause de ses malheurs mais que c'est moi qui prends car je suis la personne la plus proche pour elle, ce qui correspond à un principe de psychologie avec les dépressifs, parait-il...

Autrement dit, je suis moyennement rassuré. Mais elle souhaite que nous restions ensemble, que nous tentions notre chance jusqu'au bout, et ma présence la rend moins malheureuse que mon absence. Par conséquent, partir empirerait les choses.

J'ai donc choisi de continuer à l'aider. Sabrina a vraiment la volonté de suivre sa psychanalyse, d'aller au bout, quelles qu'en soient les conséquences. Quant à moi, je vais essayer de moins dramatiser toutes les petites scènes qu'elle me fait parfois, de me détacher de tout ça. Je sais que ça fait longtemps que j'essaie, en vain, mais je crois que je peux y parvenir.

Comme me l'a fait remarquer Sabrina, nous sommes, quoi qu'il arrive, lié l'un a l'autre. A cause de Marie, et à cause de notre passé (j’aurais pu écrire "grâce" au lieu de "à cause", hum hum, révélateur...). Il nous sera donc très difficile de nous détacher l'un de l'autre. Mais si nous continuons à être malheureux ensemble, il faudra trouver une autre solution. Laquelle ?

Pour moi, ce qui me conviendrait actuellement, ce serait de vivre séparément, mais très proche géographiquement l'un de l'autre. Nous passerions les week-ends ensembles, nous pourrions continuer à avoir une vie sociale normale ensemble, mais nous pourrions ainsi éviter toutes les contraintes de la vie quotidienne. Je n'ai pas parlé de cette idée à Sabrina, car je ne l'ai pas sentie prête à ce genre de vie.

L'autre possibilité qui me conviendrait serait d'avoir une maîtresse. Cela compenserait la médiocrité de notre vie. D'ailleurs, si l'occasion se présente, je crois que je n'hésiterais pas longtemps. Et sans scrupules, après tout ce qui s'est passé. Evidemment, nous n'avons pas parlé de ça non plus, mais il valait mieux, car nous avons vu les dégâts qu'à fait l'Accord. D'ailleurs, même les psy conseillent de ne jamais avouer...

 

 

Mercredi 9 avril

Ecrire autrement

 

Mes entrées s’espacent de plus en plus. Et pourtant, j’écris de plus en plus. J’ai un peu mis de coté ce journal en ce moment, car je me suis lancé dans une écriture plus… imaginative. En effet, j’ai recommencé à rédiger des nouvelles et à me replonger dans le romanesque. Avant d’écrire ce journal, j’avais déjà créer quelques petites histoires. Evidemment, je ne les publierai jamais sur ce site ni nulle part ailleurs, car elles ne présentent absolument aucun intérêt pour les lecteurs. Je ne vais pas revenir là-dessus, mais mon style ne me permet pas de rendre un récit autre que le mien digne d’intérêt. Par contre, pour moi, inventer des histoires me procure un grand plaisir. Créer des personnages, se mettre dans leur peau, inventer des vies, des paysages, imaginer des sentiments, tout ça est absolument délectable. C’est une façon extraordinaire de s’évader, de rêver. Mais c’est aussi très personnel, et je n’ai donc pas tellement envie de le faire partager.

A part cela, Sabrina va beaucoup mieux et je pense que son problème venait en grande partie de ce foutu médicament. Evidemment, tout n’est pas totalement rose, mais nous allons essayer d’améliorer la situation.

On vient d’enlever le plâtre de Marie, et pour elle aussi, le moral va mieux.

Je passe pas mal de temps à chercher un logement à acheter. Mais les prix pratiqués dans cette ville sont exorbitants, et je crois qu’il va nous falloir être très patients.

Voilà ! C’est tout pour aujourd’hui ! Décidément, c’est assez inhabituel pour moi de faire des entrées aussi courtes. Mais si je réfléchis bien, je n’ai pas grand chose de plus à écrire. Je crois qu’il faut accepter cela : un diariste ressent parfois le besoin de se détacher de son journal. C’est nécessaire et certainement bénéfique. Ce n’est pas la première fois que je suis moins productif, et ce ne sera sans doute pas la dernière. Quoi qu’il en soit, je n’ai absolument pas envie d’arrêter. Ce journal est devenu tellement important dans ma vie. Sans exagérer, je crois que c’est une part de moi-même, quelque chose à laquelle je tiens terriblement. Ça peut paraître excessif, mais j’ai presque du mal à imaginer ma vie sans ce journal, sans ordinateur. J’espère que je ne suis pas dans un état de dépendance. Je ne crois pas puisque je ressens ces périodes où je suis moins productif.

En attendant que l’inspiration revienne, je vais retourner dans mon autre activité d’écriture qui me plait tant en ce moment…

 

 

 

 

 

 

Jeudi 10 avril 2002

Commerce et séduction

 

Voilà trois jours que je vais de rendez-vous en rendez-vous, dans des banques, des agences de crédit, des agences immobilières… Et la plupart du temps, je me retrouve dans un bureau face à une interlocutrice charmante. Evidemment, il m’arrive de tomber sur un mec un peu con, mais globalement, j’ai l’impression que la plupart des conseillers qui sont au contact du public sont des jolies femmes. Tenez, hier par exemple, je suis d’abord aller dans mon agence bancaire afin de rencontrer un conseiller. Et bien je suis tombé sur une conseillère ravissante, jeune, sympathique, souriante. Une heure plus tard, je vais dans une agence immobilière, et je tombe sur une  interlocutrice blonde et très jolie. Une demi-heure après, je vais prendre un rendez-vous dans une agence de crédit et je suis reçu à l’accueil par une brune délicieuse, jeune, avec qui j’ai pu plaisanter.

Et bien vous savez quoi ? Malgré le coté fastidieux de ces démarches, je suis rentré chez moi de bonne humeur. Et je me demande si l’accueil de ces personnes, leur sourire et leur charme n’y est pas pour quelque chose. J’ai essayé d’analyser un peu ce qui se passe chez un homme comme moi qui a affaire a des femmes ravissantes lors d’échanges commerciaux professionnels. A plusieurs reprises, je me suis demandé si elles étaient aussi sympathiques avec moi dans un but purement mercantile ou bien si une attirance réciproque était en train de s’établir. Je sais, vous devez trouver ce genre d’interrogation bien naïve, mais je ne suis pas dupe, je constate simplement que même en ayant connaissance des pratiques commerciales des vendeurs, on est toujours un peu victime de nos sentiments. Au fond de moi, entre deux banques qui me proposent les mêmes avantages, je ne peux m’empêcher d’avoir envie de conclure l’affaire avec la conseillère la plus charmante. C’est abominable ce que j’écris là, non ? Et c’est injuste !

En essayant de comprendre pourquoi j’ai tendance à réagir ainsi, je m’aperçois que l’attitude parfois très sympathique de la vendeuse est ambiguë et c’est cette ambiguïté qui fait naître en moi un espoir. Je m’explique : même si je sais qu’à 99% la commerciale est très gentille avec moi parce qu’elle veut me faire signer un contrat, je me dis qu’il existe une chance que son excès d’attention et de sympathie soit due à une attirance vers moi… autrement dit, je me dis qu’elle est peut-être ainsi parce que je lui plais et qu’elle n’est pas aussi agréable avec les autres clients.

Je sais qu’il est naïf de penser ça, mais je suis lucide car je sais qu’il est peu probable que ce soit le cas. En attendant, j’éprouve un certain plaisir à avoir une personne charmante comme interlocutrice. C’est peut-être aussi parce que parler avec une jolie femme est très agréable. On peut, tout en parlant très sérieusement, contempler ses yeux, sa bouche, sa chevelure, très librement.

Je sais comment se passent les entretiens commerciaux puisqu’il m’arrive très souvent d’en avoir dans ma galerie. Personnellement, j’ai du mal à tricher : je n’ai jamais la même attitude avec une femme qui me plait qu’avec un interlocuteur qui me laisse indifférent. J’ignore si cela se voit, je pense que c’est assez subtil. Mais lorsque je parle avec une jolie femme, il me vient automatiquement des idées tout en discutant. Je me dis qu’elle est belle, je cherche dans son visage ce qui fait son charme, j’essaie d’entrevoir dans son regard une lueur qui pourrait signifier que je lui plait un peu. Même si je crois déceler quelque chose de significatif, je ne montre pas pour autant le fait que je sois charmé, timidité oblige.

Parfois, je me demande si je suis normal d’être ainsi sensible à la beauté d’une femme à qui je parle, d’éprouver un certain plaisir simplement à la regarder. Quand je pense que je vais presque aller avec plaisir au prochain rendez-vous concernant un prêt immobilier, au cours duquel il va falloir parler chiffre et pourcentages, et tout ça simplement parce que la conseillère est ravissante ! Ça me rappelle certains cours auxquels j’allais volontiers lorsque j’étais gamin, simplement parce la prof était sexy J

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

jeudi 11 avril 2002

humour

 

10 h 30

Il a suffit que je me force à écrire une petite entrée mercredi afin d’expliquer pourquoi j’écrivais moins souvent dans ce journal pour retrouver le goût d’y faire de nouvelles entrées ! Comme on dit, « la faim vient en mangeant ». Il est vrai que je suis en vacances pendant quelques jours, ce qui me permet de consacrer un peu plus de temps à mes activités diaristiques (ça existe ce mot ???).

Comme je le fais de temps en temps, j’ai essayé de me plonger dans un nouveau journal depuis lundi. Et j’ai testé « Henri le Diariste ». J’ai accroché dès le départ pour son originalité : un style faussement maladroit, et surtout pas mal d’humour. Le seul problème, c’est qu’on se demande constamment ce qui est vrai dans tout ce qui est écrit. Il n’y a pas de différence entre son entrée du 1er avril et les autres. Et on navigue entre le deuxième degré et le récit sincère. Mais au fond, ce n’est pas très important de savoir si ce qui est écrit est vrai ou non, puisque le seul intérêt de ce journal est, à mon sens, de faire sourire. Et dans le genre, je trouve que c’est plutôt réussi. Il est vrai que je suis plutôt bon public et que j’ai toujours été attiré (pas sexuellement, je vous rassure) par les gens qui ont de l’humour. En fait, je suis même fasciné et intrigué par le mécanisme de l’humour. J’admire les comiques et ceux qui sont capables de faire rire tout un auditoire. Mais je suis incapable d’en faire autant. Enfin, n’exagérons rien, je suis capable d’avoir un bon mot et de faire rire (en général, lorsque j’ai un petit peu bu ;-)  ) et je suis plutôt gai dans la vie. Il m’arrive aussi d’amuser certaines femmes à qui je parle (comme lors d’entretiens concernant des prêts, cf. entrée précédente) mais je ne suis pas quelqu’un qu’on remarque pour son humour. Et je le déplore, j’aimerais pouvoir être plus drôle.

Prenons l’exemple de ce journal : quand on le compare à celui d’Henri le diariste, il paraît très austère, voir chiant. Evidemment, je pense qu’en contrepartie, il est plus sincère et plus sérieux. Mais j’aimerais pouvoir mettre un peu d’humour dans certaines entrées, pas grand chose, un petit mot, mais non, je n’y arrive pas. Il m’est arrivé d’écrire des choses assez drôles, notamment lorsque j’étais étudiant et que j’écrivais des articles dans un journal de l’école, mais depuis que j’ai vieilli, rien ne vient.  Est-ce la réalité de la vie qui m’a rendu ainsi ?

J’ai des cousins qui ne me ressemblent absolument pas dans ce domaine. Ils ont toujours été très drôles (ils sont trois frères et sœurs) et leurs parents aussi. A chaque fois qu’on se voit, on est certain de passer un bon moment. Même le jour de l’enterrement de mon père, ils avaient réussi à nous arracher quelques rires…

Je me suis toujours demandé d’où leur venait cet humour. Et je me suis rendu compte que cela faisait tout simplement partie de leur éducation, de leur culture. Lorsque l’un d’entre eux sort une connerie, nous rions tous sauf eux, du moins pas autant que nous. En fait, ils ont des expressions, des mots, des vannes qu’ils doivent ressasser depuis trente ans et qui font rire uniquement ceux qui les entendent pour la première fois. Mais c’est leur façon de parler, de vivre aussi. Ils ont une façon d’aborder la vie de façon légère, toujours sur le ton de la plaisanterie. Mais en plus de tout cela, on sent aussi qu’il existe chez eux une espèce de jeu ou de compétition qui consistent à être comique. Pendant un repas, chacun essaie de dire quelque chose de marrant. Ce n’est pas une obligation, mais sans doute une façon de communiquer, de dire « j’existe, je suis comme vous ».  Si dans certaines familles, les repas sont des moments où chacun essaie de se mettre en valeur en disant quelque chose d’intéressant ou d’intelligent, et bien dans la famille de cet oncle, c’est à celui qui dira la plus belle connerie J

Et je n’écris pas tout ça de façon péjorative, bien au contraire. D’ailleurs, je ne devrais pas comparer les  conversations dites « intelligentes » aux conversations drôles. Je trouve que l’humour est lié à l’intelligence, que c’en est une forme. On devrait même ajouter des questions permettant de mesurer le degré d’humour dans les tests d’intelligence. Et puis aussi des tests concernant les aptitudes artistiques. On a une conception de l’intelligence très restreinte dans le monde occidental. Les tests de QI, comme celui qui a été proposé l’autre soir sur M6 (et que j’ai fait, je le confesse, avec un score de 135, c’est pas trop mal, non ?) ne reflètent qu’une petite partie de l’intelligence. En particulier, cela mesure des aptitudes à la logique, presque essentiellement.

Pourtant, l’humour se base souvent sur des remarques extrêmement subtiles, et il fait appel à de grosses capacités de mémoire. Presque tous les soirs en ce moment, je regarde l’émission de Laurent Ruquier, « On a tout essayé », et même si cet animateur n’a pas toujours un humour que j’adore, je suis quand même effaré de constater qu’il est capable de sortir un mot (plus ou moins) amusant toutes les minutes en moyenne. La plupart du temps, son humour consiste à faire des jeux de mots à partir d’expressions de la langue française. On peut dire que ce n’est pas toujours très subtil et que c’est un humour un peu facile, mais ce qui est impressionnant, c’est de pouvoir faire ces jeux de mots aussi vite. Est-ce dû à une mémoire exceptionnelle, ou à un entraînement intensif, à une « culture » pratiquée depuis sa plus tendre enfance ?

Mes parents n’étaient pas particulièrement désopilants, et ni ma sœur ni moi ne le sommes devenus. Nous n’avons pas été habitués à dire des choses hilarantes pendant les repas. Mais ce n’est pas pour cela que nous avons été malheureux, bien au contraire. Cependant, j’aurais aimé être un petit peu plus cocasse, c’est toujours très utile dans la vie (notamment pour séduire les filles ;-)

Pour en revenir au journal d’Henri le diariste (que je vous conseille malgré tout, c’est assez court et très distrayant), certaines scènes étant tellement amusantes qu’on ne peut s’empêcher de penser à ce type de personne (qu’on a tous rencontré au moins une fois dans sa vie) et qui ont tendance à vous raconter toujours des histoires à dormir debout, mais avec tellement de talent et d’humour qu’on le laisse parler même si on ne croit qu’à moitié ce qu’il dit. J’imagine qu’il y a peut-être une part de vérité dans tout ce qu’il narre, mais cela pose néanmoins la question de la véracité de ce qu’on écrit dans un journal. Car nous mentons tous, plus ou moins, dans nos journaux, ne serait-ce que par les pseudos que nous utilisons, ou bien les lieux, enfin tout ce qui pourrait donner un indice sur notre vie et celles de ceux qui nous entourent. Et si on ajoute à cela qu’il est très facile de fabuler, on peut se demander s’il existe beaucoup de « faux journaux intimes ». 

On est vraiment obligé de tout remettre en cause aujourd’hui. Cela me fait penser à cette histoire des attentats du 11 septembre (ouah, quelle transition !), et des doutes qu’émettent certains journalistes, comme je l’avais signalé le mois dernier. Et bien depuis, d’autres journalistes et d’autres experts estiment qu’il y a bel et bien un avion qui s’est écrasé sur le pentagone. Vous pouvez aller lire certains témoignages ici. Franchement, on ne sait vraiment plus quoi penser. Comme disait Dutronc, « on nous cache tout, on nous dit rien »

 

16 h 10

 

Je reviens d’un rendez-vous dans une banque avec… un type. Pas du tout sympa, ni souriant, ni aimable. Franchement, j’ai pas du tout envie de signer un prêt chez lui. Je préfère largement la conseillère de l’autre jour ;-). D’autant plus que les prêts que ces deux banques proposent sont équivalents. Alors à tout choisir, autant faire affaire avec la plus charmante, non ?

 

 

21 h 00

je viens de finir la lecture du journal d’Henri le Diariste, et j’ai écouté notamment son interview : cette fois, plus de doute, c’est vraiment du second degré, et donc il s’agit bien d’un faux journal. Et ça ressemble vraiment à un gag d’étudiant. Mais c’est vraiment très drole, il faut l’avouer J

 

 

 

 

 

 

mercredi 17 avril 2002

Querelle

 

Cela fait trois jours que je suis chez ma mère, avec Marie. Je lui ai repeint ses volets et fait d’autres bricoles. J’étais vraiment bien ces derniers jours, très gai. Et puis ce soir, j’ai eu un petit accrochage avec ma mère. Oh, pas grand chose, mais ça m’a un peu perturbé. Tout a commencé par un reproche de ma mère concernant le temps que je passe sur mon ordinateur. Elle m’a dit qu’elle ne comprenait pas que je puisse passer autant de temps là dessus, qu’elle n’aurait jamais supporté un mari qui passe tant d’heures devant un écran. Et j’ai très mal encaissé ces remarques.

C’est vrai que je passe pas mal de temps depuis que je suis ici à écrire sur cette machine. En fait, je profite que Sabrina n’est pas là pour écrire le plus possible, vu qu’elle me fait des scènes de jalousie à chaque fois que j’allume mon PC. Donc, j’ai assez mal apprécié que ma mère, après ma femme, me fasse le même type de reproche.

Ensuite, ma mère passe son temps à ressasser des histoires anciennes, elle n’a aucun passe-temps, aucune passion, et lorsqu’elle m’a fait ce reproche, elle regardait une connerie à la télé, alors que j’écrivais une lettre à une lectrice. Donc, ça m’a énervé…

Juste après, elle a un peu craqué, elle m’a ressorti une histoire ancienne, complètement anachronique…

Pour être clair, aujourd’hui, j’ai à nouveau pris conscience de l’absence de mon père…

Toute la journée, en peignant les volets, en utilisant ses pinceaux, ses outils, je me suis dit que je faisais son travail. Et en voyant ma mère pleurer tout à l’heure, j’ai compris qu’il lui manquait…

Heureusement, on s’est réconcilié et l’incident est clos, mais j’ai le cœur un peu lourd quand même.

Et puis, outre l’absence de mon père, j’en ai marre de tous ces reproches concernant le temps que je passe sur mon ordi. Ce que je ne comprends pas, c’est qu’aucun des diaristes que je lis ne semble avoir ce problème alors que je suis presque sûr que je suis un de ceux qui passe le moins de temps sur ma machine. Je ne participe à aucun forum, je ne chat qu’une fois tous les six mois, je fais 8 ou 10 entrées par mois… Franchement, je ne suis pas un intoxiqué de l’informatique.

Enfin, je doute quand même un peu. Parfois, je me dis que tout ce temps que je passe sur un ordinateur me coupe de la vie réelle (la vie sur Internet n’est-elle pas aussi réelle ?), que je pourrais faire des choses plus concrètes, qu’on puisse voir, toucher. Et si je laissais tomber cette machine ?

Non, évidemment, je ne le ferai pas. Mais il faut que je justifie tout le temps que je passe devant l’écran, que les autres puissent connaître une partie de mes activités. Le problème, c’est qu’elles sont à 70% consacrées à mon journal et à ma correspondance… difficile de laisser les autres lire ce que j’écris.

Je suis un peu découragé par tout ça. Je constate une fois de plus que je reprends ce journal aujourd’hui alors que le moral ne va pas trop. Je ne l’ai pas fait les jours précédents alors que j’étais en pleine forme, heureux, joyeux. Décidément, je donne de moi une image assez négative dans ce journal. Du moins, je montre surtout mes moments difficiles, comme si j’avais besoin de les écrire ici pour m’en débarrasser. J’aimerais vous montrer autre chose de ma personnalité, car je suis plutôt gai dans la vie. Enfin ce ne sera pas pour ce soir. Je vais aller me coucher, et j’espère que ça ira mieux demain…

 

 

 

 

 

 

 

 

vendredi 19 avril 2002

Désirs

 

Ca s’est arrangé avec ma mère, même si je reste un peu inquiet de la savoir seule et un peu déprimée.

Nous sommes allés au resto hier soir avec Sabrina, Marie, Malika, son copain et sa fille. Auparavant, Malika était passée à la maison et nous avons bavardé (Sabrina était également là). Je ne sais pas pourquoi, mais je l’ai trouvée particulièrement belle hier soir. C’est peut-être parce qu’elle avait changé de coiffure, ou parce qu’elle n’était pas maquillée comme d’habitude. Toujours est-il que pendant toute la soirée, j’ai ressenti des choses bizarres à chaque fois que je la regardais. Et évidemment, comme par hasard, j’ai rêvé d’elle cette nuit… et évidemment, c’était un rêve plutôt… érotique. Bon, OK, je sens que vous insistez, je vais vous raconter ;-) Nous étions tous les deux allongés dans le même lit, et je lui caressais… les pieds ! Ben oui, j’y peux rien, on fait toujours des choses un peu absurdes dans les rêves :-). Reprenons : je lui caressais les pieds, et elle m’a pris ma main afin que mes caresses remontent un peu plus haut (je la comprends, ça ne devait pas être très excitant) , et petit à petit, ma main est montée, montée, montée, et je suis arrivé en haut de sa cuisse, et … Putain ! Le réveil de Marie qui sonne ! Elle a encore joué avec hier soir et elle n’a pas baissé le bouton ! C’est pas vrai ! Comment je vais faire pour reprendre mon rêve ?

Vous l’avez compris, je n’ai jamais pu continuer mes caresses virtuelles avec Malika, hélas, mille fois hélas :-(

Ce qui m’inquiète (enfin, c’est une façon de parler, car c’est tout de même très agréable) c’est que je réagis ainsi assez souvent en ce moment. Le week-end dernier par exemple, nous avons vu des amis de ma belle-sœur (qui vient de se trouver un copain, pfff, du coup, elle ne me fait plus aucun effet) et j’ai fait la connaissance d’une femme de 35 ans, d’un physique agréable, et surtout avec beaucoup de charme. En fait, j’ai repensé à elle pendant deux jours (et deux nuits).

Je ne sais pas ce que j’ai en ce moment, mais dès que je suis au contact d’une femme, je suis littéralement sous le charme. J’imagine que c’est la situation avec Sabrina et tout ce qui s’est passé avant qui me fait réagir ainsi. Auparavant, les femmes que je rencontrais ne me faisaient pas un tel effet. Ou bien je le refoulais. Aujourd’hui, la situation est différente, puisque je n’exclue pas d’avoir une relation extra-conjugale. Alors, chaque femme que je rencontre devient une maîtresse potentielle, ce qui fait naître certains fantasmes… Autrefois, je savais que les fantasmes resteraient fantasmes, et ils avaient donc moins d’ampleur qu’aujourd’hui.

Je me demande si Malika a déjà éprouvé une attirance physique comme la mienne. Je me demande si elle rêve de moi la nuit…

Je me souviens que je me posais les mêmes questions au sujet de Liu l’an dernier. Et elle rêvait bien de moi la nuit. :-)

Ce qui est ambigu avec Malika (et qui entretient donc le fantasme), c’est qu’elle me fait souvent des remarques un peu… troublantes. Je vous avais déjà raconté qu’elle me disait souvent que j’étais charmant, de façon amicale et en présence de Sabrina, et bien elle a recommencé hier. « Je trouve que tu as pris un peu de poids, que ça se voit au niveau du visage, mais tu restes tout à fait charmant » m’a-t-elle dit. Ça signifie donc que je lui plais, non ? Donc elle me désire un petit peu, non ? :-)

Peu importe, car c’est la meilleure amie de Sabrina et il ne se passera jamais rien entre elle et moi, cela compliquerait trop la situation.

N’empêche que ce n’est pas désagréable ce genre de petits jeux de la séduction et du désir ;-)

 

 

 

lundi 22 avril 2002

Honte d'être Français

 

7 h 45

Terrible jour que ce 21 avril... Hier soir, en voyant la tête de Le Pen apparaître juste après celle de Chirac, j'ai eu honte d'être Français...

J'ai honte d'avoir la même nationalité que ces 20% de gros cons qui votent pour un fasciste. Honte d'habiter au milieu de connards dont la cervelle ne dépasse pas celle d'une poule.

Mais j'ai honte aussi d'avoir sous-estimer le danger. Honte aussi de n'avoir pas pu voter (pour des questions bassement techniques). Honte de ne pas avoir compris, comme des millions de gens ici, qu'en votant pour des petits candidats sympathiques, comme Arlette, le facteur ou les verts, on dispersait nos voix et cela faisait le jeu de l'Affreux. Mais putain ! Comment se fait-il que les sondages n'aient pas vu que Le Pen pouvait passer ? Si on nous avait averti du moindre danger, nous aurions voté pour Jospin ou Chirac, c’est évident ! Mais il semblait tellement certain que ces deux là allaient se retrouver au deuxième tour, que l’on s’est dit qu’on pouvait donner quelques voix aux autres candidats, qui semblaient si honnêtes et différents... C'est incroyable qu'en 2002 on ne soit pas capable d'avoir des sondages fiables. Ou bien alors, c'est parce que les sondés n'osent pas dire qu'ils vont voter Le Pen, ils ont trop honte. Y'a de quoi, quels gros nases !

 

17h50

Je viens de faire un tour chez les autres diaristes : tous emploient le même mot : HONTE. Je me sens mal à l’aise, j’ai encore du mal à comprendre. Je ne suis pas tellement étonné qu’il y ait 20 % d’abrutis (pardon pour tous ces termes que j’emploie les concernant, mais ces mots ne seront jamais aussi vulgaires que les idées pour lesquels ils votent) qui adhèrent à des idées racistes. Dans la petite ville où j’ai grandi, ils sont même 30 %. Oui, cela signifie que lorsque je me promène dans cette ville, une personne sur trois que je croise dans la rue a voté Le Pen. 

Je sais que beaucoup d’entre eux ne prennent pas la pleine mesure de leur acte, mais est-ce une raison pour ne pas leur en vouloir ? Ils ont pourtant appris à l’école qu’Hitler a été élu démocratiquement, que les Allemands n’imaginaient pas qu’il pourrait devenir le dictateur qu’il est devenu.  Le Pen est sans doute moins dangereux qu’Hitler, je n’en sais rien, mais dans le doute, il faut s’abstenir de lui donner le moindre pouvoir. Sinon à quoi sert l’Histoire ?

Je suis partisan de la diabolisation de Le Pen (c’est son terme préféré à cet ignoble ). Il faut que ceux qui ont voté pour lui comprennent la gravité de leurs actes. Il faut les culpabiliser, qu’ils comprennent qu’ils mettent en danger notre bonheur à tous. On culpabilise bien les chauffards qui mettent la vie d’autrui en péril.

Je suis rassuré d’avoir lu toutes ces réactions semblables à la mienne sur Internet. A l’Assoce, tout le monde n’était pas aussi abasourdi. Certains gardaient même le sourire, semblaient ne pas se rendre compte de ce qui se passe.

Je continue de m’interroger sur ces foutus sondages. Quels étaient les dernières prévisions ? Il faut que j’aille voir sur Internet. N’y avait-il pas des indices qui pouvait laisser présager un tel cataclysme ?

Avec un peu de recul, je me dis que nous allons peut-être éviter un président fasciste, mais qu’au moins, cette histoire nous aura servi de leçon. Nous sommes maintenant très nombreux à avoir compris qu’il faut éviter de voter pour les petits partis, que ce type de vote contestataire qui a pour but de vouloir faire entendre certaines idées que véhiculent les verts ou l’extrême gauche, est dangereux. D’ailleurs, je trouvais que Jospin avait plutôt été bon (sans doute grâce au climat économique favorable) et qu’il semblait honnête. Finalement, on va devoir choisir entre un escroc et un facho. Mais tant pis, je préfère encore le voleur…

Hier soir, lorsque nous étions devant la télé à 20 H, Marie a pleuré. Sans doute devant nos réactions catastrophées. Peut-être aussi parce qu’elle se souvenait de ce que je lui avais dit au sujet de Le Pen et du danger qu’il représente. Si tous les Français pouvaient avoir au moins l’intelligence de ma fille…

 

 

 

 

 

mardi 23 avril 2002

Agressivité défensive

 

Je commence à me remettre un peu du K.O. de dimanche. Je reprends même espoir en voyant ces manifestations pacifistes spontanées qui ont lieu un peu partout en France. J’ai vu un sondage dans lequel on mentionnait qu’une très faible proportion de jeunes de 18 à 24 % votaient FN. C’est rassurant pour notre avenir. Et puis il y a toutes ces nouvelles adhésions au parti socialiste qui se font, et tous ces gens qui s’en veulent d’avoir voté pour les petits partis et avoir ainsi fait le jeu des lepénistes. Je crois et j’espère que tout cela ne sera qu’une leçon monumentale qui nous permettra d’éviter certaines erreurs dans l’avenir. J’en suis persuadé. Evidemment, nous allons payer le prix, et fort cher : cinq ans de Chirac :-(  mais tant pis, c’est un moindre mal. Et puis les élections législatives risquent de réserver d’autres surprises, et j’espère des bonnes cette fois…

Je retrouve un peu le moral, mais je ne décolère par pour autant, non contre les électeurs du FN (ceux-là, y’a plus rien à faire pour eux hélas), mais contre les instituts de sondage et contre les médias. J’ai appris que les chiffres des intentions de vote pour Le Pen étaient systématiquement réévalués car les instituts savent depuis longtemps que les sondés n’osent pas avouer leur vote pour le FN. Ainsi, si le sondage donne 5% pour Le Pen, l’institut réajuste en… 10 % !!! Et leur marge d’erreur est souvent de 3 points. Ils annoncent d’ailleurs ces marges aux médias, mais ceux-ci ne veulent absolument pas donner des résultats du genre : « Le Pen devrait avoir entre 12 et 17 %, Jospin entre 15 et 20 %, etc ». C’est trop imprécis, ça fait pas sérieux et du coup, ils donnent la valeur centrale… avec les conséquences qu’on connaît maintenant.

Evidemment, j’ai aussi ma part de responsabilité, car d’abord je n’ai pas pu voter même si c’est vraiment indépendamment de ma volonté, et si j’avais voté, j’aurais donné ma voix à un petit parti. Et je m’en serais donc mordu les doigts…

J’ai fait un petit tour chez les autres diaristes : on parle toujours de ces élections, avec plus ou moins de virulence. Seul l’Idéaliste reste très modéré. Son entrée est d’ailleurs intéressante car elle évoque la violence que semble avoir certains vis à vis du FN… Et cela m’a fait réfléchir, notamment à cause de mon entrée d’hier qui, je l’ai constaté, était assez.. emportée. Pourtant, je ne regrette pas ce que j’ai écrit, car je pense que mes propos correspondent vraiment à mon caractère, du moins à certaines réactions que je peux avoir parfois, et notamment à ma colère de dimanche et lundi. Je suis quelqu’un de très calme, posé, réservé, mais il y a certaines choses qui me font vraiment sortir de mes gonds. Par exemple, je m’emporte dès que je vois quelqu’un commettre des imprudences en voiture. Je ne supporte pas cela. Et j’ai la même réaction vis-à-vis des votes FN. Pourtant, je ne pourrais jamais faire de mal à un électeur de Le Pen, ni à un chauffard. Sauf, sauf… sauf s’il était la cause d’un accident envers un proche. Car mon problème est là : lorsque je vois un mec bourré prendre le volant, je me dis que je pourrais le croiser un jour, ou Sabrina avec Marie, et être victime de cet abruti. Et pour le FN, c’est la même chose : je me dis qu’à cause d’inconscients et d’irresponsables pareils, je pourrais un jour ne plus avoir la liberté de m’exprimer librement, et je serais peut-être même obligé de partir. Car les origines de Sabrina, et par conséquent de Marie, font que notre famille serait en première ligne des fascistes au pouvoir. Et je me sens donc agressé à l’idée de pouvoir être la victime potentielle d’un type qui, par ses idées ou par son attitude au volant, pourrait briser ma vie ou celle de mes proches. C’est cela qui me rend aussi virulent dans mes propos. Lorsque je vois un ivrogne prendre le volant, je ne peux m’empêcher de voir à travers lui un assassin, irresponsable certes, mais assassin tout de même. Lorsque je vois un électeur du Front National, je ne peux m’empêcher de voir… non, je ne vais pas l’écrire, car ma comparaison serait exagérée, et la réalité est sûrement plus complexe.

Evidemment, je  sais qu’ils ne pourront pas arriver un jour à la présidence de la république, du moins je ne veux pas le croire. Et même si Le Pen était élu, nous aurions peut-être un gouvernement semblable à celui qui gouverne en Autriche. Mais il y a des doutes. De même que très souvent, un type bourré rentre chez lui sans encombre en voiture, il y a toujours de gros risques qu’il tue quelqu’un. Et bien je ne veux pas courir ces risques. Je ne veux pas qu’on joue avec mon bonheur, avec ma vie, avec l’avenir de ma fille. Alors tout cela me rend agressif, comme peut l’être n’importe quelle personne qui sent sa vie en danger. C’est une réaction tout à fait normale, une réaction de défense.

J’ai discuté encore aujourd’hui avec certaines personnes qui veulent dédramatiser la situation, qui pensent que le péril n’est pas si grand. Ils ont sans doute raison, ils doivent être moins craintifs que moi. Il y en a même qui pensent que diaboliser Le Pen lui rend service ! Parler du Front National incite les gens à voter pour ce parti !!!

J’ai été très marqué par une pièce de Ionesco que j’ai lue lorsque j’étais lycéen : il s’agit de « Rhinocéros ». Pour ceux qui ne connaissent pas, c’est l’histoire d’un mec (comme dirait Coluche) qui voit tout son entourage se transformer en rhinocéros. Au début, les premiers qui se transforment ainsi ont honte de leur nouvelle apparence, et petit à petit, c’est le contraire qui se produit : l’aspect « rhinocéros » devient plus prisé que l’aspect humain, et tout le monde se transforme en rhinocéros, jusqu’à ce que les rares qui restent humains deviennent totalement minoritaires et rejetés. J’ai peut-être un peu transformé cette histoire, mais c’est ainsi qu’elle est restée dans ma mémoire. Je pense à cette métaphore de la montée du fascisme à chaque fois que j’entends des gens qui semblent négliger la montée du FN, qui la banalisent. Je sais que je m’alarme peut-être trop, mais putain ! Les conséquences d’une sous-estimation du risque pourraient être catastrophiques. On n’a pas le droit de ne pas prendre au sérieux un tel cancer.

Désolé, je n’arrive pas à être modéré dans mes propos : résumons les termes que j’ai employés depuis deux jours : « cons, gros cons, connards, gros nases, abrutis, diabolisation, assassins, irresponsables, catastrophique, cancer… ». Et ben :-( C’est pas très littéraire tout ça ! Et c’est pas bien ! Non, pas bien du tout. Je devrais être plus compréhensif envers ces gens qui votent Le Pen par désespoir, ou par ignorance. Mais j’ai beaucoup de mal, je dois le reconnaître. Je ne leur ferai aucun mal, bien évidemment, mais je ne peux m’empêcher d’avoir un certain mépris. Même si je vivais dans des conditions très précaires, même si j’avais été victime d’agressions ou de vols répétés, pourrais-je en venir à voter pour un mec comme Le Pen. Non, c’est évident, car je sais que la situation serait forcément pire, que renvoyer tous les Arabes chez eux ou les mettre dans des ghettos (ne le sont-ils pas déjà ?) aboutirait aux horreurs que l’on a pu vivre (pas moi heureusement) dans les années 40. Je peux comprendre qu’on puisse être raciste même si je combats cette idée qui me dégoute, il s’agit d’une idée hélas humaine, mais vouloir voter pour un type qui pourrait mettre le pays dans le chaos total, qui enlèverait nos libertés, ce n’est pas possible. Si des gens sont désespérés au point de préférer la dictature à leurs problèmes d’insécurité, c’est qu’ils ont un coté suicidaire.

Oui, je sais, ils ne sont pas suicidaires mais simplement ignorants… Pourtant, même dans les films hollywoodiens bas de gamme (pléonasme ?;-) je plaisante  , quoi que… ) on parle du nazisme, des dangers du racisme. On ne peut pas ignorer tout ce qui s’est passé au siècle dernier.

Vote sanction alors ? Oui, sans doute, et c’est ce que je vais essayer de me mettre dans la tête pour comprendre comment 20 % de mes concitoyens ont pu voter ainsi. Ça va me rassurer, même si je leur en veux de jouer ainsi avec notre liberté, et d’utiliser des idées aussi basses et honteuses pour exprimer leur ras-le-bol. Nous n’avons peut-être pas tout à fait les mêmes valeurs…

Et puis non, c’est vrai, je réagis mal. Au fond, ils ne peuvent pas comprendre. Ceux qu’il faut mépriser, ce sont les dirigeants de ce parti qui exploitent la détresse de ces pauvre gens. Ben ouais, pour ceux-là, j’avoue ressentir une certaine… colère, rancune, enfin quelque chose de ce genre.

Au fond, je crois que nous sommes des millions en France à être en colère. En colère contre nous, et contre les autres aussi, ceux qui veulent détruire sciemment ou non, notre beau pays. Il faut être en colère, surtout si elle est fondée. Il faut la contrôler, et ne pas la transformer en violence ni en haine. Mais il ne faut surtout pas rester insensible et minimiser le problème…

 

 

 

 

 

Vendredi 26 avril 2002

Sans clés

 

Mauvaise surprise en rentrant ce midi : j'ai oublié mes clés ce matin en partant. Je ne peux donc pas rentrez chez moi. Et je ne parviens pas à joindre Sabrina, donc je vais être obligé d'attendre son retour qui est prévu...dans 3 heures ! Je vais donc devoir m'occuper pendant tout ce temps... Je suis allé m'acheter à manger et j'ai dégusté mes chips dans la voiture, sur un parking d'hypermarché. Un peu déprimant tout ça. Heureusement, mon ordinateur de poche est là, à mon secours. Comme j'ai été bien inspiré le jour où je l'ai acheté. Certes, ce n'est pas aussi pratique qu'un portable, mais c'est tellement petit que je peux l'emporter partout et l'avoir toujours avec moi. Et quand on se retrouve démuni comme moi aujourd'hui, quel bonheur :-) Car en plus de cela, je suis sur un parking ombragé, il fait 28 ° dehors et avec les vitres ouvertes, le petit courant d'air est bien agréable. J'ai plusieurs CD dans la voiture, du jazz principalement. J'ai à boire, à manger, je suis bien assis. Finalement, je suis presque aussi bien qu'à la maison... Evidemment, je ne peux pas consulter mon courrier puisque je n'ai ai de connexion.

Parfois, je m'inquiète un peu de la dépendance que je peux avoir vis à vis de l'écriture. J'imagine que j'ai dû écrire l'équivalent de plusieurs centaines de pages papier  depuis que je tiens ce journal. Et je ne m'en lasse pas, j'en redemande même ! J'imagine que ça doit être le cas de tous les diaristes. Parfois, je me demande si cette activité de plus en plus prenante ne me coupe pas de la vraie vie. Oui, je sais, écrire n'a rien d'irréel, mais je pense que vous comprenez ce que je veux dire. Qu'aurais-je donc pu faire si je n'avais pas ordi de poche ? Je serais peut-être allé à la bibliothèque. Ou j’aurais acheté une revue pour passer le temps. Ou je serais allé voir Malika qui travaille à deux pas d'ici. Enfin peut-être pas, j'aurais eu peur de la déranger dans son boulot. Je serais allé dans des magasins. Ou dans un café.

Enfin bref, je ne pense pas que j'aurais fait quelque chose de plus enrichissant qu'écrire mon journal...

Encore plus de deux heures à tenir...

Je regarde les gens passer avec leurs chariots. Les femmes ont déjà leurs tenues d'été : décolletés, robes légères et moulantes. Toutes celles que je vois sont ravissantes, à quelques exceptions près. Je ne regardais jamais les autres femmes avant, du moins pas avec autant d'intérêt. Evidemment, si une très jolie fille passait, je ne détournais pas mon regard (sauf si Sabrina était là) mais en général je n’y prêtais guère attention. Sans doute parce qu'avec mon idéal de fidélité, je pensais ne jamais aimer d'autre femme que la mienne. Alors je  préférais ne pas penser aux autres, pour ne pas les désirer, et donc je ne les regardais pas. Et je ne me posais pas de questions, j'avais admis cette idée. Je savais qu'en échange d'une telle sagesse j'aurais la vie de famille dont je rêvais...

Ceux qui me lisent depuis le début savent que j'ai beaucoup évolué depuis 1 an et demi, à cause de Sabrina. Aujourd'hui, je sais que je ne serais pas fidèle à Sabrina. De toute façon la fidélité n'a plus aucune signification entre nous. Alors je regarde les femmes passer et je me dis que j'aimerais peut-être un jour celle-là, ou celle-ci. Je me demande si je plairais à cette autre, si j'oserais aborder celle en face, ou sourire à celle à coté. Et toutes ces femmes, ne sont-elles pas dans la même situation que moi ? Celle qui vient de passer a peut-être été trompée par son mari, et elle cherche sans doute un amant pour se venger. Celle en rouge rêve peut-être d'un autre homme à aimer le soir en s'endormant. La brune là, est peut-être divorcée, la grande rousse est peut-être veuve...

Tout serait tellement plus simple si on pouvait lire dans les pensées...

Tiens ! Un couple, ça change. Ils sont beaux, ils ont une petite fille de l'âge de Marie. Ils semblent heureux, enfin je crois. Oui, c'est ça que je voudrais. Bah ! Tout ça ne veut rien dire : nous leur ressemblons, et ce n'est pas pour ça que notre vie est enviable.

J'ai souvent le vertige lorsque je regarde des gens passer ainsi. Quand je vois la complexité de ma vie, les difficultés que j'ai à me comprendre, je suis effaré de penser que chaque être que je vois passer sous mes yeux à des problèmes tout aussi complexes, une vie tout aussi riche qui vaudrait largement la mienne s'il la racontait dans un cyberjournal. Et il y en a 6 milliards ainsi ! C'est vertigineux ! Et combien y en a t-il qui pensent la même chose que moi aujourd'hui ? Combien de femmes sont-elles en trains de regarder des hommes passer dans la rue en se demandant si untel ferait un bon amant ?

Je me demande si je choque mes lecteurs lorsque j'écris ouvertement que je pense que je tromperais Sabrina dans quelques semaines, quelques mois ou quelques années. Encore une fois, je ne devrais pas utiliser le terme "tromper" car ça n'a plus vraiment de sens pour moi aujourd'hui. Et puis je ne la "tromperais" sans doute pas puisque je pense que nous serons séparés avant. Oui, j'en suis de plus en plus persuadé. Nous avons trop de mal à vivre ensemble, à nous supporter dans le quotidien.  Mais nous avons besoin de rester ensemble, liés, mari et femme. C'est pour cela que je me demande de plus en plus si nous ne devrions pas vivre séparés mais proches. Chacun son appartement, chacun sa petite vie et ses petites manies. Plus de compte à rendre, plus de scène de jalousie (rêvons un peu).

Evidemment, il y aurait le problème de Marie. Mais si elle peut aller chez l'un ou l'autre en moins de 5 minutes, ça ne devrait pas être trop traumatisant.

Je verrais Sabrina le dimanche, nous pourrions sortir ensemble, elle serait comme une maîtresse, je ne la verrais que sous ses bons cotés, et elle aussi.

Nous aurions dû faire cela depuis un an. Pardon aux lecteurs qui me l'avaient conseillé et que je n'ai pas écoutés...

Bon, je vais changer de parking, plus qu'une heure et demie à tenir...

15 h 45

Petit tour dans quelques magasins... Rien d'intéressant à acheter (tant mieux dans un sens). Encore trois quarts d'heure à patienter... Heureusement, le temps se couvre, il ne fait plus que 26 °C...