André Thomann
in Le Libre Penseur, Périodique Romand Laïque et Indépendant, n° 100, Mars 1999.
On sait que le libéralisme économique vit en ce moment
des instants difficiles. Le manque d'enthousiasme des consommateurs, la
crise asiatique ont prélevé leur tribut. Si bien que ces
messieurs, avec de l'eau jusqu'au cou, seule la tête dépasse,
supplient l'état honni de leur lancer une bouée. (Maman,
je me noie, au secours !) On laissera ces faux jetons à leur triste
sort, tout en nous rappelant que c'est aussi le nôtre.
Il en va tout autrement des multinationales spirituelles, qui prospèrent,
merci pour elles, mais se livrent une guerre inexpiable, merci pour nous.
Cela ne manque pas de piquant. Il se trouve ainsi que l'opposition au libéralisme
forcené nous vient d'une source qu'on attendait pas. Jipi deux,
dans une de ses parlottes hebdomadaires, s'est plaint qu'il y ait de plus
en plus d'adeptes de la réincarnation, au détriment de la
résurrection. Suivez mon regard : le coupable, c'est cet autre grand
clown médiatique, le Dalaï Lama. l'Eglise catholique, qui a
toujours été pour une suppression des frontières pour
pouvoir à l'aise exporter ses produits, se trouve toute bête
lorsqu'elle se rend compte qu'une frontière perméable, cela
va dans les deux sens. Exemple : les montres suisses peuvent être
vendues à Moscou, en revanche, c'est le cas de le dire, la mafia
tchétchène propose ses produits douteux, dope, putes et argent
sale en Suisse. Ce sont les lois du marché et jusqu'à une
époque récente, les tenants du libéralisme nous prouvaient
que c'étaient les meilleurs.
Qui gagnera de Kid Wojtyla ou de Battling Dalaï, les paris sont
ouverts. Rien n'empêche le turbulent tibétain de proposer
une OPA sur l'ECAR (nous vivons à l'époque des sigles, il
s'agit de l'Eglise Catholique, Apostolique et Romaine). Il s'agit d'un
marché immense dont les gagne-petit du type Novartis, UBS et autres,
n'ont aucune idée des dimensions. Ce sont out simplement nos carcasses
mortelles qui sont en jeu. Comme disait Big-Mac (Mahon) dans un contexte
et une orthograohe différents : "Que d'os, que d'os !". Pour ce
qui nous concerne, que le meilleur gagne.