Unité 2 : Les sociétés humaines face aux risques naturels

 

 

Les risques définissent des dangers que les sociétés doivent prendre en compte dans leurs choix d’aménagement et de gestion des milieux. L es catastrophes ne doivent pas être confondues avec les risques car elles sont des risques devenus réalités qui s’analysent en terme de coût humain et économiques et de réactions des sociétés.

 

Etude multiscalaire :

·        A petite échelle : inégale répartition liée aux facteurs naturels, inégal bilan des catastrophes selon les niveaux de développement.

·        A grande échelle : rôle des sociétés humaines dans l’aggravation des risques naturels et vulnérabilité des pays riches à ce niveau.

 

Trois thèmes se dégagent :

·        Répartition des zones à risques au niveau mondial (faire la carte)

·        Implantation humaine : activités et risques

·        L’inégale réponse des sociétés humaines face aux risques.

 

Le 17 janvier 1995, un séisme de forte amplitude dévaste la région très urbanisée du Kansai, détruisant notamment la ville de Kobe. Le bilan s’élève à 5000 morts, ce qui en fait le tremblement de terre le plus meurtrier depuis celui qui avait détruit Tokyo en 1923. Les lenteurs des secours sont dénoncées.

 

Figure 1: carte du Japon méridional.

Document 1 :  le monde 24/03/1995 

« La société japonaise est encore sous le choc du séisme qui a ravagé la ville de Kobe, le mardi 17 janvier 1995 au petit matin. En témoigne, entre autres, la floraison d’ouvrages sur le sujet : comment survivre en cas de séisme, sous forme de bande dessinée ; la bible de la survie, par un japonais qui a servi dans la légion étrangère ; Que faire lors du grand séisme ?; le four du grand tremblement de terre de Tokyo ; description des conséquences d’un tremblement de terre à Tokyo…Dans les grandes librairies de la capitale nippone, des présentoirs spéciaux sont consacrés aux livres sur les séismes et plus particulièrement, à celui que tout le monde craint, sous Tokyo. »

 

Document 2 : les effets du tremblement de terre de Kobe in le point, 11/03/1995.

« Près de 100 milliards de $ évaporés en quelques secondes ou, en d’autres termes, près de la moitié du budget de l’Etat français disparu dans les décombres : la facture du tremblement de terre de Kobe est pharaonique. Mais deux mois après ce désastre, alors que les experts n’ont toujours pas terminé l’évaluation précise de la catastrophe de Hanshin, les économistes et les instituts de recherche se disputent paradoxalement sur l’estimation du formidable coup de fouet provoqué par l’énorme programme de reconstruction rendu nécessaire. Avec même 2% voire 3% de hausse du PIB dans les ou trois prochaines années, à écouter les pronostics du très sérieux institut de conjoncture japonais Nomura, le tremblement de terre de Kobe va en effet rapporter plus qu’il n’a coûté à l’économie  du pays. Même pour les compagnies d ‘assurances, la facture est modique. Seulement 3% des habitants avaient eu le soin de prendre une police d’assurance contre le risque sismique (elles sont trop chères). […] C’est le gouvernement japonais qui prendra, en fait, la plus grande partie de la charge financière de la catastrophe. »

 

le cas d’un pays en développement :

 

Document 1 :

Un séisme d'une magnitude de 6,7 sur l'échelle de Richter, a frappé mardi matin 17-08 sept provinces du nord-ouest et du centre de la Turquie et notamment la région de la mer de Marmara. L'épicentre se trouve dans la région d'Izmit (province de Koecali). Le foyer a été localisé à une faible profondeur (10 à 20 kilomètres). Après la secousse principale, plus de deux cents répliques ont été ressenties.

D'après Nicole Pope, Le Monde - 18-08-1999.

Document 2 :

Un désastre national

Le bilan du séisme de Turquie s'élèverait à près de 30 000 morts, 40 000 blessés et plus d'un demi-million de sans-abri. (…)Un tiers de la population du pays vivait dans la zone affectée par le tremblement de terre. La famille " étendue " (parents, oncles, beaux-frères et cousins éloignés) demeure le cœur de la société locale et le désastre a touché directement un nombre impressionnant de citoyens, toutes couches sociales confondues. (…) Le séisme va miner un peu plus une économie déjà durement touchée par la crise russe(1) et frappée par la désertion des touristes. Le pays connaît une croissance très ralentie, qui ne devrait s'accélérer que lentement en raison de la situation du commerce international jugeait, à la mi-juillet, l'OCDE dans une étude consacrée à la Turquie. Il est certain que les prévisions économiques de l'OCDE, déjà peu optimistes, devront être révisées à la baisse(2). Le séisme a frappé au cœur de l'économie nationale, dans la région où sont concentrées les principales industries(3), notamment le raffinage et la pétrochimie. Istanbul à elle seule fournissait en 1997, 22,5% du PIB national et la province d'Izmit-Kocaeli concentre 15% de l'industrie, 5% du total des exportations et 5% du PIB.

A Izmit : C'est dans cette ville industrielle densément peuplée que le séisme a fait le plus de dégâts. Des dizaines de grands immeubles résidentiels se sont écroulés comme des châteaux de cartes. Au centre de la ville, la route est désormais ondulée et un cratère profond s'est creusé. Certains bâtiments ont été réduits à néant, alors que l'immeuble voisin demeure intact. Des immeubles entiers se sont inclinés comme des dominos, alors que d'autres semblent agenouillés, penchés comme la tour de Pise. Des fissures profondes et des dégâts structurels rendent également de nombreux bâtiments, apparemment intacts, inhabitables. (…) Le tremblement de terre, qui a détruit un pont routier près d'Izmit a également provoqué un incendie dans une raffinerie de pétrole de la compagnie Tupras, la plus importante du pays(4). On craint des risques de pénurie de carburant.

A Golçuk : Dans cette ville de 75 000 habitants sur la mer de Marmara, 10 000 personnes se sont trouvées prisonnières des immeubles et des maisons écroulés. Dans le port qui abrite l'une des plus importantes bases navales de Turquie, plus de 80 marins ont été ensevelis lorsque leurs baraquements se sont effondrés alors qu'ils dormaient. Au total, les autorités ont recensé plus de 100 tués et quelques mille blessés.

A Yalova : En face du stade, un quartier sinistré : des bâtiments de luxe, tout neufs, se sont écroulés avant même d'avoir été occupés.

A Ciftlikbay : Des villages de vacances sont alignés le long de la côte. De nombreux Stambouliotes, ainsi que des habitants d'Izmit ou de Bursa y ont des résidences secondaires. Le tremblement de terre a mis une fin brutale aux vacances de beaucoup d'entre eux. Deux immeubles de 45 appartements se sont écroulés. C'était il y a quelques jours un paradis estival. Aujourd'hui, à l'entrée du village, plusieurs véhicules sont parqués, des cercueils sur le toit : les survivants sont venus chercher leurs proches pour les enterrer.

Articles divers du journal Le Monde (éditions du 18 au 25 août 1999) des journalistes Nicole Pope et Babette Stern.

(1) La Turquie a succombé à la défiance généralisée des investisseurs envers les pays émergents suite à la crise russe en août 1998.

(2) Pour l'ensemble de 1999, les économistes prévoyaient une croissance de 1,4%, après une hausse de 2,8% en 1998.

(3) Les sept provinces touchées hébergent plus de 45% de l'industrie turque et représentent le tiers du PIB total.

(4) Elle produisait 86% de la consommation pétrolière nationale.

Document 3

Le tremblement de terre d'Izmit n'a pas surpris les spécialistes. " On sait que la région d'Istanbul est, de manière récurrente, soumise à des séismes de forte intensité " indique Michel Granet, directeur de l'Institut de physique du globe de Strasbourg.

La Turquie est traversée par la faille nord-anatolienne qui coulisse sous l'effet de la remontée vers le nord de la plaque arabique, responsable de la formation de la chaîne du Caucase. Cette faille coupe en deux le territoire, le nord se déplaçant vers l'est , tandis que le sud est poussé vers l'ouest. Les séismes résultent du relâchement brusque de formidables contraintes accumulées le long de cette faille. Plus de 90% du territoire turc est ainsi situé sur des failles sismiques et la région d'Istanbul, la plus densément peuplée du pays est donc particulièrement vulnérable.

Le tremblement du 17 août 1999 s'inscrit donc dans une série d'événements telluriques catastrophiques qui se sont succédé d'est en ouest à travers la Turquie depuis 60 ans, comme une série de dominos renversés les uns après les autres (…) Depuis 1939, date de la catastrophe d'Erzincan (45 000 morts), les séismes les plus puissants ont eu lieu toujours plus à l'ouest. (…) Pour la plupart des spécialistes, la région d'Izmit était la prochaine étape, une " lacune sismique " où les tensions résultant des précédentes secousses s'étaient accumulées (…) Mais plus longue est l'attente, plus forte risque d'être la décharge d'énergie. Le séisme majeur récent datait de 1509.

D'après Le Monde, article d'Hervé Morin des 18 et 19 août 1999

 Document 4

La presse se fait l'écho de l'indignation de la population et accuse les dirigeants d'avoir laissé construire des bâtiments hors des normes et d'être responsables du manque de moyens de secours.

(…) Lorsque le désastre annoncé a eu lieu, aux premières heures de la journée du mardi 17 août, il a une fois de plus pris de cours les autorités. Les désastres naturels sont fréquents en Turquie : en 1998, plus de 140 morts à Adana, 600 en 1992 à Erzincan, déjà frappée par un séisme particulièrement meurtrier en 1939 (45 000 morts).

(…) Pourtant, chaque fois, les secours sont insuffisants et les équipements nécessaires au déblaiement des décombres et au sauvetage des survivants ne sont pas disponibles. A Izmit, plusieurs heures après le séisme, les seuls sauveteurs qui s'affairaient autour des décombres étaient des civils qui creusaient à mains nues. Il a fallu des heures avant que les équipes professionnelles soient déployées.

(…) Mercredi 18 août, la presse turque exprimait une fois de plus l'indignation générale : " Le pays est sans responsable ", titrait le quotidien Milliyet. (…) Elevés dans le concept d'un Etat paternaliste qui, d'une part, dicte à ses citoyens une façon de penser et d'agir mais, en contre partie , veille sur eux, les Turcs ont été obligés de constater qu'en ces jours de crise, l'Etat ne s'est pas montré à la hauteur de leurs attentes.

(…) Mais les journaux ne s'en sont pas pris à la seule insuffisance des moyens de secours. " Meurtriers " accusait à la " Une " le quotidien Hürriyet qui dénonçait les constructeurs irresponsables qui, pour augmenter leurs bénéfices utilisent des matériaux bon marché et rognent sur la qualité et la quantité de ciment et de fer nécessaires à la consolidation des bâtiments, ignorant les normes de sécurité indispensables dans un région sismiquement active.

(.. .) De nombreuses victimes ont aussi péri à cause de l'incompétence et de la corruption, soulignaient les mêmes journaux. De fait, à Istanbul, ce sont les banlieues modestes, où de nombreux immeubles sont construits illégalement qui ont subi les plus importants dégâts.

Articles divers du journal Le Monde, éditions du 19 août au 25 août

 

 

 

Vocabulaire

Foyer : Point en profondeur où se produit le choc initial et la rupture de roches.

Épicentre : Point situé à la surface du sol à la verticale du foyer.

Magnitude : Énergie libérée au foyer du séisme . Une magnitude de 5 correspond à l'énergie dégagée par la bombe d'Hiroshima.

Échelle de Richter : Échelle des magnitudes comptant neuf degrés et suivant une progression logarithmique. Un séisme de magnitude 6 est dix fois plus fort qu'un séisme de magnitude 5.

Répliques : Secousses consécutives au choc initial. Elles peuvent s'étaler sur près d'un mois.