Mois de janvier 2001 (2eme quinzaine)


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Mercredi 17 janvier 2001

Interprétation de rêves

 

 

J'essaye parfois de ne pas me centrer sur des sujets qui ne concernent que moi. Mais, après tout, ce journal, bien que lu, reste mon journal intime. Je ne vais donc pas m'empêcher d'écrire ce qui me plaît, ce que j'aurais inscrit sur mon journal papier. Sinon, je n'ai plus qu'à reprendre ce journal papier...

 

Bon, voila pour mon coté j'ai-toujours-besoin-de-me-justifier.

 

Donc, rubrique "intime" ce matin.

J'ai fait un court rêve avec Laura cette nuit. Elle venait rejoindre, avec des amis communs, une petite fête genre pique-nique. J'étais un peu étonné de la voir arriver, mais pas beucoup plus que ça. En fait, je la vis au dernier moment, à quelques centimètres de son visage, alors que je faisais la bise aux nouveaux arrivants. J'eus un sourire, qu'elle me rendit. Sourire simple. Ni forcé, ni enthousiaste de sa part. Assez content de la revoir, je lui dit au moment de l'embrasser "alors, comment vas-tu?"? Je crois qu'elle n'eut pas le temps de me répondre, déjà accaparée par d'autres bises. Son visage était normal, et ne me procurait pas d'émotion particulière. Le rêve s'estompa...

 

Constat: même dans mes rêves je ne suis plus à la poursuite d'un échange avec elle. Je n'attends rien, et si rien ne se passe, je n'en ressens aucune frustration. Je me sens "fort" face à elle, et plus du tout en position de demandeur ou de celui qui s'est accroché inutilement.

 

Je constate donc qu'en ayant dit ce qui me pesait, en m'étant livré trés sincèrement à elle, et quoi qu'il m'en ait coûté, ç'aura été quelque chose de trés utile. Par ces confidences tardives, j'ai pu me débarassez de ce qui m'empoisonnait l'existence. Doux poison, mais poison quand même...

 

Deuxième rêve, immédiatement après, trés long celui là. Je me trouvais, par je ne sais quel hasard, en présence d'une personnalité importante. Une femme ministre (rien que ça!!!). Ségolène, pour ceux qui connaissent... Il ne serait pas impossible que cette rencontre soit due à ce journal, parce qu'elle me connaissait trés bien. Et moi même n'avait aucune crainte à dialoguer avec elle. Comme si, par exemple, j'avais déjà échangé avec elle par mail ou Chat. C'est la première fois que ma vie "virtuelle" fait irruption dans mes rêves.

Cette femme représentait pour moi l'alliance de l'intelligence (du savoir) et d'une certaine séduction. Ceux qui ont lu, ou liront la suite de "Harcèlement textuel" comprendront à quoi je fais allusion...

Cette femme, auréolée de ce prestige à mes yeux, s'interessait donc à moi. Accompagnée d'une de ses amies, nous partions faire une promenade. Au départ trés agréable, elle discutait avec moi, comme si nous connaissions bien avant de nous être rencontrés. Peu à peu, des signes de sa haute fonction apparaissaient. Je me sentais fier de pouvoir cotoyer de près cette femme et qu'elle me considère.

Au départ, la promenade était dans la campagne, puis nous rentrions petit à petit dans des hameaux, puis un village, qui devint bourg, puis grande ville. A chaque étape de cette entrée dans le monde des humains (des "autres"), elle prenait un peu plus de distance. Elle devenait bavarde, m'écoutant de moins en moins. Ses propos concernaient de plus en plus sa fonction et elle ne semblait plus s'interesser à moi. Le plaisir que j'avais eu à échanger avec elle disparaissait trés vite. Finalement, elle ne s'adressa plus qu'à son amie, me laissant totalement tomber. Je continuais pourtant à les suivre, attendant de reprendre la place que j'avais auparavant.

Mais fréquemment, alors que j'essayais de m'occuper pendant qu'elles furetaient devant des magasins, ou un kiosque à journaux (elle était en première page de plusieurs d'entre eux), elles continuaient sans même savoir si je les suivais. Je faillis plusieurs fois les perdre dans le dédale des rues (une vieille ville touristique fortifiée, en pente descendante???). Jusqu'au moment ou cela se produisit.

Je m'inquiétais un peu, parce que je ne connaissais pas la ville, ni le lieu d'où nous étions partis, et que je me sentais incapable de retrouver le chemin pour retourner au point de départ. En bref, sans elles (elle?), j'étais perdu.

Je me demandais comment elles n'avaient pas pu s'apercevoir que je n'étais plus a coté d'elles. Mais il faut dire qu'elles bavardaient tellement... ma présence n'avait absolument plus aucune importance pour elles. Au loin, je les vis qui s'étaient arrêtées, comme si d'un coup elle s'étaient aperçues que je n'étais plus là. Elles me cherchaient vaguement du regard, tout en bavardant. Je n'étais manifestement pas un souci pour elles.

Le temps que je les rejoigne... elles avaient continué leur route. Et cette fois, je me trouvais dans une ville moderne, sur de grandes avenues. Impossible de les retrouver.

Je renonçais au bout d'un moment, décidant de tenter de retrouver le point de départ. Aprés un bon moment passé à marcher, et me retrouvant au sommet d'une colline prés d'une vieille tour en ruine, je compris que j'étais perdu. Je pensais à Charlotte qui allait s'inquiéter de ne pas me voir revenir. Je ne savais même plus comment la joindre... (il n'existait apparemment pas de de téléphones dans ce rêve...)

 

Je me suis réveillé brusquement à ce moment là...

 

Quelle interprétation en faire? Pas compliqué pour moi, l'analogie avec mon histoire avec Laura est évidente. Mais aussi ma peur de me faire abandonner par ceux que j'aime (Charlotte surtout) qui me laisserait totalement perdu.

Le rapport avec la nature (solitude) dans laquelle tout allait bien (je comptais, j'étais apprécié) et la ville (les autres) où je ne trouve plus ma place. Où je n'existe pas assez pour retenir l'attention. Où je deviens insignifiant (ma timidité handicapante).

Ma tendance à me dire "une femme comme ça (belle et/ou intelligente) ne peut pas s'intéressser à toi". Mon renoncement à toute tentative de reprendre ma place (elle s'interessait moins à moi, mais je ne faisais rien pour lutter contre).

Un peu fouillis tout ça... et probablement compréhensible seulement pas moi. Pauvres lecteurs qui doivent se demander ce que je raconte là!!!

 

Une chose m'a frappée: j'étais incapable de retrouver mon chemin sans elle, perdu. Alors que dans la réalité, j'ai la chance d'avoir un bon sens de l'orientation et jamais je ne me perds, que ce soit dans une ville étrangère ou en pleine nature. Mais dans le monde des rapports aux autres... alors là oui, je me perds!   

 


 

Jeudi 18 janvier 2001

 

Metajournal

Mon entrée d'hier était vraiment strictement personnelle. Je ne sais pas ce que vous, lecteurs, pouvez tirez de ce genre de choses. Probablement rien. Pourtant, comme je l'ai dit, je ne me suis pas empêché de le faire.

Mais je me heurte à une certaine réalité du diarisme en ligne: puis-je écrire seulement pour moi? En théorie, oui. Mais je sais trés bien que je m'astreins à être "ouvert" au monde, à votre monde. Je ne me vois pas raconter ce qui ne concernerait que ma vie, sans me préocuper de ce que vous pouvez en penser.

Un peu comme un éditorialiste de quotidien, je m'efforce d'être "bon". De délivrer du contenu, avec un certain "style" (mais jamais retravaillé) pour que ce soit agréable à lire. Parce que si je laisse tomber cette "exigence" je risque fort de désintéresser mes lecteurs... et de les perdre.

C'est pas que j'ai les yeux rivés sur le nombre de lecteurs, mais bon, j'aime savoir que j'en ai et qu'ils me sont fidèles (au moins un certain temps). Je sais que certains diaristes critiquent cette façon de faire (écrire en se préoccupant des lecteurs), mais je pense qu'ils savent que les lecteurs les suivent. Un diariste qui verrait ses lecteurs fuir jusqu'à n'en avoir plus que de passage perdrait vite, à mon avis, l'envie d'avoir son journal en ligne.

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J'ai reçu hier le mail d'un nouveau lecteur qui m'a dit avoir lu l'intégralité de mon journal. Ouyah! Quel courage! :-) Moi-même je n'ai jamais osé entreprendre de tout lire. Je suppose qu'il y en a pour des heures...

Ben, franchement, ça me fait plaisir de savoir que toutes mes élucubrations (ah! auto-dénigrement flagrant) ont touché querlqu'un au point qu'il me suive de bout en bout. Ce qui me fait surtout plaisir, au delà de l'égo rassuré, c'est que j'ai l'impression de faire oeuvre utile. parce que si je "touche" quelqu'un, je sais que ce sera un enrichissement dans sz réflexion. Tout comme moi me suis enrichi à la lecture d'autres diaristes. Et ça, franchement, c'est vraiment ce qui me fait le plus plaisir.

 

Parfois, je me compare (ce qui est inutile et stupide) à d'autres diaristes. Et j'ai parfois eu la tentation de chercher à leur ressembler (mais sans changer ma façon de faire pour autant). Et puis finalement je me dis que moi c'est moi, et que je n'ai pas à vouloir ressembler aux autres. Prendre ce qui me paraît bon de ci, de là, mais faire "moi-même le mélange des couleurs" comme dirait F. Cabrel.

Ouais, je sais, c'est l'évidence même ce que je dis là... mais j'ai besoin de me le répeter de temps en temps.

Je crois que j'ai trouvé mon style maintenant. Mélange d'intime (ce qui manque un peu chez certains...) et d'introspection, de sujets à portée un peu plus vaste (rares en ce moment), parsemé parfois de détails de mon quotidien (là, je suis assez peu prolixe, non?). Il faut croire que ce dosage convient à ceux qui me suivent.

De mon coté je picore dans des registes assez différents pour mes lectures. Similaires au mien, ou assez éloigné, je trouve de l'interêt dans cette diversité.

 

Note: le J.mag est paru (journal des diaristes en ligne).

 


Dimanche 21 janvier 2001

Rencontres

 

Quelques jours sans écrire...

Ce n'est pas faute d'inspiration, ou par manque d'envie, mais j'ai eu tellement de contacts que je n'ai pas eu le temps d'écrire.

 

Je n'aurais jamais pensé que par le biais de ce journal je "rencontrerais" (virtuellement) autant de personnes. Ni que les échanges iraient aussi loin.

C'est avec S. que j'ai passé beaucoup de temps, avec des discussions de plusieurs heures sur icq. Et il en est sorti des choses de ces échanges... tellement que je ne pourrais pas les dire toutes. Et puis qu'en dire? C'est une succession d'éléments de compréhension, ni vraiment nouveaux, ni vraiment connus. Beaucoup des sujets personnels que je traite dans ces pages sont venus dans la conversation, et l'échange direct avec une personne extérieure apporte toujours un nouvel éclairage.

J'ai aussi discuté avec... appelons la L. , qui a lu mon texte et l'a semble-t-il apprécié. Plus qu'apprécié puisque je crois qu'il l'a aidée à faire quelque chose qu'elle reportait depuis longtemps. Je suis vraiment trés content que ce texte plaise à ceux et celle qui l'ont lu, mais si, en plus, il peut aider des gens, alors je suis vraiment pleinement satisfait. C'est une des raisons pour laquelle je l'avais écrit.

Vous remarquerez que je reste discret avec les noms, lorsqu'il s'agit de conversations privées. La micro-société des diaristes et de leurs lecteurs ne me permet pas de citer les personnes avec qui je discute, parce que ceux qui me lisent connaissent peut-être mes interlocuteurs. Ce journal à beau dévoiler ma vie privée devant vous, je ne peux impliquer la vie privée des autres. Il y a aussi de la vie privée sur internet...

 

Quand je pense à ces personnes avec qui je correspond, je pense à la notion d'amitié. Peut-on devenir "amis" sur internet? Il y a quelques jours, je me posais la même question au sujet de l'amour...

Ces relations ressemblent vraiment à une amitié. Ce qui les différencierait, c'est le temps incroyablement court qui a permis à ces "amitiés" de naître. Je mets le mot entre guillemets, parce que, d'une part, je ne sais pas comment le perçoivent ces personnes (dire qu'elles vont lire ça...), et d'autre part parce que je ne connais pas le sentiment d'amitié.

Ben non! aussi étonnant que ça puisse paraître, je ne connais pas l'amitié. J'ai de trés bons copains, des gens que j'ai plaisir à rencontrer, que je connais depuis longtemps... mais avec qui jamais je n'ai abordé des sujets de fond nous concernant. J'ai Charlotte, amie trés particulière, mais ma seule vraie amie en fait. Depuis un an, il y a aussi Inès. Mais justement, c'est assez compliqué dans ma tête de séparer la relation de séduction de celle d'amitié.

Il faut dire que je me débrouille pour n'avoir que des amitiés féminines...

Il y a aussi eu Kathryn, rencontrée sur le chat, il y a prés d'un an. Et depuis que je tiens ce journal, je sens naître des ébauches de relation qui ressemblent bien à ce que j'imagine être l'amitié.

Amitiés sans séduction (quoiqu'il soit difficile de certifier qu'il n'y ait rien de cet ordre là...)

J'ai beaucoup de mal à trouver la place de l'amitié. Le fait qu'il ne s'en développe pas avec un homme est peut-être significatif? En tout cas, cette absence d'amitiés masculines ne contribue pas a éclaircir ma vision des choses par rapport aux femmes.

Je crois que j'ai peur de l'amitié, comme d'autres ont peur de l'amour. Peur de ne pas être à la hauteur, de décevoir, de ne pas "tenir" dans le temps. Sans doute aussi peur de perdre une liberté? C'est trés confus dans ma tête. Ce que je sais, c'est que la naissance se fait toute seule, et que la suite dépend de ce que je veux en faire. A moi de voir si j'accepte de lier amitié...

Inès fait les frais de cette situation depuis six mois...

Je sors ces idées, mais c'est vraiment le brouillard total. Ce que je sais, c'est que c'est lié à l'image que je me fais de moi-même. Et que si je ne m'aime pas davantage, je ne peux comprendre que d'autres "m'aiment". Tout tourne autour de ça en ce moment...

C'est un gros morceau que j'attaque. Aprés Laura, la séduction, mon père, il faut que j'analyse maintenant l'image que j'ai de moi même. D'ailleurs, les étapes précédentes tournaient toutes autour de la perception que les personnes qui comptaient avaient de moi.

Pfff, je ne vous embête pas avec mes histoires? Je ne vais pas trop profond dans l'intime? Ne vais-je pas vers une certaine impudeur, celle de l'image de soi. Je vais toucher à des sentiments que je refoule: narcissisme et dévalorisation de soi...

Allez, basta pour aujourd'hui...

   


 Mardi 23 janvier 2001

 

Je ressens parfois comme une lassitude devant mes relations internautiques. Un vide intérieur, un manque d'énergie. Peut-être parce que je donne beaucoup de moi à travers le journal, les échanges directs et les argumentations sur les forums...

Peut-être aussi parce que je ressens une certaine déception, comme si j'attendais plus?

J'ai ressenti ça hier soir sur les forums que je visite: rien de bien passionnant (et parfois même carrément insipide, genre café du commerce ou plaisanteries entre copains). Ou alors des discussions passionnées, des échanges vifs... mais surtout beaucoup d'incompréhension et, parfois, d'intolérance.

En fait, rien de bien diférent de la vie réelle...

Heureusement qu'il existe les relations privilégiées que j'entretiens avec plusieurs personnes pour me donner le goût de poursuivre dans de bonnes conditions. Quoique, là encore, ce soit quelque chose d'assez énergivore.

***

 

Je relisais les extraits du journal de MöngôlO choisis par Philippe Lejeune dans "Cher écran". Et une de ses entrées m'a fait réagir: on parle toujours de l'anonymat du net, et moi-même je n'y échappe pas sur ce journal. MöngôlO disait avec raison que l'on n'est rapidement plus un anonyme, puisque l'on est reconnu par un pseudonyme, qui est bien un autre moi (tout en étant la même personne). Il est curieux d'ailleurs de constater comme ces dédoublements (ou plus) de personnalité s'endossent facilement. Si j'écris ici, je suis l'idéaliste, spontanément, sans réfléchir à un rôle que je pourrais me donner. Ailleurs, je serais un autre (pas fondamentalement différent), qui aura une autre attitude, d'autres mots, d'autres centres d'interêt. Et la séparation entre les deux est toute naturelle.

En fait, je suis le seul qui connaît (si toutefois on peut se connaître...) tous mes personnages. Et pour moi, c'est bien une seule entité.

Je crois que c'est une façon de se protéger que de ne dévoiler qu'une partie de soi, et c'est ce qui permet d'aller loin dans l'intime.

Tout ça pour dire que l'on est pas "anonyme" sur le net, mais "pseudonyme". Et plutôt que de parler d'anonymat, on devrait parler de "pseudonymat". Je ne sais pas si le mot existe officiellement, mais je l'ai déjà vu employé.

Comme j'aime une certaine précision, je vais essayer d'employer à l'avenir ce mot lorsque ce sera nécessaire.

Il y a pas mal de mots peu courants (parce qu'inventés?) qui mériteraient d'être plus employés. Lejeune utilise ainsi le mot d'"écrivant", préférable à celui décrivain, à trop forte connotation littéraire. MöngôlO s'interrogeait sur le terme de "journaleur" pour l'activité que nous avons. Diariste est devenu, je crois, évident pour tous dans ce milieu, mais reste largement inconnu du public.

***

 

J'ai parfois l'impression que ma vie d'internet prend de plus en plus de place. Je passe des heures, chaque jour, devant mon écran. Pas connecté en permanence, puisque j'y inclus le temps de réponse aux courriers et forums.

Je sais que c'est un besoin du moment, et il est fort possible que dans quelques années je me demande comment j'ai pu être autant "accro". Lorsque je serais retourné à mes promenades dans la nature, à mes rêveries au pied des grands arbres...

Mais pour le moment, internet et les relations que j'y ai correspondent à un besoin profond d'ouverture aux autres et à moi-même. C'est ce dont j'ai besoin maintenant. Je n'ai pas envie de reporter à plus tard. Et si mon travail en pâtit... tant pis (grosse culpabilité quand même...).

En ce moment, je devrais travailler (il est 10h 30)... mais j'ai pas envie. Je sais que je regretterais plus tard ce temps passé, lorsque je serais totalement débordé par tout ce que j'ai à faire. Mais je me dis aussi que ce que je prends maintenant est bon... et que je verrais bien le moment venu, les arrangements que je ferais avec mon exigence pour accepter un travail moins "parfait". La perfection est un enfer!

 

***

 

A propos de perfection. Pour ceux qui lisent ou ont lu ce journal en totalité, vous aurez remarqué qu'il y a une partie " index" dans les archives. Vous aurez aussi remarqué qu'elle est loin d'être à jour... C'est qu'il n'est pas facile de suivre à la fois la rédaction et la structure du site simultanément. Je privilégie donc l'écriture, au détriment de cet index, et d'une présentation plus esthétique de l'ensemble du journal, en projet depuis bien longtemps. Obligation de faire des choix...

 


Mercredi 24 janvier 2001

 

Si je parle du "piège de la liberté", est-ce que je vais choquer?

J'ai souvent dit que j'avais une profession qui me laissait une grande liberté à certaines périodes. C'est la cas en ce moment.

Comme je travaille à domicile, quoi de plus facile que de succomber à la tentation d'en profiter? Qu'est-ce qui m'empêche, à part ma volonté, de faire ce qui me plaît? Et bien ma culpabilité: je me dis que ce n'est pas bien de ne pas travailler. Pas bien parce que beaucoup de gens sont salariés et n'ont pas le loisir de se poser des questions sur leur envie ou non de travailler. Pas bien parce que plein de gens s'embêtent à faire un travail qui ne leur plaît pas. Pas bien parce que je profite du fait que ma femme gagne sa vie.

En attendant que mon activité prenne son essor, c'est Charlotte qui s'est mis en charge de subvenir aux besoin de la famille. Moi-même n'apportant qu'une part marginale. Bon, comme auparavant j'avais été salarié pendant huit ans, il y avait une sorte de contrepartie. Mais maintenant que ça fait huit ans que je dépends de ses subsides, je commence à me dire que la contrepartie touche à sa fin. Ce qui tombe bien, puisque mon activité à fait un grand bon en avant et que je peux apporter une part plus significative.

Mais c'est là qu'un certain choix de vie entre en ligne de compte: je ne travaille pas pour l'argent. Je m'en fiche un peu de l'argent. Je ne vais donc pas profiter de mon activité qui décolle pour en faire encore plus, gagner davantage... et passer mon temps à travailler. Justement, aprés des années de travail sans grande contrepartie financière, j'ai tendance à ralentir le rythme et profiter de cette (petite) aisance que donne un compte bancaire positif. En fait, je ne ralentis pas le rythme, puisque je passe autant d'heures à travailler, mais je ne fais plus que le minimum. Pas de zèle, pas de perfectionnisme. Je fais mon boulot, c'est tout. Alors qu'avant, n'ayant pas trop de travail directement productif, je travaillais à la marge, en "improductif". Réalisation d'un site web professionnel, aménagements de mon cadre de travail et d'accueil des clients, lectures et documentations professionnelles, écriture (et oui...) de documentation à l'usage de mes clients, etc... Toutes choses que je néglige désormais, ne me consacrant qu'au productif (ce qui rapporte des sous).

J'en ai un peu marre de bosser pour des choses qui demandent beaucoup de temps pour peu de résultat. Je deviens "productiviste cool". C'est à dire travailler le moins possible en gagnant le plus possible. L'objectif premier étant d'avoir plus de temps libre, vous l'aurez compris.

Quand je pense à ces années passées à me défoncer dans le travail... Je sais que c'était dans un désir de perfection, d'être irréprochable. Maintenant, je lutte contre cette tendance dévorante d'énergie pour un bien faible résultat: la reconnaissance est rare.

Pourtant, je sais aussi que mes client m'apprécient pour ce "plus" que mon exigence permet. C'est un peu mon fond de commerce cette qualité de ce que je fais. Je ne dois donc pas la négliger (non, je suis incapable de travailler comme un sagouin!).

Tout ça pour dire que je ferais mieux de bosser plutôt que d'écrire ici... Oui... mais j'aime mieux écrire que travailler! C'est ça que j'appelle le "piège de la liberté".

***

 

Tout autre sujet: hier, je suis allé à une réunion professionnelle. Il y avait une cinquantaine de personnes et, trompant l'ennui, mon regard se balladait sur les visages. Bon, sur les hommes, ça passait vite... trois femmes attiraient mon regard. Trois styles différents. Et j'essayais de comprendre ce qui fait qu'un visage m'accroche ou pas. Deux d'entre-elles, que j'avais vu au départ, me paraissaient agréables. Jusqu'a ce que je voie un troisième visage, surpassant largement les deux premières femmes qui, du coup, me parurent nettement moins intéressantes. Pourquoi ce changement d'avis? Qu'est ce qui fait qu'un visage paraisse "mieux" qu'un autre? Pourquoi une femme qui me plaît est détrônée par une autre qui me plaît davantage?

Mes questions sont un peu idiotes, et peut être un peu insultantes pour les femmes, jaugées à leur seule subjective beauté? Ben oui... mais c'est comme ça que je fonctionne et il semble que je ne sois pas le seul.

Mais ça n'est pas tout. Cette femme que j'ai remarquée, coiffure soignée, maquillée, bijoutée, élégante, je l'ai observée à de nombreuses reprises. Extrêmement séduisante...

Lorsque la réunion s'est terminée, alors que je discutais avec un confrère, cette femme s'est trouvée a coté de moi. Au bout de quelques instants elle m'a regardé et m'a dit me connaître. !?? Surprise de ma part?? Moi, je connaissais cette femme séduisante? Etait-il possible que je n'ai pas souvenir de l'avoir rencontrée???

Lorsqu'elle s'est présentée, je me suis souvenu d'elle. Effectivement elle était passée me voir, mais dans des circonstances trés différentes de la situation d'hier. Je n'avais pas fait le rapprochement. Je me suis souvenu de cette cliente, que j'avais effectivement remarquée.

Curieux quand même, de ne pas reconnaître quelqu'un qui avait attiré mon regard dans les deux cas... Ah oui, hier elle avait des lunettes, et pas la fois d'avant. Et puis pas du tout le même genre d'habillement.

Bon, à part ça, me faire accoster par une jolie femme... n'étais pas déagréable du tout. Et même si ça n'est pas allé bien loin, ce petit plaisir à illuminé la fin de ma journée. Il m'en faut peu, hein?

Non de xxx, que les femmes sont belles parfois...!!!

 

Euh... C'est vachement insultant pour les autres ça, non? 


Jeudi 25 janvier 2000

 

Echanges multiples en ce moment...

Je reçois assez souvent des mails, parfois assez longs, et toujours trés importants pour moi. D'une part parce qu'ils me donnent un écho de lecture, ce qui est la source d'énergie du diariste, d'autre part parce qu'ils m'apportent toujours un éclairage sur ce que j'ai écrit. Soit parce que j'ai des commentaires sur ce que j'ai écrit un jour (toujours constructifs), soit parce que des lecteurs me disent avoir été touchés, d'une façon ou d'une autre, par mes idées. Touchés dans le sens que cela a fait vibrer quelque chose de sensible en eux, que celà les a amenés à une réflexion sur eux-mêmes. Et vraiment, ça, c'est une grande satisfaction pour moi.

Si le fait de "donner" de moi est utile à d'autres, c'est vraiment une superbe récompense des efforts que j'ai pu avoir à fournir.

Efforts? Je ne sais si c'est un effort... Un effort que l'on fait avec plaisir est-il encore un effort?

Oui, je ne nie pas qu'il y ait une certaine souffrance parfois à se dévoiler en public. Ne serait-ce qu'en constatant l'énergie que ça me bouffe, je ne peux nier qu'il y ait effort. Certes, les mots viennent tout seul, mais chaque moment passé à réfléchir sur l'opportunité de tel ou tel mot, l'incessante attention nécessaire au travail d'écriture, les pistes qui s'ouvrent et qu'il faut catégoriser sous peine de devenir totalement confus, chaque instant d'hésitation sur le sens du mot, sa portée, la micro-censure conjuguée avec la volonté de sincérité (lutte permanente...), oui, tout cela est dévoreur d'énergie.

Ces derniers jours, je me suis trouvé dans un état un peu déprimé. Parce que ces relations via le net sont à la fois intenses et riches... comme elles peuvent être décevantes. Dans le domaine de l'intime, de la psychologie profonde, c'est trés enrichissant... mais en même temps épuisant. C'est ce qui demande le plus de temps de compréhension, d'acceptation de soi, d'auto-analyse. Et je vais vous faire une confidence, si vous êtes plusieurs personnes à m'offrir vos réflexions sur ce que j'écris ici (réflexions trés précieuses pour moi), et bien... je ne suis qu'un à pouvoir y répondre. Et chacune de vous (oui, je corresponds surtout avec des femmes, pour mon plus grand plaisir *large sourire*). Et ma tête, sollicitée dans différentes directions... est soumise à rude épreuve! C'est pour cette raison que je me mets souvent "hors-ligne" sur icq, débordé que je suis des réflexions en cours. C'est parfois l'auto-analyse à marche forcée, et je peux vous assurer que c'est épuisant mentalement.

Finalement, les échanges que j'apprécie tant sur le net marchent presque "trop bien". J'en suis pleinement satisfait, je vous rassure, mais je dois apprendre à gérer ce surcroît d'activité intimiste. Peut-être aussi que je devrais apprendre à moins répondre aux mails de mes correspondantes habituelles? ou moins longuement? C'est, je le sais, mon désir de perfectionnisme, additionné au besoin de me justifier, qui font que je me lance dans des mails assez complets, tentant de répondre point par point à mon interlocutrice. Mais c'est un peu idiot! puisque vous lisez mon journal et que vous savez donc trés bien ce que je pense.

Donc... je vais essayer d'être plus court dans mes réponses régulières. Je dis bien "essayer"...

Les relations décevantes, ce sont celles que j'ai dans les forums de discussion. Pourtant, j'ai aussi envie de me frotter un peu à la société, parler d'autre chose que de l'intime. C'est le coté détente de l'écriture. Beaucoup moins impliquant en général (mais pas toujours), ce coté de mon intériorité a aussi besoin de sortir. Pour le moment, ce n'est pas vraiment concluant...

J'essaie aussi de "donner" de moi, mais les yeux qui me lisent n'ont pas la même connivence que les votres, qui ne sont pas là par hasard. Si vous lisez mon intimité, si vous êtes parvenus jusqu'aux sites de journaux en ligne, c'est bien que vous avez une sensibilité particulière pour ce genre d'écrits. Nous sommes, diaristes et lecteurs, "entre nous", complices. Et ceux qui s'attardent sur mon journal en particulier, s'y attachent durablement ou pas, ou sur d'autres du même style, trouvent une résonnance particulière qui leur convient.

Sur les forums... on est loin de cette connivence. Le seul lien est le désir de discuter avec d'autres (ce qui est déjà pas mal...), mais pour des raisons qui peuvent être extrêmement diverses. Ca peut aller de l'envie de rigoler au besoin de tromper sa solitude, d'une volonté de provoquer à celle d'approfondir des discussions. Et forcément, cet amalgamme ne fonctionnera pas parfaitement. C'est un peu l'inverse de ce journal. Ici un espace d'expression pour une personne, devant plusieurs observateurs qui ont choisi d'être là. Sur les forums: un seul espace pour plusieurs personnes sans affinité particulière, qui se supportent ou s'apprécient plus ou moins.

 

***

 

Tou d'un coup, je repense au fait que je me sois mis à écrire en ligne. C'est curieux, parce que mon passage de l'écriture manuelle à l'écriture sur l'ordinateur s'est fait au moment où j'ai choisi la mise en ligne. J'avais souvent pensé à écrire mon journal privé sur écran, mais je n'en voyais pas l'utilité. Je craignais que ce soit une perte de temps, parce que l'écriture manuelle est plus rapide et spontanée.

Mais je crois que l'écriture autobiographique, parallèle au journal, à défriché le terrain. J' étais totalement prêt pour cette mutation. C'est seulement la rupture entre écriture manuelle et écriture imprimée qui me dérangeait. Je ne voyais pas pourquoi d'un coup mon journal aurait changé de forme. Et puis, vous le constatez, ça s'est fait tout seul...

 

***

 

Vous savez quoi? Ma femme est vraiment quelqu'un de bien! Parfois je lui parle de mes activités internautiques (et puis elle sait bien tout le temps que j'y passe...) et de la culpabilité que je ressens à être dans cette seconde vie. Et bien ça ne la dérange pas du tout!

Mieux, elle est même contente de me voir changer, m'épanouir peu à peu. Elle m'a même dit aujourd'hui: "tu me rends heureuse".

Que puis-je espérer de mieux?

Elle me sent mieux dans ma tête, moins dépendant d'elle et de son écoute, plus attentif aux enfants, plus disponible (paradoxal, non?). Alors je me demande bien pourquoi je me culpabilise. Certainement une idée que je me fais du regard que les autres pourraient porter sur moi.

Et lorsque quelqu'un va bien, c'est tout son entourage qui en profite...

 


Vendredi 26 janvier 2001

 

0 h 30

Ce soir, aprés avoir mis mon entrée en ligne (ce qui explique la date du lendemain...), je suis allé visiter un peu des "collègues" diaristes inconnus. je prends rarement le temps de le faire, faute de temps, évidemment. J'en ai rajouté 4 dans mes favoris, que je vais suivre dans les jours à venir, dont deux trés récemment commencés.

Ce n'est pas facile de rentrer dans un journal existant. On ne connait rien de la personne qui écrit, et évidemment elle ne cherche plus à se présenter. Tandis que les nouveaux ont toujours une première pages, les hésitations et découvertes des premiers jours. C'est plus facile de rentrer en lecture simultanément avec leur découverte des particularités de l'écriture en ligne.

 

Bon, en voyant d'autres journaux, j'ai encore eu des complexes devant le graphisme de certains... Il faudrait vraiment que je fasse des efforts!!!

J'ai aussi remarqué assez souvent un "qui suis-je?". C'est marrant, mais ça ne m'est jamais venu à l'idée de me présenter directement, dès la page d'accueil. J'ai préféré laisser les lecteurs me découvrir au fil des mots. Mais peut-être que des lecteurs nouveaux aimeraient ce genre de présentation, même si elle resterait succinte, anonymat oblige...

Autre constation: des diaristes qui disent ne recevoir aucun message pendant de longues périodes (plusieurs semaines). Ferais-je partie des chanceux qui en reçoivent assez souvent? Est-ce dû au fait que mon journal est encore relativement jeune?

Je dois bien dire que je ne sais pas comment je réagirais si je ne recevais plus aucun courrier. Peut-être que le journal reprendrait un ton plus libre? Ces derniers jours, plusieurs personnes se sont inscrites sur la liste de diffusion de ce journal. C'est à la fois rassurant et... "apeurant" comme disent les Québecois (j'aime bien ce mot, inusité en France).

Pour le moment, je ne crois pas être trop influencé par cette lecture fidèle (ou censée l'être), mais j'ai déjà dit que si je me savais lu par beaucoup de monde, je prendrais peur. Et le pire... c'est que je viens de répondre à un journaliste de magazine féminin qui veut interwiever des diaristes (et il semble que je ne sois pas le seul à qui il ait écrit).

Moi, évidemment, en quête de "reconnaissance" (oui oui, vous avez le droit de vous foutre de moi...), j'ai hésité un moment, puis lui ait répondu. Je ne sais pas ce que ça aura comme suite, mais juste aprés l'avoir envoyé, je me suis dit que ce genre de situation est le meilleur moyen pour faire venir du monde, et accroître le risque que quelqu'un qui me connaît tombe sur mon site. Je ne sais pas bien pourquoi j'agis comme ça, si ce n'est "jouer avec le feu", me mettre un peu en danger (ou en avoir l'illusion), tester ma capacité à m'adapter à des situations nouvelles.

Pfoouuu... je pense tout d'un coup que j'écris ça, alors que les lectrices avec qui je dialogue vont me lire... Ca me donne un peu le vertige parfois. Heureusement que lorsque j'échange avec elles je n'ai plus mes écrits sous les yeux, et pas de souvenirs précis. Je fractionne ma pensée, me protégeant ainsi de sentiments de gêne qui pourraient me venir...

Allez, il est 1 h 00, c'est le moment d'aller faire un gros dodo. Je vais aller me blottir contre Charlotte qui m'aura réchauffé le lit (la pauvre...). Vous savez quoi: j'adoooore ces moments où on est serrés l'un contre l'autre, le soir ou le matin. C'est ça aussi la tendresse du couple... même aprés presque 20 ans de mariage (je dis pas ça pour faire envie aux célibataires, je vous jure!).

Hmmm, c'est vrai qu'il semble y avoir pas mal de célibataires parmi les diaristes. Et ce n'est certainement pas toujours un choix...

 


Samedi 27 janvier 2001

 

Voulant relire ce que j'avais mis ces derniers jours, suite au courrier d'une lectrice qui y faisait référence, je me suis surpris. Comme je ne me relis que rarement, je découvre toujours avec un certain étonnement mes écrits. Un peu comme si je n'étais plus le même, alors que c'est trés récent.

Je me vois extérieurement, et constate parfois comme ma pensée est en évolution. Si jamais je ne renie mes pensées, je suis parfois surpris d'avoir pu les avoir un jour. Tout en me souvenant trés bien, à la relecture, de les avoir eues.

Je suis en plein nombrilisme là!!! Je m'observe et me surprends...

Tant que j'y suis, et parce que je le dis rarement... et bien... voyez-vous... il m'arrive de me trouver... bon! Excusez cet excés de narcissisme (il en faut bien un peu de temps en temps...) mais parfois il me plaît de relire ce que j'ai écrit. Je me surprends agréablement.

Normal: je me comprends trés bien! Je ne peux qu'être d'accord avec celui qui a écrit ces mots quelques jours auparavant. A la relecture, je me dis "voilà, c'est exactement ça!". Comme si je me sentais en parfaite compréhension avec une autre personne.

Vous me suivez? C'est un peu compliqué à décrire.

 

En mettant devant vos yeux mes impressions narcissiques, je m'expose à heurter des sensibilités. Moi-même, je suis trés vite allergique à ça chez les autres. Sans doute parce que je me le suis interdit pendant des décennies. C'est trés nouveau que je parvienne à être relativement satisfait de moi (mais je ne le dis qu'à moi-même... et... hum... dans ce journal maintenant). Mais si je veux parvenir à "m'aimer", il faut bien que j'accepte de voir ces cotés "aimables". Et les appréciations de mes lecteurs/lectrices m'y aident grandement. Merci à vous qui me faites partager vos impressions de lecture...

 


Dimanche 28 janvier 2001

 

Je me suis arrêté brusquement, hier, faute de tranquillité (les enfants étaient à la maison et sollicitaient ma présence). Du coup... mon sujet de réflexion s'est dispersé dans ma pensée. Pas grave, ça reviendra sous une forme ou une autre.

Comme je n'aime pas trop risquer de décevoir, je n'ai pas mis en ligne une entrée aussi courte. Il faut qu'il y ait quand même quelque matière à réflexion...

Je sais bien que des diaristes ne mettent parfois que quelques lignes certains jours, et pourquoi pas? Cela traduit aussi un état du moment. Mais comme mon journal est écrit sous forme de chronique, j'évite les entrées qui ne seraient pas un minimum approfondies.

***

 

Je me demande si je ne retombe pas en crise: excés d'internet. Excés de relations. Excés de remises en questions. Tout d'un coup, ça me fait trop. Je me rends compte que je deviens dépendant, avec le besoin de ma dose quotidienne d'échanges. Mais en même temps, je constate que ça me prend énormément de temps...

Et comme je ne peux pas répondre avec toute la qualité nécessaire, je sens un certain malaise. L'impression de "bâcler" certaine réponses, de ne pas y mettre toute ma sensibilité, toute ma conscience. Je veux garder des échanges de qualité.

Et puis, je dois bien le dire, j'ai du mal à suivre tous ces contacts simultanément. Passer en quelques mois de zéro amitié (hors de Charlotte), à la mise en place de une, puis 2, 3, 4 correspondances suivies, donne une impression de sauter dans le vide. J'étais dans ma bulle, elle se déchire, et c'est un air neuf qui rentre. Et puis toute la liberté qui se dessine au dela de cette bulle...

Il y a deux jours, c'est un trés long message qui me parvient d'une personne rencontrée sur ce forum auquel je fais souvent allusion. Elle me transmettait un gros travail de recherche/retour sur soi. Des souffrances de l'enfance encore extrêmement vivantes. Il faut croire que j'attire les confidences et la confiance...

Que cette femme me demande mon avis sur l'opportunité de livrer cette part de son intimité au regard des autres m'a touché au plus haut point. D'une part parce que c'est une démarche trés proche du journal en ligne (elle ignore que j'en tiens un). D'autre part parce que les blessures d'enfance touchent une corde trés sensible chez moi. Et enfin, parce qu'elle se fiait à mon avis, qu'elle jugeait donc "sensé" et qu'elle me faisait CONFIANCE. Ceux qui me lisent depuis un moment sauront la valeur que j'attache à cette notion.

Confiance et sincérité, indissociables, sont vraiment le chemin vers les profondeurs de l'humain. Et la source des échanges les plus profonds, les plus révélateurs de l'autre et de soi-même.

Par cette femme, que j'appellerai Aïcha, j'ai découvert un peu plus comment aller plus loin dans la tolérance.

Depuis un bon moment, je suivais ses interventions sur deux forums. Toujours trés pertinentes, mesurées, tolérantes. Récemment à l'occasion d'un débat difficile, Aïcha a fait preuve d'une trés grande rigueur d'esprit en se documentant avant de nous livrer des faits trés précis, indiscutables, mettant ainsi fin de manière trés claire à plusieurs questions sujettes à interprétation. Je l'ai alors félicitée publiquement ainsi que d'autres. Réaction étonnante de sa part: elle tenait à se replacer au même niveau que nous, "refusant" poliment, mais clairement, nos compliments.

Je n'ai pas trés bien compris, et me suis dit qu'elle devait faire partie de ces gens qui n'aiment pas être flattés. Un peu déçu, tout de même, parce que je l'appréciais bien.

Ce n'est que lorsque j'ai reçu de sa part copie d'une correspondance que j'ai compris les raisons de ce refus marqué de toute marque d'admiration. Sans vous en donner les détails, elle avait d'excellentes raisons de ne pas supporter qu'on la félicite. Je n'aurais pas pensé qu'il puisse s'agir de ça...

Alors je me suis dit qu'on avait toujours tendance à juger trop vite, sans rien connaître de la vie des gens. Des réactions qui peuvent paraître étonnantes, incompréhensibles, violentes même, ont une origine trés profonde que l'on ignore généralement. Les blessures d'enfance, notamment, laissent des traces indélébiles. C'était son cas.

Je lui ai donc répondu, avec la sincérité que vous pouvez imaginer en me lisant. Ce qui lui a fait du bien et l'a aidée à mettre son texte en ligne. Confession libératrice qui lui fera certainement le plus grand bien. Elle ne l'a jamais dit dans la réalité, même à ses proches, et profite de l'anonymat du net pour mettre à jour cette souffrance...

J'ai été trés tenté de lui parler des journaux en ligne... envie de lui rendre sa confiance en lui proposant l'accés au mien... mais c'est d'elle qu'il s'agissait. Elle avait besoin de s'ouvrir, pas de lire la souffrance des autres. Pas encore du moins...

 

Et voila comment passe mon temps...

Une de mes lectrices se demandait comment je pouvais trouver le temps de faire tout ça à la fois. C'est vrai que ma vie est trés remplie en ce moment. Si jamais je ne m'ennuyais, c'est désormais de temps que je manque pour vivre aussi intensément que j'aimerai. Ma vie est pleine, épanouie (ou en voie de l'être...). Pour tout dire, je crois que je n'ai jamais été aussi VIVANT.

 

J'en parlais ce midi avec mes enfants et Charlotte, leur expliquant un peu ce que je faisais sur internet. Pas idiots, les deux plus jeunes le savaient déjà... bribes de conversations avec Charlotte qu'ils ont volées au passage. Les enfants comprennent tant de choses...

Mon fils aîné le sachant depuis longtemps.

Seule regret, important, je partage peu de moments avec eux à FAIRE quelque chose. Ils aimeraient que j'aille faire du ski, que j'aille à la piscine avec eux. Ou que nous jouions à des jeux de société.

Je leur ai alors répondu que j'amais beaucoup ÊTRE avec eux, pour simplement rire, échanger, discuter. Le coté échange quoi... comme ce qui m'attire sur internet! Etonnant non?? (sourire)

"Pour moi, vivre c'est être, plutôt que faire..."

J'avoue que lorsque j'ai sorti cette phrase, telle qu'elle me venait, j'ai apprécié le petit silence qui a suivi et l'admiration de mon fils, qui en mesurait la portée. Eh! encore une fois où j'étais satisfait de ma trouvaille. Ou plutôt de cette étincelle de lucidité.

Mais c'est vrai que dans ma vie, je privilégie toujours les sensations, l'émotion, l'échange, la perception, plutôt que l'acte. Ce n'est pas un hasard si ce journal est trés peu factuel, essentiellement concentré sur le relationnel.

Pour moi, qui me suis longtemps considéré comme un "ours", je dois avouer que je suis étonné de constater que les relations humaines me passionnent à un tel point. Il faut dire que j'ai tellement d'années à rattraper...

 


Lundi 29 janvier

Pas drôle...

 

Il est fréquemment question en ce moment, en France, de la question de la torture en Algérie pendant les "opérations de maintien de l'ordre" des années 54 à 62. C'est un sujet largement connu, mais qui est resté sous silence pendant 40 ans. Soit cet épisode tragique était minimisé, soit il était carrément nié.

Depuis quelques mois le sujet est revenu en surface, déclenchant des réactions opposées, entre ceux qui en appellent à une reconnaissance par l'état de ses responsbilités, et ceux qui s'offusquent que l'on "remue cette boue".

Les partisans de la parole libératrice contre ceux du silence de plomb...

Mon père a fait cette guerre, comme tous ceux de son âge. Il n'en a que trés peu parlé. Si j'ai longtemps cru que c'était une "guéguerre", parce qu'il n'y avait pas une armée contre une autre, pas d'avions ni de chars... et surtout parce qu'on n'en parlait pas, j'ai appris peu à peu l'importance qu'avaient eus ces évènements.

Peut-être en partie à cause des "évènements" de Bosnie et du Kosovo? Mais surtout parce que, de temps à autres, sortent des bribes de ce qui s'est passé. Ce ne sont pas les livres d'histoire qui nous en ont parlé, c'est certain.

Alors peu à peu, notamment grâce à une émission de radio qui aime bien pointer le doigt là où ça fait mal, j'ai su que la torture avait été largement pratiquée par des Français. Que des massacres avaiet été organisés dans des villages, des éxécutions sommaires, des viols... Toutes ces atrocités que l'on nous avait complaisamment citées de la part des Allemands pendant la seconde guerre mondiale, ce qui avait fait d'eux des monstres à mes yeux.

Je ne sais plus à quel âge j'ai pris conscience de tout ça, mais j'étais déjà adulte.

Et maintenant encore, comme ce matin à la radio, il y a encore des gens qui réclament qu'on ne parle pas de ça!!! Comme si ça pouvait effacer la honte! Alors que la meilleure façon de se "racheter" est de dire ses fautes, les avouer, les regretter.

Je constate aussi que la "propagande" continue toujours, lorsqu'on entend des généraux supérieurs, des gens censés être garants d'une certaine rigueur morale, dire qu'il ne s'agissait que d'actes trés isolés, justifiés par la protection de vies humaines, et qui n'étaient pas torture mais seulement quelques coups donnés pour faire parler. Tout ça dit sous un accent de révolte du genre "comment pouvez-vous mettre ma parole en doute?". Et de nous sortir des exemples (certes justifiés...) des atrocités commises par les partisans de la libération.

De l'autre coté, et c'est ça qui est nouveau, on commence à entendre des voix de plus en plus nombreuses: celles des simples soldats, ceux qui avaient 20 ans à l'époque et débarquaient d'un coup dans ce conflit qu'ils ne soupçonnaient pas aussi "sale". Ces voix, on ne les a pas entendues pendant 40 ans. A la fois parce qu'ils avaient trop honte de ce qu'ils avaient vu, ou des actions auxquelles ils avaient participé, mais aussi parce qu'on avait pas envie de les entendre.

Et maintenant que ces hommes on entre 60 et 70 ans, ils ressentent le besoin d'en parler. Peut-être pour soulager leurs consciences, peut-être pour transmettre un message à la seconde génération après leurs enfants? Toujours est-il que les langues se délient, que les oreilles s'ouvrent.

Et ces voix là ont un autre accent de sincérité que celles des généraux...

Voix nombreuses, de gens qui ne se connaissent pas, qui étaient en des lieux différents, mais qui disent la même chose. Voix sincères, brisées par l'émotion et qui s'éteignent dans les larmes.

A-ton déjà vu un général ému?

Ils sont nombreux ceux qui on souffert de cette "guerre sans nom" dont il n'ont pas pu parler. Comme pour toutes les guerres je crois, il restera toujours un fossé immense et définitif entre ceux "qui y étaient", et ceux qui n'ont eu pour informations que la version aseptisée officielle.

Révéler ces horreurs, c'est nous donner le droit de combattre celles des autres, ailleurs dans le monde. Tant qu'on refusera de dire que la France à été aussi ignoble que les Allemands, on ne pourra que fermer notre gueule sur la Bosnie et le Kosovo. On est pas mieux que les autres, à l'échelle de notre pays. Et nos individualités sont salies par ce qui a été commis en notre nom collectif.

Je suis en révolte contre l'humain. Ce menteur, ce manipulateur, ce salaud, ce monstre, ce profiteur. Parce que ces actes, commis par les "forts", les puissants et les grandes gueules, impliquent de fait tous ceux qui essaient d'agir avec l'autre coté de leur humanité. Et ça me fait chier de savoir que j'appartiens, que je le veuille ou non, à cette humanité là. De savoir que j'ai cette violence dans mes gènes, cette potentialité de vouloir dominer mes semblables déclenche des impressions contradictoires. Suis-je vraiment différent ou pour toujours habité par des pulsions mauvaises?

Ou autrement dit: est-ce que tout homme est capable de se transformer en salaud?

Peut-on se sentir capable d'une conscience qui dominerait ces penchants détestables?

J'aime croire que oui...

 


 

Mardi 30 janvier 2001

 

J'ai reçu hier un mail d'une diariste particulière. Un mail spontané, pas un retour de courrier. C'est la première fois que cette diariste le fait, et je dois dire que j'y ai été sensible. Parce que c'est une "ancienne" que je lis depuis fort longtemps. Il est trés rare que je reçoive des mails spontanés de ceux qui ont commencé leur journal bien avant moi. Je crois qu'une seule autre m'avait fait ce plaisir. Il y a aussi un "célèbre" lecteur de journaux en ligne qui m'avait fait cette surprise.

Mais pour tous les autres, lorsqu'il y a eu contact avec ces "anciens", c'était suite à mon initiative.

Je suis trés sensible à la lecture de mon journal par ceux qui ont une certaine expérience des journaux. Parce que je sais que si je les touche au point qu'ils m'écrivent, c'est que ce que je dis à une certaine "valeur". Toujours ce besoin d'être reconnu...

Je me sens toujours "petit nouveau" dans le monde des diaristes en ligne, malgré les 6 mois d'existence de ce journal. Toujours la crainte de ne pas être à la hauteur. Pourtant, objectivement, je sais bien que mon journal "tient la route", comme tout journal d'ailleurs. Mais il y a des noms qui existent depuis des années, et je me dis que je ne sais pas si je trouve grâce à leurs yeux. Je sais bien qu'en disant ça, je vais faire rigoler... pourquoi me référer à ce qui serait une sorte d"élite" du diarisme? En quoi le jugement de ces "anciens" aurait-il plus de valeur que celui de ceux qui font partie de ce mileiu depuis peu?

Je sais que c'est la lecture de certains textes qui m'a un peu blessé. Lorsque ces anciens disent que les nouveaux journaux correspondent à une mode, que la plupart ne tiennent pas longtemps, qu'ils sont loin de grandes références comme "Le Tisserand" par exemple, ou d'autres qui ne me viennent pas en tête.

Alors moi, je me sens écrasé d'avance par ces jugements à priori. Comme s'il n'y avait que le bon vieux temps qui pouvait avoir grâce à leur yeux ("bon vieux temps" d'il y a... 2 ans tout au plus!). Je me sens toujours parti trop tard. Comme si le fait d'avoir découvert tardivement les journaux en ligne était un handicap jamais récupérable.

Avec le temps, je vois de plus en plus de journaux nés après le mien. Peu à peu, je rentre dans ce groupe des "anciens". Et puis il y a des journaux antérieurs au mien qui disparaissent, donc je sais que, peu à peu, je vais "exister" dans la communauté des diaristes. Et les "p'tits nouveaux" qui s'adressent à moi, ou parlent de mon journal, me montrent que j'existe déjà pour eux. Cette reconnaissance m'est précieuse.

 

Je constate, en écrivant tout ça, que j'ai vraiment le désir de faire partie d'une communauté, d'exister. C'est la même chose qui se passe sur les forums: besoin d'être accépté, intégré, reconnu...

Un vrai adolescent, hein? Pffff!!!

***

 

Il me passe souvent plein de choses par la tête dans la journée. Je me dis "tiens, il faudra que je l'écrive dans mon journal". Puis je reporte... et finis par oublier. Ou à être fatigué et les idées plus trés claires pour écrire quelque chose d'un peu cohérent.

Tant pis. Si c'est important, ça reviendra un autre jour...

***

 

J'ai reçu un premier mail d'une diariste, qui me dit qu'elle à lu mon journal du début à la fin. Quel courage! Je pense qu'elle en a eu pour quelques heures... Ca me fait toujours plaisir de voir qu'une personne a accroché au point de tout lire.

Mais... je crois que je radote! Il me semble avoir dit la même chose il y a quelques jours au sujet d'un autre lecteur.

C'est étonnant de voir que des lecteurs dont j'ignorais totalement qu'ils me lisaient se manifester. Ou de voir des nouveaux lecteurs arriver sur ce journal. Peut-être est-ce grâce à des liens inscrits sur les sites d'autres diaristes? Je sais que je fonctionne souvent de cette façon, curieux de lire un journal évoqué par un des diaristes que j'apprécie.

Et que de journaux différents..! J'apprends beaucoup sur les comportements des autres, avec ces lectures variées. Légers ou profonds, jeunes ou moins jeunes, hommes ou femmes, tristes ou gais... il y a vraiment tout le kaléidoscope des personnalités.

 

Bon... j'aurais voulu poursuivre, mais le sommeil est là. Il faudra que j'écrive avant de lire, la prochaine fois! C'est ce que je fais souvent, pour avoir l'esprit non influencé. Mais ce soir je ne savais pas bien sur quoi fixer mon attention, alors j'ai cherché l'inspiration chez les autres... et elle n'est pas venue.

 

Au fait, vous avez remarqué comme je me suis rapproché de mon thème initial du journal, depuis quelques temps? "Relations qui se nouent sur internet", au point que ça prend presque toute la place maintenant. Alors qu'il y a quelques semaines je constatais que j'avais complètement laissé tomber cet aspect de mes réflexions... Comme quoi, ce qui doit être dit ressort toujours à un moment où un autre.

 


 

Mercredi 31 janvier 2001

 Dépendance

 

Pas trop la forme aujourd'hui. Sans bien savoir pourquoi... Certainement le regain d'activité de mon travail qui se profile à l'horizon, et avec lui, toute une série de choses à faire qui m'emm... 

Je suis comme ça: je reporte les tâches désagréables, mais vient un moment où il faut bien que je m'y attèle. Et là... ça fait mal! Ces travaux désagréables sont souvent des choses que j'ai accépté bêtement de faire, parce que je n'ai pas osé dire non quand on me les demandait. Ce sont des activités peu rémunératrices en rapport du travail d'organisation que cela demande. Et je déteste l'organisation. J'ai horreur de prévoir a l'avance ce que je dois faire, prendre des rendez-vous, coordonner différentes personnes... Certainement un mauvais souvenir de mon père qui anticipe, prévoit tout d'avance, s'énerve dès que ça ne fonctionne pas comme prévu.

J'aime ma liberté d'action, et tout ce qui me contraint agit sur mon état. Je deviens vite dépassé par mes réactions: perte de tonus, baisse du moral, ... et agressivité prête à jaillir ("défoulement" pour évacuer le stress). Je ne m'aime pas comme ça, et ça me démonte encore plus le moral de voir que je ne sais pas surmonter ces situations.

Je dis ça, parce que maintenant j'ai compris le mécanisme de colères soudaines, mais il m'a fallu des années avant d'en connaître les raisons.

Mhhhh! Pas envie de vous raconter ça. Pas envie de casser mon image auprès de vous. Tant pis... je dois bien m'assumer tel que je suis...

 

***

 

Bon, autre chose: ce matin, je crois avoir compris ce qui fait que je passe autant de temps sur le net. Errant parfois à la recherche de contacts... tout en en fuyant d'autres. Je ne suis pas un accro du net, pas un drogué de l'écran. Si j'y passe autant de temps, c'est que je suis à la recherche de quelque chose.

La même chose qui a fait que, voici quelques années, je me suis lancé à fond dans mon activité professionnelle. J'abattais un travail considérable, avec une qualité démesurée pour les résultats attendus. Tout ça pour une seule chose: avoir de la reconnaissance! Parce que je me disais que si mon travail était irréprochable, proche d'une certaine perfection, alors on l'apprécierait... on m'aprécierait. Toujours cette soif d'être reconnu, parce que je me suis senti le dernier des nuls pendant des années.

Au bout de 5 ans, j'ai commencé à réduire mes exigences de qualité. C'était vraiment trop de travail, trés rarement reconnu à sa vraie valeur. Pour quelques gratifications admiratives, c'était vraiment trop cher payé. Et puis, franchement, c'était inutile d'en faire autant. J'étais le seul à être convaincu de la nécessité de mon exigence. J'étais aussi le seul à convaincre!! Personne d'autre que moi ne doutait de mes compétences.

Ces dernières années, j'arrive à me satisfaire d'un travail moins "parfait", je passe sur des détails invisibles, pour m'occuper de satisfaire ma clientèle. Bref, je travaille à l'optimum plutôt qu'au maximum.

Du coup, la charge de travail à baissé... et les gratifications de mes clients n'ont pas diminué! Au contraire, la notoriété aidant, j'ai de plus en plus souvent des signes de cette satisfaction. Et il m'est facile de rester modeste devant des compliments, puisque je sais avoir pris un chemin plus facile qu'avant. Ce n'est pas moi qui dirait "vous savez, c'est beaucoup de boulot", puisqu'en mon for intérieur je sais que j'en fais moins qu'avant...

Par ailleurs, je ne supporte pas ceux qui disent avec légereté "quel chance vous avez de faire ce métier", sous-entendu "c'est pas trop dur", en n'en voyant que les bons cotés.

J'aime mon métier, qui m'apporte beaucoup de satisfactions. Mais il a aussi des cotés vraiment trés pénibles et bien peu gratifiants. Comme tous les métiers...

 

Le rapport avec ma "dépendance" vis à vis du net?

Vous devez bien vous en douter...

Besoin de reconnaissance! Et oui, parce que chaque fois que j'échange avec quelqu'un, chaque fois que je suis accépté, apprécié à travers mes mots, c'est une preuve que j'existe dans le regard des autres. Chaque fois que je reçois un mail, c'est une gratification: on apprécie celui que je suis (ou plutôt l'image que je transmets de moi).

J'ai donc compris ce matin que ce n'est pas du net que je suis dépendant, mais des gratifications. Je me shoote avec l'image que vous me renvoyez de moi. Parce que vous me renvoyez l'image de quelqu'un que je ne connais pas vraiment, faute de pouvoir être moi-même face aux autres.

Cette personne intimidée, fade, sans personnalité, que j'ai l'impression d'être (et que je suis dans les faits réels) ça me ramène toujours à cette impression de nullité, d'inexistance, de transparence. Face aux autres, je ne compte pas (ou du moins, je ne me sens pas compter pour eux).

Sur le net, je suis libéré de cette timidité handicapante. Je suis vraiment moi. Et je constate que je ne déplais pas, que j'existe, que je suis reconnu et... oserais-je?... apprécié.

Et ça, c'est vraiment extraordinaire! Ce n'est pas vraiment le regard des autres qui a changé, mais plutôt le mien. Moi qui me vois en miroir dans votre regard. Moi qui me rends compte que je suis "normal", pas plus insignifiant qu'un autre. Avec mes qualités et mes défauts. Phrase bateau, évidence...

Evidence, oui, mais qui demeurait (et demeure encore dans le réel) invisible, impalpable pour l'inconscient. Je sais, mais mon inconscient, lui, ne sait pas encore. Il commence tout juste à comprendre...

 


 

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