Nathalie

31 janvier 2004

Fanny Ardant apprend que son mari le trompe. Sa réaction est plutôt étrange : elle se réfugie dans un cabaret où elle rencontre Emanuelle Béart, splendide prostituée qui la fascine au premier coup d'oeil. Elle va lui demander d'aborder son mari sous le nom de Nathalie et de lui raconter ensuite leurs rencontres...
Et pas platoniques, les rencontres. Emanuelle Béart, sans ciller, nous raconte froidement ses ébats pornographiques avec son point de vue détaché de prostituée. Fanny Ardant, pendant ce temps, écoute, réagit, ou ne réagit pas. Mais en redemande. Pourquoi ? Est-elle écoeurée, émerveillée ? Jalouse ? Ou bien peut-être se réalise-t-elle elle-même en fantasmes au travers des récits de Nathalie... Peut-être trouve-t-elle ainsi le moyen de se rapprocher de son mari, de "partager" avec lui quelque chose, de le maîtriser, de le connaître. En dirigeant Nathalie - dont le mari tombe amoureux -, elle peut le combler ou le briser...
Et puis il y a Nathalie qui soulève, elle aussi, des questions. D'abord parce qu'elle se prostitue, et qu'elle n'en fait pas un drame. Cette prostitution de "choix", à elle seule, suffit à nous remuer les méniges et les entrailles. Mais il n'y a pas que ça. Et toute l'intrigue prend sa véritable dimension lors des dernières minutes, où l'on en apprend bien plus... Sans que cela ne résolve beaucoup de nos questions, bien au contraire. Mais tant mieux, car "Nathalie" fonctionne sur cette torture constante et douce à laquelle nous sommes soumis.
Et puis il y a Fanny Ardant, la grande Fanny, qui nous désespère dans ce rôle de femme mûre qui se réfugie dans des voies dangereuses pour régler ses problèmes conjugaux.
Emanuelle Beart est belle comme jamais. On la méprise et on tombe amoureux en même temps.
Et en dernier lieu, Depardieu, qui n'a pas vraiment l'habitude d'être en dernier lieu. Et c'est pourquoi ce rôle est honorable. Son personnage est présent tout au long du film (lors des récits de Nathalie), le public s'en fait toute une opinion, mais on ne voit l'acteur que très peu, et quand on le voit, quelle piètre importance ! Le mari gentil et doux a bien moins d'intérêt que la bête sexuelle amoureux de Nathalie. Il est donc écrasé entre ces deux femmes, et cela rend son rôle tellement humble...
Car tout le film ne repose que sur les relations entre Fanny Ardant et Emanuelle Beart, Admiration, dégout, dédain, amitié, amour peut-être...
Un très beau film, haletant malgré son rythme doux, qui nous fait chavirer en fouillant en nous (les femmes ?) là où on ne voudrait pas. Mais c'est pour ça que j'adore.

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