Fanny
Ardant apprend que son mari le trompe. Sa réaction est plutôt
étrange : elle se réfugie dans un cabaret où elle
rencontre Emanuelle Béart, splendide prostituée qui la
fascine au premier coup d'oeil. Elle va lui demander d'aborder son mari
sous le nom de Nathalie et de lui raconter ensuite leurs rencontres...
Et pas platoniques, les rencontres. Emanuelle Béart, sans ciller,
nous raconte froidement ses ébats pornographiques avec son point
de vue détaché de prostituée. Fanny Ardant, pendant
ce temps, écoute, réagit, ou ne réagit pas. Mais
en redemande. Pourquoi ? Est-elle écoeurée, émerveillée
? Jalouse ? Ou bien peut-être se réalise-t-elle elle-même
en fantasmes au travers des récits de Nathalie... Peut-être
trouve-t-elle ainsi le moyen de se rapprocher de son mari, de "partager"
avec lui quelque chose, de le maîtriser, de le connaître.
En dirigeant Nathalie - dont le mari tombe amoureux -, elle peut le
combler ou le briser...
Et puis il y a Nathalie qui soulève, elle aussi, des questions.
D'abord parce qu'elle se prostitue, et qu'elle n'en fait pas un drame.
Cette prostitution de "choix", à elle seule, suffit
à nous remuer les méniges et les entrailles. Mais il n'y
a pas que ça. Et toute l'intrigue prend sa véritable dimension
lors des dernières minutes, où l'on en apprend bien plus...
Sans que cela ne résolve beaucoup de nos questions, bien au contraire.
Mais tant mieux, car "Nathalie" fonctionne sur cette torture
constante et douce à laquelle nous sommes soumis.
Et puis il y a Fanny Ardant, la grande Fanny, qui nous désespère
dans ce rôle de femme mûre qui se réfugie dans des
voies dangereuses pour régler ses problèmes conjugaux.
Emanuelle Beart est belle comme jamais. On la méprise et on tombe
amoureux en même temps.
Et en dernier lieu, Depardieu, qui n'a pas vraiment l'habitude d'être
en dernier lieu. Et c'est pourquoi ce rôle est honorable. Son
personnage est présent tout au long du film (lors des récits
de Nathalie), le public s'en fait toute une opinion, mais on ne voit
l'acteur que très peu, et quand on le voit, quelle piètre
importance ! Le mari gentil et doux a bien moins d'intérêt
que la bête sexuelle amoureux de Nathalie. Il est donc écrasé
entre ces deux femmes, et cela rend son rôle tellement humble...
Car tout le film ne repose que sur les relations entre Fanny Ardant
et Emanuelle Beart, Admiration, dégout, dédain, amitié,
amour peut-être...
Un très beau film, haletant malgré son rythme doux, qui
nous fait chavirer en fouillant en nous (les femmes ?) là où
on ne voudrait pas. Mais c'est pour ça que j'adore.
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