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Elle s'est implantée petit à petit, sans aucune manifestation vraiment visible.
Rien ne laissait deviner un quelconque changement, pas de fatigue apparente, au contraire une hyperactivité physique et intellectuelle.

Elle s'était enracinée lentement mais avec une insidieuse profondeur, laissant libre cours à la douleur.
L'esprit fonctionnait à deux mille tours seconde et le corps obéissait à la façon d'une machine super performante.
Et pourtant, le mal avançait en eaux troubles, invisible en surface, avec une terrible efficacité.

Pour accomplir son oeuvre destructrice, rien n'était trop fourbe, larvé, hypocrite.

Comment deviner sous une apparence quasi parfaite, un danger d'une effrayante froideur calculatrice que rien ne saurait atteindre ni arrêter.

Mais la douleur devenait d'une telle intensité qu'il fallut reconnaître qu'elle n'expliquait pas tout et se résoudre à voir plus loin et consulter.

A partir de ce moment, la vérité est apparue dans toute son insupportable clarté.
Tous ces symptômes, ces petits signes, ces douleurs incompréhensibles auxquelles on ne voulait pas donner de nom ou alors un nom tellement commun qu'il ne voulait rien dire ou dire beaucoup!

La nature m'ayant jusque là dotée d'une santé de fer, l'idée même du mot maladie n'effleurait personne et moi moins encore.
Lorsque le couperet s'est abbattu sur ma pauvre tête, cent mille cloches se mirent à carillonner lugubrement en une cacophonie discordante, avec plein de fausses notes, ça faisait mal, ça faisait mal!

Le bombardement de mes neurones dura une éternité. L'impact puis l'onde de choc devastatrice déferla dans mon cerveau à la vitesse d'un cyclone ravageur.
Un vide sidéral venant de nulle part, degré moins cinquante, proche de la cryogénie, ma caboche sonnait la gourle, il n'y avait plus dans cette calebasse qui me servait de tête qu'une morbide sensation de néant.

Pour reprendre pied et tenter de me maintenir hors de l'eau afin d'aspirer une bouffée d'air, je dus faire appel à une force inconnue qui s'extirpa de mes entrailles au prix d'une indicible douleur.
Assommée, anéantie, vidée, il restait néanmoins un coin dans mon cerveau capable d'analyser la situation et c'est ce reliquat qui me permit de comprendre ce que Madame la Professeur, avec une franchise qui me plut, tentait de m'expliquer.

Il était question de leucémie aigüe, une des formes les plus graves qui soient, de chimiothérapie, capable de tuer un cheval, de souffarnces dont on ne tiendrait pas compte... et la dernière et la plus importante phrase "mais on vous guérira"

Voilà, tout était dit, calmement, franchement, sans mièvrerie. Pas de sensiblerie, pas de faux semblants.

Allongée dans un de ces lit d'hopitaux étroit et inconfortable, le cataclysme continuait de se deverser sur ma modeste personne, quasiment crucifiée.
Madame la Professeur a ajouté
- Vous en avez pour un an, considérez cette année comme perdue.
Elle tourna les talons suivie par ses aides.

Heureusement, et c'est terrible de dire cela, mais c'est pourtant vrai, la douleur neutralisée sans doute momentanément par des calmants, revint de plus belle et je cessais de réfléchir aux conséquences de cette affreuse maladie.

Deux mois plus tard, je sortis de ma léthargie, un peu comme certains animaux de leur hibernation, je n'avais plus ces douleurs atroces mais j'étais exangue, sans force, lessivée.
Il me fallut des jours d'une semi-conscience pour bien réaliser mon état.
Par bribes, des mots, des phrases se présnetaient à ma mémoire.
Quelques moments précieux glanés ça et là, sous forme de flashes illuminaient mon esprit et celà m'obligeaient à reconnaitre un état mental sans dommage, c'était déjà ça!

Voyons, elle m'a bien dit "mais on vous guérira..." et "vous en avez pour un an", donc il me reste dix mois à faire.
Maintenant, j'étaits très consciente de la réalité, j'assistais à tous les soins qui m'étaient prodigués, je voyais tout, entendais tout, analysais tout.

Je fis la connaissance de soignants qui gravitaient dans mon sillage et commençais à les apprécier différemment, suivant leurs aptitudes à me soigner, à leur façons plus ou moins humaines de se conduire avec moi.
Et on en voit des choses du fond de son lit de souffrances, c'est édifiant, parfois consternant , affligeant et quelquefois touchant.

Facile de savoir laquelle des infirmières est consciencieuse mais peu humaine, laquelle est gentille sans plus mais efficace, comme si le fait même de paraître méchante la fatiguait, sourire pour ce genre de personne ne demande pas d'effort, alors sourire oui, mais sans chaleur.
Et puis il y a celle qui sous une apparence bourrue cache un coeur gros comme un soleil.
Cette autre faisant strictement son travail comme si elle était en face d'un objet quelconque, sans attacher aucune importance aux états d'âme du malade.
Et puis il y a celui ou celle dont on ne peut se passer, le parfait, la parfaite, chaleureux, humain, doux, qui sait anticiper et répond aux questions que l'on n'a pas posées, fait le geste que l'on attend et pose sur vous un regarg d'égal à égal, sans vous écraser de son savoir, de sa position verticale, face à une personne complétement à sa merci.

Et cela, être à la merci des autres, c'est le plus terrible, le plus humiliant.
On se sent petit, tout petit, un fétu de paille, un bout de brin de rien.
Evidemment si le soignant sait, par son attitude, vous redonner un semblant de personnalité, vous traiter comme un être à part entière et non comme une espèce de mauvaise herbe, dont il faut séparer le bon grain de l'ivraie, alors revient timidement par la petite porte un peu de joie d'exister.

Et voici qu'à partir de là, une monumentale, une incommensurable vague d'espoir fou se propage dans votre corps, l'envahit, le submerge, le ballotte dans tous les sens et le pétrit d'une force combattive, innataquable, indestructible et c'est le départ d'une longue, d'une interminable bataille à la loyale.

Cette maladie me paraissait tellement loin de moi, de ma personne, de ma bonne santé... ceux qui avaient cette maladie étaient des gens maladifs, des gens patraques, toujours chez le medecin, nourris aux médicaments, gorgés d'antibiotiques, surprotégés par les anti-dépresseurs, enfin des gens aux antipodes de moi.
Moi, ma santé faisait envie, ma bonne humeur, ma tonicité étaient légendaires, jamais malade, jamais en retard au travail, toujours à l'écoute de la detresse des autres, la devinant, infatiguable, inaltérable, invulnérable, pratiquement indestructible.

Quelle folie de penser cela! et quelle présomption!

Un travail sérieux et profitable commençait à se faire jour au niveau de mes méninges, ma matière grise se prit de frénésie pour mettre en place un plan d'attaque.

Voyons! Comment une telle maladie a-t-elle pu, à mon insu, s'emparer de ma personne?
Ou était l'erreur? parce qu'il n'y avait aucun doute, tout était de ma faute.
Ou avais-je commis l'irréparable, qu'avais-je négligé, qu'avais-je omis de faire, de voir, d'entendre?
Entendre! entendre! un rayon lumineux traversa mon esprit. Je savais, j'avais oublié d'entendre les plaintes de mon corps.
Ce corps pour lequel j'avais un grand respect et même un peu d'admiration parce qu'il me permettait de répondre toujours présente aux besoins de la vie.
Je ne l'avais pas épargné, je lui avais demandé beaucoup, beaucoup trop.
Jamais il n'avait rechigné pour accomplir les tâches souvent pénibles dues à mon travail.
Soulever les malades, les lever, les accompagner aux toilettes, à la marche, passer les nuits auprès d'eux, les écouter, les consoler, les aider moralement, physiquement.
Faire du sport, faire le jardin, transporter des poids, sans jamais lui demander son avis, non, ma tête décidait et mon pauvre corps n'avait qu'à obeir.
Comment ai-je pu, pendant toutes ces années, ne jamais me préoccuper de l'état de mon corps?
Pourquoi ne lui ai-je jamais posé cette simple question "vas-tu tenir longtemps à ce rythme?"

La conclusion me parut évidente, je n'avais que le revers de la médaille, las de crier comme un sourd dans un désert de silence, mon corps a flanché et toute resistance vaincue, s'est laissé happer par le premier virus venu ou un microbe ou une bactérie, je ne sais pas, mais toujours est-il qu'il s'est laissé pieger et le filet a les mailles serrées, solides, resistantes, en apparence inviolable.

...a suivre... (le texte sera complété dans la semaine.)

 
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