Folklore fossois : les Chinels


Dans son aspect actuel, le chinel semble être un descendant du Pulchinella de la Comédia del Arte. Mais au début, à Fosses, le costume était de toile grossière et bourré de paille et de foin : c'était le "Doudou" qui dansait le rigaudon, sabots aux pieds, au son des fifres et des tambours.

Si l'histoire se refuse à donner une origine probante aux Chinels, la légende des "Deux Bossus" semble vouloir leur donner naissance bien que celle-ci soit également connue en France, en Flandre et en d'autres lieux de Wallonie. Voici cette légende, telle qu'elle est racontée à Fosses :

Au temps où l'on croyait encore aux fées, vivait à Fosses un gentil petit bossu qui s'occupait de colportage dans la région.
S'étant attardé plus qu'il ne fallait auprès de ses clients, il rentra un soir, très tard. Si tard qu'en passant au lieu-di "Pont de l'Allou", il assista, interloqué, au sabbat des fées de la forêt. Celles-ci, voulant le récompenser pour sa serviabilité, le débarrassèrent de sa difformité.
Quand le lendemain, un autre bossu de la région, méchant et haineux celui-là, eut vent de la chose, il se rendit dans la forêt à l'heure de minuit. Mal lui en prit. Il en revint affublé d'une seconde bosse, une devant et une derrière.
Carnaval était proche. Les Fossois se moquèrent de lui.
Ainsi serait né le "Chinel", le roi du carnaval de Fosses

Ce groupe folklorique est un des plus beaux fleurons du carnaval de Wallonie, connu mondialement depuis ses nombreux déplacements, partout en Europe et même... au Japon!

Le costume est fait de deux bosses, effilées et courbées, vers le bas pour celle de devant, vers le haut pour celle de derrière. La tunique est de velours et de satin, où se conjuguent le vert et le rouge, le rose et le mauve, le noir et le jaune, et se termine par des dentelures auxquelles sont attachées des "chîlètes". Des souliers ornementés d'une rosette remplacent les sabots que portaient les Doudous. Une blanche fraise avec galon doré enserre le cou. La coiffure est un haut bicorne enjolivé et surmonté d'une aigrette. Le chinel manie avec grâce un sabre de bois, recourbé comme un cimeterre, avec lequel il marque la cadence.

C'est en 1869 que Louis Canivet, directeur de la Philarmonique fossoise, composa la musique de la nouvelle danse qui remplaça les pas primitifs des rigodons des Doudous. Cette partition légère et entraînante se compose de quatre figures : essai, ballet, rigaudon et carnaval. Un passage, la "Sabotière", imite les claquements faits en sautillant avec des sabots; un autre est dit "à surprise"; ici, subitement, la musique s'arrête et les danseurs restent figés un moment dans leur dernière position.

Le chinel tout en dansant tient à respecter deux coutumes. La première est le "sabrage des filles". Quittant la danse, le chinel s'approche d'une dame qu'il veut honorer; brusquement, il se retourne et de la pointe de son sabre lui caresse les mollets; puis, la quittant en souriant, il la salue de son arme.
La seconde coutume est le "coup de bosse" : le chinel a remarqué le cigare ou la pipe qui orne la bouche d'un spectateur; virevoltant subitement devant celui-ci, il enlève de la pointe de sa bosse arrière l'objet des lèvres du quidam qui ne s'y attend pas.