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Perdu le 11 décembre 1943

"Bataille Aérienne sur les Pays-Bas" par Ab. A. Jansen

Le 11 décembre 1943, tandis qu'un nouveau jour d'occupation allemande commençait pour nous citoyens des Pays-Bas, 538 bombardiers lourds de l'U.S. Army Air Force se rassemblaient sur l'Angleterre. Les appareils, B-17s et B-24s, se joignaient aile dans aile par box, escadrons et Groupes pour former d'immenses formations avant de pointer vers Emden en Allemagne. De même manière, 313 P-47 Thunderbolts de sept groupes, et 31 P-38s du 55ème Fighter Group décollèrent ou se préparèrent à le faire pour assurer l'escorte des "Grands Amis". Emden n'étant pas une cible trop éloignée, les chasseurs seraient avec les bombardiers tout au long de l'itinéraire. Une couche de stratus sombresétait accrochée à 1500 métres au dessus de la campagne anglaise lorsque les premiers Thunderbolts commencèrent à grimper.

Le plan de bataille de la 8ème Air Force pour cette mission prévoyait une feinte en dirigeant les bombardiers sur un vol d'ouest en est, presque jusqu'à Heligoland, avant soudainement de virer sud-ouest pour revenir sur Emden, faisant route directement vers la cible. L'objet était de tromper les chasseurs allemands, défenseurs du secteur de Breme-Hambourg, qui allaient monter à travers les nuages en les envoyant plus à l'est. L'escorte dans le secteur de la cible serait assurée par les P-51s du 354ème Fighter Group, qui effectuait là sa troisième mission de pénétration profonde, survolant les provinces hollandaises de Friesland et Groningen, directement vers Emdem.

Tout n'allait pas pour le mieux dans la mesure ou la prévision météorologique avait sous-estimé les vents. Tandis que les pilotes luttaient face à un vent contraire de 120km/h qui allongeait bien plus que prévu le trajet au dessus de la Mer du Nord, le navigateur du bombardier leadership se voyait contraint de changer la position originale du virage près de Heligoland par une nouvelle située plus à l'ouest. Cela signifiait que les bombardiers arriveraient sur la cible avant le rendez-vous avec leur escorte. Mais auparavant, fait inattendu, des trous de plus en plus grands dans la couche nuageuse apparurent, révélant la côte nord de l'Allemagne. L'espoir que la couche de nuages clouerait les chasseurs allemands au sol venait de disparaitre. Avant que le premier bombardier ait franchi la côte Est de la Frise un cri retentit: "Chasseurs à une heure!"

Tandis que les forces américaines se groupaient en formation sur l'Angleterre, les radaristes allemands, toujours attentifs, enregistraient les premières grosses lueurs sur leurs écrans radar et observaient le développement des formations de bombardiers. Quelques minutes plus tard le dispositif allemand de défense entier était en alerte :"Ansammlungen dans Dora-Dora." Les messages étant immédiatement relayés aux diverses bases de chasseurs. Sur ces bases des pilotes de chasse jeunes, agressifs étaient prêts à dompter leurs Messerschmitt Bf 109 éfilés, leurs fidèles Focke Wulf 190, les Messerschmitt BF 110 "Zerstorer" et même de polyvalents Junkers Ju88.

"Alarmstart!" les mécaniciens tout de noir vétus tournent les manivelles sur les capots moteur gris des Bf 109 et sautent. Trois appuis, un coup de pied et ils filent autour des appareils. Les hommes font tout leur possible pour éviter de se faire éjecter par le souffle des hélices. Les cokpits sont fermés et les chasseurs, moteurs hurlants, décollent. À Jever, les arbres bordant les pistes de décollage et d'atterrissage de la base de chasse de la Luftwaffe, bien cachée dans des constructions en bois, sont encore secoués par les avions qui viennent de décoller. Les roues tournant encore sont repliées dans les ailes et la casserole d'hélice pointant vers le ciel, les chasseurs commencent leur longue montée en altitude.

"Grosses bagnoles dans secteur Dora-Nordpol gehen Sie auf Hanni achtnull!" Les instructions des contrôleurs crépitent dans les écouteurs des pilotes de chasse comme ils montent (à 8000m) pour affronter les bombardiers.

Au moment d'aborder la côte, les deux premièrs box de la 3rd Bomb Division, menée par le 390th Bomb Group, furent attaqués par six bimoteurs plongeant du soleil et visant l'appareil leader du 390th. "C'était une attaque frontale," rapporte l'historique du Groupe, "qui a éliminé le leader et a traversé en trombe le squadron de tête. Avant que le commandant est pu réunifier la formation, 30 chasseurs monomoteurs se sont joints à la bataille et ont abattu 4 autres Forteresses."

L'avion leader - probablement "Six Nights in Telergma" piloté par le capitaine Hiram C. Skogmo transportait 11 hommes ce jour, y compris le chef de la mission, le major Ralph V. Hansel, Group Operations Officer du 390th. Les compositions d'équipage avaient été légèrement changées. Le major Hansel était installé comme copilote, tandis que le lieutenant W. Poythress, Jr. était en position de mitrailleur de queue afin de pouvoir observer les groupes suivants. Le navigateur du groupe, le capitaine Donald S. Warren, était le onzième homme. Il était avec le capitaine Irving R. Lifson, navigateur du squadron, dans le nez de l'appareil, donnant à l'avion principal deux navigateurs.

Survolant encore la Mer du Nord cet avion a été attaqué par des chasseurs ennemis et abattu. Trois hommes seulement survécurent : le capitaine Warren, le capitaine Lifson et le T/Sgt E. Phillips, mitrailleur de la tourelle supérieure. Les capitaines Lifson et Warren se posèrent en parachute sur l'île allemande de Norderney et Phillips tomba dans l'eau tout près du rivage de l'île. Tout trois fûrent capturés et passèrent le reste de la guerre dans un camp de prisonniers.

Sur l'itinéraire du retour, les formations américaines survolèrent le nord des Pays-Bas. À la droite des avions s'étalaient les Îles de la Frise de l'Ouest, des taches brun-vert dans le bleu-gris de l'estuaire Hollandais (le "Wadden") bordé par le jaune d'or pâle des côtes. Là, en des temps meilleurs, des milliers de Hollandais profitaient paisiblement de leurs vacances d'été, mais pour l'heure des hommes casqués d'acier tiraient fébrilement leurs salves d'obus vers le raid volant à haute altitude.

Juste en-dessous se trouvait le brun échiqier des champs de Groningen, une vieille contrée qui au fil des siècles avaient été protégée des attaques de la Mer du Nord, balayé furieusement du côté du rivage par les tempêtes du nord-ouest. Les gens dans les champs, dans les villages et dans les villes cherchaient les taches minuscules ronronnant haut dans le ciel, traçant une masse de traînée de condensation sur fond bleu. Et ils pensaient : "Les voici de nouveau. Ca va faire du bien aux allemands de gouter un peu leur propre méthodes. Brisez-les. Ils l'ont bien mérité et plus tôt cette guerre sera finie plus tôt ces pillards de nazis seront partis!

Tandis que les gens observaient, des paquets de chasseurs allemands attaquaient furieusement les bombardiers américains sur le chemin du retour à travers les Pays-Bas. Du sol on ne pouvait pas suivre grand chose de l'action. Seules les oreilles percevaient ce qui restait des pleintes aigües des chasseurs, le perçant staccato des mitrailleuses et les coups secs pop-pop-pop des canons.

Sur la frontière Hollando-allemande - quelque part près de Nieuwe-Schans - des staffels de chasseurs allemands se ruèrent dans une formation. Un bombardier fut touché mais continua de lutter pour rester en vol. Les témoins virent que cinq ou six hommes avaient abandonné l'avion traînant de la fumée, quand quelque chose arriva qui exaspère encore les gens du village de Finsterwolde. Comme ils assistaient à la destruction du "Grand Ami", les canons antiaériens allemands de la batterie "Steiling Dollard-Sud", dans le polder Carel Coenraad, lui envoyèrent le coup de grace, leurs obus de mort traversant l'espace ou les malheureux aviateurs descendaient, impuissants suspendus à leur parachutes. Un de ces parachutes fut mis en lambeaux, et l'homme tomba comme une pierre vers le sol gelé.

Tandis qu'en haut, de puissantes formations traînaient toujours leurs panaches de condensation, le rythme pénétrant des centaines de moteurs se réverbérant sur la terre sombre - visions et sons que les générations d'anciens n'oublieront jamais - l'avion qui avait été partiellement abandonné brûlait, et dans son agonie, tournait dans le ciel. Puis il s'écrasa, son fuselage virevoltant n'en finissant pas de culbuter. Les fragments s'éparpillèrent tout autour de la maison de M. Roelf Remmers. Les enfants terrorisés pleuraient mais par miracle la maison s'en sorti intacte. Une aile restait, plantée droit dans la terre.

Six hommes ayant réussi à évacuer cet avion, qui appartenait au 560th BS du 390th BG, sont réputés avoir été aidé par les résistants Hollandais, bien que cela n'ait jamais été prouvé, d'autres témoignages parlant d'au moins un homme capturé. Ces aviateurs étaient : les lieutenants, Lester N. Mensch, Clyde L. Hughes et Marion E. Wiles, le T/Sgt Edouard W. Mayo, le Sergent Maius Magnerelli et le Sergent Kenneth W. Wheeler. Quatre membres d'équipage furent tués dont l'homme au parachute déchiqueté en l'air.

Les Groningers reçurent ce jour plus que leur compte d'action, quatre bombardiers lourdsétant abattus au dessus de leur province. Un des accidents les plus spectaculaires auquel on ait jamais assisté fut celui du Boeing B-17 numéro de série 42-30667, du 390ème BG. Il tomba près d'un petit village du nom d'Harkstede, quelques kilométres à l'est de Groningen. Les témoins racontent comment ce grand bombardier orbita au dessus du village et comment, soudainement, à peu près une demi-douzaine de taches blanches fleurirent sur le bleu étincellant de ce ciel d'hiver. J'étais moi-même agé de 14 ans, je venais de quitter ce samedi midi mon lycée dans Groningen, et je me souviens que quelqu'un s'est agité en s'écriant : "Hé! Regardez le ballon!" Un observateur plus expérimenté corrigea bien vite, qui nous dit que les minuscules points blancs étaient des parachutes. L'équipage d'un bombardier avait abandonné son avion en détresse! Fascinés, nous avons observé cette scène peu banale.

Au-dessus d'Harkstede le grand bombardier traînant de la fumée, chancela puis plongea, une de ses ailes se cassant tandis qu'un autre membre d'équipage, le pilote, sautait. L'avion pointa vers le sol pour s'écraser dans l'enclos d'un pâturage avec une énorme explosion, un voile sinistre de fumée marquant le site de l'accident et la tombe du "Grand Oiseau". Un chasseur allemand passa en hurlant au ras de l'épave, puis tourna et disparu.

M. Klaas G. Bos, aujourd'hui enseignant à Hoogezand mais Harksteder de naissance se rappelle : "Le bombardier avait déjà survolé Harkstede et nous avions pu voir qu'il brûlait. Une partie de l'équipage flottait haut dans le ciel au-dessus de nous. Alors l'avion réapparu au dessus de notre village une seconde fois et il s'écrasa dans un énorme fracas. En même temps les pièces de l'épave volèrent jusqu'à nos oreilles. Je m'étais déjà élancé dans la direction de l'homme que j'avais vu sauter de l'avion, "le Capitaine" qui était resté dans le bombardier jusqu'au dernier moment, vraisemblablement pour permettre à tout l'équipage d'évacuer.

"J'étais le deuxième à arriver à l'endroit où le pilote venait de se poser. Le premier arrivé c'était l'aide du boulanger. L'Américain jeta son parachute dans un fossé, le couvrant avec une feuille de glace puis demanda, "Où pourrions-nous parler ?" Malheureusement, il n'y avait pas beaucoup de temps pour discuter la meilleure façon de s'échapper dans la mesure ou des tas des gens s'étaient précipités vers la scène, rendant toute tentative pour faire disparaître l'homme extrêmement dangereuse." (Les Allemands avaient de très désagréables idées concernant les gens qui aidaient les aviateurs Alliés.)

Le pilote fut guidé vers la maison de M. Flip Heikens, un fermier, Là il pourrait se remettre de l'épreuve qu'il venait de traverser. On lui donna à boire et quelque chose à manger. Cependant ses hôtes hollandais remarquèrent rapidement qu'il ne pouvait rien avaler. Il était trop secoué par les pérpéties de ses dernières minutes de vol.

Mme. Heikens se souvient bien de l'incident: "l'homme, d'environ trente ans, vigoureusement bati, avait une allure plutôt aristocratique, c'était manifestement un officier. Son uniforme était de couleur sable et - cela je m'en souviens bien, car une femme a l'oeil vif pour ces choses - il avait pas mal d'or : montre-bracelet en or, gourmette en or et une chevalière, en or aussi."

Bientôt le médecin local, le docteur J. Berg, arriva et après une courte conversation avec l'Américain il lui demanda de noter son nom avec l'intention de le transmettre à la résistance. Les rumeurs disent que des membres de "Knokploeg" (littéralement "Le Groupe Combattant") de Groningen, déguisés avec des uniformes allemands capturés arrivaient dans une voiture pour essayer de soustraire l'aviateur américain des pattes des Allemands. Cependant l'enthousiasme excessif de la population locale qui s'était réunie en grand nombre contrecarra ce plan avec pour conséquence l'arrestation du pilote par un SS hollandais.

M. W. Kruise, policier dans la municipalité de Slochteren à l'époque a donné un récit détaillé de ces derniers événements. Avant de se précipiter vers le site de l'accident, il fit d'abord un rapport au Quartier général de la Police par téléphone. "Comme ça deux des membres de ce Quartier général, qui faisaient un excellent travail dans la résistance, ayant été (immédiatement) informés ils pourraient peut-être prendre des mesures pour aider l'aviateur."

Le pilote était descendu sur les terres du fermier M et, quatre hommes et quelques femmes, appartenant à un groupe de résistance, transportant des vêtements civils pour l'aviateur,étaient parmi la foule. Une voiture avec les deux policiers résistants de Slochteren était aussi dans le voisinage, prêts à passer à l'acte immédiatement quand une occasion se présenterait pour faire disparaitre l'aviateur. Mais une telle chance ne devait pas se présenter.

"Quand je vis le pilote, il était déjà aux mains des Allemands. Vous ne savez jamais ce qui peut arriver, donc je fit un clin d'oeil au pilote et immédiatement il répondit à mon signe. Je pensai, 'Maintenant il sait qu'il doit être sur ses gardes, si une occasion se présente.' Je ne sais pas si les allemands sentirent que quelque chose se tramait - le sentiment anti-allemands étant très répendu - mais ils commencèrent à donner des coups de pied et frapper des témoins. Les spectateurs ayant pris un coup de botte nazie s'enfuirent en hâte. D'autres allemands arrivèrent alors et l'espoir de le secourir s'évanouirent.

Donc l'américain fut fait prisonnier par les allemands, partageant le sort de certains de ses équipiers. Un témoin occulaire dit que la réunion des aviateurs américains fut particulierement joviale. Ils furent conduits à Groningen dans le "Rabenhaupt-kazerne" - des baraquements de l'armée de Hollandaise situés au sud de la ville utilisée pour lors par les Allemands, et dont les bâtiments furent détruits pendant les durs combats de 1945 quand Groningen fut libéré par les Canadiens. Une fois, comme je m'étais arrêté pour regarder ces hommes derrière les lourdes barres des portes de fer, je me suis fait grossièrement chasser par les beuglements d'une sentinelle allemande. (A l'époque, même regarder un américain était interdit.)

Le pilote de la Forteresse Volante était le Flight Officer Francis R. "Budd" Gerald. Les autres membres de l'équipage étaient : le lieutenant Ernie A. Amport, copilote; le lieutenant W. J. Bumgarner, Navigateur; le lieutenant G. Garner, Bombardier; le S/Sgt Nick M. Colagiovanni, Ingénieur; le sergent R. E. Lanham, aide ingénieur; le S/Sgt J.J.Costa, Opérateur radio; le sergent J.C. King, Jr, mitrailleur de sabord; le sergent D. C. McConkey, mitrailleur ventral et le Sergent Collidge Howlett, mitrailleur de queue. C'était la première mission pour l'équipage mais la troisième pour Gerald Budd qui se remémore :

"Notre 390th Bomb Group a été durement secoué par la flak en survolant les îles de la Frise sur la route de la cible. C'est à ce moment que nous avons perdu un moteur, mais nous avons continué dans la formation avec les autres B-17s. Juste une minute ou deux avant d'atteindre Emden, 6 ou 8 bimoteurs Ju 88 tombèrent du soleil sur notre Squadron de commandement, le 568th, nous envoyant leurs roquettes. Une fusée toucha notre aile droite, laissant un trou énorme et perçant le réservoir de carburant de droite.

"Après le largage de nos bombes et avoir quitté le secteur de la cible, nous avons été attaqués par de nombreux Me 109s. A ce stade, avec deux moteurs KO et l'aile droite en feu, nous étions incapables de rester avec le reste de nos formations. Une fois isolés, les Me 109s nous attaquèrent à tour de role et le feu de leur canons mit hors d'état notre troisième moteur. Nos mitrailleurs furent crédités d'un Ju 88 et de deux Me 109s."

Nous avons perdu de l'altitude, chutant de 21,000 pieds à environ 15,000 ou 16,000 pieds et les commandes sont devenues quasiment sans effet aucun, a cause de l'aile en feu et et des dommages dans le nez de l'appareil. Avec un avion dramatiquement endommagé capable d'exploser à chaque instant et les Me 109s renouvelant attaque sur attaque, j'ai donné l'ordre à mon équipage d'abandonner l'avion. Nous avons tous sauté. Moi en dernier, après avoir essayé de pointer l'avion en direction de la mer. Certains d'entre nous avaient été blessés par la flak. Mon mitrailleur de queue étant le plus grièvement atteint. Le sergent Howlett avait été touché aux deux jambes par les tirs de mitrailleuse d'un 109."

Une forteresse du 385ème BG est tombée près de Zuurdijk. Elle s'écrasa sur les terres situées en face de la ferme de M. Warendorp-Torrenga, des morceaux de gilets cuirassés contre les éclats des obus antiaériens se trouvent encore là. Un homme, probablement un mitrailleur, fut tué dans le crash. Un autre fut assez malheureux pour se parachuter dans le Reitdiep (une rivière canalisée, allant se jeter dans le bras de mer "Lauwers") et se noyer. Les autres membres d'équipage furent capturés par les Allemands.

Le copilote, 1st lieutenant John Richards Ward agé de 21 ans, se cacha pendant le jour et, quand l'obscurité fut tombée, frappa à la porte de la maison de M. Cornelus Brinkhuizen, gardien de la station de pompage "Electra" (règulant l'alimentation souterraine en eau) près d'Oldehove. Ward y passa la nuit et M. Brinkhuizen avait l'intention de continuer à cacher l'aviateur jusqu'à ce qu'il puisse être mis en sécurité. Mais, le lendemain il découvrit que son voisin, qui avait une femme très bavarde à qui l'on ne pouvait pas faire confiance, connaissait aussi la présence de l'américain. Il n'osa pas prendre l'énorme risque de se faire prendre et dû signaler la présence de l'aviateur. "Ca m'a fendu le coeur - c'était un chic type."

M. Brinkhuizen dû expliquer la dissimulation de l'américain pendant une nuit et fut ammené à la maison Scholtens (de très mauvaise réputation), quartier général du "Sicherheitsdienst." Là, un homme du S.D. le rabroua: "Monsieur Brinkhuizen, cela vous coûtera votre tête." Ils suppose qu'il doit d'avoir conservé sa tête au prétexte que les communications téléphoniques furent interrompues cette nuit là et au sergent Hollandais (pourtant nazi) de la gendarmerie qui heureusement confirma son excuse. (M. et Mme. Brinkhuizen conservent toujours le souvenir du jeune aviateur américain et seraient heureux de savoir, après toutes ces années, ce qu'il est advenu de leur invité d'une nuit et s'il est en bonne santé.)

À approximativement 13h00, trois chasseurs allemands tombèrent à l'ouest de Groningen. Un, Me 110 fut intercepté par les chasseurs américains au nord-ouest de Groningen et abattu portant les traces de coups au but dans ses deux moteurs, laissant échapper un ratatouillage et bruit de ferraille étonnant. M. H. Dorenbos, le forgeron de Lettelbert, assista à cet événement. Selon lui, le pilote essaya d'amener le chasseur endommagé jusqu'à l'aérodrome d'Eelde, une base de la Luftwaffe. De toute évidence il changa d'avis quand il vit devant lui le lac "Leek" et se décida à se poser sur le ventre dans un pâturage juste avant ce lac. Avec ses hélices pliées, l'avion vint s'arrêter à mi-chemin entre le village et le lac, se retournant presque lorsque son nez vint frapper une inégalité du terrain.

Le mitrailleur de cet avion ayant sauté auparavant venait d'atterrir dans un bosquet. Marchant dans la direction où son avion venait "de se vomir" il s'arrêta en chemin pour échanger quelques mots avec le forgeron. Il lui dit qu'ils avaient décollé vers 12h00 de Hannovre. Cette information permet d'identifier ce chasseur bleu-gris comme un Me 110 du ZG26, "Horst Wessel," qui était basé sur les térrains de Quackenbruck/Wunstorf/Hildesheim, près d'Hannovre.

Pendant ce temps un Me 109 précédé d'un long rugissement vint s'écraser dans un champs cultivé près du village de Niebert, entre Letterlbert et Marum. Il y creusa un cratère assez grand pour y loger une petite maison. Le pilote, sain et sauf, s'était parachuté au nord de Marum. Un autre chasseur allemand tomba à Opeinde, juste à la frontière des provinces de Groninger / Frisian et le pilote fut tué.

Presqu'au même moment, un B-17 dû abandonner sa formation composée d'environ 30 appareils. Il perdit de l'altitude en tournat en rond, pendant que trois membres d'équipage abandonnaient en urgence le bombardier. Les témoins virent alors l'avion se remettre en ligne et prendre la direction de l'ouest, semblant suivre d'autres formations tout en volant beaucoup plus bas.

Un des aviateur de ce B-17, le lieutenant Edouard Pollock de New York se posa à De Wilp, près de Marum, et fut recueilli par un Groupe de Résistance local. Le lieutenant Pollock atterrit presque au milieu du village. Bien que de nombreux villageois se soient réunis autour de l'homme tombé du ciel, quelques courageux appartenant à l'organisation de résistance locale furent assez hardis pour prendre en charge l'américain, non sans avoir adressé à la foule un avis: "tenez vos langues!"

Ces hommes appartenaient au groupe mené par M. J.J. Zijp, instituteur à De Wilp. Il "Travaillait" pour le L.O. Landelijke Organisatie, Organisation Nationale résistante. (En 1944 son groupe fut démantelé et il fut arrêté puis interné dans un camp à Wihelmshaven où son état de santé se dégrada, souffrances dont il ne se remit jamais.) Pollock resta caché pendant six jours avant que le groupe Zijp ne l'expédie via la filière d'évasion "Appelscha". Après "Appelscha", les pilotes qui avaient été abattus étaient pris en charge par le "Koerierster" Zwarte Tine (la Dent Noire). Depuis Appelscha la ligne passait par Meppel et de là en Belgique où les voyageurs illégaux étaient remis entre les mains de la "Grande Blanche." Ce groupe se chargeait de leur transport via la France, l'Espagne puis le Portugal à destination de l'Angleterre.

"Penny's Thunderhead" un B-17 du 614th BS, 401st BG faillit terminer sa course dans la Mer du Nord près des côtes de la Frise. Piloté par 1e lieutenant Richard Kaufman ce matin là, "Penny's Thunderhead" avait décollé de sa base de Deenethorpe dans le Norfolk. En route pour Emden tout se passa bien, mais arrivé sur la cible l'avion fut touché par la flak. Deux moteurs furent mis hors d'usage, le nez et la soute à bombes étant eux aussi touchés.

L'hélice du premier propulseur fut mise en drapeau mais celle du second resta déployée faisant prise au vent. Un B-17 pouvait voler sur deux moteurs, mais il était quasi impossible d'assumer la traînée aérodynamique d'une hélice en panne. Pour corser encore les choses, le troisième moteur surchauffé, prit feu et l'incendie ne put être maitrisé. "Penny's Thunderhead" perdit graduellement de la vitesse et de l'altitude, abandonnant la protection de sa formation. Son équipage savait qu'il était dans le pétrin car la Luftwaffe avait la désagréable habitude de choisir les retardataires et de concentrer leur attaque sur eux.

Comme prévu, vinrent les chasseurs, infligeant de nouveaux dégâts et le moment arriva où le lieutenant Kaufman senti qu'il ne pouvait plus contrôler l'avion endommagé. Il donna l'ordre d'abandonner l'avion. Trois hommes se jettèrent dans le vide à 18,000 pieds et un moment plus tard, au dessus de Harlingen sur la côte, cinq autres hommes suivirent. Deux d'entre eux effectuèrent des sauts retardés, raccourcissant la durée de leur descente, tombant dans la mer en face d'Harlingen pour y être repêché par les Allemands. Les trois autres ouvrirent prématurément leurs parachutes et dérivèrent au large, emportés par le fort vent d'est. Seul un d'entre eux, le sergent Donald Carlson, opérateur radio, fut sauvé par le canot de sauvetage "Twenthe" qui s'élanca sans demander de permission aux allemands. Environ trois mois plus tard le corps du copilote fut rejetté à terre du côté de Pietersbierum, sur la côte de la Frise, et fut inhumé sur place.

Le lieutenant Fritzgerald, bombardier, ayant des difficultés avec son parachute prit trop de retard pour sauter avec les autres. Quand finalement il fut prêt à sauter, il entendit le lieutenant Kaufman lui annoncer que le moteur avait arrêté de brûler et que l'autre hélice s'était enfin mise en drapeau. Du coup il s'éloigna du sas de secours.Convaincus que l'équipage entier avait abandonné l'avion et qu'il volait sur pilote automatique les chasseurs allemands avaient rompu le combat.

Très vite, Kaufman et Fitzgerald firent le point. "Penny's Thunderhead" avait été terriblement endommagé et perdait de l'altitude, mais avec le troisième moteur sous contrôle et les hélices correctement positionnée en drapeau ils décidèrent de tenter le retour vers l'angleterre. Et ils réussirent! Sur deux moteurs ils achevèrent leur terrible mission sur l'aérodrome de Lindholm situé près de la côte dans le York. Pour leur exploit les deux hommes reçurent la Distinguished Flying Cross.

À environ 12h15, les gens d'Harlingen virent quatre chasseurs allemands survoler la ville. Ils arrivèrent à basse altitude puis effectuèrent une ressource, montant à l'attaque de chasseurs américains s'approchant par l'ouest. Mais les Américains les attendaient et bientôt les combats se développèrent. Très vite un Me 109, probablement parti de Leeuwarden, tomba, moteur stoppé. Le pilote se débrouilla à sortir de son piqué pour faire un atterrissage sur le ventre entre Harlingen et Franeker.

Un autre 109 arriva, mais celui-ci était encore capable de voler, bien que ses volets soient sortis. Le Messerschmitt survolait la ville d'est en ouest quand, à l'étonnement des observateurs, les canons antiaériens allemands commencèrent à tirer comme des fous. Leur visée fut excellente. La queue entière de l'avion se détacha. Un témoin occulaire s'exclama, "Pour sur, voila un beau carton," mais le pilote allemand devait probablement avoir un avis différent sur la question. Sans perdre son temps à réfléchir à ce problème inattendu il réussit à évacuer l'avion avant qu'il ne percuta la surface de la mer. Non loin du rivage il prit contact avec l'eau. La chance fut avec lui, car un pêcheur était dans les parages avec son bateau. Il avait observé la scène et dans son esprit il ne pouvait s'agir d'un avion allemand. Quand il eut sorti l'allemand de l'eau, il lui demanda, "est-ce que vous êtes Anglais ?"

La réponse fusa, "Donnerwetter noch mal Mench, bring mir nach dem Hafenkaptitan!" (Tonnerre de dieu, pas encore mon gars, amenez-moi à la capitainerie!) On peut supposer que l'entretien qui s'en suivi fut orageux. A l'époque les habitants d'Harlinger trouvèrent que c'était plutôt un bon gag.

Deux bombardiers tombèrent ce jour sur le territoire du Friesland. Un B-17F, N°42-30218, du 95ème BG s'écrasa à Ferwerd sur la côte de la Frise. Il avait été poursuivi par plusieurs chasseurs crachant leur obus avant que mortellement blessé l'oiseau n'ait fini par dégringoler en mer près de la digue. Trois membres de l'équipage sautèrent près de Zwaagwesteinde, un fut trouvé mort et les autres furent capturés. Il n'est pas certain qu'ils appartenaient tous à la Forteresse tombée à Ferwerd mais c'est probable.

Un autre Boeing B-17 retardataire, du 385ème BG, fut abattu par les chasseurs au dessus du Friesland. Environ trois ou quatre hommes avaient sauté au dessus de l'Allemagne et trois autres se posèrent près de Sneek. Tous trois, blessés, furent admis à l'hôpital Catholique de Sneek où leur chambre fut inondée par les fleurs amenées par les habitants enthousiastes. Il se dit qu'un huitième homme tomba aux alentours de Grouw / Terhorne. Deux hommes furent tués dans le crash et enterrés localement (après guerre tous les américains tombés à la guerre furent ré-inhumés au sud de la Hollande à Margraten).

L'avion percuta le sol de Goengaaster Mieden, sur les terres du fermier Hinne Bosma et s'embrasa. L'épave n'ayant jamais été renflouée par les Allemands, plus de dix années s'écoulèrent avant que la chasse au métal, menée par des gens du voyage, l'ait fait disparaître, au grand soulagement du fermier. En effet, pendant tout ce temps les pales des quatre hélices avaient continué de dépasser au-dessus de la surface du terrain, blessant continuellement les pieds des vaches!

Le quatrième bombardier à s'être écrasé dans les environs de Groningen ce jour, un autre B-17, appartenait au 332ème BS, 94ème BG. Il vint mourir dans les eaux peu profondes de l'Eems après un combat héroïque qui coûta aux allemands plusieurs chasseurs. Venant de la direction d'Emden il était poursuivi par 6 à 8 chasseurs qui lui tiraient dessus tandis que l'équipage rendait bravement coup pour coup. Deux des chasseurs allemands percutèrent dans les eaux de l'Eems. C'est alors que le B-17 s'embrasa.

M. H. Coolman, un fermier vivant à la ferme de "Bosma", Oudeschip, vit d'abord le bombardier qui volait en direction de l'ouest. Puis il se retourna et a chancela en l'air comme ivre, ses moteurs hurlants et de toute évidence hors de contrôle. Il chûta plus bas, trainant un panache de fumée noire, avant de disparaitre derrière la digue du front de mer. De la fumée monta vers le ciel.

"Puis en cherchant, j'ai vu sept taches minuscules. Un des parachutistes, qui avait été mitraillé par un pilote allemand à la gachette facile, est tombé dans l'Eems. Les autres dirigés par leurs parachutes vers la rive, touchèrent un sol plus consistant. Un d'entre eux se posa sur le "middeldijk" (? Digue médiane ?). Il se posa à une cinquantaine de mètres de mon manoeuvre qui aurait pu lui parler anglais, ayant vécu au Canada pendant quelques années. L'américain plia son parachute et a ensuite alluma une cigarette. Mais avant qu'ils n'aient été capables d'échanger un mot, les allemands arrivèrent. Les autres se posèrent le long de la côte. Ils furent aussi fait prisonniers."

On se rappelle bien ce crash, dans lequel trois aviateurs furent tués et qui a été clairement décrit dans un historique local sur la guerre. Dans les villages de Bierum et Spijk, de nombreuses personnes se rappelleront cet événement jusqu'à à la fin de leurs jours. Il y a M. Hoving qui, avec quelques amis, fut arrêté par une patrouille allemande sur la route menant à l'épave puis jeté dans une prison de Groningen. Après avoir été inquiétés à ce sujet pendant une quinzaine de jours ils furent finalement inexplicablement libérés par les Allemands et regagnèrent leurs maisons.

Vingt cinq ans environ ont maintenant passé depuis ce jour, mais des deux côtés de l'océan il reste beaucoup d'hommes et de femmes, qui ne l'oublieront jamais.

Article écrit en 1968..pw

REMERCIEMENTS: l'auteur remercie M Irving Lifson pour son aide spontanée et constante afin de loacaliser le F/O Gerald et pour avoir mis à jour de nombreux détails évoqués dans ce récit. Sans son aide, cette histoire ne serait pas ce qu'elle est et je souhaite lui exprimer mes sincères remerciements pour son excellente coopération. Quelques autres détails proviennent du livre, "Harlingen dans Oologstijd" par H. H. Drost.

Ces informations ont été gracieusement partagées par le Colonel Harry F. Cuver,
premier Officier Commandant du 100th Bombardment Group (H)
http://www.100thbg.com/mainpages/history/histo

N° série

 Type / Nom

Squadron

Code

Raison

Mission

Pilote / Equipage

42-31122

Boeing
B-17G-1-BO
"Six Nights in Telergma (Arabian Nuts)"

390 BG 568 BS

BI-A

Bimoteur allemand
(Me110 ou Ju88)

Emden

Point de chute
Mer du Nord

Capt. Hiram C. Skogmo P KIA,
Maj. Ralph V. Hansel CP KIA,
Lt W. Poythress Jr. TG KIA,
T/Sgt E. Phillips TT POW,
Capt. Irving R. Lifson N POW,
Capt. Donald S. Warren N POW,
était un 11ème homme dans cet appareil qui était l'appareil leader de la 3rd Bomb Division.
8KIA, 3POW,
MACR 1583




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