Généalogie des familles TRAVERS et Alliées,  

de l'Albanais (entre Annecy, 74 et Aix-les-Bains, 73)

Les surnoms en Savoie

Nés de la nécessité de distinguer les personnes portant le même patronyme et le même prénom, l'utilisation du surnom dans les discussions quotidiennes restait encore très fréquente jusque dans les années 70 (1970!!) dans ma commune natale, Gruffy. C'est ainsi que mes cousins Joseph Travers et Henry Emonet étaient nommés Joseph (Jose) du sapni (ou l'sapni) et Henry Châmi (ou l'grand Châmi), surnoms provenant du lieu-dit d'origine de leurs ancêtres (Hameau du Sapin, à Viuz-la-Chiésaz encore répertorié sur la carte IGN au 1/25000, et ferme "Chez Châmi" à Gruffy, non répertoriée, 500 m. au dessus du cimetière).

Il y avait aussi mon oncle, Léon Travers, connu sous le nom de Léon Naure, mon cousin, Henri Travers, Mizan, des Richard Granpire et d'autres Bauloz (prononcé Beule en patois), des Charles Caforet, des Dagand Fiornet et Colas, des Daviet Carmagne, Denaz, ... . Cette série de surnoms est intéressante à étudier, puisqu'elle a fait l'objet d'une officialisation dans les actes d'état-civil au 18ème siècle (en particulier actes de naissance/baptème), jusqu'à la première période française (1792 à 1815 ou 1816 selon les lieux); on trouvera ainsi Travers dit Naure, Travers dit Mizan, etc. . L'origine de ces surnoms semble assez diversifiée :

  • Non déterminée : Mizan, Fiornet, ...
  • Caractéristiques physiques : Granpire (de grand Pierre), ...
  • Caractéristiques diverses : Naure, de honorable, ...
  • Très souvent d'une alliance : Dagand/Colas, Charles/Cavoret, Richard/Bauloz, ...

Voici ce qu'en disait Bernard Emonet dans un échange récent sur "Genesavoie" :

"Enfin le surnom :
le dépouillement sytématique fait apparaître le fait qu'une même personne est inscrite parfois sous son nom simple, sous son surnom (qui peut devenir le nom d'usage) ou sous la double mention séparée par dit dans les deux sens :
A Saint Alban Leysse on trouve successivement pour la même lignée :
MARIET, MARIET dit ROSSET, ROSSET dit MARIET, ROSSET, ROCHEX
Sur Massingy on trouve simultanément :
BUTTIN - BLAMOUZ , BUTTIN dit BLAMOUZ , BLAMOUZ dit BUTTIN
BERTHET, BERTHET dit CHESNES, DUCHESNE, DUCHENE
avec toutes les variantes orthographiques : BONTRON dit TOPY, BONTRON dit TOUPIS, BONTRON dit TOPPIER, EMONET dit TISSOT, TISSOT dit EMONET TOPPIER, TISSOT dit TOPPY, TOPY, TOPPY, TOPPIE, TOUPY, TOUPIS, TOUPIS dit TISSOT...
Bien malin celui qui s'y retrouve. Une explication donnée par mon père me semble bien correspondre à mes observations. Mon père a été "bovéron" à partir de l'âge de 10 ans à CESSENS et MASSINGY. Voila ce qu'il m'a dit :
"Autrefois lorsque quelqu'un se mariait en bouc, il prenait le nom de sa nouvelle famille et on ajoutait à son nom propre le nom de la famille dans laquelle il vivait. La maison TISSOT s'appliquait à tous ceux qui y vivaient. Ainsi EMONET marié chez TISSOT devenait "TISSOT".
Je pense que c'est l'explication : l'individu déclarait EMONET dit TISSOT pour l'enregistrement des baptêmes de ses enfants car tout le monde l'appelait TISSOT. A son décès, il est possible que l'on ait complétement oublié son nom de "jeune homme" ou "jeune fille". La lignée garde le même patronyme. Ainsi au fil des années EMONET se transforme en EMONET dit TISSOT puis en TISSOT dit EMONET car on se souvient encore de son origine puis seul reste TISSOT.
J'ai pu observer souvent cette inversion de noms ainsi que le fait que le surnom vient du nom du conjoint d'un aïeul. On peut ajouter aussi deux autres faits assez courants :
- L'usage du Francoprovençal (ici en l'occurence dans sa variante Savoyard)
A l'église l'individu qui ne sait pas écrire déclare : "Maé d'm'apalo José JOURET !"
Transcription du curé : Joseph JOURET. Or JOURET, c'est la variante de JORIS. Le même individu a donc changé de nom pour la postérité.
- L'épouse est souvent noté sous le nom de sa mère du moins dans les paroisses de l'Albanais sous le Clergeon :  mon aïeule Marie ROUPIOZ est notée DECARRO dans les premiers actes la concernant.
C'est relativement fréquent dans mon dépouillement pour la fin du 17e et le début du 18e. A la fin du 18e, les mentions d'état-civil sont assez fantaisistes quant à l'orthographe utilisée. A partir de 1803, on note une certaine régularité avec la reprise des registres par les prêtres. L'orthographe se fixe définitivement vers 1860. Il est donc conseillé avant d'entreprendre un dépouillement de commencer par la période suivante (1860-1900) pour bien s'imprégner des patronymes en usage dans la commune afin de bien retranscrire les écritures difficiles du 17e en particulier. Je conseillerais aussi de garder en regard de cette transcription normalisée qui permettra la recherche alphabétique et le regroupement des individus nommés différemment de noter scrupuleusement la variante orthographique rencontrée dans sa forme originale."

J'y rajoutais les remarques suivantes : "Merci Bernard pour cette excellente étude, très complète et instructive et qui éclaire certaines difficultés que j'avais rencontré, en particulier du coté de mes ancêtres Conversy et alliés, sur Saint-Girod, Albens et St Félix. Peut-être faut-il rappeler ce que veut dire marié en bouc : le mari va habiter chez l'épouse, ce qui survient en particulier lorsqu'un garçon d'une fratrie épouse une fille unique (par décès de la mère après cette naissance, impossibilité d'avoir un autre enfant, ou par décès des autres membres de la fratrie, les filles uniques étant naturellement rares à l'époque). Le processus décrit par Bernard permet alors au nom de famille qui allait disparaître de perdurer, (voir sur ce sujet le site : http://www.justice.gouv.fr/discours/d080201.htm ) tout en permettant à la famille d'origine du mari de ne pas trop parcelliser la propriété, ou de ne pas trop léser un cadet. Cela ne signifie pas que c'étaient systématiquement des mariages "arrangés", mais c'est toutefois fort probable."

Le "X dit Y" n'a que très rarement perduré comme patronyme officiel : dans toute ma carrière, qui m'a permis de connaître quelques dizaines de milliers de patronymes d'appelés et de cadres, je ne l'ai rencontré qu'une fois
Bernard parle également de l'usage du patois et de ses conséquences; j'en citerai un autre exemple, mes ancêtres Davennaz (prononcer Davin-nâ, avec le in long), Davoine en patois local, sont tous redevenus des Davoine ... sauf des expatriés, restés Davennaz! Pas forcément facile de remonter une généalogie n'est-ce-pas, camarades Sherlock Homes!

 

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