Lundi 3 décembre

Promenade dans la ville de province la plus proche de la base. Certains jours cette ville me déprime. Aujourd'hui, sous un ciel gris et un crachin glacial, elle m'a paru agréable à traverser, avec son musée des beaux-arts rempli de grandes peintures académiques, ses salons de thé et ses antiquaires.

Mardi 4 décembre

Jeté un coup d'oeil sur mon horoscope pour 2002. J'ai vite refermé le livre et l'ai reposé sur le rayon du supermarché. Tout va être secoué, c'est terrible ce qui attend les gémeaux du second décan !

Mercredi 5 décembre

Tout le monde découvre le Jerry Lee Lewis country, à la base. C'est l'effet Nick Tosches. Moi je connaissais et j'aimais déjà, mais je n'osais pas le dire. Les albums de Jerry Lee figuraient dans la discothèque de l'homme qui courtisait ma grande soeur, un fringant rocker néo-fifties qui allait se métamorphoser assez vite en un ignoble beauf.

Jeudi 6 décembre

Gros ramassage de feuilles en perspective. Bill et Joe vont venir m'aider. Lonesome ne veut pas mettre le nez dehors. Il prétend qu'il est malade. J'ai touché son front, il n'avait pas de fièvre. "J'ai pas dit malade, j'ai dit sur le point de l'être."

Vendredi 7 décembre

La voiture du GFIV a des problèmes. Elle ne démarre plus. Encore un lien avec la civilisation qui s'en va. Comment allons-nous finir ?

Samedi 8 décembre

Ce matin, j'ai lu ça :

" Évidemment, la vie est immense, démente, dévorante, apparition insensée sur les miasmes de la matière et, voici, qu'en plus, elle se réfléchit dans les miroirs de la prison mentale, devenant cette tragédie que l'on sait, puisqu'elle est d'incarnation éphémère, musardant parmi les espèces et passant comme une ombre. "

Yves Buin, Jack Kerouac

 

Dimanche 9 décembre

Lire Kerouac revient à plonger dans l'océan sans fin du langage (Burroughs parlait à son propos de "Mississippi verbal"). Tout est relié constamment dans l'univers de Kerouac, et tout est là, accessible, à portée de mot. Ce tour de force est le résultat d'une extraordinaire ouverture de la conscience sur l'immensité et la diversité fugitive de l'univers. Douleurs et illuminations se précipitent, comme dans un solo de Parker..

Lire Kerouac est une expérience qui laisse toujours des traces. Je me souviens d'une maison humide au bord de la mer en Bretagne où je lisais Vanité de Duluoz, d'un appartement ensoleillé à Paris où je dévorais Visions de Cody.

L'excellent texte qu'Yves Buin a consacré à Kerouac précède une sélection de courts extraits, une sorte de best of. C'est parfait. La dose idéale.

Lundi 10 décembre

Patrick m'a fait découvrir le saut dans le vide, un très beau texte de Troudair. Si vous voulez le lire (et je vous le conseille), prévoyez du temps, c'est assez long. Prévoyez également une durée d'atterrissage pendant laquelle vous risquez de paraître un peu étranger à votre entourage et où votre environnement familier vous paraîtra un peu bizarre.

Mardi 11 décembre

Tout-à-l'heure, je roulais sur une petite route de campagne en suivant un camion. J'ai mis une cassette que Lonesome m'a faite pour m'initier à la country. Je crois que c'était les Flying Burrito Brothers. Et soudain, j'étais dans un film, un road movie, traversant des espaces verglacés du côté du Montanna ou sur la route qui mène à Pitsburg. Pendant quelques secondes, ma vie était devenue une séquence de cinéma. Je vais écouter plus souvent de la country en voiture.

Mercredi 12 décembre

Pas en forme. Le froid ne me réussit pas. J'écoute Marvin Pontiac, la dernière trouvaille de Lonesome Pat. Une voix à la Léonard Cohen, des rythmes hyptnotiques, des choeurs tribaux. Envoutant, il n'y a pas d'autre mot. Le fait que Marvin Pontiac n'existe pas vraiment ajoute au charme.

Jeudi 13 décembre

Je m'installe devant l'ordinateur. Je le regarde, les doigts posés sur le clavier. Et soudain, je réalise que je n'ais rien à écrire. Je vais me refaire un café. Ce sera tout pour aujourd'hui.

Vendredi 14 décembre

Je ne m'attarde pas car le bureau est à peine chauffé et j'ai hâte de retourner auprès de la cheminée.

Samedi 15 décembre

Contraints à l'hibernation.

Dimanche 16 décembre

Ce matin, tout le monde est malade et parle du nez. J'ai de la fièvre.

 

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