CORRESPONDANCES (Fabe feat. Al)

 

Al

Talant, 26 juin 1998, salut Befa, qui d'neuf depuis la dernière fois?

Pour moi, toujours la même. En c'moment j'taffe un vrai

calvaire: j'm'emploie à gagner un salaire de misère dans

une atmosphère qui pue comme l'enfer

Y paraît qu'quand tu travailles t'as le droit des

espérances, j'sais pas mais en faisant mes palettes, j'ai du

mal à m'dire que j'ai de la chance...

Au fait, j'voulais savoir si t'as pas un pote qui peut

m'faire un son, tu sais ici c'est pas New York, c'est juste

Dijon. Pour assouvir sa passion, ça relève de la mission.

J'suis là à regarder loin devant moi en rappant mes textes

dans l'vide, mais j'vois pas l'endroit où hip-hop rime avec l'avenir solide. Les incertitudes se

cachent derrière les embûches. Tu t'excites comme une abeille dans sa ruche et tu t'rappelles qu'il

faut remplir la cruche et metre du pain dans la huche.

Dur d'avancer sans obstruction, les murs, comment en faire abstraction? le futur s'annonce difficile

dans sa construction

Ne brusquons pas les choses, ça veut dire quoi ça?

Est-ce que les choses se gênent pour me brusquer moi? Souvent j'pense quon est abonnés à la

souffrance, aux carences sue le plan de la chance.

Comme vivre dans une substance qui s'endurcit jusqu'au jour où plus aucun mouvement n'sera

permis.

Pas verni, mal servi et pas un radis en poche.

J'entends "le paradis est proche!" Mais on nous prend pour des cloches, j'veux faire faire mon truc

alors j'm'accroche. Mais pour combien de temps? La paroi est glissante, les prises sont peu

nombreuses. Ma chute peut-être imminente... Bon j'arrête, je n'chiale pas plus. Au fait, j'attends

grave le nouvel opus.

Tchao, à plus.

 

Fabe

Quand j'faisais 19H00-6H00 du mat à ma porte de la Chapelle, j'trouvais qu'les sacs "La Poste"

étaient tous plus lourds que la vie est belle. J'fais partie d'ceux qu'ont pas eu peur de suer.

J'recevais pas d'courrier, mais ça m'a pas empêcher d'trier l'tiens!

Servir des verres à des poivrots derrière un bar qui n'm'appartenait pas. J'ai dit "j'me casse!", ils

m'ont dit "on t'retient pas!". Alors j'suis parti et si j'en tiens pas rancoeur aujourd'hui c'est qu'mon

coeur pense à tous ceux qui sont toujours là-bas, en train d'trimer pendant qu'j'raconte ma vie au

cromi. Remarque j'y croyais , j'disais "j'réussirai, c'est promi!" En notant chaque idée qui traînait

sur un papier volant... Ca fait un bout d'temps!

D'après c'que j'ai appris, on a tous une place en enfer. Pour un plus ou moins long séjour et y'a des

jours on n'sait plus comment faire. J'espère pas faire trop d'mal, j'veux juste respirer. L'avenir est

incertain, même si t'es le mec le mieux assuré. Ca peut rassurer et ça peut faire monter la pression.

Entre c'qu'on fait et c'qu'on dit, y'a la bonne foi et la discrétion. J'vais voir c'que j'peux faire au

niveau du son mais bon t'as vu, t'es déjà venu, Paris c'est pas New York non plus... Et même New

York, c'est pas New York non plus.

 

Ps : J't'écris de chez Cut, on est le 11 Juillet. J'avais oublié, quand j'étais petit c'était l'époque de

l'été...