Dans ce monde. Ce monde qu'on nous propose. Avec son "nouvel ordre mondial", ses ancien communistes devenus capitalistes devenus démocrates, et ses démocrates devenus libéraux... Et derrière tout ça, l'haleine fétide des vielles aigreurs, ds vielles haines, des vielles saloperies...qui ci et là se réveillent et pètent comme autant de pustules à la surface du Globe.

 

Il ya ce monde, donc, et ses musiques siliconées, sa bouffe prédigérée, sa petite course à petit pas pressés vers on ne sait trop quoi, ses interdits, ses maladies, ses béni-oui-oui et toutes ces tragédies servies en couleurs, au jour le jour, à l'heure où chez les moines, on lisait autrefois les textes anciens. Il y a ce monde, on l'a dit, mais outre cela ? Oui, outre cela, qu'existe-t-il ? La réponse a toute prière: La Vie. Les bons moments passés à une table, les balades au bois dormant, l'amour, lentement, longtemps, avec l'autre; à deux ... Outre cela aussi, il y a les couleurs, les odeurs et les goûts. Le goût du paprika. Ce plus merveilleux, de sucre et de piment... Le goût du sel, sans quoi le goût ne serait goût. Outre cela, encore, il y a la joie et la mélancolie, qui alternent en permanence, comme deux soeurs contraires et indissociables. La joie de toutes fêtes, qui explose quand les corps se laissent aller, quand la tribu musicienne libère le feu, à grand coup de dzing, de couacs et de bongros sons joyeux et pétaradant. Outre le gris et le noir et le blanc, il y a les mille et un coloris du grand cirque de la vie. Outre le raid et l'engoncé, l'obtus et l' rbitraire, la loi et la règle, il y a le bon sens, la compréhension, l'acceptation. Outre le non-dit, outre le droit-devant, outre le pas-vu, il y a les plaintes et complaintes, au parfum amer, qui toujours rappellent à la réalité des âmes... Outre cela, il y a l'essentiel: les fondements. Le primitif, l'écho brumeux d'une conque, le doux cliquetis des bouts de bois que l'on fait s'entrechoquer, le gratouillis céleste d'une sanza, l'insaississable, l'origine, l'essentiel. Cet essentiel de vivre auquel nous aurions pas droit ? Cet essentiel d'authenticité auquel nous saurions prétendre ?

 

Alors, en attendant que la prière s'exause, en attendant que la fleur s'épanouisse, musique, musique... comme ces petits bruits que l'on entend plus, comme l'écho sourd de la rue, comme le hurlement des bêtes fauves, comme le jaillissement des sources de Transylvanie, comme le vieux chariot qui lentement bringuebale sur le chemin pierreux, comme l'oiseau qui piaffe au-dessus, tout au-dessus de nos têtes, là-haut, tout là-haut, quand même, et malgré tout.

Orient, Occident, Nord, Sud ...

Il y a tout cela dans IMAFA (Arbre de prière). Et plus encore ! Une veritable musique du monde, héritière et vecteur d'émotions universelles. Servie par un groupe international: Akosh Szelevenyi le Hongrois, Joe Doherty l'Irlandais, Bob Coke l'Americain citoyen du monde, et les Français Bertrand Cantat, chanteur de rock et voix tout court, Bernard Malandain, contrebasse terrestre, et Philippe Foch, percussion totale... Unis dans le même dessein : jouer l'ailleurs, ici, aujourd'hui, et pour demain.

Marc Berthon Novembre 1997