Mémoire :
Mémoire : l’exploitation des eaux minérales naturelles est-elle durable au regard du droit communautaire ?
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    Valérie BERTIER année 1998/1999

    Etudiante en maîtrise de droit public

    et en magistère deuxième année




    Mémoire : l’exploitation des eaux minérales naturelles est-elle durable au regard du droit communautaire ?

    Sous la direction de J.L. CLERGERIE, professeur de droit communautaire

    et de M. PRIEUR, professeur de droit de l’environnement

    Faculté de droit et de sciences économiques de Limoges


    Remerciements

    Je tiens à remercier, tout d’abord, mes professeurs pour l’aide qu’ils ont su m’apporter dans la composition et la rédaction de ce mémoire.

    Je tiens aussi à associer à ce travail messieurs Gilles-Pascal HUSSON, et François BORDET du Journal Européen d’Hydrologie dont les renseignements et les communications sur internet m’ont été particulièrement précieux.

    Enfin, je remercie la société anonyme Perrier-Vittel qui a bien voulu me communiquer des renseignements de grande valeur, à la limite de la confidentialité.


    Avant-propos

    L’eau, et particulièrement l’eau potable, pourrait devenir un " enjeu de la paix et de la prospérité au XXI ème siècle  ". [ 1 ]

    En effet, on dispose maintenant de connaissances scientifiques assez fondées pour exprimer l’idée que l’humanité risque de manquer d’eau au cours du siècle prochain, ou du moins que cette ressource pourrait devenir inaccessible à certaines zones de la planète.

    Ainsi, sa raréfaction est une donnée certaine car, si la quantité d’eau douce renouvelable reste, et restait, à un niveau à peu près stable (environ 40.000 milliards de mètres cubes par an, à condition que l’extension des sécheresses et le réchauffement de la planète ne modifient pas cette perspective), on estime que la progression de sa consommation va encore s’accélérer sous l’action conjuguée de différents facteurs et particulièrement l’accroissement démographique. Par conséquent, l’offre restant stable mais la demande augmentant, le volume d’eau douce attribué par habitant est appelée à se restreindre.

    Par ailleurs, la dégradation de la qualité de l’eau douce sous l’effet des pollutions ainsi que l’inégalité de sa répartition à travers le monde (8 pays[ 2 ] et les 15 Etats de l’Union Européenne se partagent les deux tiers de sa quantité mondiale, alors que d’autres régions du monde[ 3 ] sont confrontées à des déficits de plus en plus chroniques) amplifient le phénomène de pénurie et vont "multiplier les difficultés d’accès à une ressource dont on découvre tardivement qu’elle n’a pas de substitut possible, ni pour la santé humaine ni comme base économique".[ 4 ]

    En d’autres termes, en plus d’être un élément indispensable à l’existence humaine, l’eau est en train de devenir un bien économique rare, gaspillé par certains, trop cher pour d’autres, en tout cas convoité par beaucoup, prenant un caractère stratégique et incertain.

    L’humanité va-t-elle se disputer l’eau ou trouver les moyens de se la partager ? Les pays d’un même bassin versant[ 5 ] se lanceront-ils dans la surenchère des appropriations sauvages ou s’orienteront-ils vers une gestion concertée ? Finalement, la communauté internationale sera-t-elle capable d’ériger en droit la protection de la ressource et d’organiser rationnellement son marché ?

    C’est dans le cadre de ces interrogations sur le devenir de l’alimentation en eau potable que se précise la problématique de l’utilisation de l’eau minérale naturelle et l’importance d’une réglementation qui lui soit adaptée, non seulement rigoureuse afin d’envisager la protection de l’environnement, mais encore souple pour gérer son utilisation.

    En effet, l’annonce de la raréfaction et de la dégradation de l’eau potable est en train de réveiller le souci de la préservation de sa qualité et de mettre en lumière le marché lié à cette garantie. Comment sera-t-il possible dans quelques années de faire face aux véritables "bombes chimiques à retardement "[ 6 ] que constituent les multiples polluants (nitrates, pesticides, métaux lourds, etc.…) des rivières, des sols, et des nappes souterraines qui compromettent la potabilité de l’eau douce autrement qu’en consommant plutôt l’eau de qualité certifiée, donc l’eau minérale naturelle, que celle qui nous est distribuée par les canalisations ?

    En somme, le marché de l’eau embouteillée a un avenir prospère devant lui si les principes qui régissent son fonctionnement assurent la haute qualité de l’eau qu’il distribue.

    C’est au regard de l’enjeu que représente le marché actuel de l’eau minérale naturelle, qu’il est particulièrement intéressant d’analyser la réglementation communautaire qui s’est mise en place.


    Introduction

    L’importance évidente de la ressource en eau potable révèle le caractère indéniablement identique de l’eau minérale naturelle qui, d’après l’opinion commune, semble être la marque absolue de la qualité et de la sûreté du produit. Cependant, comme la notion d’eau minérale naturelle reste assez floue dans l’acception courante il convient de la définir, avant d’évoquer les ambitions qu’a le droit communautaire vis-à-vis d’elle, c’est-à-dire insérer le marché des eaux minérales naturelles dans le fonctionnement du Marché Commun[ 7 ] et protéger la santé des consommateurs ainsi que leur éviter toute source de méprise concernant le produit.[ 8 ]

    En d’autres termes il s’agit, par ordre chronologique, d’inscrire la réglementation des eaux minérales naturelles dans un cadre économique et de la placer dans l’objectif du " développement durable ". Ce concept de développement durable[ 9 ] recouvre l’idée que les ressources vivantes ne doivent pas être utilisées au point de ne plus se renouveler ou, par extension, à porter préjudice aux générations futures et aux ressources communes[ 10 ]. En fait, ce principe impose de concilier développement économique et environnement.

    Dans le langage courant, l’eau minérale naturelle constitue seulement une catégorie particulière d’eau destinée à la consommation humaine]. En réalité, ces appellations ont des significations bien déterminées dans le langage juridique et il convient de les rappeler pour comprendre précisément les réalités qu’elles recouvrent.

    Tout d’abord, la notion d’ "eau destinée à la consommation humaine "[ 11 ]; désigne, comme nous l’enseigne la réglementation communautaire, la généralité des eaux alimentaires, c’est-à-dire des eaux destinées à être consommées, et donc à être potables.

    La directive n° 98/83/CE du Conseil (ci-après désignée comme la directive n° 98/83)[ 12 ] modifiant la directive n° 80/778/CEE du 15.07.1980, elle-même relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine, définit ces eaux dans son article 2 comme :

    - "toutes les eaux, soit en l’état, soit après traitement, destinées à la boisson, à la cuisson, à la préparation d’aliments, ou à d’autres usages domestiques, quelle que soit leur origine et qu’elles soient fournies par un réseau de distribution, à partir d’un camion-citerne ou d’un bateau-citerne, en bouteilles ou en conteneurs ;

    - toutes les eaux utilisées dans les entreprises alimentaires pour la fabrication, pour la transformation, la conservation, ou la commercialisation de produits ou de substances destinées à la consommation humaine, à moins que les autorités nationales compétentes n’aient établi que la qualité des eaux ne peut affecter la salubrité de la denrée alimentaire finale. "

    Pour simplifier, on peut dire que les eaux destinées à la consommation humaine s’apparentent à la grande famille que l’on désigne, dans le langage commun, comme " l’eau du robinet " . Il faut noter qu’en sont exclues, selon l’article 3 de ladite directive, les eaux minérales naturelles[ 13 ] et les eaux médicinales[ 14 ], qui ont chacune leur propre réglementation.

    Par conséquent, il existe un système normatif général pour les eaux destinées à la consommation humaine, et des systèmes particuliers pour des catégories d’eaux particulières. On peut donc déduire qu’il existe trois catégories d’eaux douces potables (les eaux destinées à la consommation humaine, les eaux minérales naturelles et les eaux médicinales) qu’il convient de distinguer, alors que le langage commun aurait invité à inclure dans la première catégorie les deux autres.

    L’eau minérale naturelle est une eau potable très spécifique. En effet, sa définition est très pointue et sa qualification dépend de caractéristiques très encadrées[ 15 ]. Pour s’en tenir à une définition simplifiée mais suffisante pour le moment, il est possible de dire qu’il s ‘agit d’une "eau qui se distingue des autres par sa nature, caractérisée par sa teneur en minéraux, en oligo-éléments, ou autres constituants et par certains effets ; par sa pureté originelle ; l’une et l’autre ayant été conservées intactes en raison de l’origine souterraine de cette eau qui a été tenue à l’abri de tout risque de pollution. Elle provient d’une nappe ou d’un gisement souterrain exploité à partir d’une ou plusieurs émergences naturelles ou forées. Elle témoigne, dans le cadre des fluctuations naturelles connues, d’une stabilité de ses caractéristiques essentielles, notamment de composition et de température à l’émergence, qui n’est pas affectée par le débit de l’eau prélevée ", comme le prévoit le décret n° 89-369 du 06.06.1989 (ci-après appelé : le décret n° 89-369) transposant en droit français les dispositions du droit communautaire en matière d’eaux minérales naturelles et d’eaux potables préemballées.

    D’après l’analyse dudit décret n° 89-369 qui s’applique aux "eaux minérales naturelles, aux eaux de source, et aux eaux rendues potables par traitement "[ 16 ], cette eau, qui peut être effervescente ou non, est destinée à être mise dans le commerce après avoir été conditionnée. Il faut la distinguer des eaux de source et des eaux rendues potables par traitement qui ont la même vocation. En effet, le décret prend la peine d’énumérer les trois genres d’eaux pour établir qu’il les réglemente, or ce faisant, il les différencie. D’ailleurs, le corps du décret est constitué de trois titres dont chacun est consacré à une variété d’eau.

    Désormais, il est donc possible d’éliminer de la catégorie des eaux minérales naturelles : les eaux de source et les eaux rendues potables par traitement.

    La catégorie des eaux minérales naturelles représente donc une catégorie de boissons différente des eaux destinées à la consommation humaine, des eaux ayant une vertu médicinale, des eaux de source et des eaux potables préemballées. En effet, cette variété d’eau offre des particularités de nature et composition, comme la haute teneur en minéraux à laquelle elle doit son appellation, qui la singularisent. C’est en raison de ses particularités qu’elle et régie par une réglementation propre.

    La première réglementation communautaire portant sur les eaux minérales naturelles date de la directive n° 80/777 du Conseil datant du 15.07.1980 et relative à l’harmonisation des législations des Etats membres concernant l’exploitation et la mise dans le commerce des eaux minérales naturelles.

    Cette première directive est une illustration des mesures réglementaires prises pour favoriser la mise en place du Marché Commun, elle a une vocation typiquement économique : le titre même de la directive est parlant quant à son objectif primordial, à savoir l’harmonisation des législations des Etats membres afin de limiter les entraves à l’établissement du Marché Commun entre les pays de la Communauté Européenne. Elle a été modifiée par la directive n° 96/70 du Parlement Européen et du Conseil, datant du 28.10.1996 relative au même objet mais qui introduit des dispositions nouvelles sur la santé des consommateurs et sur la loyauté des opérations commerciales (au profit des consommateurs) concernant le produit.

    Cette modification marque le souci assez récent des Institutions communautaires de prendre en compte différents nouveaux paramètres distincts de ceux à caractère purement économique du Marché Commun, comme les préoccupations de santé publique et d’environnement. En effet, en 1996[ 17 ], l’établissement du Marché Commun est assez avancé pour que les Institutions prennent le parti de faire entrer dans la sphère des préoccupations communautaires des matières qui n’y trouvaient pas leur place jusqu’à ce moment. Il est très frappant de comparer les objectifs des directives pour étayer cette idée : alors qu’au titre des objectifs de la directive n° 80/777 il est exclusivement question des problèmes liés " à l’établissement et au fonctionnement du Marché Commun "[ 18 ], "aux obligations des Etats membres d’admettre la commercialisation des eaux minérales naturelles reconnues comme telles par les autres Etats membres "[ 19 ], la directive n° 96/70 réactualise les prescriptions du texte précédent pour " tenir compte des progrès scientifiques et techniques intervenus depuis 1980 "[ 20 ], et introduit l’idée nouvelle que la réglementation en la matière " doit avoir pour objectifs primordiaux de protéger la santé des consommateurs et de leur éviter des sources de méprise "[ 21 ].

    S’il est intéressant de noter que l’évolution des préoccupations des Institutions de la Communauté va dans le sens de la prise en compte des intérêts humains, sociaux, environnementaux et non plus seulement économiques, il faut aussi s’attacher au fait que la réglementation communautaire des eaux minérales naturelles s’opère au moyen de directives, ce qui n’est pas anodin.

    En effet, la directive est un acte juridique de droit communautaire dérivé, c’est-à-dire un acte pris par les Institutions communautaires au titre de leurs pouvoirs d’application des Traités. Cet acte a la particularité de lier le ou les Etats qui en son destinataires, mais en ne leur imposant qu’une obligation de résultat. En d’autres termes en ne leur fixant que les objectifs à atteindre et en leur laissant toute liberté quant à la forme et aux moyens choisis pour le faire (article 249 du Traité d’Amsterdam). La directive est donc un acte juridique obligatoire, qui entre en vigueur au jour qu’il fixe, mais qui est incomplet puisqu’il suppose que des actes normatifs nationaux soient pris en vue de sa mise en œuvre dans un délai qu’il fixe encore; de cette manière, cet acte respecte mieux les particularités nationales que le règlement. Par ailleurs, la directive est une illustration du principe de subsidiarité (article 5 du Traité d’Amsterdam) dans la mesure où elle témoigne de la répartition des compétences entre la Communauté (qui détermine les objectifs à atteindre) et les Etats membres (qui choisissent les moyens et la forme appropriés pour agir). C’est un instrument souple, très bien adapté à la mise en application des compétences partagées et à la collaboration entre la Communauté et les Etats membres.

    En outre, il faut noter qu’il y a eu un changement dans la technique d’adoption des deux directives : l’auteur de la première (celle de 1980) est le Conseil, au titre de son pouvoir normatif dans le cadre de l’application des Traités et des politiques communes ; alors que celui de la seconde (celle de 1996) est double puisqu’il s’agit du Parlement et du Conseil, agissant selon la procédure de décision conjointe ou de " codécision " (article 251 du Traité d’Amsterdam). L’intervention de cette procédure particulière tient à la matière régie par les directives: il s’agit avant tout de rapprochement des législations, c’est-à-dire de mesures d’achèvement du Marché Commun, avant d’être des questions de contributions à la santé humaine (objectif qui n’apparaît d’ailleurs qu’avec la seconde directive). Or, ces matières relatives au Marché Commun ont acquis un statut particulier depuis l’Acte Unique[ 22 ] et le Traité de l’ Union Européenne[ 23 ]. Ainsi, l’Acte Unique les a introduites dans la procédure de coopération (article 252 du Traité d’Amsterdam) qui donne au Parlement plus d’influence en le faisant intervenir dans une procédure jusqu’alors réservée au Conseil, et le Traité de l’ Union Européenne les a déplacées dans celle de " décision conjointe " pour donner, à travers cette procédure[ 24 ] très complexe de décision, un véritable pouvoir normatif au Parlement.

    Les eaux minérales naturelles sont donc régies stricto sensu  par les directives n° 80/777 et 96/70 directement, et dans une acception plus large au travers les normes de différentes matières dans lesquelles elles s’incluent, comme les prescriptions en matière d’hygiène des denrées, produits et boissons à usage alimentaires, en matière de protection des sols et des nappes souterraines …

    La réglementation des eaux minérales naturelles étant principalement fondée sur les deux directives précitées, elle bénéficie des caractéristiques de ces actes juridiques.

    A savoir, comme il a déjà été précisé auparavant, de plus de souplesse dans l’application que les normes issues de règlements communautaires. Ainsi, la directive est un instrument spécialement adapté à la fonction de rapprochement des législations nationales. C’est aussi une très bonne illustration du principe de subsidiarité car elle manifeste que les compétences sont partagées entre la Communauté et les Etats membres en vertu de ce principe. En effet, le partage des tâches témoigne que les objectifs communs sont mieux envisagés au niveau communautaire, mais que les mesures d’application sont mieux définies au niveau de chaque Etat membre…Finalement les décisions sont prises de cette manière le plus près possible des citoyens en laissant à chaque niveau de décision la compétence adaptée à ses moyens. En outre, les directives de réglementation des eaux minérales naturelles étant des directives d’harmonisation, dites " nouvelle approche " relatives au Marché Commun, elles s’attachent seulement à l’élaboration des dispositions essentielles de la réglementation et sont en cela encore plus l’incarnation du principe de subsidiarité.

    Par ailleurs, puisque ce sont des directives qui ont réglementé la matière relative au rapprochement des législations des Etats membres en ce qui concerne l’exploitation et la mise dans le commerce des eaux minérales naturelles, il a fallu que les Etats membres adoptent la transposition de ces directives dans leur droit interne. En effet, il existe une sanction à la non transposition ou la transposition tardive d’une directive dans le droit interne des Etats membres : le recours d’un autre Etat membre ou, le plus souvent de la Commission, en constatation du manquement. Cette procédure s’effectue devant la Cour de Justice des Communautés Européennes et la saisine de la Cour de Justice peut conduire à un arrêt en manquement, de portée déclaratoire, si le manquement est caractérisé. Du fait de la portée non contraignante de l’arrêt, la Commission peut encore saisir la Cour afin qu’elle fixe une astreinte assez persuasive pour inciter l’ Etat à rétablir la situation juridique normale en faisant cesser le manquement [ 25 ].

    Au sujet de la réglementation des eaux minérales naturelles, la directive n° 80/777 du 15.07.1980, prévoyait qu’elle serait notifiée le 17.07.1980 aux Etats membres destinataires, entrerait en vigueur le même jour, et serait publiée le 30.08.1980. Elle prévoyait également que sa transposition devrait être assurée avant le 18.07.1982 pour permettre le commerce des produits conformes à ses dispositions et pour permettre d’interdire celui des produits non conformes à partir du 18.07.1984.

    La France a transposé cette directive par le décret du 06.06.1989.

    La directive modificatrice n° 96/70 du 28.10.1996, a prévu qu’elle serait publiée le 23.11.1996, qu’elle entrerait en vigueur 20 jours après sa date de publication[ 26 ], c’est-à-dire le 13.12.1996, et qu’elle devrait être transposée au plus tard le 28.10.1997 pour permettre d’autoriser le commerce des produits conformes à ces dispositions et afin d’interdire celui des produits non conformes à partir du 28.10.1998 (article 2 de la directive).

    La France a transposé cette directive modificatrice par le décret du 04.12.1998, modifiant le décret du 06.06.1989. Actuellement un nouveau décret est en préparation au Ministère de la Santé pour faire une refonte de la réglementation. Cette réforme laissera au décret de 1998 la réglementation des questions relatives à la commercialisation des eaux minérales (conditions d’étiquetage, contrôle de la qualité de l’eau en bouteilles), et le nouveau décret régira toute la phase d’exploitation de l’eau minérale ( de la demande d’ouverture d’exploitation, jusqu’à la mise en bouteilles).

    Aucun manquement n’a été signalé de la part d’un autre Etat.

    La réglementation née des deux directives concerne directement l’exploitation et la mise dans le commerce des eaux minérales naturelles, cependant il est légitime de chercher à y lire des enjeux et des priorités caractéristiques de la politique communautaire, comme l’application des règles du Marché Commun, le respect du libre échange et de la libre circulation des biens... A ce titre il faut (encore) remarquer que de nouvelles préoccupations ont été intégrées dans la seconde directive pour enrichir la première, telles que la protection des consommateurs, le souci de leur éviter toute source de méprise, la volonté de garantir la loyauté des transactions commerciales…

    Ainsi, au terme de l’évolution du droit communautaire concernant les eaux minérales naturelles, on peut attendre de leur réglementation qu’elle ait déterminé des lignes directrices quant à leur exploitation et leur mise dans le commerce en y intégrant tous les objectifs, récents et anciens, qui préoccupent les Institutions de la Communauté européenne.

    Nous nous intéresserons plus particulièrement à la question de l’exploitation des eaux minérales naturelles car elle a plus de relations avec les questions d’environnement que la partie sur la commercialisation. Plus précisément, nous allons chercher à déterminer si la place qu’occupent les nouveaux objectifs de la Communauté dans la réglementation de l’exploitation des eaux minérales naturelles font de cette dernière une bonne gardienne du développement durable. C’est-à-dire si la réglementation en question " tend à satisfaire les besoins de développement des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs "[ 27 ].

    Ainsi, nous allons voir que l’objectif de développement durable est assimilé dans la réglementation, mais de manière critiquable. En effet, si les besoins de développement des générations présentes sont garantis par des normes d’exploitation qui certifient la qualité et les propriétés du produit afin de protéger la santé humaine et de favoriser la commercialisation de l’eau (première partie), des efforts sont encore à faire pour intégrer plus de dispositions en faveur de la protection de l’environnement et ainsi mieux garantir les besoins en eau de qualité à long terme, c’est-à-dire pour les générations futures (deuxième partie).

     

    Première partie :

    les objectifs affichés de garantir la santé des consommateurs par une réglementation exigeante de l’exploitation des eaux minérales naturelles:

    On peut affirmer que la réglementation des eaux minérales naturelles prend en compte les besoins des générations présentes en garantissant que l’exploitation des eaux minérales se fait dans un cadre strict. En effet, ce cadre assure en théorie la santé des consommateurs contre les risques d’impureté dans des eaux minérales de haute qualité et permet, par ailleurs, de délimiter les principes de commercialisation de ces eaux.

    Ce cadre réglementaire est donc très important car il permet de préserver la santé des consommateurs par une qualification exigeante du produit d’origine (section 1), et par une réglementation stricte tendant à conserver les propriétés du produit (section 2).

    Section 1. La santé des consommateurs est préservée par une qualification exigeante du produit d’origine :

    La qualification exigeante des eaux minérales naturelles permet de préserver la santé des générations présentes de consommateurs en établissant une définition stricte des produits qui méritent cette appellation (I), afin de servir des objectifs communautaires évolutifs allant dans le sens de la protection des consommateurs (II).

    I/ Une définition nécessairement exigeante et technique…

    L’article 2 de la directive n° 80/777 prévoit que " les Etats membres prennent les dispositions utiles pour que seules les eaux visées à l’article 1er et qui répondent aux dispositions de la présente directive puissent être commercialisées comme eaux minérales naturelles ". D’après cet article on peut comprendre que la définition des eaux minérales naturelles est implicitement très importante puisque du respect de ses exigences dépend l’attribution de la qualification d’eau minérale naturelle, et que de cette qualification dépend tout le régime de ces eaux.

    En effet, donner une définition rigoureuse des eaux minérales naturelles à leur émergence permet tout d’abord de limiter uniquement l’attribution d’une dénomination " valorisante " à des produits qui la méritent, et ensuite d’apporter une légitimité à la différenciation vis-à-vis des autres eaux destinées à la consommation humaine.

    A. une qualification donnant une dénomination valorisante aux produits qui la méritent :

    La définition des eaux minérales naturelles est donc donnée par l’article 1er de la directive n° 80/777 ; les différents critères conditionnant l’octroi de l’appellation " eau minérale naturelle " y sont mentionnés. Il est possible de les regrouper en deux critères cumulatifs qui sont: le respect d’une localisation définie et celui de prescriptions de nature plus technique. Par ailleurs, l’eau doit faire l’objet d’une reconnaissance particulière.

    Le critère de la " localisation imposée " est inscrit à l’article 1er de la directive n° 80/777.

    Cet article 1er prévoit que seules " les eaux extraites du sol d’un Etat membre et reconnues par l’autorité responsable de cet Etat membre " bénéficieront de la qualification d’eaux minérales naturelles (§1), l’article 1er §2 ajoute que " les eaux extraites du sol d’un pays tiers, importées dans la Communauté et reconnues comme eaux minérales naturelles par l’autorité responsable d’un Etat membre " le seront également.

    Par conséquent pour mériter la qualification d’eau minérale naturelle, l’eau doit tout d’abord provenir du sol d’un Etat membre de la Communauté ou de celui d’un Etat tiers, mais il faut ensuite qu’elle fasse l’objet, selon la procédure technique de la directive, d’une reconnaissance par l’autorité responsable d’un Etat membre comme " eau minérale naturelle ".

    C’est l’annexe 1 partie 1 de la directive n° 80/777 qui prévoit la procédure de définition technique conditionnant dans un second temps l’octroi de la qualification d’eau minérale naturelle.

    Cette procédure impose le respect d’une définition spécialement technique à l’issue de laquelle l’autorité de l’ Etat membre qui désire commercialiser l’eau sur le Marché Commun devra la reconnaître en tant que telle.

    En premier lieu, une définition technique générale de l’eau minérale naturelle est donnée par le §1, alinéa 1 de la partie 1, de l’annexe 1 : c’est " une eau bactériologiquement saine [à son émergence], au sens de l’article 5 [de la directive][ 28 ], ayant pour origine une nappe ou un gisement souterrain et provenant d’une source exploitée par une ou plusieurs émergences naturelles ou forées ".

    En second lieu l’alinéa 2 du §1 permet de distinguer de l’eau de boisson ordinaire l’eau minérale naturelle : " a) par sa nature, caractérisée par sa teneur en minéraux, oligo-éléments ou autres constituants et, le cas échéant, par certains effets ;

    b) par sa pureté originelle. "

    En troisième lieu, le §2 nous enseigne que l’eau minérale naturelle dispose de " caractéristiques, qui sont de nature à apporter à l’eau minérale naturelle ses propriété favorables à la santé " que l’autorité responsable de l’ Etat membre intéressé est chargée d’apprécier " sur les plans : géologique et hydrologique ; physique, chimique, et physico-chimiques ; microbiologique ; si nécessaire, pharmacologique, physiologique et clinique ; selon des critères énumérés à la partie 2 [de l’annexe 1]. "

    Enfin, le §3 nous apprend que " la composition, la température, et les autres caractéristiques essentielles de l’eau minérale naturelle doivent demeurer stables dans le cadre de fluctuations naturelles ", c’est-à-dire que ces caractéristiques doivent garder un certain niveau de stabilité toutes choses égales par ailleurs.

    En fin de compte, il faut retenir tout d’abord que l’eau minérale naturelle est singulièrement saine à son émergence du fait de son origine souterraine ; ensuite que deux caractéristiques (sa nature et sa pureté originelle) lui sont propres, la différencient des autres eaux de boisson, et sont de nature à lui apporter des propriétés favorables à la santé[ 29 ] ; et enfin qu’elle doit conserver une certaine stabilité de composition entre le moment de son extraction et celui de sa consommation.

    Toutes ces singularités sont vérifiées par l’autorité responsable de l’ Etat membre voulant procéder à la reconnaissance, au cours d’une procédure de certification prévue à l’article 1er §2, alinéa 2, de la directive n° 80/777. Cet article dispose que la certification s’opère sur les points visés par la partie 1 de l’annexe 1 de la directive, selon les modalités prévues par le §2 de l’annexe 2. Au terme de cette vérification très technique peut être accordée, ou non, la certification quant à la qualification[ 30 ]. Selon l’article 1er §4 et 5 de la directive n° 80/777, cette certification doit être dûment motivée par l’autorité responsable et faire l’objet d’une publication officielle ; ensuite l’ Etat concerné doit avertir la Commission des cas de reconnaissance afin de les placer sur une liste publiée au Journal Officiel des Communautés Européennes. L’article 1er §2 alinéa 3 prévoit que la durée de validité de la certification ne peut excéder 2 ans, mais qu’une nouvelle procédure de reconnaissance n’est pas nécessaire si la certification a été renouvelée avant la fin du délai.

    Cette disposition a été modifiée par l’article 1er de la directive n° 96/70 qui dispose que la durée de validité ne peut excéder 5 ans. Il faut voir dans cet allongement le résultat positif d’une avancée technologique qui permet désormais de garantir suffisamment les caractères de l’eau pour que la durée de certification en soit nettement prolongée. On peut remarquer, par ailleurs, que cette modification répond au souci de tenir compte " des progrès scientifiques et techniques intervenus depuis 1980 ", cet objectif est annoncé par la directive elle-même en application de l’article 95 §3 du Traité d’Amsterdam, qui prévoit notamment qu’en matière de protection des consommateurs, les Institutions Communautaires prendront pour base un niveau de protection élevé en tenant compte de toute nouvelle évolution basée sur des faits scientifiques.

    Nous venons de voir que la procédure de définition de l’eau minérale naturelle est complexe à la fois au regard de la procédure en elle-même, des critères d’évaluation, et enfin au regard des normes techniques d’analyse à respecter[ 31 ].

    Elle permet tant d’attribuer, que de retirer, la qualification à une eau qui obéit, ou non, aux différentes prescriptions. Ces dernières sont, à juste titre, très rigoureuses car elles garantissent non seulement la santé des consommateurs en imposant de strictes normes de qualité et de " non-pollution " à une eau de boisson qui se veut de meilleure qualité que l’eau du robinet, mais aussi la sincérité des relations commerciales en assurant au même consommateur que seules les eaux répondant aux prescriptions (et non les eaux de source, les eaux rendues potables par traitement…) sont vendues sous cette appellation.

    Par ailleurs, la définition de l’eau minérale naturelle permet de légitimer que cette eau bénéficie d’une réglementation propre, différente de celles des autres eaux destinées à la consommation humaine.

    B. une qualification justifiant la différence de régime juridique entre l’eau minérale naturelle et les autres eaux de consommation humaine :

    La définition de l’eau minérale naturelle donnée par l’article 1er de la directive n° 80/777 se décompose en deux parties : nous venons de voir que la partie positive de la définition permettait de donner les caractéristiques différenciant les eaux minérales naturelles des autres eaux destinées à la consommation humaine, nous allons maintenant découvrir que sa partie négative permet de justifier un régime juridique particulier applicable aux seules eaux minérales naturelles du simple fait que la directive exclue explicitement de s’appliquer aux autres eaux. Cependant, nous verrons que la jurisprudence est venue préciser la définition des eaux minérales naturelles afin d’éviter que cette dernière n’exclue de son champ d’application et de son régime juridique des eaux qui ont vocation à y entrer.

    La première catégorie d’eau exclue de manière explicite par la directive n° 80/777 rassemble toutes les eaux qui sont visées ,a contrario, à l’alinéa 2 du §2 de l’article 1er de la directive, à savoir les eaux qui ne peuvent pas faire l’objet d’une reconnaissance en tant qu’ " eaux minérales naturelles " puisqu’elles ne satisfont pas aux prescriptions de l’annexe 1 partie 1 ou à celles de l’annexe 2 §2. En d’autres termes, il s’agit des eaux qui ont vocation à être consommées comme les eaux minérales mais qui ne peuvent pas suivre leur régime juridique[ 32 ]. En effet, elles ne présentent pas les caractéristiques requises dans la définition des eaux minérales naturelles soit parce que leur nature est différente de celle des eaux minérales naturelles, soit parce que leurs taux de composants sont inadéquats.

    La seconde catégorie est identifiée au §3 de l’article 1er de la directive, c’est-à-dire " les eaux qui sont des médicaments au sens de la directive 65/65/CEE[ 33 ], et les eaux minérales naturelles utilisées à des fins curatives à la source dans des établissements thermaux ou hydrominéraux. " Ces eaux n’ont pas la même vocation que les eaux minérales naturelles c’est pourquoi leurs régimes juridiques sont différents.

    La différence de régime juridique entre les eaux minérales naturelles et les autres eaux destinées à la consommation humaine est importante car les eaux minérales, qui revendiquent une qualité supérieure, doivent obéir à un régime plus strict mais aussi plus valorisant de ce fait.

    C’est ainsi que certains Etats membres de l’ Union Européenne se sont mis à adopter des visions vraiment restrictives de la notion au regard de la définition étroite des eaux minérales naturelles, or il a fallu que la Cour de Justice des Communautés Européennes (ci-après désignée la Cour de Justice) intervienne pour préciser l’acception de certains points de la définition. C’est ce que nous montre la décision rendue à titre préjudicielle par la Cour de Justice le 17.07.1997 dans l’affaire opposant Badische Erfrischungs-Getränke GmbH Co KG (ci-après désignée la société d’exploitation d’eau minérale) au Land Baden-Württemberg (ci-après désigné le Land) sur l’interprétation de la directive n° 80/777.

    En effet, la société d’exploitation d’eau minérale a trouvé une source à la fin des années 80, et les caractéristiques de l’eau donnaient à celle-ci la qualité d’une eau minérale particulièrement faible en sodium et en chlorure d’après l’analyse de ses effets physico-nutritionnels. La société demanda au Land de reconnaître l’eau comme une eau minérale naturelle, ce qu’il refusa par décisions du 28.11.1989 et du 02.04.1990 au motif qu’une eau ne peut pas avoir les effets physiologico-nutritionnels requis par la réglementation allemande sans une certaine teneur positive en composants essentiels. Suite à cela, la société a introduit un recours auprès du Verwaltungsgericht Karlsruhe, qui l’a rejetée par jugement du 08.11.1991. Cette décision a été confirmée le 30.11.1993 par le Verwaltungsgerichtshof Baden-Württtemberg au motif que la société n'avait pas établi que l'eau avait des effets physiologico-nutritionnels résultant de ses constituants. Selon la juridiction d’appel, l’absence ou la faible teneur en certaines substances ne suffisant pas à conférer la qualité d’eau minérale naturelle. Saisi d’une demande en révision le Bundesverwaltungsgericht à confirmé l’interprétation de la juridiction d’appel, mais s’est interrogé sur la compatibilité des exigences de la législation allemande avec les dispositions de la directive n° 80/777, c’est pourquoi il a sursis à statuer pour poser une question préjudicielle à la Cour de Justice (article 234 du Traité d’Amsterdam). Cette interrogation portait sur la définition des eaux minérales naturelles et surtout sur trois points: savoir si le fait d’avoir des propriétés favorables à la santé était nécessaire pour pouvoir qualifier une eau d’ " eau minérale naturelle ", si la réponse était positive si ces propriétés favorables à la santé pouvaient se contenter d’être une faible teneur ou une absence de teneur en un constituant, et comment faire la différence entre " des propriétés favorables à la santé " et des propriétés ayant " certains effets ".

    La Cour de Justice a répondu que " les dispositions de la directive n° 80/777 s’opposaient à ce qu’un Etat membre exige qu’une eau ait des propriétés favorables à la santé pour pouvoir être reconnue comme une eau minérale naturelle ", tout d’abord car la définition de l’eau minérale naturelle ( §1 de la partie 1 de l’annexe 1) prise par le Conseil dans la directive n° 80/777 ne mentionne pas les propriétés favorables à la santé (alors que dans les débats à propos de la directive la Commission avait proposé de l’y intégrer), ensuite qu’il n’y a aucune définition des propriétés favorables à la santé dans la directive, et enfin que la tournure contraignante de la définition[ 34 ] contraste avec la portée descriptive de la tournure de la phrase[ 35 ].

    Par cette analyse très minutieuse, la Cour de Justice donne une interprétation plus ouverte des eaux minérales naturelles que ne commençaient à le concevoir les Etats membres, et en cela évite qu’une définition déjà étroite ne devienne trop restrictive, et ne finisse peut-être par s’appliquer qu’à des cas marginaux.

    En somme, la définition des eaux minérales fait apparaître la notion de qualité de ce produit ainsi que celle de propriétés propres à ce produit. Elle est d’une part très stricte car elle impose de respecter un certain nombre de normes rigoureuses, et d’autre part très précise car elle écarte ainsi de son régime juridique toutes les autres eaux destinées à la consommation humaine. Mais si ce régime est plus strict à sa manière que celui des autres eaux, il est finalement justifié car il tend à servir des objectifs communautaires évolutifs mais toujours exigeants.

    II/… pour régir strictement des objectifs communautaires évolutifs.

    La lecture des deux directives assurant le rapprochement des législations des Etats membres en matière d’exploitation et de mise dans le commerce des eaux minérales naturelles, nous permet de constater en premier lieu qu’elles tendent au même but (rapprocher les législations) mais aussi qu’elles intègrent des objectifs différents.

    A. la directive n° 80/777 recherche avant tout à favoriser l’établissement du Marché Commun :

    La directive étant prise sur le fondement de l’article 100[ 36 ] du Traité de l’ Union Européenne (article 94 du Traité d’Amsterdam) son but est d’édicter des dispositions de rapprochement des législations afin de favoriser l’établissement et le fonctionnement du Marché Commun. En effet, l’article 100 lui-même a été pris sur le fondement de l’article 3 du Traité de Rome (article 3 du Traité d’Amsterdam) qui donne à la Communauté le pouvoir de prendre des décisions pour assurer " le rapprochement des législations nationales dans la mesure nécessaire au fonctionnement du Marché Commun ".

    Cet objectif apparaît clairement dans les dispositions préliminaires au corps de la directive [ 37 ]. Tout particulièrement dans la disposition n° 2 où il apparaît que " les différences entre [les] législations [nationales] entravent la libre circulation des eaux minérales naturelles, créant des conditions de concurrence inégales, et ont, de ce fait, une incidence directe sur l’établissement et le fonctionnement du Marché Commun ". Ensuite, l’objectif apparaît moins explicitement mais différentes allusions s’y rattachent.

    En fait, il convient d’observer qu’à l’époque où a été rédigée la directive, les Institutions de la Communauté étaient seulement soucieuses d’établir le Marché Commun dans son acception économique. C’est-à-dire dans un sens qui se traduit uniquement par la prise de mesures permettant l’établissement du Marché Intérieur: des mesures assurant la libre circulation des marchandises (objectif n° 2), des conditions permettant une adéquate mise en concurrence (objectif n° 2), des règles de commercialisation des eaux minérales naturelles (objectifs n° 1, n° 3, n° 4, n° 5…). Finalement si ces dispositions se limitent à des mesures de type économique, elles n’en sont pas moins exigeantes : le corps de la directive en lui même est très précis et détaillé afin d’envisager les mesures les plus adaptées. C’est pourquoi la définition des eaux minérales naturelles est très importante : elle conditionne la mise en pratique des mesures de réglementation de la directive. En sachant exactement ce que recouvre la notion d’eau minérale naturelle, les Etats membres peuvent interpréter et appliquer convenablement les dispositions de la directive, qui n’ont qu’une ambition économique jusqu’aux modifications apportées par la directive n° 96/70.

    B. la directive n° 96/70, modifiant la directive n° 80/777, intègre de nouveaux objectifs :

    La directive est prise sur la base de l’article 100 A, introduit par l’Acte Unique Européen[ 38 ] et devenu l’article 95 du Traité d’Amsterdam, qui a pour but de réaliser les objectifs du Marché Intérieur par des mesures de rapprochement des législations prenant pour base un "niveau de protection élevé en matière de santé, de sécurité, de protection de l’environnement et de protection des consommateurs,[…] en tenant compte notamment de toute nouvelle évolution basée sur des faits scientifiques "[ 39 ]. Ces préoccupations nouvelles en 1986 sont reprises dans la directive de 1997.

    En l’occurrence, elles sont intégrées dans les objectifs de la directive, comme le montre la lecture de l’objectif n° 2 qui prévoit que " toute réglementation relative aux eaux minérales naturelles doit avoir pour objectifs primordiaux de protéger la santé des consommateurs et de leur éviter toute source de méprise… ", de l’objectif n° 3 qui dispose qu’il " est souhaitable de modifier la directive 80/777 pour tenir compte des progrès scientifiques et techniques intervenus depuis 1980 ", et de l’objectif n° 6 qui prévoit qu’il faut prendre certaines dispositions pour garantir " l’information des consommateurs ".

    Il convient de noter qu’une évolution s’est faite entre les objectifs de la première directive et ceux de la seconde. Ainsi la seconde directive est plus complète que la première puisqu’elle contient non seulement des dispositions de caractère économique mais encore des dispositions qui font référence à la santé des consommateurs . On peut donc conclure qu’il s’agit d’un progrès dans la réglementation communautaire, notamment celle des eaux minérales naturelles, qui s’ouvre ainsi à de nouveaux intérêts.

    Au delà de la définition exigeante des eaux minérales naturelles qui permet de protéger le consommateur en lui offrant la certitude de consommer un produit de qualité car strictement réglementé (rentrer dans le cadre de la définition est la condition sine qua non pour obtenir la qualité d’eau minérale naturelle[ 40 ]), il existe une prise en compte pratique des objectifs de santé des consommateurs dans la réglementation de ces eaux grâce à l’encadrement très précis de leur exploitation.

    Section 2. la santé des consommateurs est préservée par le strict encadrement de l’exploitation du produit :

    L’exploitation représente l’ensemble des opérations[ 41 ] qui se passent sur le site d’extraction jusqu’au moment du transport, ce dernier s’apparente en effet à la première phase de la commercialisation des bouteilles d’eau. Ces manipulations sont faites par les sociétés exploitantes mais sont strictement encadrées (I), et contrôlées (II).

    I/ Les propriétés des eaux sont rigoureusement encadrées …

    Toute la phase d’exploitation des eaux minérales naturelles est strictement réglementée par les directives afin de pouvoir garantir au consommateur que les propriétés qui ont justifiées la reconnaissance des eaux minérales naturelles en tant que telles soient préservées.

    Ainsi les deux directives assurent une réglementation rigoureuse, aussi bien avant l’embouteillage, qu’après celui-ci. Il apparaît en effet que l’exploitation des eaux minérales naturelles se scinde en deux phases principales dont l’interface est l’étape de conditionnement. C’est ce que rappelle implicitement l’article 3 de la directive n° 80/777 : " les sources d’eaux minérales naturelles doivent être exploitées [/] et leurs eaux conditionnées conformément à l’annexe 2 ".

    En d’autres termes, il y a chronologiquement une phase d’exploitation au sens étroit du terme qui se décompose en une période d’extraction de l’eau et une période facultative de traitement des eaux ; et ensuite, une phase de conditionnement.

    A. L’encadrement rigoureux de l’exploitation des eaux minérales naturelles avant leur embouteillage :

    Cette période de l’exploitation est capitale car c’est la première étape dans la reconnaissance des propriétés de l’eau minérale naturelle. Les deux directives sont donc toujours[ 42 ] très exigeantes quant à la réglementation à adopter pour protéger ces propriétés essentielles, et au delà de ces propriétés pour garantir la santé et l’information du consommateur.

    La réglementation en la matière se fait suivant deux axes temporels : elle tend à régir, en premier lieu, la phase d’extraction (ou de captage) de l’eau à sa source, et en second lieu la phase facultative de traitement de l’eau.

    La réglementation est donc très rigoureuse quant au moment du captage de l’eau pour que celle-ci conserve ses propriétés. L’annexe 2 de la directive n° 80/777 nous le montre explicitement.

    En effet, le §2 de l’annexe 2 prévoit en termes généraux les conditions requises pour que la pureté de l’eau soit assurée.

    Ainsi, " les installations destinées à l’exploitation doivent être réalisées de façon à éviter toute possibilité de contamination et à conserver les propriétés, répondant à sa qualification, que l’eau présente à l’émergence ".

    Ce paragraphe fait référence à la protection des propriétés que l’eau doit présenter à l’émergence pour être qualifiée d’eau minérale naturelle. Ce renvoi nous montre à quel point il est important que la définition des eaux minérales naturelles soit strictement définie à l’origine car elle sert d’étalon pour la suite de la réglementation. C’est la rigueur de la définition originelle qui permet de déterminer la rigueur avec laquelle il faut réglementer les conditions d’extraction de l’eau. C’est donc, par exemple, parce que la définition des eaux minérales naturelles aura interdit la présence d’ Escherichi coli et autres coliformes dans 250 ml d’eau minérale naturelle à l’émergence, ainsi que celle de streptocoques fécaux (dans 250 ml), d’anaérobies sporulés sulfito-réducteurs (dans 50 ml), et de Pseudomonas aeruginosa (dans 250 ml), que la réglementation de l’extraction de l’eau pourra adopter implicitement ces interdictions…[ 43 ]

    Par ailleurs, l’alinéa 2 du §2 de l’annexe 2 envisage plus précisément les mesures à prendre pour éviter les formes possibles de contamination et pour conserver à l’eau ses propriétés naturelles. Ainsi, il dispose que " notamment, la source ou le point d’émergence doit être protégé contre les risques de pollution ; le captage, les conduites d’amenée et les réservoirs doivent être réalisés avec des matériaux convenant à l’eau et de façon à empêcher toute modification chimique, physico-chimique et bactériologique de cette eau. "

    Il est intéressant de remarquer la tournure de la phrase qui commence par " notamment ". Ce terme laisse sous entendre que les Etats membres pourront adopter des mesures complémentaires portant sur la protection des propriétés des eaux à l’extraction. Or, il faut constater que c’est une des rares dispositions contenues dans les deux directives qui laisse cette liberté aux Etats membres…

    Il convient finalement de se demander si une réglementation faite par voie de directive ne devrait pas laisser plus de liberté aux Etats...(puisque la directive n° 96/70 ne corrige pas cet interventionnisme quasi généralisé). Si le fait de tant vouloir réglementer le domaine des eaux minérales naturelles est légitimé par les considération d’intégration au Marché Commun, de protection et d’information des consommateurs ? Si, finalement, cette réglementation ne trahit pas, dans une certaine mesure, la " nouvelle approche " arrêtée depuis 1985, concernant les directives dont l’objet est de réaliser une harmonisation technique sur les dispositions essentielles en laissant les organismes européens de normalisation édicter des normes techniques plus précises.

    Toujours est-il que la période de captage est strictement réglementée, dans deux optiques bien précises: l’une étant l’établissement du Marché Commun (en imposant à tous les Etats membres une certaine rigueur de réglementation, les Institutions Européennes créent une ossature réglementaire qui les protège des écarts législatifs des Etats membres susceptibles d’engendrer des entraves à la libre circulation, à la concurrence et donc au fonctionnement du Marché Commun), l’autre étant la protection des consommateurs (en imposant cette rigueur aux Etats Membres, les Institutions Communautaires sont certaines de leur imposer un niveau minimum de protection à mettre en application).

    Ce niveau élevé de réglementation est homogène dans les deux directives concernant les eaux minérales naturelles, il est donc tout aussi strict en ce qui concerne la question du traitement des eaux minérales naturelles.

    La question d’un éventuel traitement de l’eau minérale naturelle est évoquée à l’article 4 de la directive n° 80/777. Cet article pose en principe l’interdiction de toute sorte de traitement ou d’adjonction à l’eau minérale, mais prévoit une liste limitée à 3 exceptions. Ces dernières sont utiles à l’exploitation des eaux minérales naturelles et ne nuisent ni à leur pureté ni à leurs propriétés. Il peut s’agir, par exemple, d’incorporer ou de réincorporer soit du gaz carbonique provenant de la même nappe souterraine ou du même gisement que l’eau minérale naturelle extraite pour obtenir une " eau minérale naturelle naturellement gazeuse ou une eau minérale naturelle renforcée au gaz se la source ", soit un gaz provenant d’une autre origine pour obtenir une " eau minérale naturelle avec adjonction de gaz carbonique ".

    Il semble légitime, ici, de déplorer que la réglementation permette d’ajouter un composant extrinsèque à l’eau minérale pour la rendre gazeuse alors que ce composant est de nature étrangère à la source de l’eau.

    D’autant plus que la directive n° 96/70 est venue modifier l’article 4 en augmentant les possibilités d’exceptions au principe de prohibition des traitements et adjonctions.

    Ces faits dénaturent quelque peu l’image que la réglementation prétendait assurer à l’eau minérale, il est donc dommageable qu’elles aient été prévues de cette manière.

    Par ailleurs, les traitements envisagés ne doivent pas modifier la composition de l’eau. En effet, la définition de l’eau minérale naturelle impose que celle-ci se différencie des autres eaux destinées à la consommation humaine non seulement par sa pureté et ses propriétés mais encore par sa stabilité de composition. Il faut donc prendre toutes les mesures nécessaires à la conservation de ces trois éléments pendant l’exploitation.

    L’exploitation ne se limitant pas à l’extraction de l’eau, il faut aussi que la réglementation protège les caractéristiques de l’eau minérale naturelle pendant et après son conditionnement.

    B. l’encadrement rigoureux de l’exploitation des eaux minérales naturelles pendant et après l’embouteillage:

    Cette période correspond à deux phases successives : tout d’abord, le conditionnement des eaux minérales et leur identification ensuite.

    Le stade du conditionnement est encadré de manière très rigoureuse car il doit à la fois prendre en compte les dispositions de protection des eaux en elles-mêmes, et aussi les dispositions propres à garantir la pureté des récipients de conditionnement.

    C’est l’article 6 de la directive n° 80/777 qui établit le principe de pureté des récipients en imposant qu’ils soient munis d’un dispositif de fermeture garantissant l’authenticité et la pureté du produit. Mais avant que les récipients ne soient clos il faut évidemment les remplir, et les dispositions s’attachant au conditions d’embouteillage sont inscrites à l’annexe 2 de la directive n° 80/777 (plus précisément au §2. c.). ces dispositions imposent de strictes conditions d’hygiène autant aux installations de lavage des récipients, qu’à celles d’embouteillage. En particulier, il faut que les récipients soient fabriqués ou traités de manière à éviter que les propriété des eaux minérales n’en soient altérées. Cela garantit au consommateur de trouver, quand il débouche la bouteille, les mêmes propriétés dans l’eau minérale que s’il allait la boire à sa source.

    Toutes ces dispositions ont pour but de préserver les caractéristiques des eaux minérales naturelles exploitées à savoir, leur pureté et leurs propriétés originelles, ainsi que leur stabilité. Ceci garantit particulièrement au consommateur qu’il n’est pas trompé sur la qualité du produit, mais encore faut-il qu’il ne soit pas trompé par une dénomination erronée.

    C’est pourquoi avant de placer les eaux minérales dans le commerce, il faut les identifier. Les règles concernant cette identification sont répertoriées aux articles

    7, 8, et 9 de la directive n° 80/777 modifiés par l’article 1er §3, §4, et §5 de la directive n°96/70.

    Les dispositions des articles 7, et 8 §1 garantissent la sincérité de la dénomination du produit ainsi que sa nature exacte et précise lors de l’embouteillage, alors que les articles 8 et 9 ont une portée plus commerciale.

    Il est intéressant de s’attacher à la lecture de l’article 7 §1 qui prévoit que les eaux minérales soient identifiées conformément aux différents traitements autorisés qu’elles ont pu subir, et au §2 qui dispose que l’étiquetage des eaux minérales doit mentionner leur composition exacte. A cet égard, il est remarquable que les modifications apportées par la directive n° 96/70 renforcent les dispositions de la précédente directive, alors que ce n’est pas la tendance qui a pu se dégager jusqu’à présent à nos yeux[ 44 ].

    Cependant même s’il apparaît quelques infléchissements dans la réglementation des eaux minérales, cette dernière demeure néanmoins rigoureuse pour garantir le succès de ses objectifs : assurer au consommateur la pureté et les qualités de l’eau minérale, et prévoir une réglementation précise évitant que les Etats membres ne s’en détournent.

    En outre, en plus d’être exigeante, cette réglementation place l’exploitation des eaux minérales naturelles sous une surveillance étroite.

    II/ … et strictement contrôlées pendant l’exploitation.

    Dans la généralité du temps de contrôle, il est possible de remarquer la rigueur et la précision dont il fait preuve, ceci ayant pour but principal de garantir, encore, la qualité du produit au consommateur.

    Il apparaît que la surveillance est effective à tout moment de l’exploitation, et qu’elle prend de cette manière une portée particulière.

    A. le strict contrôle de l’exploitation des eaux minérales naturelles :

    Le contrôle de l’exploitation des eaux minérales naturelles se divise de la même manière que l’exploitation proprement dite, c’est-à-dire qu’il porte tout d’abord sur la définition puis sur l’exploitation des eaux minérales.

    Le contrôle des paramètres de définition est effectué par l’autorité responsable dans l’ Etat membre concerné. Il suit la même procédure que celle de définition, prévue à l’article 1er §2 de la directive n° 80/777. Il consiste donc à savoir, si les eaux examinées correspondent bien aux conditions prévues à l’annexe 1 partie 1 et partie 2 (sur les caractéristiques de composition) et à celles de l’article 5 (sur les caractéristiques biologiques de l’eau) de la directive.

    Ce contrôle s’effectue, en pratique, de manière très minutieuse et rigoureuse sur des paramètres très techniques.

    A l’issue de ce contrôle, l’autorité responsable est en mesure d’assurer que l’eau est susceptible d’être certifiée " eau minérale naturelle " à son émergence, ou de refuser cette certification.

    Le contrôle de la certification est supervisé par la Commission Européenne[ 45 ], comme le montre la lecture de l’objectif 7 de la directive n° 80/777 et celle de l’article 11 de la directive en question : la Commission détermine les modalités de prélèvement des échantillons et les méthodes d’analyse nécessaires tant au contrôle des caractéristiques biologiques qu’à celui des caractéristiques de composition.

    Le contrôle de l’exploitation est effectué par l’autorité nationale responsable, selon les critères de l’annexe 1 partie 1 et des critères biologiques de l’article 5[ 46 ] de la directive n° 80/777. Quand l’autorité nationale constate que l’eau ne satisfait plus aux exigences prévues, elle sanctionne l’exploitant en lui imposant la suspension des opérations d’exploitation jusqu’à ce que la cause de pollution soit éliminée.

    Le contrôle effectué sur les conditions d’exploitation de l’eau est relativement complexe et sévère, il permet ainsi de s’assurer de la stabilité de composition de l’eau au cours des différentes manipulations. Du fait de sa rigueur, il prend une portée particulière.

    B. la portée particulière de ce contrôle :

    Une telle complexité et une telle rigueur dans les méthodes de contrôle ont pour but de garantir la stabilité de la composition des eaux minérales naturelles, et au delà garantir la protection des consommateurs. Cette protection est mise en place de trois manières : la surveillance des certifications de pureté des eaux minérales naturelles qui assure la santé des consommateurs, la surveillance des dénominations conformes à la nature des eaux minérales qui permet la bonne information du consommateur, et finalement la surveillance de la rigueur de la réglementation des eaux minérales naturelles qui rend possible la loyauté des transactions commerciales entre Etats dans la Communauté.

    En pratique, les contrôles sont effectués sous la surveillance de la Direction de l’ Industrie, de la recherche et de l’Environnement (DRIRE) en France, de manière à ce que l’eau qualifiée d’eau minérale naturelle soit embouteillée telle qu’elle se présente à l’émergence.

    Des contrôles sont donc effectués par des laboratoires agréés par le Ministère de la santé et par les laboratoires privés du centre d’embouteillage. Ils portent sur les installations de captage et d’amenée d’eau jusqu’au centre d’embouteillage.

    D’après les renseignements fournis par la société Perrier-Vittel S.A., la source d’eau de Vittel fait l’objet d’environ 1000 contrôles par jour par les soins de 39 personnes.

    Des contrôles rigoureux garantissent les exigences de qualité et assurent de cette manière la protection du consommateur.

    Cependant, si la réglementation des eaux minérales naturelles assure bien la protection de la santé des consommateurs actuels, cette réglementation est défaillante en ce qui concerne la protection des intérêts des générations futures : tout d’abord, elle ne propose rien pour prendre garde à l’épuisement de la ressource et de son environnement, et ensuite, les dispositions qu’elle prend pour protéger la santé humaine sont critiquables quand on les examine en pratique et sur un long terme.

    Il y a donc des objectifs supplémentaires à intégrer dans cette réglementation.





    Deuxième partie :

    Des objectifs supplémentaires à intégrer pour parfaire la réglementation de l’exploitation des eaux minérales naturelles :

    La lecture de la réglementation des eaux minérales naturelles semble donc bien prendre en compte les questions de " bien-être " (c’est-à-dire de développement et de santé) des générations présentes. Cependant, il est permis d’en douter en ce qui concerne les générations futures puisque l’objectif de protection de l’environnement est presque ignoré dans la réglementation (section 1), et que la portée pratique des mesures de protection de la santé humaine (ou celle des consommateurs) est garantie à court terme mais pas à long terme (section 2).

    Et l’absence cumulée de ces deux facteurs suffit à conclure que la réglementation des eaux minérales naturelles n’est pas une bonne gardienne des préoccupations des générations futures.



    Section 1. Un objectif de prise en compte de l’environnement est partiellement évoqué :

    Si la protection des consommateurs apparaît souvent, que ce soit en filigrane ou clairement, dans la réglementation des eaux minérales naturelles, il n’en est pas de même de la protection de l’environnement. En effet, si celui est parfois évoqué à condition de savoir lire entre les lignes des directives (I), pour permettre la protection du gisement de l’eau minérale, il n’est jamais mentionné au titre de sa protection seule (II). C’est un fait qui peut être regretté quand on connaît le lien étroit entre protection de l’environnement et protection de la santé humaine.

    I/ L’évocation de mesures protégeant l’environnement afin de préserver l’exploitation des eaux minérales naturelles

    La réglementation des eaux minérales naturelles est avant tout dirigée dans deux directions : protéger la santé des consommateur en assurant l’existence d’un marché rigoureux de produits sains, ainsi que participer au bon fonctionnement du Marché Commun en évitant que des mesures nationales n’entravent les principes de libre circulation des marchandises, de libre échange, et de concurrence.

    Pourtant il est possible d’entrevoir dans cette réglementation une prise en compte de la protection de l’environnement même si celle-ci s’avère limitée.

    A. la prise en compte largement implicite de mesures de protection de l’environnement…

    C’est l’annexe 2 de la directive n° 80/777 qui contient une brève allusion aux mesures de protection de l’environnement en faisant mention du fait que " la source ou le point d’émergence doit être protégé contre les risques de pollution ".

    Cette disposition est la seule des deux directives à pouvoir être interprétée comme considérant implicitement que des mesures de protection de l’environnement peuvent être utiles à l’exploitation industrielle de la ressource.

    On peut regretter cette brièveté, surtout dans une réglementation aussi " dirigiste " et détaillée que celle des eaux minérales naturelles.

    Cependant, il a déjà été remarqué (voir supra) que l’alinéa 2 du § 2 de l’annexe 2 de la directive n° 80/777 commence par les mesures que doivent prendre les Etats membres, et " notamment " protéger la source ou le point d’émergence contre les risques de pollution.

    Une vision optimiste consisterait à souligner que cette directive ne fait que donner des lignes directrices et que c’est aux Etats membres de prendre des mesures adéquates. Or, la vision réaliste conduit à dire que comme la directive est très détaillée sur tous les points qu’elle réglemente, une allusion aussi brève et laconique trahit un réel oubli quant la réglementation de mesures de protection de l’environnement.

    Pourtant, nous sommes en droit d’attendre de toute réglementation communautaire qu’elle intègre des principes de protection de la ressource au même titre qu’elle intègre des principes d’exploitation et de commercialisation de cette même ressource.

    C’est ce genre de carences qui nous fait constater que la réglementation communautaire des eaux minérales naturelles ne garantit pas le développement de manière durable (c’est-à-dire en prenant soin de la ressource), alors qu’elle prévoit, en revanche, de manière très complète l’exploitation et la commercialisation de la ressource.

    B. … se révèle être une prise en compte limitée de la protection de l’environnement :

    On peut regretter qu’il ne soit pas fait mention, dans la réglementation des eaux minérales naturelles, de mesures participant à la protection de l’environnement en général, et pas seulement à la protection du gisement contre les pollutions. En effet, on ne trouve aucune référence ni à des cahiers des charges prévus pour les agriculteurs voisins afin de limiter leurs épandages[ 47 ], de réduire leur utilisation de pesticides, ni à des périmètres de protection autour des zones de captage d’eau…[ 48 ] Pourtant de telles mesures sont ordinairement appliquées par les exploitants[ 49 ] des sources d’eau minérale, mais ce n’est pas grâce à cette réglementation. Or, s’il peut être excusable que la prise de mesures de protection de l’environnement ne soit pas envisagée dans la directive n °80/777, qui est au demeurant fort détaillée voire quasi exhaustive pourtant dans toutes ses dispositions ; cela semble fortement critiquable vis-à-vis de la directive n° 96/70 qui a été adoptée à une époque où les préoccupations environnementalistes trouvaient déjà une place dans les décisions des Institutions communautaires. La seule référence à l’environnement faite dans la réglementation est donc laconique et de surcroît partielle puisque la prise en compte de l’environnement ne se fait que par un unique aspect de celui-ci, à savoir la lutte contre les pollutions.

    D’ailleurs, une rapide comparaison peut être faite avec la réglementation opérée par la directive n° 80/778 concernant les eaux destinées à la consommation humaine. Aucune des deux ne mentionne que la prise adaptée de mesures en faveur de l’environnement pourrait contribuer à la saine exploitation des eaux, qu’elles soient ou non minérales. Ce sont les réglementations nationales qui vont pourvoir à cette carence en prenant les dispositions adéquates. En France, c’est par exemple la Loi du 03.01.1992[ 50 ] qui dispose qu’un périmètre de protection peur être assigné par décret en Conseil d’ Etat à une source d’eau minérale naturelle déclarée d’intérêt public.

    Il apparaît donc évident que la référence implicite à la protection de l’environnement est insuffisante dans l’objectif de protection de la source d’eau minérale, cependant la situation est encore pire quand on considère l’évocation de mesures protectrices de l’environnement prises pour elles-mêmes.

    II/ L’absence de mesures protégeant l’environnement de l’exploitation des eaux minérales naturelles

    Plutôt que d’envisager comment des mesures de protection de l’environnement pourraient contribuer à protéger l’exploitation de l’eau minérale naturelle, nous allons nous attacher à savoir si la réglementation des eaux minérales prend en considération la protection de toute la période en amont de la distribution de l’eau minérale sur le marché …C’est-à-dire si la réglementation prend des mesures pour que l’exploitation et la commercialisation soient respectueuses de l’environnement.

    En réalité aucune des deux directives ne prend en compte les mesures de protection de l’environnement pendant l’exploitation et pendant la commercialisation des eaux minérales. Pourtant, le Traité sur l’ Union Européenne s’inspirant du cinquième programme d’action  " vers un développement durable " mentionne que les " exigences en matière de protection de l’environnement doivent être intégrées dans la définition et la mise en œuvre des […] politiques de la Communauté ".

    Or, il n’est nulle part fait mention, ou du moins fait allusion, dans les directives à des techniques qui permettrait de protéger soit l’environnement de l’exploitation, soit l’environnement dans lequel les eaux minérales sont mises en vente.

    Par exemple les directives pourraient faire allusion à des " principes écologiques " qui pourraient prévoir que les emballages ne soient pas seulement conçus pour garantir la pureté du produit qu’ils contiennent[ 51 ] mais aussi pour protéger leur environnement. Ainsi, il pourrait être recommandé de choisir des récipients à haute teneur recyclable. Ou dans une autre optique, il pourrait être envisagé de recommander aux exploitants d’extraire des eaux minérales avec des moyens techniques soucieux de l’environnement (générant peu de rejets industriels, peu de fumées , peu de bruit,…)

    Si, dans la directive n° 80/777 qui est pourtant très précise sur tous les aspects de la réglementation des eaux minérales naturelles (nous l’avons déjà dit), l’oubli de tels principes peut être excusable puisque les préoccupations environnementales n’étaient pas véritablement au centre des préoccupations communautaires en 1980, on peut critiquer le fait que la directive n° 96/70 n’y fasse pas plus allusion.

    S’il faut donc regretter que les dispositions environnementales ne soient pas assez intégrées dans les directives pour servir la protection de la ressource ou leur propre reconnaissance, il faut reconnaître que la situation est meilleure pour l’objectif de protection de la santé humaine.

    Section 2. L’objectif de protection de la santé humaine est partiellement concrétisé :

    L’objectif de protection de la santé humaine est assez bien pris en compte, théoriquement, dans la réglementation par le souci de préserver la santé du consommateur (I). Or, cette garantie ne suffit pas, à préserver la santé des générations futures en plus de celle des consommateurs actuels car les applications concrètes de la réglementation sont critiquables (II).

    I/ L’intégration théorique du principe de protection de la santé humaine

    L’objectif de protection de la santé humaine est présent dans la réglementation des eaux minérales naturelles à travers le souci de la protection de la santé des consommateurs. Cependant il est remarquable que, même récent, ce principe a très bien été pris en compte dans la réglementation communautaire en général et dans la réglementation des eaux minérales naturelles en particulier.

    A. la prise en compte récente du principe de protection de la santé humaine en droit communautaire :

    La politique de santé humaine envisagée dans cette réglementation n’est pas une politique de santé à proprement parler, c’est-à-dire qu’il ne s ‘agit pas d’une réglementation portant sur les professions médicales, la libre circulation des produits pharmaceutiques, etc. Il est plutôt question de santé humaine à travers les mesures de protection des consommateurs.

    Une telle politique est assez récente au niveau européen car la politique d’intégration communautaire est longtemps restée exclusivement réservée à des problèmes d’ordre économique.

    C’est finalement depuis l’Acte Unique Européen de 1986 et le Traité de l’ Union Européenne de 1992 que de telles préoccupations sont entrées sur la scène européenne (notamment par la référence qu’y fait l’article 100 A §3 du Traité de l’ Union Européenne, devenu l’article 95 §3 du Traité d’Amsterdam), et y demeurent grâce à l’intérêt qu’y porte la Cour de Justice (notamment dans son étude des dérogations à l’article 36 du Traité de l’ Union Européenne devenu l’article 30 du Traité d’Amsterdam, c’est-à-dire les " exigences impératives d’intérêt général ").

    Il s’effectue ainsi une bonne prise en compte théorique de l’objectif de protection de santé humaine dans la réglementation communautaire, particulièrement depuis la directive modificatrice n° 96/70 en ce qui concerne les eaux minérales naturelles.

    B. la prise en compte récente du principe de protection de la santé humaine dans la réglementation des eaux minérales naturelles :

    On ne trouve aucune référence à la question de la santé des consommateurs dans la première directive. C’est seulement la seconde qui fait entrer de telles préoccupations dans le champ d’application des eaux minérales naturelles.

    Ainsi, l’objectif 2 de la directive n° 96/70 dispose que la protection des consommateurs est un objectif primordial de la réglementation, au même titre qu’il est primordial d’éviter au consommateur toute source de méprise sur les eaux minérales naturelles et de garantir la loyauté des transactions commerciales.

    La tournure de la phrase nous permet de conclure qu’avec la directive modificatrice la protection des consommateurs prend la même importance que les transactions commerciales au sujet de l’eau minérale. C’est un progrès important que de voir entrer dans les objectifs primordiaux du droit communautaire des préoccupations étrangères à la sphère typiquement économique régie par lui jusque là.

    De la même manière, l’objectif 6 de la directive n° 96/70 assure indirectement l’application de ce principe de protection de la santé du consommateur en prévoyant qu’il faut garantir à celui-ci une information adéquate, c’est-à-dire propre à lui indiquer si la composition de l’eau est respectueuse de sa santé ou non, etc.

    Enfin, les articles 10 bis[ 52 ] et 11 bis[ 53 ] de la directive n° 96/70 donnent une importance relative à la question de la santé publique dans la réglementation des eaux minérales naturelles. En effet, l’ancien article 10 de la directive n° 80/777 ne prévoyait que la mise en pratique du principe de libre circulation des biens, avec des exceptions dans les Etats membres pour différents motifs dont la santé publique, la répression des tromperies et la protection de la propriété industrielle. Alors que la nouvelle directive prévoit que le commerce des eaux minérales naturelles peut être suspendu ou interrompu pour des raisons de santé publique. Ce nouvel article, en plus de privilégier la santé publique comme unique motif de suspension de la circulation de l’eau minérale dans un Etat membre, opère un changement d’écriture dans la directive : alors que l’article 10 était rédigé de manière à mettre en avant le principe de libre circulation en lui autorisant quelques exceptions, l’article 10 bis établit en principe qu’une considération de santé publique est une raison suffisante pour suspendre ou interrompre la circulation d’une eau minérale naturelle. Le principe de libre circulation est passé, en quelque sorte, au second plan par rapport à celui de santé publique.

    De la même manière, l’ancien article 11 de la directive n° 80/777 ne prévoyait qu’une procédure de coopération étroite entre les Etats membres et la Commission afin de décider des méthodes de contrôle des caractéristiques des eaux minérales. Alors que le nouvel article 11 bis introduit une disposition donnant seulement à la Commission, après consultation du Comité scientifique de l’alimentation humaine[ 54 ], le pouvoir de prendre les décisions susceptibles d’avoir une incidence sur la santé publique. La santé publique revêt donc une importance particulière puisqu’elle conditionne la mise en place d’une procédure où la Commission a une voix prépondérante.

    La lecture de la directive n° 96/70 permet d’affirmer que le concept de prise en compte de la santé humaine a bien été intégré dans la réglementation sur les eaux minérales naturelles. Il reste désormais à mesurer l’impact pratique d’une telle prise en compte.

    II/ La mise en œuvre discutable des moyens prévus par la directive pour protéger la santé humaine :

    L’application pratique de la réglementation apparaît pour le moins critiquable, non seulement au regard de l’impact réel que représentent les mesures envisagées par la directive, mais encore vis-à-vis de l’absence de mesures prises à long terme pour protéger l’environnement et la santé.

    A. l’impact réel des paramètres de protection de la santé humaine est critiquable

    Il est possible d’effectuer une comparaison parlante entre les mesures prises pour protéger la santé humaine, c’est-à-dire le choix et le nombre de paramètres retenus pour assurer à l’eau sa pureté, dans la réglementation des eaux minérales naturelles et dans celles des eaux destinées à la consommation humaine.

    Il faut partir du principe selon lequel[ 55 ] les eaux minérales naturelles et les eaux destinées à la consommation humaine n’ont pas la même vocation : les secondes ont pour objet de se consommer sans autres prétentions, elles doivent être potables et peuvent être utilisées pour tous les usages de la consommation, alors que les premières se commercialisent comme des produits de haute qualité, qui ont des propriétés particulières sur le métabolisme humain et qui se doivent donc d’obéir à une réglementation plus sévère que celle des autres eaux.

    Or, il est aisé de constater que les paramètres sensés garantir la très haute qualité des eaux minérales naturelles sont moins nombreux que ceux garantissant le caractère potable des eaux destinées à la consommation humaine[ 56 ]. Par conséquent, quels que soient les paramètres examinés, la réglementation des eaux minérales naturelles est, paradoxalement, moins exigeante que celle des eaux destinées à la consommation humaine.

    En principe, les contrôles des autorités nationales[ 57 ] portent au moins sur trois variétés de paramètres (les paramètres physico-chimiques[ 58 ], les bactériologiques[ 59 ], et les organoleptiques[ 60 ]) qui sont indispensables à tout examen concernant les caractéristiques des eaux. En supplément, d’autres contrôles portent sur des éléments particuliers à la nature de chaque eau. De cette manière, on peut décompter que les contrôles totaux effectués sur les eaux destinées à la consommation humaine portent sur 62 points, alors que ceux effectués sur les eaux minérales naturelles ne portent sur 26 points.

    Ainsi, même si différents dispositifs, notamment en matière de circulation des eaux, restent très performants pour assurer la protection des consommateurs, il faut conclure que la réglementation des eaux minérales naturelles, qui semblait très protectrice de la santé humaine grâce à ses exigences en matière de paramètres de contrôle, se révèle finalement critiquable de ce point de vue.

    On peut donc regretter que les paramètres de définition des eaux minérales naturelles, qui semblaient pourtant exigeants, le soient moins que ceux des eaux de qualité commune. En effet, même si en principe les eaux minérales naturelles sont contrôlées avec rigueur, elles le sont de manière moins complète que les autres eaux.

    Ceci est particulièrement regrettable car la santé des consommateurs d’eau minérale naturelle peut donc être remise en cause sur un long terme de ce point de vue.

    Par ailleurs, avec cette défaillance se cumule l’absence de préoccupations à l’égard de l’environnement … ce qui est aussi inquiétant pour les générations futures.

    B. l’accumulation de mesures discutables de protection de la santé et de l’environnement est inquiétante vis-à-vis des générations futures:

    Actuellement, les mesures prises par la réglementation des eaux minérales naturelles sont suffisantes pour assurer le bien-être des générations présentes car, à court terme, elles organisent relativement bien l’exploitation et le commerce de ces eaux. Mais, si les directives prévoient des dispositions détaillées[ 61 ], ces mesures sont insuffisantes, en théorie, pour garantir aux générations futures la même situation que celle dont dispose les générations présentes.

    En effet, deux réflexions théoriques font apparaître que, pour l’instant, la réglementation est peu lacunaire vis-à-vis des générations présentes de consommateurs mais le serait beaucoup plus vis-à-vis des générations futures.

    En premier lieu, les mesures prises isolément pour protéger l’environnement et la santé humaine sont défectueuses : l’environnement n’est pratiquement pas pris en considération et la santé humaine est assurée par des prescriptions qui dépendent d’un savoir scientifique susceptible de varier (positivement ou négativement) dans le temps en fonctions des avancées technologiques. Nous avons d’ailleurs vu que les paramètres de contrôle de la qualité des eaux minérales naturelles sont moins stricts et moins nombreux que ceux des eaux destinées à la consommation humaine …

    Il est donc possible de conclure que la réglementation des eaux minérales naturelles est faible pour l’instant mais que cela reste tolérable sur le court terme.

    En second lieu, les mesures prises et considérées comme des facteurs interactifs font apparaître que la réglementation est nettement insuffisante sur le long terme afin de prendre en compte les besoins des générations futures. Ainsi, il faut s’attendre à ce que l’absence de mesures prises pour la protection de l’environnement se cumule avec les insuffisances des dispositions en matière de santé des consommateurs, et que finalement dans quelques décennies la réglementation soit plus indulgente qu’aujourd’hui pour admettre la qualification d’eau minérale naturelle (en raison de la difficulté d’obtenir un environnement assez pur pour produire des eaux de qualité identique à celles que nous pouvons encore boire de nos jours).

    Ce qui aurait encore des conséquences sur la santé humaine puisque les normes seraient plus complaisantes à admettre des niveaux de certification plus bas et que les consommateurs boiraient une eau de moins bonne qualité.

    Cependant, les développements précédents ne reflètent que des raisonnements fondés sur de la théorie, or il faut prendre en compte le comportement concret des exploitants qui ont tout intérêt à appliquer des normes les plus strictes possibles pour garantir la qualité de leurs eaux minérales naturelles et ainsi gagner la confiance des consommateurs. Par conséquent les exploitants sont, en pratique, amenés à s’auto-appliquer des normes strictes d’exploitation et de protection de l’environnement pour donner une certaine pérennité leur production. C’est pourquoi, si l’on peut douter de l’efficacité de la réglementation communautaire vis-à-vis de l’exploitation des eaux minérales naturelles, il est permis de penser que l’intérêt et le bon sens des exploitants peuvent pallier ce défaut pour garantir des eaux minérales naturelles de qualité constante.


    Conclusion

    La réglementation des eaux minérales naturelles n’est pas une bonne illustration de la notion de développement durable.

    En effet, elle permet avant tout une exploitation très rigoureuse de la ressource ainsi qu’une commercialisation respectueuse des principes du droit communautaire : elle tend à l’harmonisation des législations dans les différents Etats membres afin d’y prévoir des conditions identiques de commerce en termes de concurrence et de libre circulation des marchandises. Cependant, si elle protège aussi la santé des consommateurs, elle ne prend quasiment pas en compte les questions relatives à l’environnement.

    Ainsi, cette réglementation va à l’encontre du Traité sur l’ Union Européenne qui, faisant référence au cinquième programme d’action (" vers un développement durable ") mentionne que " les exigences en matière de protection de l’environnement doivent être intégrées dans la définition et la mise en œuvre des […] politiques de la communauté ".

    On peut donc conclure que cette réglementation a bien été adaptée aux anciens objectifs de la Communauté Européenne, mais qu’elle ne traduit pas bien les nouveaux enjeux communautaires. Dès lors, même si la dernière directive date de 1996 et si d’autres réglementations communautaires régissent les rapports entre les eaux minérales naturelles et l’environnement, il apparaît souhaitable de réformer cette réglementation.

    Accès aux notes de bas de page


    Bibliographie

    Ouvrages concernant le droit européen :

    -Kortenberg E., Le Traité d’Amsterdam, Dalloz, coll. " Thèmes et Commentaires ", 1998

    - Gautron J.C., Droit européen, Dalloz, coll. " Mémentos ", 1997

    Ouvrages concernant le droit de l’environnement :

    - Prieur M., Droit de l’environnement, Dalloz, coll. " Précis ", 1996

    - Code Permanent Environnement et Nuisances, Editions Législatives, mis à jour en 1998.

    Documents divers :

    - Journal Officiel de la République française, Hygiène alimentaire, les eaux destinées à la consommation humaine, mis à jour le 05.12.1998

    - CD-ROM Celex de l’université de Limoges pour les extraits de directives européennes

    - Journaux : Le Monde, L’eau enjeu de la paix et de la prospérité du XXI ème siècle, article du 20.03.1998

    : Le Monde Economie, Pression démographique oblige la pénurie d’eau est pour demain, article du 02.02.1999

    - Brochure, L’aventure de l’eau minérale naturelle, éditée par le groupe Perrier-Vittel S.A., 1998

    - Grand Dictionnaire Encyclopédique Larousse, édition 1982


    Plan

Remerciements

Avant propos page 3

Introduction page 5

Première partie : les objectifs affichés de garantir la santé des consommateurs par une réglementation exigeante de l’exploitation des eaux minérales naturelles. page 12



Deuxième partie : des objectifs supplémentaires à intégrer pour parfaire la réglementation de l ‘exploitation des eaux minérales naturelles. page 28


      Mémoire rédigé par Valérie Bertier, étudiant en magistère de droit de l'environnement et de l'urbanisme à Limoges.

    Vous pouvez comme lui nous transmettre par mail des documents rédigés par vos soins et nous les mettrons en ligne dès lors qu'ils correspondent à nos critères :). Si vous souhaitez prendre contact avec Valérie, n'hésitez pas à nous écrire.



Dernière mise à jour : 7 juillet 1999