LE TRAÇAGE.

 

Réalisation et copyright: Bruno HABERKORN. Ce texte ne reflète que mes opinions. Cependant, je suis Traceur Fédéral depuis pas mal d'années, et j'ai aussi une certaine pratique. (4-6 courses tracées par an, dont quelques championnats de France...).Bien-sûr, je m'inspire également de mon vécu, pas seulement à haut-niveau, mais aussi comme papa, président de club, ou encore concurrent de compétition internationales... J'utiliserai aussi le cours de traçage suivi il y a des années par Yvette et Didier HBK (que je remercie au passage) en Suisse.

Au menu:

Principes généraux.

Aires de départ et d'arrivée.

Contraintes.

Allure générale du circuit.

Choix des postes.

Le poste à poste.

Le parcours jalonné

 

Principes généraux:

L'organisateur ne doit pas perdre de vue un principe de base, trop souvent négligé: à de très rares exceptions, les concurrents viennent aux compétitions pour le plaisir, pour s'amuser. Il est clair qu'une minorité fera sa course sans regimber, même si c'est nul, du moment que ça lui rapporte des points en Coupe de France. Mais les autres! Quel plaisir tireront-ils de farfouiller dans les ronces à la recherche d'un hypothétique trou? Ou à cavaler 2km sur un chemin tout droit? Ne riez pas, on trouve encore ça dans le petit monde de la CO, en l'an 2000, en France.

Cette recherche du plaisir des concurrents doit guider toutes les étapes d'une organisation technique: traçage, choix des postes, aires de départ et d'arrivée... Elle n'est pas antinomique avec la recherche de difficultés; bien évidemment, même si les parcours pour les débutants doivent rester simples, sans pour autant manquer totalement d'attraits, les tracés des autres circuits doivent présenter aux coureurs des problèmes variés: choix d'itinéraires, postes techniques, changements de direction... J'en parlerai par la suite.

Le traçage est donc une affaire complexe, qui commence tôt avec le choix du terrain et des aires de départ et d'arrivée, pour ne s'achever qu'une fois le prébalisage terminé. Outre les difficultés techniques évoquées plus haut, il doit prendre en compte différentes contraintes, comme le respect des jeunes plantations, des zones de repos pour le gibier, d'éventuelles zones interdites. On rencontrera donc avec profit, si on ne connaît pas très bien la zone de course, l'agent ONF de la zone de course, des habitants des villages riverains, au hasard des reconnaissances. Ceux-ci vous indiqueront les contraintes, mais aussi des coins à ne pas manquer: arches, points de vue...

 

Aires de départ et d'arrivée:

Même si ces choix doivent être le fruit d'une concertation de l'ensemble des organisateurs, le traceur a son mot à dire. Les contraintes sont liées au parking, à une éventuelle structure d'accueil, mais aussi à la possibilité d'atteindre la forêt rapidement: cette dernière considération n'est pas la moindre: on a vu encore récemment des couloirs d'arrivée à rallonge, précédés de postes sans intérêt dans des champs et des lotissements; pitié pour les concurrents! L'aire d'arrivée devra donc se trouver à moins d'un kilomètre du parking, et jouxter la forêt de la course. Il faut garder à l'esprit que ces parcours obligatoires (parking-arrivée, dernières balises dans la forêt- arrivée) s'adressent également à des enfants et des personnes âgées qui y laissent des plumes, et qui n'y prennent aucun plaisir. Notre sport s'adresse aussi à eux!

L'aire de départ doit également être choisie avec soin: les concurrents y passent du temps et se font une première idée de leur course à cet endroit. Le site doit permettre l'accès à des premiers postes de différents niveaux: des faciles, et aussi des plus difficiles pour les grands circuits. Il doit également permettre de s'échauffer. Un bon exemple est le départ des championnats de France classiques en 2000.

extrait de la carte des championnats de France 2000

Si le départ est loin (plus de 700, 800m), il doit comporter de l'eau et des toilettes, même rudimentaires, ne serait-ce que pour éviter le courroux des propriétaires.

 

Contraintes:

Avant d'attaquer le traçage proprement dit, il convient d'étudier les contraintes liées au terrain: zones interdites, zones infranchissables, zones dangereuses (ce qui peut évoluer selon les catégories: une pente raide est prohibée pour les jeunes enfants comme pour les personnes âgées, mais les costauds peuvent y aller), routes. Dans ce dernier cas, il faudra évaluer la dangerosité de la circulation, pour éventuellement imposer un passage. Mais où? Si votre connaissance du terrain vous le permet, vous devrez aussi éviter les zones où se trouvent faune et flore protégées. Même si vous n'y voyez aucun intérêt, des raisons de basse politique vous y inciteront. En Suède, on recommande même de penser à un sens de parcours général pour repousser la faune dans les parties de la forêt où des aires de repos sont possibles pour ces animaux. En France, on y vient également.. Des cartes de petit format invitent le traceur à les utiliser pleinement; attention à ne pas affoler le gibier, le chassant de son refuge naturel; on en voudra aux orienteurs, ce qui rendra des demandes d'autorisation ultérieures périlleuses.

Attention aux zones de falaises; outre qu'il ne faudrait pas inciter nos chers bambins à se prendre pour des parapentistes (avec l'inconvénient majeur de ne pas avoir de parapente), il ne faut pas perdre de vue qu'elles sont souvent occupées par des oiseaux qui s'en servent pour nicher: interrogez le cartographe, il vous le dira: "ici, c'est plein de déjections".

Attention également aux zones humides: elles sont fragiles et très dégradées par le passage des coureurs.

Allure générale du circuit:

Beaucoup de traceurs pensent qu'un circuit doit être "beau". C'est à dire bien proportionné, varié... Ca reste très subjectif: pourtant, on est souvent d'accord pour dire: tel circuit est beau, tel autre est moche. De toutes façons, les critères esthétiques correspondent souvent à des contraintes qu'on aurait tendance à oublier:

Postes alignés:  il faut éviter de poser 3 (ou plus) postes dans le même axe: c'est lassant pour le coureur, il n'a pas à changer de direction, ce qui réduit l' intérêt du parcours.

Angles aigus: là encore, c'est laid à voir et c'est une faute de traçage: ça encourage le concurrent à entrer et à sortir de la balise par le même endroit, ce qui induit une injustice: le coureur qui suit voit repartir ses concurrents de la balise. Manque d' intérêt et injustice: on ne devrait plus voir ce genre d'erreurs de traçage, et pourtant elles se reproduisent même au meilleur niveau (en 2000, au championnat de France des clubs, aux championnats du monde universitaires pour ne citer que des exemples connus).

Poste à poste équidistants: le traceur se branche sur 350m, et on voit sur 4-5 postes la même distance séparer les balises: l'effet de lassitude est rapide sur le coureur, surtout sur un terrain monotone! Il faut autant que possible varier les plaisirs: tout parcours devrait posséder au moins un grand poste à poste (voir plus loin), mais aussi un ou plusieurs groupes de postes rapprochés dans une zone technique (voir plus loin aussi), et les longueurs intermédiaires: bref faites preuve d' imagination.

L'arrivée de Sportident a semblé à certains être la possibilité de s'affranchir de ces contraintes, et les fautes de traçage se sont accumulées. C'est dommage, et ce n'est pas parce que les coureurs ne peuvent plus tricher qu'ils doivent s'ennuyer.

Choix des postes:

Comme je l'ai déjà dit, la plupart des coureurs sont là pour se faire plaisir, et ce principe devrait conditionner le choix des postes: ils doivent autant que possible être intéressant à trouver, esthétiques, pas trop visibles (c'est dans le règlement sportif: on doit voir l'élément avant le détail: mais dans le cas d'une borne...) mais pas planqués. Ce n'est peut-être pas possible sur les 120 postes d'une Nationale, mais il faut faire des efforts dans ce sens. Il ne faut pas hésiter à rechercher le beau poste, grotte, ruine, arbre remarquable; cependant, le poste à poste précédant ne doit pas être sacrifié au poste lui-même; La philosophie de la course d'orientation est attachée au déplacement en milieu naturel, et on a parfois tendance à croire que la technique, c'est courir sur des chemins et "grenouiller" dans le vert pour chercher la balise. Une balise technique, ce n'est pas un trou dans les fougères à 100m du détail le plus proche, ou encore un rocher parmi tant d'autres (ou alors tous doivent être dessinés). Par contre, si dans une zone fouillée la lecture de la carte permet de trouver une balise difficilement abordable sans franchement ralentir, sans recourir à la chance , alors oui, là c'est une balise technique. Et les parcours de compétition devraient en comporter plusieurs!

Le poste à poste:

C'est l'âme d'un circuit. Contrairement à une opinion répandue, on ne doit pas imposer l'itinéraire mais au contraire offrir plusieurs choix sur tous les poste à poste. C'est la richesse de notre sport de pouvoir choisir, non seulement par là où on passe, mais aussi à quelle allure et dans quel esprit. Les poste à poste devront donc être aussi variés que possible: variation de longueur, de technicité, et, j'y tiens, au moins un long poste à poste où le choix d'itinéraire sera déterminant, c'est à dire où un bon choix peut faire gagner du temps. On en voit de temps en temps, malheureusement uniquement sur des circuits élites. Mais ils pêchent souvent en France par une réalisation ennuyeuse pour les concurrents: si le choix est réduit entre la route de gauche et celle de droite, quel intérêt? Cela reviendra de toutes façons à courir sur une route ... La zone où est tracé le choix doit être assez riche pour que l'orientation entre ces deux postes soit attrayante, et c'est la plupart du temps possible. Le plaisir des concurrents doit rester prioritaire, là encore.

Le parcours jalonné:

Il ne doit pas être la dernière roue du carrosse! Les petits concurrents sont les futurs champions de demain. Par ailleurs, des petits défauts sur d'autres circuits peuvent devenir de véritables galères pour ces bambins. D'une manière générale, il faut éviter pour eux la végétation basse, surtout les ronces, les pentes raides, les marais. Tout obstacle, mineur pour nous, devient majeur pour un minot d'1m20...

Je rappelle le principe: il s'agit de reporter sur la carte l'itinéraire jalonné, sur lequel on dispose des postes, en prenant soin d'inciter les enfants à quitter les jalonnés pour "couper", ce qui devrait les amener doucement à l'autonomie et à des parcours de grands. Évidemment, couper  ne doit pas les mettre en danger et ils doivent retomber sur une section du jalonné s'ils le quittent par un chemin. Il ne doit pas dépasser 3000m sur le jalonné, et le balisage doit être soigneusement établi pour ne pas créer l'insécurité chez les bambins. Là encore, pensez à votre public, ne mettez pas le balisage à 3m de haut!

 

Voilà, maintenant au travail!