les mouches... elles sont insupportables !

[Encyclopédie]

  MOUCHE, s. f. musca, (Hist. nat.) insecte qui a des aîles transparentes. La mouche differe du papillon en ce que ses aîles ne sont pas couvertes de poussiere : elle differe des scarabés, des sauterelles & de plusieurs autres insectes aîlés, en ce que ses aîles n'ont point de fourreau ou de couverture particuliere, & qu'elles peuvent seulement s'en servir quelquefois les unes aux autres. Les mouches ont une tête, un corcelet, un corps ; la tête tient ordinairement au corcelet par un cou assez court, & sur lequel elle peut souvent tourner comme sur un pivot : les aîles sont attachées au corcelet ; & lorsqu'il y a deux corcelets, le premier est le plus petit ; c'est au second que tiennent les aîles.

Musca domestiqua

ordre; diptère
sous- ordre: brachycères ou cyclorhaphes
famille: muscidae

On peut diviser les mouches en deux classes générales, dont l'une comprend les mouches qui n'ont que deux aîles, & l'autre celles qui en ont quatre. Chacune de ces deux classes générales peut être sous-divisée en quatre classes particulieres, dont la premiere comprend les mouches qui ont une trompe, & qui n'ont point de dents ou de serres ; la seconde est composée des mouches qui ont une bouche sans dents sensibles ; la troisieme renferme les mouches qui ont une bouche munie de dents ; & la quatrieme, les mouches qui ont une trompe & des dents. Les mouches à deux aîles, observées par M. de Reaumur, se sont toujours rapportées à la premiere & à la seconde de ces classes ; par exemple, les grosses mouches bleues des vers de la viande, toutes les petites mouches que l'on voit dans les maisons, & les cousins, ont une trompe sans avoir de dents, & sont de la premiere classe. Les petites mouches qui paroissent des premieres au printems dans les jardins, & que l'on appelle mouches S. Marc, & certaines mouches qui ressemblent à des cousins, mais qui sont souvent plus grandes, ont une bouche sans dents, & appartiennent à la seconde classe.

Il y a beaucoup de genres de mouches à quatre aîles dans la troisieme & la quatrieme classe. Toutes les guêpes ont une bouche & deux dents en-dehors, aussi elles sont de la troisieme classe ; toutes les abeilles, ayant une trompe & deux dents au-dessus de la trompe, sont de la quatrieme classe. Il y a aussi des mouches à quatre aîles, qui appartiennent à la premiere & à la seconde classe ; telles sont toutes les mouches papilionacées, qui viennent de différentes especes de teignes aquatiques ; elles n'ont qu'une bouche sans dents, ainsi elles sont de la seconde classe. Tous les pucerons aîlés & les faux pucerons aîlés, les cigales ont une trompe sans avoir de dents, & sont par conséquent de la premiere classe.

On pourroit faire une cinquieme classe qui comprendroit les mouches à tête en trompe. Ces têtes sont fort allongées, & ont comme celles des oiseaux, une sorte de long bec, mais qui ne s'ouvre que par son bout, c'est-à-dire à l'endroit où les têtes des autres insectes finissent. Celles de quelques-uns ont un prolongement qui a la figure d'une trompe, mais qui est roide, qui ne peut changer de figure ni de position, sans que la tête en change. C'est au bout de cette partie allongée que sont les dents, ou les instrumens au moyen desquels le petit animal prend de la nourriture. La mouche scorpion a la tête en trompe.

Après ces cinq premieres classes, on peut faire trois autres classes subordonnées, dont les caracteres seront pris de la forme du corps : savoir, 1°. la classe des mouches à corps court & plus large qu'épais ; telles sont les mouches bleues de la viande, les abeilles, cent & cent autres genres de mouches, soit à deux aîles, soit à quatre aîles. 2°. La classe des mouches à corps long, comme celui des demoiselles, des cousins, &c. 3°. La classe des mouches à corps long ou court, qui est joint au corcelet par un simple fil visible, comme dans les frélons, les guêpes, plusieurs mouches ichneumons, les mouches des galles, du chêne, &c.

Les caracteres des genres sont tirés du port des aîles & de la trompe, de la figure des antennes, & d'autres parties extérieures du corps, & sur-tout des postérieures.

Il faut considérer le port des aîles, lorsque la mouche est en repos, ou lorsqu'elle marche. 1°. Celles qui portent leurs aîles paralleles au plan de position, sont en plus grand nombre que celles qui les tiennent dans des directions inclinées. 2°. Les mouches qui portent leurs aîles de façon qu'elles couvrent le corps en partie, sans se couvrir l'une l'autre, si elles n'ont que deux aîles, ou si elles en ont quatre, sans qu'une des supérieures empiete sensiblement sur l'autre aîle supérieure ; telles sont les mouches bleues de la viande & les mouches des maisons. 3°. Les aîles de plusieurs mouches se croisent plus ou moins sur le corps. 4°. D'autres sont faites de façon, & se croisent à un tel point que le corps déborde au-delà de chacune des aîles. 5°. D'autres ne se croisent que sur la partie postérieure du corps, & laissent entr'elles une portion de la partie extérieure à découvert. 6°. Les aîles de plusieurs autres mouches se croisent sur le corps, & celle qui est supérieure, se trouve plus élevée sur la ligne du milieu du corps que sur les côtés. 7°. Quelques mouches ont les aîles posées sur le dos, & appliquées les unes contre les autres dans un plan vertical ; telles sont plusieurs especes de petites demoiselles, & les mouches éphemeres. 8°. Les aîles de plusieurs autres mouches sont appliquées obliquement contre les côtés, & se rencontrent audessus du corps ; par exemple, les aîles de la mouche du petit-lion, des pucerons, & celles de la mouche du fourmi-lion. 9°. D'autres mouches ont les aîles appliquées contre les côtés ; mais ces aîles, après s'être élevées, se recourbent sur le dos en forme de toît écrasé. 10°. Enfin d'autres mouches tiennent leurs aîles obliques, de façon qu'elles se touchent au-dessous du ventre : cette position est contraire à celles des aîles qui forment un toît au corps ; telle est la mouche qui vient du ver du bigarreau.

Certains genres de mouches ont 1°. des antennes articulées, 2°. des antennes articulées qui deviennent de plus en plus grosses, à mesure qu'elles s'éloignent de la tête ; ce sont des antennes en forme de massue. 3°. Les cousins & certaines tipules ont des antennes qui ressemblent à des plumes. 4°. Il y a des antennes qui à leur origine & près de leur bout sont plus déliées que dans tout le reste de leur étendue ; on les appelle antennes prismatiques. 5°. Quelques mouches ont des antennes branchues ou fourchues. 6°. D'autres ont des grosses antennes extrèmement courtes ; elles n'ont que deux ou trois articulations : deux ou trois pieces posées l'une sur l'autre, forment un pié, un support à un grain d'un volume plus considérable, par lequel l'antenne est terminée : on l'appelle antenne à palette.

Les trompes peuvent fournir les caracteres de bien des genres. Les unes ont un fourreau composé d'une seule piece ; les autres en ont un fait par la réunion de plusieurs pieces différentes : les unes ont des fourreaux comme écailleux, les autres en ont de charnus ; ceux de quelques-unes sont terminées par un empatement charnu, par des especes de grosses levres ; d'autres trompes sont faites comme une espece de fuseau dont le bout seroit creux. &c.

Il y a des insectes, par exemple des demoiselles, qui ont la tête presque ronde ; d'autres ont la tête plus large que longue.

Quelques insectes ont deux corcelets ; telle est la mouche du fourmi-lion : le corcelet est plus ou moins élevé.

Toutes les mouches ont six jambes, mais elles sont plus ou moins longues ; les cousins & les tipules les ont très-longues. Ces six jambes tiennent ordinairement au corcelet ; mais dans quelques especes l'une des paires de jambes est attachée à un des anneaux du corps.

Les mouches ont à la partie postérieure du corps un aiguillon, une tariere, une scie, des longs filets semblables à des antennes. Les tarrieres appartiennent aux femelles, & leur servent à percer & à entailler les corps dans lesquels elles déposent leurs oeufs. La plûpart des mouches sont ovipares ; mais il y en a qui sont vivipares, & qui mettent au jour des vers vivans. Certaines especes de mouches ne sont distinguées que par la grandeur. Il y en a qui sont solitaires, d'autres vivent en société comme des guêpes, les abeilles, &c. Voyez les mém. pour servir à l'Hist. nat. des insect. par M. de Reaumur, tom. IV. dont cet extrait a été tiré. Voyez INSECTE.

  MOUCHE CORNUE, taurus volans, (Hist. nat.) scarabé de l'Amérique & des îles Antilles, dont le corps est presque aussi gros qu'un petit oeuf de poule un peu applati, ayant comme tous les autres scarabés, des aîles fort déliées recouvertes par d'autres aîles en forme de coquilles, d'une substance seche, assez ferme, très-lisse, luisante, d'une couleur de feuille morte tirant sur le verd & parsemée de petites taches noires ; le reste du corps est d'un beau noir d'ébene très-poli, & principalement garni à la partie posterieure d'un duvet jaune disposé en forme de frange. L'animal a six grandes pattes, dont quatre prennent naissance au-dessus de la poitrine, & les deux autres sont attachées au milieu de la partie inférieure de l'estomac, elles se replient chacune en trois parties principales par de fortes articulations, dont quelques-unes sont armées de pointes très-aiguës ; les extrémités de ces pattes sont terminées par trois petites griffes courbées en crochet, très-piquantes, & s'accrochant facilement à tout ce qu'elles rencontrent. La tête de cet insecte paroît comme étranglée & détachée du corps ; elle a deux gros yeux ronds, demi sphériques, de couleur d'ambre, très-clairs & fixes : la partie qui est entre ces yeux s'avance beaucoup, & s'étend d'environ deux pouces & demi, formant une grande corne noire, très-polie, recourbée en-dessus, garnie de quelques excrescences de même matiere, & terminée par deux fourchons disposés l'un au devant de l'autre. Le dessus de la tête est emboîté dans une espece de casque large d'un pouce, s'allongeant par-devant comme un grand bec un peu courbé, long à peu-près de trois pouces & demi, garni de deux éminences pointues, disposées des deux côtés vers les deux tiers de sa longueur ; le dessus de ce bec est d'un beau noir, aussi lustré que du jais poli ; mais le dessus est creusé par une petite rainure toute remplie d'un poil ras très-fin, de couleur jaune, & plus doux que de la soie, & un peu usé dans la partie de ce bec qui s'approche de la corne inférieure dont on a parlé. Tout l'animal peut avoir six pouces de longueur d'une extrèmité à l'autre : il vole pesamment, & pourroit faire beaucoup de mal s'il rencontroit quelqu'un dans son passage. M. LE ROMAIN.

  MOUCHES LUISANTES, autrement nommées bêtes à feu, c'est un petit insecte des pays chauds de l'Amérique, mais gros, mais plus long que les mouches ordinaires, ayant les aîles un peu fermes, d'un gris-brun, couvrant tout le corps de l'animal. Lorsqu'il les écarte pour voler, & qu'il découvre sa partie postérieure, on en voit sortir une clarté très-vive & très-brillante, qui repand sa lumiere sur les objets circonvoisins. Ces mouches ne paroissent que le soir après le coucher du soleil. Les arbres & les buissons en sont tout couverts ; principalement lorsqu'il a beaucoup plu dans la journée ; il semble voir autant d'étincelles de feu s'élancer entre les branches & les feuilles.

L'île de la Guadeloupe en produit d'une autre sorte beaucoup plus grosse que les précédentes, dont la partie postérieure répand une plus grande lumiere, qui se trouve fort augmentée par celle qui sort des yeux de l'animal. M. LE ROMAIN.

Encyclopédie de Diderot et d'Alembert

éditée en CD-ROM & DVD - Editions REDON