Le démembrement de la clause bénéficiaire
dans les contrats d'assurance-vie

 

1°/ Les avantages attachés à une telle stipulation
 

Le démembrement de la clause bénéficiaire consiste à ce que l'assuré stipule que le capital versé à son décès reviendra en usufruit à telle personne et en nue-propriété à telle autre. Dans ce cas, le démembrement joue sur une somme d'argent, en l'occurrence les actifs monétaires versés par la compagnie aux bénéficiaires. Dès lors, on se trouve en présence d'un quasi-usufruit au sens de l'article 587 du Code civil. Le quasi-usufruitier peut dépenser les actifs monétaires comme s'il en était propriétaire à charge pour lui de rendre l'équivalent, en ragent ou en nature, à l'extinction de l'usufruit. Ainsi, le nu-propriétaire a une créance sur la succession de l'usufruitier. Or, une telle créance est fiscalement déductible de l'actif successoral de l'usufruitier. Dans ces conditions, le contrat d'assurance-vie, combiné à la technique du quasi-usufruit, peut devenir un excellent véhicule pour transmettre un capital à une personne sans porter préjudice à une autre.
 

2°/ Un exemple d'application : le quasi-usufruit du conjoint survivant

En désignant son conjoint comme bénéficiaire du quasi-usufruit et ses enfants comme bénéficiaires nus-propriétaires, un assuré transmet un capital à son conjoint, qui pourra en jouir comme il l'entend pour subvenir à ses besoins, alors que ses enfants détiennent une créance sur leur parent quasi-usufruitier, exigible lors de l'extinction de l'usufruit, c'est-à-dire au décès de l'usufruitier. Cette opération permet donc une double exonération des droits de succession sans léser quiconque, que ce soit le quasi-usufruitier ou les nus-propriétaires :
- Dans un premier temps, s'applique la fiscalité de l'assurance-vie (exonération des droits de succession).
- Dans un deuxième temps, la technique du quasi-usufruit permet de faire valoir une créance sur la succession du quasi-usufruitier permettant de recevoir des actifs hors fiscalité.

Au regard de l'abus de droit, la justification économique d'une telle clause se trouve dans le désir de protéger le conjoint, sans pour autant léser les enfants.
 

3°/ L'article 751 du Code Général des Impôts est-il applicable ?

Ce risque existe au décès du quasi-usufruitier. Cependant, la présomption de l'article 751 du CGI est écartée lorsqu'il y a "une donation régulière et que cette donation, si elle n'est pas constatée dans un contrat de mariage, a été consentie plus de trois mois avant le décès". Or, au regard du droit civil, le contrat d'assurance-vie, fondé sur le mécanisme de la stipulation pour autrui, est une donation indirecte avec désignation du bénéficiaire, donc régulière au sens de l'article 751 du CGI. Ainsi, le risque d'application de cet article ne subsiste-t-il que pendant trois mois qui séparent la souscription du contrat du décès de l'assuré.
 

4°/ Un modèle de clause bénéficiaire démembrée

"Messieurs,"

"Je souhaiterais modifier la rédaction de la clause bénéficiaire du contrat d'assurance-vie ci-dessus référencé. Voici la nouvelle rédaction de cette clause :"

"1°/ Bénéficiaire en cas de décès de l'assuré"
"
Les capitaux dus par l'assureur au titre du contrat désigné ci-dessus reviendront à mon décès : Pour l'usufruit à mon conjoint à la date du décès et, pour la nue-propriété, par parts égales à mes enfants vivants ou représentés. Toutefois, mon conjoint sera exclu du bénéfice du présent contrat, et perdra sa qualité de bénéficiaire en cas :"
"- d'assignation en divorce ou en séparation de corps."
"- de révocation de sa désignation."
"- de renonciation à sa qualité de bénéficiaire."
"- de prédécès de celui-ci."

"Dans chacun de ces cas, les droits des autres bénéficiaires s'exerceront en pleine propriété. A défaut des personnes ci-dessus mentionnées, je désigne comme bénéficiaires mes héritiers."

"2°/ Gestion du capital démembré en quasi-usufruit"
"
A mon décès, le capital dû par l'assureur sera soumis à un quasi-usufruit, en application de l'article 587 du Code civil. Il sera versé à l'usufruitier, qui aura la liberté d'en disposer "en bon père de famille". Ce versement aura pou l'assureur un caractère libératoire des obligations qui lui incombent en vertu des présentes. Le quasi-usufruitier lui donnera, à cette occasion, bonne et valable quittance du paiement du capital. L'usufruitier sera dispensé de fournir caution et de faire emploi desdits sommes. Il sera redevable, vis-à-vis des nus-propriétaires, d'une somme égale à celle qu'il aura reçue de 'l'assureur. Cette dette ne deviendra exigible qu'au jour de son propre décès."

"Vous voudrez bien m'accuser réception de la présente; A l'avance je vous en remercie."
"Je vous prie de croire, Messieurs, en 'l'assurance de mes sentiments distingués."

 

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