Histoire du Cacao   

de Côte d'Ivoire et d'ailleurs
Source : www.saveurs.sympatico.ca


Arbre de vie chez les Mayas
Sang d'une princesse Toltèque
Idolâtré par l'empereur Montezuma
Considéré comme aphrodisiaque par les Aztèques
Convoité par les pilleurs espagnols
Méprisé par les pirates anglais
Monnayé par les commerçants hollandais
Utilisé comme potion magique par Casanova ...

Origine:
Amérique centrale et Amérique du Sud - plus précisément au Mexique dans la presqu'île du Yucatan et dans les bassins de l'Orénoque et de l'Amazone.

Étymologie:
dérivé du mot aztèque tchocolatl, lui-même emprunté au Maya: choco signifiant bruit et ati, l'eau ou xocoatl - Allusion au bruit du fouet pour faire dissoudre et mousser le chocolat dans l'eau chaude.

Appellations

Allemand: schokolade Néerlandais : chocolaad
Anglais: chocolateNorvégien: sjokolade
Chinois: tchyaokeuliPolonais: zsekolada
Danois: chocolade Portuguais: chocolate
Espagnol: chocolateRusse: chokalade
Finlandais: sukiaaSerbo-croate: cokolada
Flamand: chocoladeSuédois: choklad
Grec: sokolataTurc: çikolata
Italien: cioccolato


Ère pré-colombienne :
Sauvage pendant des siècles, il naquit, aux yeux des hommes vers l'an 2000 avant notre ère dans l'immensité de l'Empire Maya et vit défiler toutes les grandes civilisations qui lui portèrent une origine royale ou divine - son nom latin Theobroma signifie "nourriture des dieux".

C'est Quetzalcoatl, dieu de la végétation et de son renouveau, représenté par un serpent à plumes et qui régnait sur la cité de Tula qui apprit aux hommes comment cultiver le cacahuaquahuilt - le cacaoyer à l'ère pré-colombienne.

Arbre sacré
Chez les Pilpils, le cacao était associé aux principaux événements de la vie quotidienne. Les fèves de cacao servaient d’offrandes pour les grands passage rituels de l'embryon à la naissance; de l'enfance à la puberté. Le corps des jeunes garçons était enduit d’un mélange d’eau de pluie, de pétales de fleurs et de poudre de cacao.

Chez les Mayas, il était tout d'abord un breuvage rituel appelé " chacau haa ".

Après le déclin de l’Empire Maya, les envahisseurs Toltèques (époque post-classique 950 - 1500) firent du cacaoyer leur symbole de la réincarnation terrestre au monde végétal. Associé au sang dont les fèves ont la couleur, le cacao représente chez les Toltèques une princesse de la tribu sauvagement assassinée. L'amertume des fèves n'est que la transcription sensible de toutes les souffrances qu'endurèrent la princesse avant de mourir et celle de tout un peuple avant de dominer tout le Mexique central sous l'oeil vigilant du héros civilisateur Kukulcan.

On retrouve cette même connotation chez les Bribris, où le cacao tient fonction d’élément médiateur entre le ciel et la terre, entre la nature et les hommes, véritable source de fertilité et de vie à partager entre tous. À chaque année, on recherchait un chien aux poils couleur cacao pour l'offrir aux dieux, rendre la terre féconde et la récolte généreuse.

Arbre de Vie
Mayas et Aztèques apprirent les propriétés hydratantes du beurre de cacao, cette substance obtenue après plusieurs étapes de transformation. Ce baume devint partie intégrante de la pharmacopée pour cicatriser les gerçures et les brûlures, calmer les ardeurs du soleil, soigner le foie ou les poumons et comme remède préventif contre les morsures de serpent.

Au royaume des Aztèques
Les Aztèques, pilaient les grains de cacao à genoux, au moyen d'un métalt, un mortier moitié bois, moitié fer et légèrement chauffé sur une pierre plate - la matate. Les fèves étaient ensuite grillées et concassées avec des épices, notamment du poivre, de la cannelle et de l'achiote et passées au tamis.

La cabosse demeura, pendant tout leur règne, un élément majeur social, économique et religieux jusqu'au jour où ils durent plier sous le joug de la conquête espagnole au XVe siècle.

La cabosse est à l'origine de la comptabilité en Amérique
La fève de cacao, séchée, devint une monnaie d'échange. On pouvait aussi bien acheter un lapin à 10 fèves qu'un esclave à 100 fèves. Ayant en main une référence comptable acceptée par les différentes tribus, plusieurs grandes civilisations d'Amérique Centrale commencèrent à développer des relations commerciales autres que sur une base de troc. On a même découvert les plus anciennes inscriptions calendaires.

La mesure étalon des Mayas était la "carga", équivalente à la charge que pouvait porter un homme sur son dos déterminée à 8 000 fèves.

  • 1 zontle = 400 fèves
  • 20 zontles x 400 fèves = 3 xiquipils
  • 3 xiquipils soit 8 000 fèves = une carga
  • 32 cargas - environ 1 tonne

Les Aztèques continuèrent à utiliser la mesure étalon des Mayas. Aussi, on comptait par "carga" le tribut que les populations soumises devaient payer à leur valeureux conquérants pour se libérer du joug de la servitude. L’imposition annuelle perçue par la confédération aztèque était de 980 cargas, soit environ 30 tonnes.

Toute une institution bancaire vint se greffer à la structure politique et le rôle de banquier équivalait à une charge de prestige.

Ère hispanique

En 1502 - Christophe Colomb accoste au Nicaragua au mois de juillet. Vers la fin du mois, son bateau mouille au large de l’île de Guanaja, à quelques lieues du Honduras actuel.


"Un grand bateau indigène de vingt-cinq rameurs vint à notre rencontre.
Leur chef, abrité par un toit, nous offrit des tissus, de beaux objets de cuivre
et des amandes qui leur servent de monnaie et avec lesquelles ils préparent une boisson."

Mais trop absorbé par la recherche du Nouveau Monde et de la route des Indes, il ne s'attarde pas aux "amandes".

1519 - C'est à Hernan Cortes que l'on doit la découverte du chocolat alors qu'il débarque en avril 1519 sur les côtes du Tabasco. Les habitants, à la vue de sa cuirasse, de son visage blanc et barbu, monté sur un cheval, le prennent pour le dieu Quetzalcoatl car une prophétie avait annoncé que ce dieu était allé conquérir de nouvelles terres à l'est et qu'il reviendrait par ses descendants. Ils conduisent ce conquistador au palais flamboyant de l'empereur Moctezuma où, en signe d'hospitalité et pour honorer le dieu de la culture du cacaoyer, on lui offre un "xocolatl" dans un gobelet d'or incrusté d'écailles de tortue. Montezuma veut lui faire partager sa passion pour ce breuvage épais édulcoré au miel qu'il aime pour son amertume aphrodisiaque accentué d'épices et de piment. Sa ration quotidienne se chiffre à 50gobelets par jour. Il goûte ainsi au chocolat chaud parfumé de cannelle, de poivre, de girofle, de graines d'achiote et, s'il présume une découverte alimentaire, il est tout d'abord sidéré par la richesse des gobelets.

Dans sa première lettre-rapport à l’Empereur Charles Quint, datée de 1520, Cortès mentionne le cacao " qui est un fruit comme des amandes que les indigènes vendent moulue. Ils la tiennent, dit-il, en si grande valeur qu’elles sont traitées comme monnaie dans toute leur terre et achètent avec elles toutes choses nécessaires sur les marchés et ailleurs ".

En même temps que part ce premier rapport, les Espagnols massacrent la noblesse aztèque et Cortez doit fuir la ville de Mexico le 30 juin de la même année. Près d'un an plus tard, aidé par les tribus qui refusent le joug aztèque et les sacrifices humains, il prend Mexico et la détruit. En 1522, il est nommé gouverneur général de la Nouvelle-Espagne.

En 1528 - (ou 1529 selon différents manuscrits), les caravelles espagnoles, leur ventre gonflé d'or voguent vers l'Espagne emportant des sacs de fèves de cacao prélevés des plantations de Cortes offertes en cadeau de bienvenue par Montezuma.

Cortès demeure en territoire aztèque jusqu'en 1540; il apprend la valeur des cabosses. En l'an 1536, il l'estime autour de 5 à 6 pesos d’or. Son cours demeurera stable durant toute une décennie. Après le départ de Cortès, il se mit ensuite à grimper et atteint 20 pesos par carga, fixé par l'ordonnance de 1551.

Reprenant à leur compte la méthode comptable et politique des Aztèques, il réquisitionne un tribut annuel et met en place un système de "coopération volontaire" du nom de "encomienda" pour cultiver les plantations de cacaoyers et s'assurer d'une récolte progressive.

À la cour de Charles Quint le chocolat fait des ravages autant qu'en Nouvelle-Espagne
Introduit en Espagne par le célèbre navigateur Fernand Cortez, le chocolat qui devait donner des forces aux plus défaillants et "permettre d'approcher les femmes" laisse un goût amer. Après de nombreuses tentatives, c'est au Mexique qu'on adapte enfin une recette pouvant satisfaire les goûts espagnols en remplaçant le poivre et l'achiote par du sucre d'agave. Les religieuses d'Oaxaca ajoutent de la vanille, de la fleur d'oranger et du musc. Muni de cette recette, le chocolat traverse à nouveau l'Atlantique. Charles Quint en fait un monopole d'état.

En 1585 - une première cargaison, en provenance de Vera Cruz débarque à Séville. Seuls les botanistes s'y intéressent.

Au Mexique, l'aristocratie consomme de plus en plus de chocolat chaud. Les femmes ont l'habitude de se faire servir un gobelet finement ciselé à toute les deux heures et pendant les longs offices religieux ce rite n'échappe pas à la règle. L'évêque de Chiapas invective ses fidèles d'user de tempérance pendant les offices mais ces dames n'en font qu'à leur tête. Ce dernier, par un retour des choses, mourra empoisonné ... par une tasse de chocolat.

Le chocolat conquiert l'Europe

Une contrebande active s'organise par les Hollandais. En guerre contre l'Espagne catholique, ils voient, dans la cabosse, un moyen de saper le monopole de Charles Quint et ils introduisent des tonnes de fèves en France. Le chocolat séduit Florence et l'Italie toute entière.

En 1606 - apparaissent les premiers cioccolatieri qui se se consacrèrent à l'art du chocolat.

En 1609 - des Juifs, fuyant l'Inquisition, débarquent à Bayonne et créent les premiers ateliers de traitement du cacao. Certains d'entre eux sont passés maîtres dans la chocolaterie et font connaître leurs spécialités en Pays Basque. Le chocolat traverse la frontière pour pénétrer dans les cuisines des princes d'Allemagne et de Pologne.

À la cour des rois de France         

1615 - Mais c'est six ans plus tard que le chocolat franchit officiellement les Pyrénées. Anne d'Autriche, fille de Philippe II d'Espagne en emporte dans sa corbeille de noces. Elle a même amené sa molina, une servante experte dans le maniement du moulinet pour faire mousser le chocolat. Son époux Louis XIII est séduit et offre des douceurs chocolatées à ses plus fidèles courtisans.

Richelieu en consomme pour soigner sa rate; les femmes pour reprendre des forces alors que les journées à la cour sont longues et épuisantes; tout est prétexte pour siroter une tasse de chocolat chaud.

Alexandre Dumas raconte, dans son Grand Dictionnaire de la Cuisine, que l'usage du chocolat au début du XVIIième siècle "y devint promptement populaire ; les femmes et surtout les moines se jetèrent sur cette boisson nouvelle et aromatique avec un grand empressement, et le chocolat fut bientôt à la mode. Les mœurs n'ont guère changé à cet égard, et encore aujourd'hui, dans toute la péninsule, il est de bon goût de présenter du chocolat dans toutes les occasions où la politesse exige d'offrir quelques rafraîchissements, et cela partout et dans toutes les maisons qui se respectent.

Le jeune Louis XIV qui avait l'âme d'un cuisinier et aimait concocter de petits plats dans ses appartements, n'avait pas un très grand penchant pour le chocolat et déclarére que "cet aliment trompe la faim mais ne remplit pas l'estomac". Par contre, en 1659 il accorde à un certain David Chaillou, par lettres patentes et privilège royal, pour une durée de 29 ans, de la fabrication et de la vente d’une "certaine composition que l’on nomme le chocolat (...) soit en liqueur ou pastilles ou en boîtes, ou en telle autre manière qu’il lui plaira" sur toute l’étendue du royaume et l'ouverture de la première chocolaterie dans le quartier des Halles. Il ouvre sa boutique à Paris rue de l'Arbre Sec. À cette époque, c'est les fèves arrivent encore non décortiquées. Grillées dans une bassine et pilées au mortier comme chez les Aztèques, Chaillou procède alors à une autre étape de broyage à l'aide d'un lourd rouleau de fer.

1660 - Le chocolat aurait-il adouci les relations entre la France et l'Espagne. La petite histoire ne nous le dit pas mais un an plus tard Marie-Thérèse d'Espagne épouse en grande pompe Louis XIV. La chronique de l'époque raconte que la pauvre petite Infante, solitaire, mal aimée, puisait dans une tasse de chocolat épicé et parfumé à la cannelle toute la nostalgie de son pays natal. On chuchotait, même en coulisse, qu'elle avait donné naissance à une petite princesse au teint trop foncé et nombreux étaient ceux qui mettaient le blâme sur son amour immodéré du chocolat. . Avait-elle trop bu de chocolat en attendant son enfant?

C'était tout un art que de confectionner un bon chocolat espagnol car il était relevé de nombreuses épices, beaucoup trop pour capter le palais raffiné des Français. Même si, à l'odeur, on reconnaissait infailliblement une pointe de cannelle et de piment rouge, la pâte de cacao demandait de multiples ingrédients et un dosage délicat pour arriver à l'harmonie. Pour 100 grains de cacao grillés, pilés et dégraissés, il fallait 12 amandes et 12 noisettes broyées, un demi pain de sucre concassé, une cuillerée de miel, des grains d'anis et deux grains poivre du Mexique ou grains de chili, six roses d'Alexandrie, une gousse de campêche et deux drachmes de cannelle.

Certains en vantent les mérites. Le duc d'Albe se constitue une cave comme d'autres de grands vins.

1671 - Mme de Sévigné écrit à sa fille, Madame de Grignan, qu'il n'y a rien de tel que des truffes, un potage de céleri et un chocolat.

J'en ai pris avant hier pour digérer mon dîner afin de bien souper, Et j'en ai pris hier pour me nourrir, afin de jeûner jusqu'à ce soir, Il m'a fait tous les effets que je voulais; voilà de quoi je le trouve plaisant, c'est qu'il agit selon l'intention
On le buvait chaud ou froid, servi souvent dans de ravissantes chocolatières. Sa consommation, au cours des rendez-vous galants, faisait bonne figure.

En 1680 - le mot "chocolat" apparaît dans le Dictionnaire français contenant les mots et les choses de Richelet.

En 1705 - suite à l'exemple de la "Molina" de la reine Anne d'Autriche, on institue à la cour une charge de chocolatier de la reine.

"Au commencement de la Régence (1715-1723), le chocolat était devenu plus en usage que le café", raconte Alexandre Dumas, "qui, tout nouvellement importé aussi, était regardé comme boisson de luxe et de curiosité, tandis que le chocolat était considéré, à juste titre du reste, comme un aliment sain et agréable".

En 1734 - Pour être bien vu à la Cour, recueillir les potins, pavaner et intriguer, toutes les têtes poudrées se rendent tôt le matin "au chocolat du prince" régent.

1778 - Début de la mécanisation

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Source : www.saveurs.sympatico.ca