À vie de tempête sur les mots de mon amie 
    Marie Mélisou   
 
                         
   
 
   Sous la pluie ou depuis l'intérieur du soleil, Marie écrit,
trace les contours de la vérité des masques,regarde les 
esquives en face. 
   Son écriture anti-abstraite, précise et extrèmement vivante, 
fait appel à tous les sens,connus et
inconnus.Sa plume est aussi un pinceau, une tige, une vague,
un geste...
   Marie trempe ses mots dans son chemin. Plus que de simples
"poèmes"ses textes sont des routes qui nous parlent.
 
   Marie  Mélisou est auteur pour la jeunesse.Vous pouvez par exemple`
lire sa série Lilou, commençant par"Panique chez les lêve-tôt" , 
paru à la rentrée 98 aux éditions du Batsberg. Vous pouvez aussi choisir
les émotions artistiques et amoureuses de "Mon amoureux d'Internet". 
qui se passe autour du musée d'Orsay.  Ou bien encore succomber au charme 
des chats et des avions de Qui a zigouillé le chat Beauté ? 
 
Quant à sa poésie, elle est vraiment d'une extrème élégance.  
 
Ce lien    vous en dira (un peu ) plus sur ses débuts. 
 
 
 
Pour lui écrire,  cliquez sur les coquillages  
 
 
 
   Libre à vous de naviguer dans les différentes pages de son 
Livre d'et-vies-danses étonnantes  
 
Mai-septembre 97
Octobre 1997
Novembre-décembre 1997
Janvier 1998
Février-mars 1998
Avril-octobre 1998 
Novembre-décembre 1998
Janvier-février 99 
Mars-avril 1999  
Mai-juillet 1999
Août-octobre 1999
Octobre-novembre 1999`
Décembre99-mai 2000
Juin-Septembre 2000 (cette page)
 
Liens spéciaux :
 
  • Des étudiantes de l'université de Swarthmore interviewent Marie Mélisou sur son poème Leitmotiv, sur le site de Clicnet
  • Sur le même site écoutez Marie Mélisou dire son poème Lire lande
      
     
     
     
     
     
    "  La vie nous peint et la mort nous dessine en 201 tableaux. "
                                                  René Char
     
     
    " Tu peux être tranquille. Il reste du limpide en toi. En une 
    seule vie tu n'as pas pu tout souiller. "
                                Henri Michaux - Poteaux d'angle -
     
     
     
               Errance en borderline   - 005 -
     
     
     
    Ce matin comme tous les autres, tu te risques peu. Tu ne 
    veux surtout pas d'un éveil sur les graviers gris de la 
    vallée que tu gravis. Ni recevoir à cŠur le bleu hors 
    d'usage qui gît à ciel étendu. Tu avances sagement. Tu 
    traverses la forêt qui cascade de verts climats. Des 
    vagues de feuilles et d'épines agitent le calme, les 
    bouleaux et les sapins aux racines mouillées sont 
    d'identiques départs. 
     
    Ton attention traverse les couleurs sans t'arrêter. Incise 
    chaste pas pour pas, pensée pour pensée, regard pour regard, 
    sans qu'un mot ne franchisse tes lèvres. Elles sourient 
    pourtant, comme elles ont pleuré. Et ces raisons de te taire 
    ensommeillent mes rumeurs, peinent mes tourbillons. Et je 
    hurle de ces plusieurs bras que tu possèdes qui oublient de 
    m'étreindre. Ils glissent sur mes claquements de dents, sur 
    mes émotions que je dois geler et fermer comme des valises. 
    Mes échos de sommiers reniflent et se mettent en boule de 
    chagrin lorsque je ne suis pas pressée contre ta chaude odeur 
    vivante.
     
    Tout au long de tes faims - par ton silence elles me restent 
    souvent étrangères -, tout au cŠur de tes semelles ensoleillées 
    de montées, tu observes cet ouvrage du printemps et tu oublies 
    de me regarder. Tes yeux m'affalent, me sombrent, je dévale 
    silencieusement. Aucun brin d'herbe ne s'aperçoit de mon 
    anéantissement. 
     
    A mi pente, tu ris à une ceinture de neige glacée en creux 
    d'un pont de bois. La fraîcheur en plein vol glisse jusqu'à toi 
    sur le souffle d'un vent délicieux, elle y goutte si proche 
    qu'elle éloigne la lourdeur de plomb. De cette joie qui 
    t'enthousiaste soudain, à me perdre davantage, tes paupières de 
    papiers sagement pliées me voient. Tes yeux semblent me réclamer 
    un regard. Je lis une trace d'amour. Peut-être.
    Parce que je veux la lire. Parce que je veux y croire. Je ne sais 
    plus. Plus déméler le vrai de l'espoir.
    Interprétation d'un tourbillon à désirs, d'une fortune qui jouit 
    sur la pulpe pensée, d'un jeu fascinant en parcours effrayé sur 
    l'innocence du temps qui n'existe pas. Oublier, juste un instant, 
    combien je suis rien.
     
    En ceinture de la vie je crie. Je crie pour que tu m'entendes. A
    plein poumon et en silence. Avec mes pas, avec mes yeux, avec mes 
    mains. Jamais en mots, tu prendrais la fuite et dévalerais la 
    pente. Peut-être. Je crois. Je ne sais plus.
     
    L'éternité apprivoise l'aventure. Un peu. Longue errance en 
    borderline où se construisent et se détruisent le carcan des jours 
    déshabillés. Je confonds les enchantements possibles. Gouffres 
    toujours repoussés. Gouffres devant lesquels je m'arrête épuisée. 
    Dévaler. Gouffre où je suis prête à glisser. 
    Démission. Je glisse... 
     
     
                                     Marie Mélisou   - sept 2000 -
     
     
     
     
     
    "  La vie nous peint et la mort nous dessine en 201 tableaux. "
                                                  René Char
     
     
    "  Le mystère que l'on vit sur soi instruit sur les autres. "
                                                 Virginia Woolf
     
     
                       Ils sèment  - 004 -
     
     
            les chemins pour atteindre au sublime
            se cachent se déguisent en cailloux blancs
            qui remplissent les poches des enfants
     
            en étendu secret en fin silence
            ils roulent dévalent jusqu'à l'instant précis
            d'un dessein chargé d'ans
            
            ils sèment les enfants lâchent répandent
            caillou après caillou l'amour à construire
            crissé entre les dents sur le courroux des grands
     
     
                               Marie Mélisou  sept 2000
     
     
    "  La vie nous peint et la mort nous dessine en 201 tableaux. "
                                                  René Char
     
     
     
                 L'indifférence scellée  - 001 -
     
     
             sur la limbe en bolduc 
             de mon brouillard en friche
             où chaque idée s'étend
             d'un rien tellement immense
             existe un sourire niais 
             petit reste d'être vivant
             aux souffrances agitées 
             puis mornes de cachets colorés
     
             un bocal de yeux grands ouverts 
             à regarder encore observer comment 
             j'avale une douceur ralentie
             lente presque arrêtée 
             vivante à si petits sursauts 
     
             à l'espoir chimique 
             ce jour regard embrumé existe 
             j'y retrouve une possible avancée 
             vitreuse à pétrir un instant décalé 
             un reste farouche oublieur du mal être
     
             instant d'urgence 
             d'une tête en partance
             d'un corps en indifférence 
             comme vent tombé
     
             même la souffrance de dépérir s'oublie
     
     
     
                            Marie Mélisou   sept 2000
     
     
    "
        " Devant l'horloge abattue de nos millénaire, pourquoi serions-nous souffrants ? "
                         René Char - Orion iroquois
 
 
 
                     Il tourne les pages nuits
 
 
 
         il a peur de la nuit
         le dit de toutes celles qui suivent les jours
         comme jamais en haine du peu d'amour
         que je puis m'éprouver je m'en offre le droit
 
         il a peur de la nuit
         le dit sur les branches fragiles de l'endroit
         quand il bivouaque éveillé pareil au dos tourné 
         combien la chimère sombre l'étreint de terreurs
 
         il a peur de la nuit
         le dit simplement en parole profonde d'écho
         qui rallume mon bord de ruisseau mangé d'insomnies
         parfum accompagné de coteaux paupières sur la plaine
         en causerie qui fume il sourit à sa peur
 
         il a peur de la nuit
         et afin que rien n'y soit changé chacun des soirs
         il la laisse l'enlacer de ses bras
         elle pas la nuit elle de ses bras calmes de femme
 
         le soir peut se creuser il a chaud 
         il va il marche en elle près de son corps 
         lorsqu'il endort entre eux sa peur de la nuit
 
 
                                  Marie Mélisou  - sept 2000
 s
 
 
       " Aller me suffit. J'ai rapporté du désespoir un panier si petit, mon amour, qu'on a pu le tresse en osier. "
                                                 René Char
 
 
               Si petit
 
 
         sous des ponts à géants
         si petit ton panier d'amour
         mon amour
         qu'en jardin défraîchi te viennent 
         parfois de larges richesse d'ombres
 
         ouverte trop affamée sans doute
         je mendie ta chaleur
         tes veines épuisées à bout de cap
         je heurte au prix de la faim
 
         quelquefois
         à folle étoile en souffres-tu ? 
 
         et mon orgueil sans grand soucis
         jusqu'à l'écŠurement
         noue encore de petits fils blancs
         d'autres perfections qui nichent
         sans secrets quand ils t'adressent
         des signes ils se veulent rencontre
 
         quelquefois
         à écarlates fruits en souffres-tu ? 
 
         ouverte trop affamée sans doute
         ma révolte se met à une table ancienne
         j'effraie comme de juste
         jusqu'aux parcelles lumineuses
 
         alors sans témoins temporels
         à cruauté de tous mes regards baissés
         je redécouvre tes limites tes ténèbres
         les biens que tu partages sont
         des voltiges petites sans prodige
         sans grandir sans années
 
         quelquefois 
         à limites éveillées en souffres-tu ? 
 
         si petit ton panier d'amour
         mon amour
         que moi
         à une si lointaine portée de ton cŠur
         à telle indifférence
         je souffre
 
 
 
                 Marie Mélisou  sept 2000
 
 
 
" (...) quel crime insoupçonné et quelle douleur sobre végétale
sauront un jour de saphir apaiser mes monstrueux désirs
mes monstrueux désirs de ciel corrosif  (...)
                          Tristan Tzara - L'homme approximatif -    
 
 
            Présence irréfragable
 
 
      rien ne durera au bout de ce fil 
      à la grasse or de flammes
      au balancement de l'école des images
      rien ne durera 
 
      déployée et éparse 
      la proie qui est en moi souffre
      de ton manque embrouillé d'équidistance
 
      rien ne durera
      ni la pulpe de ta bouche manteau nuptial
      ni les frissons attentifs en éventails
      tant tu crains en ennemi
      l'homme possible qui est en toi
 
      rien ne durera à quoi bon
      à l'amour mutisme si petitement avalé
      à la naissance d'heures impérieuses
      rien ne durera
 
      oxydée et cognée
      la solitude qui est en moi résonne
      sur des murs vides souvent et je grelotte
 
      tant que ça dure      
      ta présence irréfragable
      dosée à grouillement d'aventure
      met ma malice en morceaux
      me barde de l'épuisant à taire le fabuleux
 
      rien ne durera
      mais en exercice de l'infini
      complaintes de flaques à venir
      la dérive qui est en nous s'embourbe encore
      de mains de sexes de pieds de poches en études
      à chasser l'opaque des instants
      
      rien est quelque chose
      qui dure en monstrueux désirs
      et voilà
 
 
                                Marie Mélisou   sept 2000
 
 
                                             le sel ici a la même odeur
                                             que là-bas
                                             il efface les fenêtres pareillement 
                                             les bourrasques les ponts
                                             et précipite le désir
 
                                             le sel ici a la même odeur
                                             sur le poisson au sol
                                             les pignes des pommes de pins
                                             l'idée de ta peau tannée et arquée 
 
                                             le sel ici sûrement
                                             a la même odeur
                                             sur la peau de chacun des marins
 
                                                     *
 
                                             flaques de neiges fondues
                                             souffrances démaillotées
                                             invisible
                                             une haie sépare le lait du soir 
                                             des bruits d'ailes du matin
 
                                             quand aux sons des mots
                                             ils marchent en arrière
                                             où ils croisent plein d'amour 
                                             le début de l'hiver
 
                                                        *
 
CE MORCEAU DE CHANT D'ELLE
 
 
 
" Nous restons au bord de nous-mêmes."
           Jean Guéhenno - La Foi difficile -
 
 
J'écris sur le toujours qui depuis tôt s'ouvre en ciel. J'écris, en
t'indiquant d'une voix achevée, ces graffitis à quiétude de quand nous
étions assis, alors il faisait doux. Infiniment.
 
J'écris à enfouir la panique, le sournois et l'absurde qui poussent 
hors de
terre, hors de nos poitrines, en éphémères cris à me vieillir un peu. 
Sans
adresse, en hiver, ils rugissent à la gueule.
 
J'écris à t'ouvrir la porte, à m'envoler pour t'abreuver d'échelles..
J'écris, aussi, sur tes mains levées pour appeler l'air. Sur les 
chevets
des aveux. Sur la santé des murs qui frôlent les sources.
 
J'écris pour l'histoire qui commence à peine. Pour tes mains fantômes,
elles caressent chacun des parfums qui prouvent l'existence des soirs.
Elles tracent des allées de salle d'échos en porcelaine et de légers
frottements à sentir les bourrasques.
 
J'écris à t'en tremper le cŠur sur tout ce vide que tu laisses.
 
 
                                   Marie Mélisou   juin 2000
 
 
 
 
 
" - Je - n'est qu'un terme commode qui désigne 
  un être dépourvu de toute réalité. "
                                Virginia Woolf
 
 
        
                  Dodeliner d'indociles idées
 
 
 
            je
            enragée de survie
            lorsque laissée derrière ou sur la commode
            mon jeu de douleur de mal à combattre
            en une sempiternelle ligne de vŠu
            dépense une encre meurtrie
 
            je 
            cours après des béances charnelles à
            hériter de mots qui lient des phrases
            que je
            voudrais écrire
 
            je
            rétive et froussarde
            chargée à bout de bras de ma carcasse écaillée 
            mon jeu se cherche se baisse se cueille
            de trousseaux de lettres et si même repoussée
            de répétées brûlures  elles me tombent
            me souffrent m'augmentent d'avalanches
            je
            couvre de mots avec mes reins
            ces nuits où croulent les traits malhabiles
            à dire à hurler à brandir
 
            jusqu'à loin  à frapper  à dodeliner
            sur mes idées indociles
            parfois
            d'échecs myopes en éphémères oublis   
            je tressaille de découdre les frissons des mots 
            une grande peur me saisit
            que je 
            ne veuille plus de moi             
 
 
                            Marie Mélisou   juin 2000
 
 
 
 
" Il y a des défaites qu'il est facile de changer en succès d'estime, 
des lâchetés qui deviennent sans effort des victoires sur soi-même, 
des abandons qui se déguisent en instinct de survie, 
des silences où l'on se dit qu'à la longue on finira par entendre 
la voix de la raison. "
                                         D. v. C.
 
 
      
               NŠuds à cŠur de papiers écrits 
 
 
 
 
         jetés au vaste vent en chemin vers vous
         en chemin vers où
         pour tout votre amour 
         ces papiers écrits
 
         en chaque homme croisé pourquoi
         pourquoi je crois vous rencontrer ?
 
         un inconnu approche  vous approchez
         silhouette qui martèle l'agile de mon souffle
         qui marelle de temporaires carrés
         à sauter enfant à cloche-pied  
         insouciante vers le ciel craie
         vous m'aidiez à le tracer
 
         il approche  vous approchez
         quelques pas et très vite 
         l'hélice d'un cheveu dénoue mon impression
         fuit le magique inventé auquel j'accrochais
         des lampions aveugles de bornes
         pour mieux vous vivre de pudeurs cruelles
 
         il approche  vous approchez
         un geste et se brouille
         la coupole d'un mouvement haleine  changeante 
         elle referme éteint vainc
         la rumeur retour de l'espoir d'un là
         
         je continue sur un radeau d'embûches
         et parcours le désert
 
         il approche  vous approchez
         aussitôt je sais  déjà je savais
         l'inventé glacial des moulins à tourments 
         d'où peut sourdre le défait et glissent 
         ce jour de décembre votre départ 
         ce puits ce mal ce vide les laids jours
         
         tout disparaît en pire 
         comme vous à cet instant
 
         pour tout votre amour
         accroupie devant ces papiers écrits
         je retrouve vos bruits de sourires qui luisent
         vos rides à sens de provisoire
         ces douleurs à partir harassé 
         sans me quitter 
         car l'arôme des souvenirs ont des yeux secrets 
         appuyés contre l'enceinte des signes
 
         orpheline
         un jour détroussée de vous mon père 
         pourquoi encore 
         en chaque homme croisé 
         cette espérance de vous rencontrer ?
 
 
 
                         Marie Mélisou   juin 2000
 
 
 
 
 
 
" Et je m'en vais 
  Au vent mauvais
  Qui m'emporte 
  Deça, delà,
  Pareil à la
  Feuille morte. "
              Paul Verlaine 
           - Poèmes saturniens -
 
 
 
           La colère de mon vent sur les verrous du monde
 
 
 
           lorsque tu comprendras 
           comment je porte ployée sans rompre
           ces douces violences si exigeantes
           le sang et ses verrous que je condamne
           le furieux des unions dégoulinant du sablier
           les souffrances identifiées impossibles à taire
 
           lorsque tu sentiras
           les ronces de l'obscurité en lentes griffures
           mordre tes bras à éplucher le vide
           le visqueux des couvercles à masquer
           l'impossible que je voudrais tant balayer           
           mes mains fraîches à échasses à étriers à
           vérités à immensités
 
           tu connaîtras le siège de mes couteaux
 
           lorsque tu verras 
           la vie à rien en cathédrale de séismes
           la vie avide de chacun en peines infinies 
           à côté des murs de vents d'oiseaux 
           qui génèrent de solennelles solitudes
           la vie labyrinthe à guet-apens de souffles
           la vie élastique sur une tempe dentelée
           par les horreurs pâles des jours inconsolés
 
           lorsqu'enfin 
           tu regarderas droit dans les yeux 
           un nuage enfoncé de sa gorge coupée d'éclairs 
           et de colères à battre avec le cŠur 
           plutôt qu'avec la tête 
           mes plus grands repères
 
           tu auras approché mon vent et sa colère
 
 Marie Mélisou  juin 2000
 
 
 
" Ce fut l'unique jour d'équité de l'année, en entier déroulé 
sur l'aube de chacun."
                            René Char - Equité et destruction - 
 
 
 
 
         Uchronie sur l'Šuvre imaginaire en chemin
 
 
 
        quand mon ami fut porté en terre
        des oiseaux insouciants chantèrent
 
        sans heures froissées ni pensées brisées
        ce matin-là à plusieurs splendeurs  
        illumina le silence devenu transparent
        
        tous les départs attendaient d'être incisés
 
        l'inspiration restait liée à l'hiver 
        comme un enfant au bord d'une rivière se tient
        vibre hésite redoute
        sans arriver à reculer sur la berge 
        ni à s'élancer dans les eaux
 
        tous surent désormais
        comment l'horizon plaide la souffrance
        en grognant sur la brume et les fêlures
        sur les heures incommodées et les vertiges à être
        sur la pluie et le temps qui allaient recueillir  
        l'iris de son regard  son nez en l'air aussi
        tous surent qu'une étoile un jour 
        afficherait ses miettes éparpillées
 
        quand mon ami fut porté en terre 
        ses pas ne s'éloignèrent pas
 
        l'histoire aurait pu ou dû être 
        mais sur tout et son contraire
        aucune arrivée n'avait plus lieu d'exister
 
        sur des chemins pourtant
        toute l'Šuvre imaginaire avance
 
 
                            Marie Mélisou  avril-juin 2000
 
 
" La vertu dans le monde est toujours poursuivie,
Les envieux mourront, mais non jamais l'envie. "
                          Molière - le Tartuffe - 
 
 
 
             Deux temps trois mouvements
 
 
 
            deux temps trois mouvements 
            mes pas Rue des Abeilles et tes yeux 
            bordés de bonheur qui arpentent à l'imaginaire
            des trottoirs au sens large
 
            frasques à bouches cueillies
            je ne suis pas devenue la suite attendue
            celle qui dévoile l'encre des fauteuils
            pas encore
            je ne me suis pas levée où marche le bout du fil
            si grand est le partout à prendre
 
            deux temps trois mouvements
            Rue des Abeilles à l'imaginaire tu me touches 
            d'une douceur relative de crépitements contraires
            en périls déterminés tu enflammes l'évasion 
            elle joue à se demander quel est 
            le pire des maux sans horizon
 
            deux temps trois mouvements
            pas encore
            je ne déverse pas le flux des ruisseaux 
            qui bourdonnent aux ruches de quelques éclats 
            d'ailes ensanglantées
 
            je ne bouge plus
            pour ne pas perdre à coup de cauchemars
            la soif cruelle d'un Šil qui connaît ma faim
 
            deux temps trois mouvements
            sur l'immensité des sourires confus je rêve 
            d'avancées Rue des Abeilles pour boutonner l'abîme
            cicatriser la tristesse
            et encombrer enfin la chaussée de lumière
 
 
 
                           Marie Mélisou   juin 2000
 
 
 
 
 
             
 
 
                                            Quelques mots d'amour
 
 
          " Les mots font l'amour."
          André Breton - Les Pas perdus -
 
 
          demandez-moi des mots
          opposés aux demi-teintes 
          à la nuit sans ciel 
          et aux citadelles
 
          demandez-moi des mots
          qui tanguent de contrastes 
          d'effets tempétueux
          et de présages signes
 
          encore demandez-moi 
          des mots en éclaircie
 
          qui brasillent diaprent 
          scintillent papillotent
          et la lumière 
          en regard à la Terre
          flambera
 
          Marie Mélisou
 
 
A la proue de la poudrière
 
 
          " Mon naturel me contraint à chercher et aimer les choses bien ordonnées, fuyant la
          confusion qui m'est contraire et ennemie comme est la lumière des obscures ténèbres. "
          Nicolas Poussin - Correspondance. -
 
 
          sans âge sauvage
          je dépose une unique larme
          message
 
          message en saccage
          saccage balade au matin de cette nuit 
          lorsque le tôt et le tard épousés 
          reculent le temps de se sentir désaimé
 
          une grande marée peut tout oser
          oser quelques pas sur la plage mémoire
 
          message d'un mal pas cicatrisé 
          dîner interrompu esquisse laissée
          ouvrage à peine commencé
          conversation juste entamée
 
          je dépose
          une larme grain de riz
          granule ou larme terraquée
          essence de l'humide et des épaufrures
 
          message d'un goutte à goutte 
          ladre de souffrir 
          ladre de déjà tout t'avoir offert
          ladre par peur que tu ne piétines encore
          les clartés aussi les pénombres en plein jour 
 
          plein jour de faux-jours 
          qui brillent sous les halos d'un faux-soleil
          théâtre au hasard de ta fourchette
 
          à la proue de cette poudrière 
          qui héberge mon souffle 
          l'intérieur au-dedans de mon sein
          tu es un mirage fourvoiement 
          une cacophonie des pâtes mal modelées
          papiers trop mâchés cire faussement moulée
 
          et l'eau diaphane 
          unique larme luminescente
          peut couler sans t'émouvoir 
          tu jettes mon cŠur à la gribouillette
 
          je dépose 
          quand même
          par respect de moi
          sur ta main une unique larme sagittale 
          message le plus succinct
          le plus intense
 
          cette sécrétion brillante
          séchera 
          avant le passage de ton regard vide
          sur moi
 
          Marie Mélisou
 
Lune gibbeuse
 
 
          "L'homme ne peut se trouver qu'à la condition, sans relâche, de se dérober lui-même à
          l'avarice qui l'étreint."
          Georges Bataille - L'expérience intérieure -
 
 
          un bref essai un court galop
          en distraction terrible 
          j'essaie la vie 
 
          ses clairs de lune coulent des doigts
          moitié du disque accrocheur de sagace
          lune gibbeuse qui fascine le flambeau
          fend la nuit en traits harassés
          observe le miel virtuose et façonné
 
          souplesse d'esprit
          des lunes scrutent nos nutations
          nos regains de désespoirs
          l'endurance des seconds souffles
 
          légendaire clair-obscur de la pénombre
          à la lumière solaire des éclaircies
          un bref essai un court galop
          j'essaie la vie
          et abandonne l'oubli
 
          Marie Mélisou
  C'est avant tout la poursuite de l'expérience qui importe : la raison suivra toujours, son
          bandeau phosphorescent sur les yeux. "
          André Breton - Le Surréalisme et la Peinture -
 
				Tango je tangue
 
          je brasille tel un rai qui point
          à l'ambigu des feux renouvelés
 
          moi tango je tangue
          de quelques scènes elliptiques 
          inquiétées de cette mosaïque privée de l'intègre
          détours exaspérés
 
          elles traversent et brouettent l'uni
          tranche de voie
          où la furieuse envie se fièvre de minutes 
          à périr embrasée
          lorsque rien et rien n'arrêtent pas de survenir
 
          ce que vous faites résonne lumineusement
          moi tango je tangue 
          et reste hantée par ces hommes oublieurs 
          détroussée de ce que je ne sais leur insuffler
 
          moi tango je tangue 
          à poser les pieds par charme
          à parler par joie à réciter par bouche
          et gisent terre tête cŠur
          sur le raidillon aux gobelets des jours
 
          moi tango je tangue
          laissée froissée
          en rayons qui se traînent
          sur des peines que j'invente peut-être
 
          Marie Mélisou