La première rencontre avec l'ennemi eut lieu le 14 juillet, un peu au nord de Chébrérys (Chebress). Vers 6 heures du matin, les avant-gardes françaises (4600 hommes) virent apparaître à l'horizon la cavalerie musulmane.

Son aile droite, tout entière composée de Mamelouks, était appuyée au village de Chébrérys; sa gauche, formée de 2000 Arabes, prolongeait sa ligne dans le désert. L'ensemble, continuellement en mouvement, pouvait être évalué à environ 18000 combattants.

Ce spectacle frappa les Français d'étonnement.
Pour la première fois, ils allaient recevoir le choc de ces ennemis si différents de ceux qu'ils avaient eu à affronter jusqu'ici et c'est avec une admiration inquiète qu'ils voyaient approcher cette masse d'hommes et de chevaux, ce luxe d'armes et de broderies, ces vêtements aux couleurs variées et scintillantes.

Pendant ce temps, Bonaparte se demandait comment il parviendrait à neutraliser l'effet de cette énorme cavalerie. Soudain, une image lui vint à l'esprit: celle d'une digue de pierre, opposant sa rigidité à l'assaut  des vagues. Transposée dans le domaine de la stratégie, elle consistait à opposer à des cavaliers non pas d'autres cavaliers, mais des blocs de fantassins compacts et inentamables. Sur son ordre, les 5 divisions commandées par Desaix,Reynier, Dugua, Vial et Bon se formèrent en carrés, présentant sur chaque face 6 hommes de hauteur. L'artillerie fut placée aux angles et disposée de manière à pouvoir tirer dans toutes les directions. Au centre, se groupèrent les équipages et la cavalerie. Les grenadiers, distribués dans chaque carré, se tinrent prêts à renforcer les points les plus menacés.

C'est dans cet ordre imposant que les divisions françaises s'approchèrent de l'ennemi. Aussitôt les Mamelouks, s'ébranlant par masses, vinrent caracoler sur leurs ailes et leurs arrières, à la recherche d'un point vulnérable; mais , constatant que leurs moyens de défense étaient partout les mêmes, ils se réunirent pour fondre sur la droite de l'armée. Bonaparte attendit qu'ils fussent arrivés à portée de la mitraille. Alors, l'artillerie, se démasquant brusquement, ouvrit sur eux un feu meurtrier et les arrosa d'une grêle de boulets et d'obus.

La plupart des Mamelouks s'arrêtèrent, désemparés, mais les plus braves, emportés par leur élan, continuèrent leur charge et vinrent mourir au pied des carrés. Le reste, après quelques assauts inutiles, se retira en désordre dans la direction de Chébrérys. A cet instant, 200 Mamelouks sont restés sur le sable, tandis que les Français comptent à peine quelques blessés.....

On raconte, qu'avant la bataille, en apprenant l'abscence de cavalerie digne de ce nom chez les Français, Mourad-Bey -Emir el-Hadj- (commandant de l'armée Mamelouk), était parti d'un énorme éclat de rire:"Comment ces malheureux pourraient-ils résister aux charges des cavaliers les plus intrépides du monde ? Nous les couperons en deux comme des pastèques !"

La victoire remportée ce jour-là par la discipline collective sur la bravoure individuelle fit perdre beaucoup de leur assurance aux cavaliers mamelouks.

Ils cessèrent de considérer les Français comme des ennemis négligeables, et les fantassins, qu'ils avaient méprisés jusque-là, leur parurent tout à coup des êtres surhumains.

"Comment ces malheureux pourraient-ils résister aux charges des cavaliers les plus intrépides du monde ? Nous les couperons en deux comme des pastèques !"

Mourad Bey
- Emir el-Hadj-

Dromadaire de Bonaparte en Egypte - Musée Africain de l'Ile d'Aix (17)

MAMELOUK au combat -
d'après une lithographie originale de GERICAULT (cabinet des Estampes)

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