Bonaparte, Membre de l'institut national, général en chef de l'armée française
14 messidor An VI (2 juillet 1798)


Peuple de l'Egypte !

Depuis assez long-temps les beys, qui gouvernent l'Egypte, insultent à la nation française, et couvrent ses négociants d'avanies; l'heure du châtiment est arrivée.
Depuis long-temps ces ramassis d'esclaves, achetés dans le Caucase et dans la Géorgie, tyrannisent la plus belle partie du monde; mais Dieu, de qui dépend tout, a ordonné que leur empire finît.

Peuple de l'Egypte, on dira que je viens pour détruire votre religion; ne le croyez pas ! répondez que je viens vous restituer vos droits, punir les usurpateurs, et que je respecte, plus que les mameluks, Dieu son prophète et l'Alcoran. Dites-leur que tous les hommes sont égaux devant Dieu; la sagesse, les talents et les vertus mettent seuls la différence entre eux.

Or, quelle sagesse, quels talents, quelles vertus distinguent les mameluks, pour qu'ils aient exclusivement tout ce qui rend la vie aimable et douce ?
Si l'Egypte est leur ferme, qu'ils montrent le bail que Dieu leur en a fait. Mais Dieu est juste et miséricordieux pour le peuple. Tous les Egyptiens seront appelés à gérer toutes les places; les plus sages, les plus instruits, les plus vertueux, gouverneront, et le peuple sera heureux !
Il y avait jadis parmi vous de grandes villes, de grands canaux, un grand commerce; qui a tout détruit, si ce n'est l'avarice, les injustices et la tyrannie des mameluks ?

Cadis, Cheiks, Imans, Tchorbadjis, dites au peuple que nous sommes amis des vrais musulmans. N'est-ce pas nous qui avons détruit le pape, qui disait qu'il fallait faire la guerre aux musulmans ? N'est-ce pas nous qui avons détruit les chevaliers de Malte, parce que ces insensés croyaient que Dieu voulait qu'ils fissent la guerre aux musulmans ? N'est-ce pas nous qui avons été dans tous les siècles les amis du grand-seigneur (que Dieu accomplisse ses désirs) et l'ennemi de ses ennemis ? Les mameluks, au contraire, ne sont-ils pas révoltés contre l'autorité du grand-seigneur, qu'ils méconnaissent encore ? Ils ne suivent que leurs caprices.

Trois fois heureux ceux qui seront avec nous ! Ils prospéreront dans leur fortune et leur rang.
Heureux ceux qui seront neutres ! Ils auront le temps d'apprendre à nous connaître, et ils se rangeront avec nous. Mais malheur ! Trois fois malheur à ceux qui s'armeront pour les mameluks, et combattront contre nous. Il n'y aura pas d'espérance pour eux; ils périront.
                                                           
Signé BONAPARTE

Texte original  distribué  en arabe

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