Voilà qui est bien pratique quand on a un label, hein Mr Lollipop... Non content d'avoir de bons groupes sous la main dans so propre ville, on pousse le vice jusqu'à jouer soi-même dans les Neurotic Swingers et à sortir le CD sur son propre label, bien évidemment ! On va s'gêner, tiens ! Pffttt, heureusement que la qualité du rock & roll bien excité du neurone est là, sinon je n'hésiterais pas à dénoncer haut et fort cette situation quasi mafieuse !! (Interview intégrale, non censuré)

1) Pouvez-vous expliquer les liens incestueux qui rattachent les Neurotic Swingers, Lollipop et les Gasolheads ?

Stéphane : En fait, c'est simple : Olivier et Pascal jouent dans Gasolheads et je s'occupe de Lollipop. Avec Pascal, on joue maintenant ensemble dans les Neurotic Swingers. Lollipop a sorti les deux premiers albums des Gasolheads et s'apprête à sortir le troisième pour Septembre (et ceci, malgré la rumeur qu'ils cherchent à répandre selon laquelle leur 1er album sorti sur Lollipop n'est que la version CD postérieure de leur double 45 T sorti chez Rockin' Bones, alors que ce double 45 T est sorti bien 6 mois après le CD, bon...). Là où ça se complique, c'est qu' Olivier, expert en Photoshop et Dreamweaver, fait la plupart des pochettes des disques du label, qu'il a fait aussi la pochette du Neurotic Swingers et qu'il a conçu tous les sites internet des labels et groupes marseillais . Enfin, en creusant un peu, on s'aperçoit que ces trois gaillards jouaient déjà ensemble au début des années 90 dans un groupe obscur, dont les derniers exemplaires de leur seul et unique CD se vendent à prix d'or dans les foires à disques, et ceci malgré une médiocrité peu égalée. Au fait, Olivier et Pascal sont frères et leurs relations sont fortement influencés par les frères Gallagher d'Oasis.

P : Et ce qu'oublie de dire Stéphane, c'est qu'en plus de tout ça, on a encore trouvé le moyen de monter ensemble une asso d'organisation de concerts, " La Ratakans Connexion " qui programme tous les mois à la " Machine à coudre ". Mais gross-modo, c'est la scène marseillaise en général qui est incestueuse. Un exemple : je joue dans les Neurotic avec Raphaël qui joue aussi de la basse dans Dollybird dont le chanteur Hugues a enregistré notre 25 cm et va faire le 3eme Gasolheads et on partage tous les même roadies et les même camions, en fait, on se croit tous à New-York en 76 et la " Machine à coudre, c'est le CBGB, AH Ah !

2) Pascal étant donc le guitariste des Gasolheads, est-ce que cela ne fait pas double emploi pour lui de jouer dans les Neurotic Swingers (Même si la musique est sensiblement différente) ?

P : Comme tu dis, ça fait vraiment double emploi, mais quand on aime, on ne compte pas hein ? Et puis personnellement, ça m'a fait beaucoup de bien de monter les Neurotic, parce que la musique est effectivement différente et là je peux y aller dans le " early 77 glam rock & roll (euh ?) ", alors qu'avec les Gasolheads, je me serais fait lyncher pour avoir mené un morceau comme " What's your definition… " en répétition. En fait, le plus gros problème, c'est l'emploi du temps, essayer de ne pas se faire chevaucher les tournées des uns et des autres et de ménager le sensibilité de tout un chacun. Un groupe, c'est pas assez bordel !!

3) Pourquoi avoir sorti la version vinyl du disque sur Shark Attack et non sur Lollipop ?

S : En fait, au départ, nous voulions sortir quelque chose sur un autre label que Lollipop, afin de différencier un peu le groupe du label. Et puis on avait un peu besoin de savoir qu'un autre label voulait bien sortir quelque chose de nous. Avec Lollipop, c'est un peu trop facile. Nous avions enregistré une démo 6 titres, qu'on comptait d'abord envoyer aux zines, attendre quelques chroniques, puis envoyer aux labels. De mon côté, faisant des échanges avec Dave de Shark Attack, j'en ai profité pour lui faire passer notre démo un peu en avance. Et il a été tout de suite partant pour faire quelque chose avec nous. Nous, on était super contents d'être sur un label qui a sorti Jerry Spider Gang, Wonky Monkees, Holy Curse, Protex Blue... Dave ne pouvait pas faire le vinyl et le CD, donc tu parles si on a choisi le vinyl !! Shark Attack a été le seul label qui ait reçu notre démo. Nous, on avait l'idée de faire juste un 25 cm, puis d'autres opportunités sont arrivées...

4) Il y a le logo Myrmecoleo Rds sur la pochette. Est-ce que le disque est aussi sorti au Japon ?

S : Myrmecoleo avait déjà co-produit notre split 45 T avec le groupe Dogmatic Salamander. Là encore, le groupe a profité des contacts que j'avais grâce au label. Je lui ai envoyé nos 8 titres, pour savoir s'il pouvait distribuer le 25 cm au Japon. Il m'a dit que c'était trop difficile de distribuer du vinyl pour un groupe peu connu. En fait, pour distribuer un disque au japon, il faut d'abord que ce soit un CD, et qu'il y ait un livret interieur en japonais et un petit papier (appelé obi) sur la tranche du CD avec un petit explicatif en japonais également. Sous forme de boutade, je lui ai demandé s'il ne voulait pas sortir la version CD. A ma grande surprise, il était partant pour le co-produire ! Donc, on a fait une belle co-prod massilia-stephano-japonaise !!

5) Si oui, avez-vous des échos de l'accueil ?

S : Le CD sort au Japon en Août. Nous n'avons pas d'échos pour l'instant. Notre split 45 T est sorti au Japon à 300 exemplaires et Kenji, le boss de Myrmecoleo a pratiquement tout vendu et m'a dit qu'il y a eu de bonnes chroniques. Mais bon, il n'a pas le temps de me traduire ça en anglais. Déjà, il fait un travail énorme car il doit faire un livret intérieur en japonais, traduire les paroles de nos chansons en japonais etc... C'est vraiment un mec super, complètement investi. Il écrit dans des gros magazines et zines, a un groupe terrible et son label va devenir très très gros je pense d'ici peu. Il trouve des distros partout en Europe, aux USA. Nous, on va en profiter avec les Neurotic, c'est vraiment cool. Il connaît presque la scène française mieux que moi !! Il connaît tous les labels français et européens les plus obscurs qui ont sorti juste un 45 T ou deux . C'est un phénomène !! J'arrête pas de la harceler pour qu'il nous organise une tournée au Japon "pour faire swinguer les friponnes nippones" comme ils disent dans Dig It !

6) Vous semblez des adeptes de la "prise rapide" pour l'enregistrement. Est-ce un parti pris ou un manque de budget ?

P : Pour le 25cm, ça a été totalement un parti-pris, à 5 dans une pièce et 1-2-3-4 Let's go ! Par contre pour l'album qu'on devrait enregistrer en décembre là ça risque d'être une autre paire de manche. Moi, je fais du low-fi speed punk depuis 4 ans et je suis tenté par une nouvelle expérience, on en a pas mal discuté entre nous et on est assez d'accord sur le fait de soigner la production. On verra bien comment ça se passera et pour le budget, ça va pas être facile mais je pense que pour le futur, on va essayer de peaufiner le truc.

7) Vous semblez également fonctionner sur le mode "Gasolhead" pour la durée des morceaux, des lives... A savoir qu'un morceau rock de plus de 3 minutes est du rock progressif !

S : Ah non, pour Gasolheads, un morceau rock de plus de 2 min 30 est du rock progressif. Nous, c'est 3 minutes. Toute la nuance est là ! On aime les musiques simples et directes. Les chansons trop riches me gonflent. Je respecte le principe soi-disant issu du punk-rock selon laquelle il n'y a aucune règle en matière de composition de morceau, qu'il faut expérimenter au-delà de l'éternel couplet-refrain-couplet-refrain-break-solo-refrainx2, mais cela ne m'intéresse pas. Tu peux être, je pense beaucoup plus créatif avec un roulement de batterie judicieusement placé plutôt qu'en enchaînant les breaks. Je suis d'accord avec Iggy Pop qui disait qu'un bon morceau est un morceau que tu peux chanter seul avec ta gratte. Je trouve que c'est assez difficile, surtout aujourd'hui, d'être simple et efficace. Ensuite ce sont les petits détails, les petits arrangements qui font qu'on se lasse pas d'un morceau et qu'on prend toujours du plaisir à l'écouter encore et encore. Il faut qu'on sente l'urgence, la colère, la simplicité ou le fun. Ca va mal avec de morceaux de 5 minutes je trouve. Mais bon, on va pas se prendre la tête, c'est juste du punk-rock.

Mais si tu veux parler de la brièveté de notre concert à Toulouse, il ne faut pas non plus oublier que notre première répète date d'août 2001 et qu'on est tous occupés à côté par nos autres groupes et label. En 10 mois, on arrive déjà à une quinzaine de morceaux, c'est pas si mal. Et de la même manière, en tant que spectateurs, les concerts de plus de 45 min me gonflent aussi. Donc ça tombe bien !

8) Il est maintenant peu courant que des groupes aient un morceau éponyme sur leur disque. Est-ce que le titre "Neurotic Swingers" raconte l'origine du groupe ?

S : Ca raconte ce que nous sommes : des fous du swing totalement névrosés ! !

9) C'est assez déconcertant de voir, à l'intérieur de la pochette, "What's Your Definition Of The Underground" traduit par "Quelle est la définition du métro"... Est-ce que vous en aviez marre que l'on vous pose des questions sur l'underground ou parce que vous pensez que le mouvement underground, quelque part, n'est qu'une vaste plaisanterie (Tous cessent de penser "underground" dès que l'argent pointe son nez...) ?

S : Cette traduction inopinée est le fait d'Olivier Gasol, qui n'est pas le dernier pour déconner, le bougre ! Il subit depuis nos foudres répétés ! Mais si cela crée un décalage bienvenu, pas de problème, on peut dire que c'est volontaire.

Avec ce titre, on veut plus interpeller qu'imposer un avis définitif sur le sujet. C'est un vaste débat au sein même du groupe, difficile à synthétiser en quelques mots. En tout cas, cela ne se veut pas ironique à propos des acteurs de l'underground. Bien au contraire. J'ai un respect immense par exemple pour un gars comme Ian McKay. Imposer son groupe et son label de la sorte, en faisant si peu de concessions (car on en fait toujours un peu), chapeau. Ceci dit, je partirais pas en vacances avec lui, hé hé. Dans un autre domaine, Cassavetes acceptait des rôles dans des films ou des séries grands publics pour pouvoir financer ses propres productions indépendantes. Je suis sûr que les avis divergent déjà sur ce dernier cas. Faut-il être extrême comme Maximum Rock &Roll, qui vient de quitter Mordam car ces derniers acceptent de distribuer des disques sortis sur des labels indés, mais en licence sur des majors ? Cela se défend, car le but de Mordam, à la base, c'était de créer une distribution alternative en dehors de ces majors justement. Mais bon, les disques d'Alternative Tentacles, distribués par Mordam se retrouvent de toute façon en France dans les Fnac et Virgin, qui ne sont pas des philanthropes. Cela peut sembler un combat perdu d'avance. Mais bon, on peut lutter chacun avec ses armes.

D'un autre côté, il y a des fanzines tirés à 30 exemplaires qui critiquent Sugar & Spice. Pourquoi ? Parce qu'ils nous trouvent des disques disponibles nulle part ailleurs, que cela demande un boulot monstre et ce gars-là voudrait bien en vivre un peu. Si ça, c'est pas légitime ! Respect Laurent. Ce sont les même qui pleurent qu'il n'y a pas des disquaires indés près de chez eux.

Il y a aussi l'autre versant, certains groupes demandent des subventions avant même des chercher des concerts ! C'est le monde à l'envers. Johnny Thunders, il était subventionné peut-être ? Il y a des limites ! Je ne pourrai jamais faire ça.

Je pense, en conclusion que l'important est de rester cool.

P : Pour être honnête, il n'y a rien à creuser derrière cette traduction, un délire qui passe par la tête… Par contre je suis un fervent partisan de " l'underground " et du " do it yourself " : fuck les majors, fuck les subs mais fuck aussi le prosélytisme et l'austérité, chacun est libre de mener sa barque comme il l'entend. Ma définition à moi de l'underground serait plutôt celle de Maximum R & Roll mais bon, je ne vais pas aller faire chier tous les mecs qui ne pensent pas comme moi, heureusement sinon j'aurais plus beaucoup d'amis dans le monde du R&R, parce que question réflexion sur l'indépendance, houlà c'est pas le milieu que je préfère. Je pense aussi, en conclusion que l'important est de rester cool.

10) N'avez-vous pas parfois, en tant que fans de rock (Avec Lollipop et les Gasolheads), l'impression d'être les derniers gaulois résistants aux envahisseurs, dans le panier de crabes pas très rock qu'est Marseille ?

S : C'était peut-être le cas il y a 2-3 ans. C'est moins vrai aujourd'hui. Bon c'est sûr, Marseille n'est pas une ville rock et sera toujours plus connu pour IAM et sa scène Rap que pour sa scène punk-rock. Mais bon, cela s'améliore. Déjà niveau qualité des groupes on est bien loti : Gasolheads, Cowboys From Outer Space, Sugarfix (RIP. J'espère qu'on redécouvrira un jour leur superbe album. si ces gars-là n'étaient pas si fainéants !!), euh Neurotic Swingers (?), ou encore Take Shit Back (HC), Sweet Children (street-punk), ou Dollybird (power-pop)... On arrive à voir pas mal de concerts grâce à la Machine à coudre et des assos très actives. C'est assez significatif d'un changement important que New Bomb Turks passent ici cet été. Cela aurait été inimaginable il y a quelque temps. La scène marseillaise est en bonne forme, elle est soudée, elle est bien portante : Masillia's still burning ! D'un autre côté, n'est-ce pas trop dur de vendre des disques punk-garage dans la ville de Zebda ?

11) Projets...

S : On va enregistrer 3 ou 4 titres pour tenter de faire un split avec un groupe étranger (on adore ça les splits !!) et pour un tribute aux Devil Dogs qui sortira en CD et double vinyl sur Head Dip et Junk records. Il y aura du beau monde : New Bomb Turks, Hives, Peawees, Onyas, Yum Yums, D4, Gasolheads, Jerry Spider Gang..... Ensuite, on va enregistrer l'album pour décembre. On sait pas chez qui ça sortira encore Puis tourner et tourner encore. On veut des concerts arrosés et des gueules de bois !!! Yeah !

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