Une sortie de printemps !

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Si vous êtes pauvres et à Dax, ne comptez pas être défendus et assistés par un avocat. Le système judiciaire, ses éléments et ses rouages ne garantissent pas toujours les droits de la défense.

Voir la lettre à Madame la Ministre de la Justice.
Dax - 25 octobre 2001 : Pas d'avocat intervenant avec l'aide juridictionnelle pour garantir la défense d'un RMIste devant le tribunal de police. (Simple affaire de stationnement). Le RMIste maintient sa demande d'assistance d'un avocat. Devant cette situation le Ministère Public à Dax requiert le jugement immédiat. Le Président du tribunal de police de Dax décide le renvoi de l'audience au 29 novembre.
 
 

Une sortie de détente

Le 13 mai 2001, trois survivants au RMI (dont moi-même) et la petite fille de l'un d'eux décident d'associer leur misère pour une petite sortie sur la côte landaise. Depuis des mois, pas de sorties : les démarches administratives qui se succèdent, la recherche incessante d'un hypothétique emploi, les perpétuelles tracasseries administratives, le manque de pouvoir d'achat qui impose de limiter les déplacements à l'extrême. Après un pique-nique à Messanges, sur les tables en bois prévues à cet effet, la maman de la petite fille propose une ballade à pied pour faire connaître au petit groupe un tranquille endroit en forêt. Conduisant le véhicule, je constate dans cette zone, au bord de la route goudronnée, de nombreux chemins forestiers. Certains d'entre eux font l'objet d'une interdiction de circulation à tous véhicules, sauf services et autorisés, signalée par des panneaux.

 

Stationnement

J'écarte, naturellement, l'idée d'emprunter ces voies. Et j'écarte aussi l'idée de stationner sur le bord étroit de cette petite route goudronnée rectiligne, en pensant aux passagers qui allaient monter et descendre tout autour de la voiture en ouvrant les portières. Et je trouve, un peu à l'écart de cette route, un emplacement pour stationner qui ne comporte aucune signalisation d'aucune sorte, persuadé d'éviter ainsi une tracasserie supplémentaire, comme celles auxquelles nous sommes perpétuellement confrontés dans la précarité quasi invivable.

 

Un PV de printemps !

Au retour d'une ballade réparatrice dans la nature, le petit groupe, stupéfait, trouve sur le pare-brise, une amende forfaitaire de 600 Fr (4ième classe).

600 Fr la sortie ! Pour un stationnement sans intention de commettre une infraction. Appliquée sur un revenu minimum d'insertion mensuel de 2295 Fr. C'est l'intolérable !

 

Se défendre ?

Immédiatement, les discussions fusent pour trouver tous les moyens permettant de procéder à la défense de cette affaire. Et la première disposition est de se rendre immédiatement à la gendarmerie pour s'expliquer. Là, surprise, le gendarme de permanence à Lit-et-Mixe, refuse de nous recevoir, et nous maintient à la porte de la gendarmerie par une conversation à travers le répondeur que l'électronique programmée interromp automatiquement toutes les minutes. Il nous conseille de repasser ultérieurement (80 km aller), et de faire une réclamation, si les choses ne nous conviennent pas.

 

Code rural

L'amende minorée s'appuie sur une infraction à l'article R331-3 alinéa 1 qui précise : << Est puni d'une amende prévue pour les contraventions de la 4e classe tout détenteur de véhicules, bestiaux, animaux de charge ou monture trouvés dans les forêts, sur des routes et chemins interdits à la circulation de ces véhicules et animaux. >>

 

Actions de défense

8 juin 2001 : Une réclamation écrite est déposée, et le Commissaire de Police de Dax, Officier du Ministère public répond, le 20 juin, que la réclamation est refusée. Que la saisine du tribunal de police est possible avec le risque de voir l'amende majorée à 2500 Fr.

Le 9 juillet, je saisie le Tribunal de Police, car chaque jour j'entend autour de moi que nous sommes dans un pays démocratique, un Etat de droit. Le 27 septembre, un huissier m'apporte une citation pour une audience le 25 octobre 2001.

 

La citation à prévenu précise :

<< TRES IMPORTANT

Vous êtes tenu de vous présenter personnellement à cette audience, seul ou assisté d'un Avocat, soit de vous y faire représenter par un Avocat. Si vous souhaitez être entendu et si vous estimez être dans l'impossibilité de venir à l'audience et si vous ne vous faites pas représenter par un Avocat, vous devez adresser une lettre au Président du Tribunal pour expliquer les raisons de votre absence. Vous joindrez à votre lettre toutes pièces justificatives. Si, à l'audience, vos raisons sont admises par le Tribunal, une nouvelle citation vous sera adressée pour une audience ultérieure. Dans le cas contraire, l'affaire sera jugée malgré votre absence et celle d'un représentant.

Toutefois la Loi vous permet de demander par écrit au Président du Tribunal à être jugé en votre absence et sans représentant. Dans tous les cas, vous pouvez présenter dans votre lettre les observations qui vous paraissent utiles.

Vous devez rappeler dans toute correspondance la date, l'heure et le lieu de l'audience à laquelle vous êtes convoqué ainsi que le numéro du dossier figurant sur la présente citation. >>

J'obtiens un rendez-vous, pour le 9 octobre, auprès d'un cabinet d'avocats dacquois (pour ne pas faire déplacer un avocat de loin). Je pense que même pour des affaires simples, les citoyens se trouvent démunis devant le professionnalisme bien entraîné de la Justice, devant la raison d'Etat, devant la prolifération des codes, lois et règlements.

Le secrétariat de l'avocat interroge sur la date de l'audience pour savoir si un avocat du cabinet sera disponible. Le rendez-vous est accordé. L'entretien est mené avec toute l'attention attendue, malgré la faible importance de l'affaire. Cependant, lorsque le volet financement est abordé, la perspective de l'aide juridictionnelle change tout. Selon cet avocat, la rémunération par l'Etat pour cette affaire s'élèverait à 200 Fr. A la question de savoir combien coûte la même affaire payée par le client, aucune réponse n'est obtenue. L'avocat fournit cependant son point de vue technique sur cette affaire, et conseille de retirer un dossier de demande d'aide juridictionnelle auprès du tribunal, et de demander un avocat disponible. Car, aucun avocat de ce cabinet n'est disponible pour la date de cette audience.

Je retire, ce même jour, 9 octobre, un dossier d'aide juridictionnelle auprès du Tribunal. Je complète les nombreuses pages du dossier. Je fournis les diverses pièces justificatives concernant les revenus, l'identité. J'expédie le dossier aussitôt qu'il est complet, à la date du  19 octobre.

Suite à ce dossier, le message suivant est déposé sur le répondeur du numéro de téléphone indiqué dans ma lettre de demande :
<< Bonjour, ... Bon, ici, l'Ordre des Avocats. J'ai reçu une lettre d'un certain .... , je ne sais pas à quel numéro de téléphone je suis. Il demande un avocat avec une demande d'aide juridictionnelle, il va passer en police 4ième classe. Il n'est pas possible de désigner un avocat pour les polices 4ième classe. La rémunération des avocats n'est pas prévue dans ce cadre. Donc, ... on ne peut pas désigner d'avocats. Merci. >> 22/10/2001 - 15:15

J'adresse une lettre recommandée, le 22 octobre, au Président du Tribunal pour confirmer le maintien de ma demande à être assisté par un avocat.

 

Audience

A l'audience du 25 octobre, où je me présente, l'huissier de justice dans la salle d'audience me demande si un avocat m'assistera. A ma réponse négative, elle précise que ce n'est pas grave, car pour ce genre d'affaire, il n'est pas très important d'être assisté d'un avocat. Confirmant ma demande à être assisté, l'huissier me prie de monter à l'étage et de me rendre à l'Ordre des Avocats, pour en solliciter un, sur le champ.

Au secrétariat de l'Ordre des Avocats, visiblement débordé par la tâche. j'expose le problème. Mon dossier est identifié. Le secrétariat tente de joindre par téléphone le bâtonnier, pour résoudre "ce cas déontologique grave" (sic). Il s'avère que le bâtonnier n'est pas contactable. Le secrétariat explique que les avocats sont des professions libérales et qu'ils ont la possibilité de choisir les affaires. Qu'ils ne travaillent pas quand ils ne sont pas payés. Qu'aucun avocat n'est disponible. L'huissier de justice dans la salle d'audience reprend ces propos, et reprécise qu'il n'est pas nécessaire d'être assisté d'un avocat. Je maintiens ma demande.

Je suis appelé à la barre. Le Président trouve que la demande d'aide juridictionnelle a été faite tardivement. Il demande si je maintiens mon souhait d'être assisté d'un avocat. Je réponds positivement. Le Ministère Public (Commissaire de Police de Dax) expose que l'affaire étant de faible importance, il requiert qu'elle soit jugée immédiatement. Le Président décide le renvoi de l'audience au 26 novembre.

Survivant

Suite au prochain épisode ...

Si vous êtes intéressé par la suite, envoyez un courriel à :
arc.en.ciel@free.fr

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