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Mois de juin

Source :
SHAT, archives du génie, article 15, section 1, §5, pièce 23

 

Journal de la Campagne de 1757

Mois de juillet

5 Juillet

M le maréchal a détaché le 1er de ce mois MM. de Souvré et de Chevert, qui ont marché à Lemgoss, et à Hervorden avec des instructions particulières.

M. le duc d’Orléans est parti cette nuit avec 23 bataillons et 22 escadrons pour soutenir ces corps avancés.

La réserve de M. d’Armentières a fait un mouvement sur sa droite et celle de M. de Broglie est restée dans la même position. Il vient d’arriver un officier dépêché par M. Dauvet, maréchal de camp, qui a été envoyé en Westfrise avec un détachement de 1000 hommes, et cet officier a porté la nouvelle de la prise d’Emden ; M. Dauvet avait détaché le 2 de ce mois MM. de Lillebonne, de La Chatre et de Sey pour reconnaître cette place dans différents points.

Pendant cette reconnaissance, où ils ont essuyés quelques volées de canon et du feu de mousqueterie, M. Dauvet faisait ses dispositions pour prendre la ville d’assaut. M. de Lillebonne eut avis, le 3 à 7 heures du matin, que 70 déserteurs étaient à un de ses postes avancés et que le désordre régnait dans la place ; il profita de cette circonstance pour faire sommer le commandant de se rendre. L’officier qu’il y envoyait à cet effet trouva la bourgeoisie qui rappelait. Après avoir fait une capitulation provisoire, il prit possession des postes, et M. Dauvet avec son détachement y entra une heure après ; la garnison a été faite prisonnière de guerre, et il a été remis des otages pour sûreté de l’exécution des autres articles de sa capitulation. M. Dauvet a rempli à tous égards les objets de sa mission. Par les dernières nouvelles qu’on a des ennemis, on apprend qu’ils sont toujours campés leur droite à Minden.

 

13 Juillet

M le maréchal ayant pris le parti de se porter de sa personne sur les points désignés pour l’établissement des ponts qu’il avait ordonné de jeter sur le Weser, il est parti de Bielefeld le 7 et s’est rendu le 8 à Brakel, laissant son armée aux ordres de M. de Bercheny : M d’Armentières, qui était à Erken avec sa réserve, s’avança le 7 au soir sur les hauteurs de Beverougen avec 25 compagnies de grenadiers et 400 carabiniers pour reconnaître l’emplacement du pont qu’il voulait jeter entre ce village et celui de Blanquenau.

Il y avait  dans L’ymfarde village, de l’autre coté du Weser, vis-à-vis celui de Berveraugen, 200 hommes d’infanterie et 400 chevaux hanovriens qui se retirèrent dès que M d’Armentières fit ses dispositions pour faire occuper Beveraugen par une partie des grenadiers et ses hussards. Il se porta la nuit avec le reste de son détachement a Blankenau où il coucha ; il y fit établir son pont sans aucun obstacle le 8 de 4 à 5 heures du matin.

Le même jour, à midi, il passa le Weser avec 15 compagnies de grenadiers pour balayer le pays de l’autre coté et il poussa jusqu'à Baffshem. En passant,  il envoya occuper le château de Fostemberg, dont les ennemis s’étaient retirés avec tant de précipitation qu’ils y avoient laissé 200 havresacs.

M. d’Armentières fit partir de Baffsem MM. d’Emery et Baudoin, aides maréchaux généraux des logis, avec un détachement de 300 volontaires pour continuer la reconnaissance de la rive droite du Weser jusqu'à Beveren et Vortz ; ils n’ont rencontrés que quelques troupes de chasseurs qui se sont toujours retirés dans les bois.

Les ennemis, à ce qu’on assure, soutiennent encore leurs positions de Minden.

M. d’Armentieres est revenu camper avec sa réserve à Fostemberg : M le maréchal a attendu ici avec les corps de MM. de Souvré et de Chevert et une partie de celui de M le Duc d’Orléans, le reste de son armée qui arrive aujourd’hui. Il a fait établir deux nouveaux ponts de pontons à Tonnembourg.

Sur les avis que M le maréchal avait reçus, il jugea à propos de suspendre la marche de M le Duc d’Orléans qui s’était acheminé vers la Hesse avec 28 bataillons et 32 escadrons. Ce prince est resté à l’armée, et M le maréchal a envoyé à Cassel M. de Contades avec 4 brigades d’infanterie et 20 escadrons de cavalerie.

M. de Pereuse, maréchal de camp, qui s’était porté avec une brigade de cavalerie à Munden, envoya hier un courrier à M le maréchal pour l’informer de la prise de cette place. La garnison, composée de 300 hanovriens, a été faite prisonnière de guerre.

M. de Contades mande à l’instant de Parbourg qu’il y a été joint par le Grand Ecuyer du Landgrave qui est venu l’assurer de la soumission du pays et des dispositions certaines où est ce prince de procurer à l’armée française tous les secours que les ressources du pays pourront fournir.

M de Contades a reçu des otages pour sûreté de la convention, et nos troupes sont en marche pour aller occuper Cassel.

 

18 Juillet

Toutes les dispositions étant faites pour passer le Weser, l’armée campée à Corvay, s’est mise en marche le 16 sur six colonnes : l’infanterie a passé cette rivière sur 3 ponts, et la cavalerie au gué. M le maréchal a établi son quartier génénal à Holtzmunden ; il a fait marcher un détachement de 800 hommes d’infanterie pour chasser les partis ennemis répandus dans la forêt de Solingen. M. de Chevreuse est aussi parti ce matin avec un détachement pour se porter à Olimdorff et reconnaître les mouvements de l’ennemi au débouché de la gorge de Vinkensen.

On a appris ce matin que la ville de Gottingen s’était soumis aux troupes du Roi. M de Pereuse, maréchal de camp, est parti de Munden pour cette expédition, avec une brigade d’infanterie et une de cavalerie. A la première sommation, le commandant a rendu cette ville et la garnison d’environ 200 hommes a été faite prisonnière de guerre. On a  trouvé dans cette place 8 pièces de canon de fonte, 11 de fer et quelques munitions de bouche.

 

20 au 26 Juillet

Extrait de ce qui s’est passé a l’armée auxiliaire en Westphalie depuis le 20 juillet jusqu’au 26.

L’armée partit de son camp de Holtzmunden, se porta sur Olindorff, et fit assurer sa marche par un détachement de 88 compagnies de grenadiers et de tous les dragons aux ordres de M. le Duc d’Orléans. Les ennemis qui avaient présenté quelques restes de troupes dans les gorges de Vinkensen, Enschereusen et Halle, se retirèrent et l’armée campa à Olindorff le 20. Elle y séjourna le 21 et en partit le 22 pour se porter à Halle.

M. de Maillebois avec les volontaires de Flandres, et d’Hainaut, et les grenadiers de Solar ouvrit la marche dès le 21 et reconnut, le 22 au matin, la position des ennemis qui occupaient les villages de Bergen et de Fringheim ; il y eut une légère escarmouche qui cessa dès que M. de Maillebois eut fini sa reconnaissance. M Le maréchal, qui arriva le 22 de bonne heure, se porta de sa personne, avec les princes, sur un plateau avancé dans la plaine qui est entre ces deux villages et celui d’Herven, où il venait d’établir son quartier. M Le maréchal, après avoir fait tâter les villages de Bergen et de Fringheim par quelques volontaires, ne jugea pas à propos de les attaquer et se retira. L’ennemi profita de ce mouvement pour faire avancer sur le plateau que nous venions de quitter un corps de cavalerie qui détermina M le maréchal à faire battre la générale : toute l’armée qui arriva dans ce moment-là se porta  avec la plus grande vivacité sur le champ de bataille qui fut reconnu dans l’instant : les ennemis se retirèrent et l’armée rentra dans son camp. On estime que leur détachement pouvait être de 3 à 6000 hommes.

Le 23 il fut décidé que  M de Contades, à la tête de 30 compagnies de grenadiers et de trois régiments de dragons, se porterait, à l’entrée de la nuit, au village de Brukensen, en-deçà de celui de Bergen, que les ennemis tenaient en force. Ce détachement fut soutenu de la réserve de M d’Armentières qui devait opérer sur Binghen, et M. de Voguë, à la tête de 14 compagnies de grenadiers et des volontaires de Flandre et de Hainaut, se porta sur les hauteurs d’Apseste, dans les bois de la gauche des ennemis, pour les reconnaître et les inquiéter dans cette partie. M le maréchal se mit en marche à 2 heures du matin pour voir l’effet du détachement de M de Contades : il se fit suivre par son armée, et il arriva au point du jour sur le plateau dont il a été question. Les ennemis avaient abandonné les villages de Fringhem et de Bergen ; ils s’étaient retirés à Ludfozde et tenaient les hauteurs et les bois qui bordent cette partie du Weser. On poussa ce qui paraissait de cavalerie en avant du village. L’infanterie qui était encore dans le village se retira, et quelques coups de canon qui furent tirés, tant de notre avant garde que de la réserve de M de Broglie, qui par sa position à la rive gauche du Weser concourait à notre manœuvre, eurent bientôt déterminé les ennemis à quitter les hauteurs. M de Voguë, de son coté, s’était emparé d’une très bonne position sur les hauteurs de la gauche des ennemis, d’où il les canonna longtemps. Il manda à M le maréchal que les ennemis se renforçaient devant lui et il eut ordre de se retirer. L’armée campa dans le terrain qu’on venait de prendre, la gauche au Weser, la droite au village de Bergen, le plateau étant à peu près au centre de la ligne. Il fut agité, dans un conseil de guerre qu’on tint à 6 heures du soir, si on attaquerait les ennemis : les débouchés pour aller à eux étant très difficiles, il fut décidé qu’on les ferait reconnaître et qu’on manœuvrerait pour tacher de les déposter en les tournant.

Pendant la nuit, M le maréchal reçut avis que les ennemis se retiraient : en conséquence il fit de nouvelles dispositions et renvoya M. de Voguë reprendre sa position sur les hauteurs le 23 au point du jour, et il le fit renforcer par une brigade d’infanterie aux ordres de M. de Chevert. M. de Maillebois s’y porta à 6 heures au moment d’une vive canonnade et jugea que l’affaire pourrait s’engager plus sérieusement, et il vint en rendre compte à M. le maréchal sur ce qu’il avait entendu lui-même de l’attaque de M. de Voguë ; il était déjà parti avec la réserve de M. d’Armentières, et il s’était porté par les débouchés reconnus sur les hauteurs d’Ozen ; il avait ordonné à son armée de le suivre ; elle arriva en effet successivement sur ces hauteurs : on aperçut alors l’armée des ennemis en bataille dans son camp, la droite à Hameln et la gauche appuyant aux bois et aux hauteurs d’Apserte. Cette partie était soutenue de batteries et d’une espèce de redoute. Notre armée se trouva rassemblée à quatre heures après midi sur les hauteurs d’Ozen, touchant par la gauche jusqu’au Weser : il se trouvait en avant de la gauche un marais presque impraticable, protégé du coté des ennemis par un plateau où ils avoient établi du canon, et le village d’Hastembeck était en avant du centre. La position de l’ennemi ne permettant pas de l’attaquer de front, on songea à le tourner par sa gauche ; on avait d’abord destiné à cette opération la réserve de M. de Randan, qui était venu par Embeck à Halle. Mais M le maréchal en chargea M. de Chevert avec les brigades de Picardie, Navarre et La Marine ; on y joignit encore la brigade d’Eu qui était une des deux qu’avait M. de Randan qui rejoignit l’armée. Le reste de la journée fut employé à ces différentes dispositions, et on se canonna de part et d’autre jusqu'à la nuit.

Il fut convenu que l’attaque du lendemain commencerait par M. de Chevert, et que l’armée s’ébranlerait au signal qu’il donnerait. Il s’éleva au point du jour un brouillard si considérable que les armées ne purent s’apercevoir qu’à six heures ; alors les ennemis commencèrent a tirer quelques coups de canon, auxquels nous ne répondîmes que faiblement, attendant toujours le signal de M de Chevert : il ne put arriver au point de son attaque qu’à 8 heures et demie, et ce fut dans ce moment-là que l’armée se mit en mouvement. M d’Armentières déboucha sur la droite avec les brigades de Belzunce, La Couronne et Alsace, soutenues de la Brigade Impériale et des dragons a pied. Son objet était d’attaquer la redoute et les batteries des ennemis. Le reste de la ligne s’ébranla lentement, et l’on entendit commencer l’attaque de M. de Chevert. M. d’Armentières avait un peu changé sa direction et s’était jeté tout entier dans le bois : on y remédia en faisant marcher à la redoute des ennemis la brigade de Champagne et celle de Reding. Ce mouvement fut nécessaire par ce que l’éloignement de M. d’Armentières intervertissait l’ordre général de la bataille. Le bois de la droite devint le véritable champ de bataille, le reste du terrain fut celui de notre artillerie qui fut placée et servie supérieurement. Les attaques de la droite firent leurs progrès ; Picardie, Navarre et La Marine gagnèrent toujours sur le flanc de l’ennemi ; les brigades de Champagne et d’Alsace s’emparèrent de la redoute et Reding garda la lisière du bois.

Dans ce moment la, on songea a engager les attaques de la gauche, et on fit marcher au village d’Hastembeck M de Guerchy avec le régiment du Roy, les Grenadiers de France et de Solar et les autres colonnes s’avancèrent lentement. On s’aperçut alors que les ennemis avaient dégarni leur gauche et faisaient filer des troupes pour soutenir le bois : on y entendit un feu très vif, et l’on vit paraître presque en même temps quelques escadrons dans la trouée de la droite. Dès que M. le maréchal en fut informé, il donna ordre d’y porter une brigade de cavalerie et une d’infanterie : ce mouvement et les troupes qui avoient été repliés dans cette partie, que l’on vit paraître en désordre, suspendirent pendant près d’une heure le succès des autres attaques. La cavalerie qu’on y porta rétablit l’ordre. Le feu du bois ayant cessé, et la poussière qu’on aperçut  indiquèrent la marche rétrogradée de l’ennemi. Alors M. le maréchal songea à soutenir par de la cavalerie les Grenadiers de France que M. de Guerchy avait fait déboucher du village d’Hastembeck, et il envoya les Carabiniers et la brigade de Royal Pologne.

L’ennemi continua sa retraite sur les hauteurs d’Hameln. M. le Maréchal le fit suivre jusqu’au village d’Affeste. Mais le voyant se retirer en bon ordre, et étant maître du champ de bataille ; il y fit camper son armée, et se contenta de pousser un détachement pour masquer Hameln. L’on a pris aux ennemis 9 pièces de canon, et deux obusiers. L’on a fait quelques prisonniers, parmi lesquels se trouve un général major et 2 officiers. L’on ignore la perte de l’ennemi ; la notre se montre à 1500 hommes tués ou blessés ; nous avons perdu d’officiers de marque que M le marquis de Laval, aide maréchal général des logis, qui a été tué, et MM. du Chatelet et Belsunce, blessés. On ne peut d’ailleurs donner trop d’éloge à notre infanterie et à notre artillerie.

Le terrain n’a pas permis à la cavalerie de donner. Les princes se sont portés partout.

 

28 Juillet

Les ennemis continuent leur retraite sur Minden. La ville d’Hameln a capitulé. 700 hommes de troupes réglées, qui y sont en garnison, ont permission de se retirer ; 300 paysans ou milices restent pour prisonniers, ainsi que tous les malades et les blessés qu’on y a laissé ; on a trouvé dans cette place 60 pièces de canon.

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