Chapitre 4 (1ère partie)
De la vie intense d'une femme Jockey...
ou Du manège au champ de courses...

A l'instar de ce qui se passe dans tous les domaines, le féminisme a bien évolué et a conquis comme on dit, une très belle place au soleil.
Le sport hyppique n'y a pas échappé et c'est de ma part une énorme surprise, car c'est bien là que j'aurais crû que l'évolution aurait été la plus lente.

Ici, comme ailleurs pourtant, les frontières se sont élargies dès l'instant où sur les champs de courses, est apparue, non comme une amazone de l'antiquité, mais tout simplement un petit bout de femme de 1,54 m: la toute première femme belge Jockey Professionnel.


Martine Desmet - Huybrechts.
Martine Desmet

Ceux qui l'ont vue pour la première fois sortant des vestiaires en compagnie de ses collègues masculins, ont réagi à la présence de ce petit bout de femme, bien sanglée dans sa casaque, la culotte blanche de bonne coupe, les bottes bien cirées, et ne déparant pas l'ensemble.
Gardant malgré l'habit caractéristique de la profession, cette petite allure bien féminine, (qui avait tant surpris Fabienne) que l'on ne perd jamais tout à fait, même si l'on a choisi un métier jusque là uniquement réservé aux hommes.

Pour certains, celà est apparu tout d'abord comme un événement folklorique, mais pour d'autres et surtout parmi ses collègues masculins, il y a peut-être bien eu parfois un peu de grogne, mais surtout de la bonne compréhension.

Il ne m'est même pas venu à l'idée de demander à Martine, si elle était aussi, comme celles qui l'ont suivie dans la profession, parfois un peu bousculée. Il est apparu que certaines ont eu à subir des sévices corporels (il y a certains coups de cravaches qui ne se perdent pas dans les pelotons lancés au grand galop).
Ici surtout et comme ailleurs, l'homme est resté un loup pour ses semblables et encore plus quand ce loup prend des allures de faible femme.

Il est vrai que pour Martine, celà était moins évident, car elle avait déjà eu l'occasion de faire parler d'elle, et en bien, dans les pelotons de cavalières et "gentlemen-riders". galop

Dans ce domaine trèsparticulier pour beaucoup de nos professionnels, d'assidus des hippodromes, et je dirai aussi pour moi-même en particulier, nous avons suivi cette évolution et avons considéré ces transferts vers le professionnalisme, comme une suite normale des choses; car nous la connaissions bien Martine.

Déjà à l'époque, où sous le nom de Martine Huybrechts, elle écumait littéralement les courses de cavalières et d'amateurs, dont notre vedette actuelle de la spécialité, le Super doué "Toutoune Randevuer", qu'il me pardonne, malgré tous ses exploits dans ce clan un peu fermé, n'a pas encore effacé toute la valeur de cette Martine Huybrechts là.

Désirant en savoir plus sur la vie de cette femme, et surtout pour satisfaire une curiosité bien compréhensible de mes petites filles, Fabienne et Muriel, intéressées par tout ce qui touche leur idole. J'ai profité et peut-être même un peu abusé de son caractère avenant, conciliant et de bonne tenue pour lui poser des tas de questions quant à l'évolution de sa carrière depuis ses tout débuts, jusqu'au moment où elle a franchi le grand pas vers le professionnalisme.

Me référant également à l'avis de professionnels ou autres qui l'ont fait avant moi, et avec le même succès, je livre à votre appréciation tout ce que j'ai pu recueillir, et avec les deux jeunes très intéressées, j'espère vous en faire profiter. On aime bien de connaître ceux qui sont chers.

C'est déjà à l'âge de sept ans que Martine Huybrechts, toute mignonne et toute petite, puisqu'elle n'a pas beaucoup grandi depuis, fit vraiment ses débuts dans la connaissance du cheval.
Qui fut et reste le meilleur ami de l'homme.

Elle passait d'habitude, à l'époque, ses vacances sur la plage de Duinbergen, et, tous les jours, elle guettait avidement le moment où les chevaux au service des plaisanciers auraient dû déambuler sur le sable.

Toujours la première à les suivre du regard, la petite Martine se présentait pour les reconduire à l'écurie, et je m'imagine sans peine, les braves chevaux se laissant mener par ce petit brin de fillette, haute comme trois pommes et que la fierté devait élever, moralement dans son esprit à la hauteur des plus énormes géants.

Je ne lui ai jamais demandé si elle avait gardé un souvenir précis de cette époque, mais je suis pleinement rassuré, car, si petit que l'on soit, il y a des choses parmi tant d'autres qui vous laissent toujours un agréable sentiment de déjà vu ou entendu.

Pourtant, tout n'a vraiment commencé pour elle que le jour ou elle avait à peine dix ans, et qu'elle effectua ses premiers pas dans un petit manège de la région de Bruxelles.

Son père était un passionné d'équitation, et l'intérêt particulier de Martine pour cette discipline, ne relevait donc pas d'un simple hasard.

Lui aussi, avait remarqué en elle, ce feu sacré de ceux qui aspirent à réussir, et c'est d'un oeil amusé et interessé, qu'il suivait ses premières évolutions.

A son âge, il n'était évidemment pas question que ce fût le but unique de toutes ses journées, et au début, par mesure d'encouragement, il décida qu'elle passerait les mercredi et samedi après-midi au manège pour se familiariser avec cet univers.

Après l'école, elle se réservait un certain temps pour s'occuper des chevaux, les soigner, les promener et surtout pour bien apprendre à les connaître et à les aimer du fond du coeur.

Entre parenthèses, je puis vous assurer quelle n'a pas perdu son temps, car pour ce qui est d'aimer les chevaux, elle n'a vraiment de leçons à recevoir de personne.

Je n'en veux pour preuve, que l'avis de ceux qui ont eu la chance d'être reçus chez elle, dans une maison accueillante de Wezenbeek - Oppem.

Cette petite bonne femme de 1m.54 et 43 kg, débordante d'énergie et de bonne humeur, a orné avec un art consommé, les murs de cette habitation, de peintures grandeur nature, de chevaux de toutes formes et de toutes sortes, à tel point qu'on se croirait dans un temple leur réservé.

cheval

A l'époque de sa jeunesse, les promenades dans les sous-bois ont représenté pour elle tout ce qu'elle pouvait légitimement espérer et sans aucune contrainte, puisque celà lui permettait de vire de tout près avec son animal fétiche.

Tout celà, naturellement, plaisait beaucoup à son père, son enfance, puis son adolescence se sont ainsi passées dans le cadre enchanteur où décidement le cheval gardait dans son esprit une place privilegiée.

Le père comprenait très bien sa fille, il y avait entre eux comme une espèce de complicité. Mais le rêve, n'a jamais remplacé la réalité et celà ne l'empêchait pas, naturellement, d'exiger que sa fille tente d'acquérir un diplôme valable, afin d'assurer son avenir.

Martinne reconnaît bien franchement, qu'elle ne ressentait aucune disposition pour les études, mais pour faire plaisir à son père, elle finit par se laisser convaincre. Elle s'inscrit donc à l'Université pour y suivre des cours de biologie. Elle réussit la premèire année, mais échoua à la seconde, ce qui ne contribua pas à améliorer son entrain à l'égard des études.

Et cet ainsi, qu'un beau matin, elle préféra abandonner les promenades dans les sous-bois ou le galop du matin, sur les sentiers encore tout humides de rosée, pour se lancer en ligne droite dans des courses effrénées et énivrantes, tout comme les jockeys. Un grand pas était déjà franchi.


Table des matières chapitre précédent chapitre suivant page principale