Comment je traite
un cancer de
la prostate localement avancé et métastatique non encore traité?
S.KHOURY
Les références du Comité
de Formation Continue
de l'AFU
Quelle
hormonothérapie?
Quand
faut-il commencer le traitement?
Quelle
est la durée de la réponse à l'hormonothérapie?
Le traitement de première intention du
cancer de la prostate avancé (T3-T4 et N+) ou métastatique est essentiellement
hormonal.
Quelle
hormonothérapie ?
La base du traitement est constituée par la castration (soit chirurgicale, ou
de plus en plus, chimique par les ana-logues de la LHRH). Faut-il associer un
anti-androgène à la castration de façon prolongée (blocage androgénique
maximal)? Les résultats des différentes études publiées sont discordantes et
ceux d'une méta-analyse sont attendus à présent pour savoir si la survie et/ou
la qualité de la vie sont augmentées par la mise en place d'un tel traitement
combiné.
Quand
faut-il commencer le traitement ?
La réponse dépend de la sévérité des symptômes présentés par le patient.
1. Patients symptomatiques
Ce groupe représente la majorité des patients ayant un cancer de la prostate
localement avancé ou métastatique. Ils présentent des symptômes dus soit à
l'obstruction soit aux métastases, en particulier les métastases osseuses. Ces
patients doivent être traités immédiatement après le diagnostic. 70% des
patients répondent objectivement (réduction de la taille de la prostate,
diminution des foyers d'hyperfixation en scintigraphie osseuse) et 80%
répondent subjectivement (amélioration des symptômes obstructifs, des douleurs
métastatiques et de l'état général).
a) Obstruction du col de la vessie
Dans ces cas, il est préférable de ne pas réaliser la résection endoscopique de
la prostate immédiatement, car ce geste est souvent superflu du fait que la
miction est améliorée chez la majorité des patients par l'hormonothérapie
seule.
En outre, certains auteurs pensent que la résection endoscopique de la prostate
contribue à la dissémination de la maladie. Bien qu'il n'y ait pas de preuve
objective de cette hypothèse, il est néanmoins usuel en oncologie d'éviter de
couper dans une tumeur à chaque fois que cela est possible.
Quand la rétention d'urine est la première manifestation du cancer de la
prostate, la vessie est évacuée (par sondage vésical ou par cathétérisme
sus-pubien) et une biopsie est réalisée.
Certains urologues préfèrent réaliser la résection endoscopique immédiatement
pour soulager l'obstruction. D'autres préfèrent s'abstenir et commencent
l'hormonothérapie lorsque la preuve histologique est obtenue. Le drainage
vésical est maintenu 3 à 4 semaines, jusqu'à ce que l'hormonothérapie soit
efficace. La majorité des patients reprennent leur miction après cette période
et le cathéter ou la sonde peuvent être enlevés définitivement.
Si les mictions ne reprennent pas après 4 semaines d'hormonothérapie, la
résection peut être réalisée.
b) Symptômes dus à une obstruction urétérale
Lorsqu'un patient qui n'a encore reçu aucun traitement pour son cancer de la
prostate présente une anurie ou une hydronéphrose progressive avec ou sans
insuffisance rénale, il faut proposer une hormonothérapie.
Comme une suppression androgénique immédiate est nécessaire, il est déconseillé
de mettre le patient d'emblée sous analogue de la LHRH, même en association
avec un anti-androgène, à moins que les uretères obstrués aient été drainés par
une sonde double J.
Dans ces cas, il est de règle de proposer plutôt une castration chirurgicale.
Si une obstruction urétérale aiguë révèle la maladie, la castration ne peut
être réalisée avant l'obtention d'une preuve histologique de cancer, ce qui
peut prendre plusieurs jours. Dans ce cas, l'hormonothérapie peut être
commencée par les oestrogènes. Ceci constitue une des dernières indications à
l'emploi des oestrogènes dans le cancer de la prostate.
Dans un second temps, l'hormonothérapie peut être continuée sous la forme d'une
castration chirurgicale ou de l'emploi d'analogues de la LHRH associés avec une
prescription d'anti-androgènes de courte durée pour éviter la flambée évolutive
qui peut s'observer au début du traitement.
Il peut être nécessaire de mettre en place une néphrostomie temporaire ou des
sondes double J jusqu'à ce que l'hormonothérapie ait atteint son maximum
d'efficacité.
c)Métastases osseuses douloureuses
L'hormonothérapie est le traitement de référence en première intention. La
castration chirurgicale si elle est acceptée par le patient, serait plus
rapidement efficace que les traitements conservateurs.
2.Patients peu symptomatiques ou asymptomatiques
a)Patients n'ayant plus d'activité sexuelle
Avec les nouvelles modalités thérapeutiques hormonales, l'expectative pourrait
être préjudiciable en terme de survie et de qualité de vie en particulier chez
les patients de mauvais pronostic. En outre, elle demande une surveillance plus
étroite que si le traitement avait été entrepris. Le risque d'une telle
approche est en effet que le patient développe des métastases silencieuses sur
des points d'appui tels que le rachis ou l'extrémité supérieure du fémur et
constitue des fractures pathologiques avec toutes leurs conséquences.
L'hormonothérapie retarde le moment de la progression et améliore la qualité de
la vie du patient. Pour toutes ces raisons, il semble préférable, chez les
patients n'ayant pas d'activité sexuelle, de commencer l'hormonothérapie
immédiatement après le diagnostic.
b)Patients souhaitant conserver leur activité sexuelle
Chez les patients sexuellement actifs qui veulent le rester, il est légitime de
réserver la castration pour plus tard et d'observer une surveillance régulière.
Ces patients peuvent aussi être traités par un anti-androgène pur, traitement
qui n'entraîne pas d'effet majeur sur l'activité sexuelle.
Quelle est la durée de la réponse à l'hormonothérapie?
Malheureusement, la réponse clinique à l'hormonothérapie ne dure en moyenne que
2 à 3 ans. Après cela, si le patient n'est pas décédé d'une autre cause, ce qui
est une éventualité fréquente dans le cancer de la prostate, la récidive est
inévitable et commence alors la phase d'hormono-résistance. Les options
thérapeutiques à ce stade deviennent plus étroites et demandent une bonne
coordination de façon à ce que les effets indésirables des différentes
modalités thérapeutiques n'annulent le bénéfice souvent limité que l'on peut
obtenir de ces traitements.
BIBLIOGRAPHIE
1. DENIS L. Current strategies in hormonal manipulation of advanced prostate
cancer. Current Opinion in urology 1991, 1 : 16-20.
2. MCCONNEL J.D. Physiologic basis of endocrine therapy for prostate cancer. Urol
Clinic North Am 1991, 18, N°1 : 1-14.