Stratégies diagnostiques et thérapeutiques en infectiologie urologique

Pr Bernard LOBEL (Rennes)

Les références du Comité
d'Infectiologie
de l'AFU

Définitions
Stratégies diagnostiques et thérapeutiques
Traitement des cystites aiguës simples de la femme
Traitement des pyélonéphrites aiguës
Troubles mictionnels et infection urinaire de la fille en âge scolaire
Les infections urinaires des sujets âgés

 


1 DEFINITIONS

Les Infections urinaires sont considérées aujourd'hui simples ou à risque de complications qu'il s'agisse de cystite ou pyélonéphrite aiguë.

Une infection urinaire simple (ou sans facteur de risque) est une infection qui survient chez la femme entre 15 et 65 ans, en dehors de la grossesse et en l'absence de facteur de risque. On parle dans ce cas de cystite simple ou pyélonéphrite aiguë simple quelque soit le tableau clinique.

Les infections urinaires à risque ou infections compliquées sont celles qui surviennent dans un contexte d'obstacle sur la voie excrétrice, de malfaçon de l'appareil urinaire, de vessie neurologique, de lithiase, de résidu vésical supérieur à 100 cm3, de geste endoscopique récent. Il en est de même des patients porteurs de diabète, insuffisance rénale ou immunodépression (SIDA, transplantation). Sont considérées de principe comme des infections compliquées toute infection survenant chez l'homme, chez la femme de plus de 65 ans, chez la fillette et les cystites récidivantes (>4 épisodes/an).

La Bactériurie Asymptomatique (BA) : La BA est définie par la présence de 10 puissance 5 bactéries par ml en l'absence de signes cliniques : douleurs lombaires, fièvre, dysurie qu'il existe ou non une leucocyturie. La signification de la BA dépend des conditions épidémiologiques et des facteurs de risques chez le patient.

2 STRATEGIES DIAGNOSTIQUES ET THERAPEUTIQUES

1 - Traitement des Cystites Aiguës simples de la Femme

Le diagnostic de cystite aiguë chez la femme de 15 à 65 ans se fait sur la clinique. L'ECBU est devenu inutile dans ces formes guérissant en 24 à 48 heures en l'absence de risque pour la vessie ou le haut appareil urinaire. La recherche de leucocytes et de nitrites à la bandelette réactive apporte la confirmation de l'infection pourvu que ce test rapide soit effectué dans des conditions techniques rigoureuses.

Le traitement court, dose unique (Ciprofloxacine, Péfloxacine, Fosfomycine-Trométamol) ou 3 jours (Loméfloxacine, Cotrimoxazole), est seul indiqué. Lorsque la guérison est obtenue cliniquement en 48 heures, aucun examen bactériologique ne s'impose pour confirmer cette guérison. En revanche, l'ECBU est indispensable en cas d'échec, de rechute précoce et/ou de réinfections successives à la recherche des germes résistants.

2 - Traitement des Pyélonéphrites Aiguës

La pyélonéphrite aiguë simple de la femme de 15 à 65 ans affirmée sur la clinique nécessite d'être encadrée par un examen cyto-bactériologique des urines, une radiographie de l'abdomen sans préparation ainsi qu'une échographie afin d'éliminer une pathologie obstructive qui imposerait un recours urologique. Le traitement probabiliste est immédiatement mis en route (Fluoroquinolones de nouvelle génération et Céphalosporines de 3ème Génération sont utilisées de façon parentérale ou orale). Un aminoglycoside peut être prescrit en association aux autres molécules pendant les 3 ou 4 premiers jours : lorsque la guérison des symptômes est obtenue après 3 ou 4 jours, le traitement oral sera poursuivi pour une durée totale d'au moins 10 jours. Il est inutile, sauf cas particulier, de le prolonger au delà de 20 jours.

La pyélonéphrite aiguë compliquée ou à risque de complications justifie d'une hospitalisation pour adapter la thérapeutique au résultat de l'ECBU et de l'antibiogramme. Un Uroscanner permet une meilleure appréciation des lésions parenchymateuses : le traitement dans ces formes sera prolongé au delà de 15 jours. Dans tous les cas, la guérison sera confirmée par un examen cyto-bactériologique 15 jours après l'arrêt du traitement.

3 - Troubles mictionnels et Infection urinaire de la fille en âge scolaire

1) En pédiatrie, l'ECBU avec antibiogramme reste indispensable pour deux raison principales:
- impossibilité d'utiliser des antibiotiques à large spectre en traitement court (dose unique ou 3 jours) recouvrant la majorité des germes habituellement responsables
- importance actuelle de la résistance de E. Coli aux principaux antibiotiques ou antiseptiques couramment utilisés.

2) L'ECBU n'a de valeur que si les conditions de recueil et de transport des urines sont irréprochables : il doit être réalisé chez la fillette sur les urines de milieu de jet.

3) - Le nombre des molécules utilisables per-os est restreint chez l'enfant de moins de 15 ans. Le traitement est probabiliste. Les drogues les plus utilisées sont le Clamoxyl, l'Augmentin, l'Oracéfal, le Bactrim Fort.

4) Les traitements courts (3 à 5 jours) ne sont pas recommandés. La durée reste pour l'instant d'environ 7 jours, la durée minimale restant à déterminer.

5) Les traitements adjuvants (Oxybutinine chloride, à doses fractionnées dans le nycthémère) sont utiles et la recherche d'une cause favorisante est indispensable. Il n'y a pas pour l'instant d'indication à un traitement d'entretien après une première cystite.

6) L'exploration urologique est pratiquée même en cas d'infection urinaire simple reposant sur la radio d'abdomen sans préparation, l'échographie rénale et vésicale à vessie pleine et vide, la cystographie rétrograde. Ces examens seront complétés en cas de récidive ou facteurs de risques par urographie intraveineuse, endoscopie et si nécessaire scintigraphie ou scanner.

4 - Les infections urinaires des sujets âgés

Les Recommandations spécifiques concernant la prise en charge et le traitement des Infections Urinaires des Sujets Agés se résument en 7 points:

1) Utiliser la bandelette urinaire comme dépistage de l'infection urinaire du sujet âgé. Ne demander l'ECBU que lorsque la bandelette est positive.

2) Toujours considérer qu'un syndrome infectieux avec bactériurie chez un sujet âgé peut être d'une autre origine qu'urinaire. L'infection urinaire dans ce contexte doit être un diagnostic d'élimination.

3) Eviter le sondage urinaire permanent. Préférer la pose d'un cathéter sus-pubien lorsque cela est possible. Lorsque le sondage urinaire est indispensable, il ne doit être maintenu que le temps nécessaire pour passer le cap difficile : cicatrisation d'escarres sacrés ou d'ulcérations vaginales, en cas d'incontinence.

4) Ne pas traiter les bactériuries asymptomatiques de la femme.

5) Ne plus utiliser d'aminosides dans le traitement des infections parenchymateuses du sujet âgé.

6) Adapter, en fonction de la clearance de la créatinine, la posologie des antibiotiques ayant une élimination rénale.

7) Réduire systématiquement d'1/3 les posologies des antibiotiques à élimination non rénale chez les sujets de plus de 75 ans