1ier juillet 2000

J'ai passé la belle journée d'aujourd'hui au soleil (quand il daignait se montrer) sur le bord du lac en compagnie de Lola.

Vous savez quoi ? Je suis un peu frustré. Lola et moi nous discutions de plein de choses intéressantes cet après-midi, et je me disais que ce serait intéressant de les inclure ans mon journal de ce soir.

Mais j'ai tout oublié. Je crains que je vais être obligé de m'acheter un de ces petits magnétophones de poche pour enregistrer toutes mes pensées au fur et à mesure.

Ce qui est dommage entre Lola et moi, c'est que nos modes de vie nous séparent. Nous ne nous voyons que très peu souvent, et bien que notre amitié soit profonde et nous tienne énormément à coeur tous les deux, je ne peux m'empêcher de sentir que nous nous éloignons peu à peu au fil des années. Une relation entre deux êtres, aussi intense et profonde soit-elle, ne peut survivre indéfiniment sur le simple désir de la préserver de ceux qui la vivent. Toute relation doit être entretenue, et je crois qu'autant Lola que moi sommes d'accord pour dire que nous devrons faire des efforts d'un côté comme de l'autre pour nous voir plus souvent, pour nous rapprocher, pour raviver les points communs qui nous unissent.

Je tiens énormément à elle.

J'entendais à l'instant ce que j'ai d'abord cru être des coups de tonnerre, pour réaliser qu'il s'agissait de l'écho lointain des feux d'artifice en ville.

Je suis en train d'écouter "Great Canadian Parks" et ils parlent du parc national de l'île d'Ellesmere. Et encore une fois, je me perd dans mon imagination, je me prend à rêver de me retrouver là, sous le soleil de minuit, à regarder ces paysages grandioses, à fouler ce sol rocheux et presque nu, parsemé seulement de quelques traces de lichen et quelques plantes arctiques aux fleurs multicolores, à parcourir les arrêtes rocheuses de montagnes millénaires qui n'ont peut-être pas senti le pas d'un humain depuis plusieurs milliers d'années. Et je ne peux imaginer que je ne réaliserai pas éventuellement ce rêve un jour. Mais ce genre de voyage est coûteux et demande beaucoup plus d'expérience de la longue randonnée que j'en ai actuellement. Alors je devrai attendre. Attendre encore.

Pourtant, j'ai étrangement l'impression depuis environs deux semaines que le temps presse, que rien n'est certain, que l'avenir peut être ce qu'on en fait, ou rien du tout...

Les dernières traces extérieures de mon accident ont disparu aujourd'hui. Ma peau est réparée, mes ecchymoses se sont effacées pour un oeil non entraîné, ma blessure à la tête est masquée par ma chevelure.

Demain matin je pars rejoindre mes douces amies pour notre semaine de randonnée en nature. Demain matin je pars jouir de cette vie que le destin fut assez généreux de ne pas m'enlever.


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