9 mai 2001

Je viens de passer les deux dernières heures dehors dans ma cour, à brûler des feuilles mortes dans mon foyer, au chant des grenouilles, sous un magnifique ciel étoilé.

Tout était parfait, absolument parfait. Je me forçais à vivre l'instant présent, à penser au fait que je vivais un moment dont j'ai toujours rêvé toute ma vie. Le vide était toujours là, et m'empêchait d'en jouir pleinement.

Je dois me conditionner à l'ignorer, à ne voir que l'instant présent, à cesser de toujours me projeter dans l'avenir, à arrêter de ne voir que ce qui me manque, surtout quand je ne sais même pas de quoi il s'agit. Ça ne sera pas facile, et ça ne règlera pas mon problème, mais ça m'aidera à arrêter d'en souffrir d'ici à ce que je mette le doigt sur le bobo.

Je devrais y arriver. J'ai une bonne discipline mentale. C'est grâce à elle que j'ai réussi à régler mes problèmes d'insomnie il y a longtemps, et plus récemment mes problèmes de syndrome de panique.

Je suis un peu découragé par la quantité de feuilles mortes que j'aurai à ramasser cette année encore. À mon rythme habituel, j'en ai pour deux bonnes semaines encore. Enfin... Au moins, mon nouveau foyer ne chômera pas.

Lorsque je marchais dans mon quartier dimanche passé avec un de mes amis, je me surprenais souvent, lorsque je voyais quelqu'un qui travaillait autour de sa maison ou qui prenait du soleil sur sa galerie, à espérer voir que cette personne était nue. Ce n'est pas la première fois que ça m'arrive et je me suis souvent demandé pourquoi je faisais une telle obsession. Recherche d'excitation sexuelle ? Cette explication ne collait pas. Il y a belle-lurette que je fréquente des milieux où le nudisme n'est pas rare et je ne m'excite plus depuis longtemps devant la simple nudité.

Mais aujourd'hui, je crois avoir compris l'origine de mon étrange obsession.

En recherchant autour de moi d'autres personnes qui pratiquent le nudisme de façon occasionnelle, je recherche leur compréhension et leur approbation de mon propre choix de vie.

Voilà une partie de la raison pour laquelle je souffre tant de la solitude et de l'isolement. J'ai si peur de gâcher ma vie, je suis si insécure face aux choix que je fais, que je recherche continuellement à m'entourer de gens qui ont les mêmes goûts, pratiquent les mêmes activités, et ont fait les mêmes choix que moi, comme pour me rassurer dans ces choix, comme pour me prouver que, oui, ces choix sont légitimes et peuvent s'inscrire dans le cadre d'un vie dite "réussie".

C'est sans doute aussi la raison pour laquelle je me sens si envieux chaque fois que je suis exposé, dans les médias ou dans la réalité, à des groupes de personnes qui semblent être unis par une même passion, que ce soit un sport, un loisir, un groupe musical, une équipe de recherche scientifique, etc.

Et dans mon quotidien, je me sens toujours un exclu. Je ne connais personne ou presque qui écoute les mêmes émissions de télé que moi, ou qui aime aller voir les films dans leur version originale au cinéma. J'ai toujours de la difficulté à trouver des interlocuteurs avec qui échanger sur les sujets qui me passionnent. Et pour ce qui est du nudisme, voilà sûrement ma passion la plus incomprise et la moins partagée par mon entourage. Mais il y en a d'autres.

Une autre piste à explorer.


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