27 avril 2006
Une lectrice m'a écrit aujourd'hui. Elle s'est sentie
offensée par mon billet d'hier et à cause de cela, et de la tournure qu'ont pris
mes écrits ces derniers mois, elle ne me lira plus. Rien d'étonnant à cela. Je
sais que j'ai perdu des lecteurs au fil des années, à la fois à cause de mon
manque d'assiduité et du ton général de mon journal. En fait, ce qui m'a surtout
surpris dans son courriel, c'est le fait qu'elle semble avoir pris ce que j'ai
écris hier totalement au sérieux...
Mais mis à part le fait que mon style d'humour semble lui échapper complètement,
elle m'a quand même forcé à m'interroger sur un point en particulier, à savoir:
Pourquoi les gens lisent mon journal ? Pourquoi, en général, les gens lisent-ils
les journaux des autres ?
Il y a toutes sortes de raisons, me direz-vous. Des raisons aussi nombreuses
qu'il y a de lecteurs, sans doute. Mais ne peut-on pas dégager un trait commun à
toutes ces différentes raisons ? Je pense que oui. Ne leur en déplaise, les gens
ne recherchent pas la vérité. Ils recherchent confirmation de leur
vérité. Et quand on leur donne autre chose que cette confirmation, à tort ou à
raison, ça ne leur plait pas.
Ainsi donc, j'ai perdu une lectrice. Ce que j'écris aujourd'hui ne lui plait
plus, tout simplement. Consciemment ou inconsciemment, ses propres goûts, ses
propres désirs, ses propres principes et idéaux constituaient les seuls et
uniques critères pour juger de la valeur de mes écrits. Que mes propos soient
vrais ou non, que ma démarche soit authentique ou non, que je sois mieux dans ma
peau que je ne l'ai jamais été depuis des années, tout cela n'a jamais eu
d'importance à ses yeux. Et je me risquerais même à dire que c'est le cas de la
vaste majorité de mon lectorat, et du lectorat de la vaste majorité de la
communauté de ceux qui partagent leurs écrits en ligne.
- Ouin ben Laqk, c'est pas en écrivant des affaires de même que te vas accroître
ton lectorat...
Et bien justement, vous avez tout compris. Je n'écris plus pour me faire des
amis, je n'écris plus pour me faire aimer. Mes écrits ne sont plus un cri
d'alarme, un appel à l'aide. Ma démarche diaristique est maintenant le reflet de
ma démarche personnelle: la recherche de l'authentique, de la vérité, de la
lucidité, et ce, peu importe le prix, peu importe si ce que je découvre me
plaise, ou plaise à mon lectorat.
Il semble qu'il y ait toujours eu une constante dans ma vie: Plus j'ai été
authentique, fidèle à moi-même et à mes valeurs, plus j'ai été seul. Et toute ma
vie, j'ai toujours eu à choisir entre les deux. C'est peut-être parce que j'ai
eu le malheur de naître en un lieu et à une époque où les valeurs que je
préconise ne sont pas populaires, et quand les gens entendent des choses qui ne
leur plaisent pas, ils tirent sur le messager.
Mais c'est peut-être aussi parce que je suis une mauvaise personne, et que
lorsque je retire mon masque, je suis laid, tout simplement. Mais qu'importe. Si
telle est la vérité, je préfère être laid, mais montrer ma laideur au grand
jour, sans masque, et sentir la chaleur du soleil sur mon visage.
Tout cela n'a plus d'importance maintenant. Si le rejet et la solitude sont les
prix à payer pour me permettre de devenir enfin un être authentique, bien dans
sa peau et aimant ce qu'il voit lorsqu'il se regarde dans un miroir, et bien je
le payerai, ce prix. Et ceux et elles que ma démarche intéresse encore
continueront à me suivre.