2 décembre 2007

La fin de semaine est passée beaucoup trop vite. Toute la journée je me suis cru samedi, pour ne réaliser que sur l'heure du souper que je travaillais demain. Je déteste ça quand ça arrive.

Donc, une autre semaine qui commence demain. Ce qui veut dire, si vous regardez un calendrier, que j'en ai encore pour cinq semaines à me faire écoeurer avec le temps des fêtes; à me faire dire que si je veux être aimé par mes proches, je dois leur acheter les cadeaux les plus dispendieux; à me faire rappeler jour après jour que je suis un looser de la pire espèce si je n'ai pas de conjointe ou d'enfant avec qui passer le temps des fêtes et sur qui gaspiller mon argent en babioles inutiles qu'ils iront probablement échanger dès le lendemain; à entendre des putains de grelots sur toutes les pubs télés.

Vous devez vous dire: "Wow, quel Scrooge il est devenu !". Et vous auriez tout à fait raison. Nous ne sommes plus au dix-neuvième siècle, vous savez. Peut-être qu'à cette époque, le temps des fêtes avait encore son véritable sens. Peut-être qu'à cette époque, Scrooge avait tort de penser ce qu'il pensait de la fête de Noël.

Mais s'il vivait aujourd'hui, il aurait tout à fait raison. La fête de l'amour ? Bullshit. La fête du mercantilisme et du matérialisme, oui. Comment ? Vous dites que ce n'est pas comme ça chez vous ? Que dans votre famille, le sens de la fête de Noël est encore de se retrouver en famille et entre amis, de rire, de s'amuser avec les enfants et la parenté ?

Alors prouvez-le. Peut-être est-il trop tard pour ça cette année, mais pour le prochain temps des fêtes, essayez de tout planifier et organiser comme d'habitude: le réveillon, les beaux habits, les décorations, l'arbre de Noël, le copieux repas du temps des fêtes, mais sans cadeau. Pas un seul cadeau. Ni pour vous, ni pour la parenté, ni pour les enfants. Oui oui, vous m'avez bien entendu, les enfants aussi. On va bien voir la réaction que vous recevrez de vos proches lorsque vous suggérerez l'idée. On va bien voir comment vos enfants vont réagir à l'idée de ne voir aucun paquet sous l'arbre de Noël cette année là.

Avouez-le, vous êtes pris au piège vous aussi. Vous n'avez pas le choix. Vous êtes vous aussi esclaves des normes et conventions de la société, la plupart desquelles ne tombant pas du ciel, mais étant délibérément fabriquées de toutes pièces, par ceux à qui ça profite, pour vous obliger à entretenir cette répugnante société de consommation à cause de laquelle les trois quarts de la population de la terre vivent à l'année dans la misère et la pauvreté, et pour lesquelles la fête de Noël sera juste une journée comme les autres, une journée de souffrance, de famine, de guerre et de mort.

Et pourtant, ce n'est pas impossible de vivre cette fête dans la sérénité, la paix et l'amour. C'est même tellement simple. Vous savez c'est quoi, pour moi, un beau réveillon de Noël ? C'est un réveillon comme celui que j'ai passé il y a quelques années quand la collègue avec qui je m'entend si bien est venue chez moi, sans artifice, sans cadeau, sans carte et sans décoration, et où nous nous sommes simplement assis ensemble, un verre de porto à la main, pour jaser. Juste jaser, échanger, rire, jouir de la simple présence de l'autre, jusqu'à trois heures du matin, sans même avoir vu le temps passer. Ça a été mon plus beau réveillon des dix dernières années.

Alors ne vous en faites pas pour moi. Je suis beaucoup moins à plaindre que vous pensez. Beaucoup moins à plaindre que la majorité des gens en fait. Ne m'envoyez pas les trois esprits des Noël passés, présent et futurs, ce serait une perte de leur précieux temps. Envoyez-les plutôt visiter les riches et puissants de ce monde, ainsi que ceux qui ne sont peut-être pas encore riches ou puissants, mais qui envient leur situation en croyant naïvement que c'est là qu'ils trouveront leur bonheur. Ce sont eux qui ont besoin de leur visite. Eux qui ont besoin de revoir leur passé, de se faire mettre le nez dans la souffrance dont ils sont responsables, d'avoir un avant-goût de l'abime insondable qui est l'inévitable destination vers laquelle leur coeur de pierre les entrainera inexorablement.


[jour précédent] [retour] [jour suivant]