10 juin 2010

Mon billet de ce soir sera entièrement consacré à mes observations fauniques des dernières semaines. Alors pour ceux que ça n'intéresse pas, et bien vous savez ce que vous avez à faire...

Bien décidé à ne pas rater la montée printanière des meuniers noirs cette année, je suis allé assez régulièrement faire un tour à la source du lac ces derniers temps. Hier, je les ai vus pour la première fois, tous regroupés à l'embouchure de la source. Ils se sont tous enfuis à l'approche de mon embarcation, mais ils n'avaient pas encore commencé à remonter le ruisseau. Ce soir, au lieu de prendre mon kayak, je suis allé à pied vers la route, et qu'est-ce que j'ai trouvé ? Une centaine de meuniers au moins qui s'ébattaient dans le ponceau sous cette dernière. Après la panique générale qu'a provoquée mon arrivée, j'ai pu commencer à les observer à loisir une fois qu'ils se furent calmés.

Certains groupes avaient déjà commencé à remonter le ruisseau sur quelques dizaines de mètres environ. Mais la plupart avaient déjà pondu leurs oeufs, qu'on pouvait voir sur le fond mélangés au sable et au gravier. D'après ce que je pouvais observer, ils semblaient former des groupes constitués d'une femelle et de plusieurs mâles de plus petite taille. Après une période de repos, la femelle s'agitait frénétiquement pour creuser une petite cavité dans le gravier. Il était difficile de voir se qui se passait ensuite avec les mâles.

J'ai essayé d'en saisir quelques uns pour les observer de plus près. Ils se laissaient assez aisément toucher (confondant sans doute le contact de mes doigts avec le frottement de leurs semblables), mais dès que j'essayais de les sortir de l'eau ils se débattaient au point de m'obliger à lâcher prise si je ne voulais pas les serrer avec une poigne qui aurait risqué de les blesser. J'ai alors changé de stratégie: je me suis mis à les manipuler à souhait, mais en les laissant sous l'eau. C'était surprenant de voir à quel point je pouvais les manipuler sans qu'ils ne s'objectent trop à mes investigations. Je pouvais aisément les retourner sur le côté pour observer leurs nageoires pelviennes, déployer leurs nageoires dorsale ou caudale, etc. Quand, après quelques minutes, l'un d'eux semblaient commencer à montrer des signes évidents d'impatience face à mes manipulations, je le laissais tranquille et passait à un autre.

Autre détail: ça et là, le long de la rive et dans le bois, on pouvait voir des cadavres à moitié dévorés. Facile de trouver les coupables en regardant simplement les empreintes laissés dans la vase bordant le ruisseau: ratons-laveurs. Contrairement à nous, ces petites bêtes semblent préférer les abas, les yeux et la cervelle de leurs victimes, laissant les autres parties à peu près intactes.

Nous ne sommes qu'au début de la montaison. les jours suivants vont sûrement me permettre encore de nombreuses heures d'observation.

Ce qui rend ce genre d'expérience particulièrement agréable, c'est l'absence quasi totale d'insectes piqueurs. Encore une fois cette année, il semble que la conjecture climatique ait favorisé des conditions défavorables à leur prolifération. Le printemps très sec que nous avons connu y est sûrement pour quelque chose. Presque tous les soirs ces dernières semaines, je pouvais aisément m'assoir sur le bord du lac après le souper pour lire un bon livre, sans que la moindre bébête ne vienne m'importuner. Il en était de même lors de mes randonnées en forêt.

Dans la même veine, un groupe d'outardes se sont arrêtés sur le lac hier pour y passer la nuit. Elles étaient trente et unes. Oui, je les ai compté. Il y a aussi encore cette année un couple de huards. On ne les entend plus, mais il m'arrive à l'occasion de voir l'un d'eux glisser sur l'eau et plonger à la recherche de poissons. L'autre membre du couple doit se trouver sur le nid, à s'occuper de la future progéniture.

Parlant de progéniture aviaire, J'ai terrorisé une famille de perdrix avant hier lors d'une de mes randonnées. Je parcourais un sentier lorsqu'une multitude de petites créatures, à peine plus grosses qu'un poussin, se sont soudainement dispersées dans toutes les directions, alors que leur mère, volant directement dans ma direction, s'est posée littéralement à mes pieds avant de se mettre à tourner en rond autour de moi en feignant une blessure à l'aile. C'était vraiment rigolo à voir.

Les castors ? Et bien ils m'ont foutus une peur bleu hier. En approchant des huttes jumelles, l'un d'eux se trouvait à un mètre de moi à peine, dans les buissons. À mon approche, il a fait ce que les castors font dans ces circonstances: plonger en claquant la surface de l'eau avec sa large queue plate. Je suis pourtant habitué à ce genre de comportement, mais cette fois c'était si près de moi que ça m'a vraiment foutu la trouille.

Pour ce qui est des grenouilles, et bien leur saison tire à sa fin. Elles étaient littéralement déchaînées lors de la dernière vague de chaleur, mais quelques nuits froides ont suffit à calmer leurs ardeurs. Et même si les deux dernières nuits ont été plutôt douces, cela n'a pas suffit à leur rendre leur enthousiasme. En ce moment, j'en entend bien quelques unes chanter, mais je crois bien que d'ici une semaine tout au plus, les rainettes crucifères se seront tues définitivement pour la saison, et se sera au tour des ouaouarons de prendre le relais jusqu'à la mi-juillet.

Pour finir, je ne sais pas ce qui se passe avec les orignaux cette année, mais j'en vois presque à chaque randonnée. Ma plus belle expérience à date est arrivée la semaine dernière. Je m'approchais d'un marais et je pouvais entendre au loin le bruit de ce qui ressemblait à un gros animal pataugeant dans l'eau. Lorsque je fus en vue de l'eau, j'aperçu un magnifique orignal sur l'autre rive, un mâle encore une fois. Il était dans l'eau à mi-jambe et enfonçait régulièrement sa massive tête sous la surface de l'eau pour se nourrir de plantes aquatiques. Je me suis assis sur un rocher d'où j'avais une vue bien dégagée. Ça n'a pris que quelques secondes avant qu'il me repère; ses longues oreilles d'abord, puis ses yeux se sont braqués sur moi. Il est resté ainsi de longues minutes. De mon côté, je n'ai rien fait pour me cacher. Assis sur le sol, je tournais la tête d'un côté puis de l'autre, évitant de soutenir sont regard (ce qui est un comportement de prédateur). Finalement, satisfait que je ne représentait pas une menace, il s'est détendu et a continué à vaquer à ses occupations. Soudainement, j'ai entendu un craquement provenant des buissons sur la rive juste derrière lui. Quelle ne fut pas ma surprise de voir sortir une autre magnifique bête, une femelle cette fois, qui eu tôt fait de le rejoindre dans l'eau pour commencer à se nourrir elle aussi.

Je suis resté ainsi une bonne heure au moins, à observer ces deux magnifiques cervidés dans leur élément naturel, indifférents à ma présence. Heureusement, j'avais eu la présence d'esprit d'apporter avec moi mon appareil photo de poche. Pas la meilleure qualité d'image, mais qui me permet néanmoins de partager avec vous une expérience inoubliable. :)


[jour précédent] [retour] [jour suivant]