Chapitre C : Au niveau économique

Même si les objectifs politiques paraissent primordiaux quand il s'agit de décider d'une coopération avec des partenaires étrangers, en particulier pour le long terme, le critère économique est pourtant généralement davantage mis en exergue. Il est en effet plus immédiat et beaucoup moins théorique. On s'aperçoit cependant que les économies supposées être la conséquence d'un matériel commun sont fréquemment surévaluées, quand elles ne se transforment pas en pertes. La réussite plus ou moins grande des programmes en coopération semble en fait, à qualité égale, dépendre grandement de la structuration industrielle du projet par les partenaires.

1) Attentes et déceptions économiques

a) Un fait : l'augmentation constante des prix des armements

La thèse de Ethan Barnaby Kapstein (72) est économiquement évidente (73) : si un pays a le choix entre produire lui-même un matériel et le fabriquer en collaboration, il préférera toujours le premier choix, le second n'étant qu'une solution de deuxième ordre à ne sélectionner que si le dilemme se résume à coopération ou importation. L'Etat a en effet intérêt à garder pour lui les technologies et l'emploi qui découlent de l'industrie d'armement.

Cependant, la possibilité de développer de manière autonome de grands programmes militaires est aujourd'hui de plus en plus réduite, seules les deux anciennes superpuissances de la guerre froide paraissant encore capables de posséder un armement entièrement national : « la France ne pourra plus tout fabriquer, de la balle de fusil au sous-marin nucléaire », a l'habitude de dire Henri Conze, directeur de la DGA. « Il n'est plus possible, ni d'ailleurs nécessaire, que la France possède et maintienne à elle seule l'ensemble de ces compétences » (74) répète en écho le Livre blanc sur la défense de 1994. Les raisons de ce revirement brutal - la France avait mis son point d'honneur depuis 1960 à être en situation de quasi-autarcie - sont listées dans le Livre blanc, les principales étant l'insuffisance du marché national et la complexité croissante des technologies, dont la part dans le prix moyen d'un avion de combat est passé de 15 % dans les années 60 à 30 % pour cette décennie.

La dérive des coûts entraînée par ce dernier phénomène n'est pas nouvelle et suscite deux conséquences parallèles. D'une part, le prix unitaire de chaque nouvel équipement est en forte augmentation par rapport à la génération précédente; ainsi, l'Ouragan de 1952 qui coûtait 5,4 millions de francs 1975 eut en 1980 pour lointain successeur le Mirage 2000 à 60 millions de francs 1975, soit une augmentation annuelle hors inflation de 9 % (75). Le Rafale ne devrait pas déparer. Tous les matériels sont d'ailleurs dans cette situation, le Tigre lui-même devant atteindre un coût moyen estimé de 100 millions de francs (76), à comparer aux 14 millions de la Gazelle HOT qu'il remplace (77), dont le prix a, il est vrai, été amorti sur une longue série. Il faut évidemment comparer les 80 % de matériaux composites présents dans sa structure aux 0,25 % du Mirage F1 de 1976 (78). D'autre part, cette inflation continuelle des matériels militaires - qui n'est pas limitée à la France - a pour corollaire l'incapacité à renouveler les stocks dont le volume diminue à mesure que la qualité augmente. C'est ainsi qu'en théorie, si ce rythme se poursuit, les Etats-Unis ne pourront plus s'offrir qu'un avion de combat par an en 2054 (79), et l'Europe dès 2032 (80), en supposant que les budgets de défense ne diminuent pas. Il est toutefois possible que la surenchère ralentisse, la disparition de la menace soviétique rendant le perfectionnisme technologique américain beaucoup moins utile.

Les pays européens ne peuvent de toute façon plus suivre le rythme. En dehors de la Grande-Bretagne dont la politique du « Best value for money » (81) correspond en fait à l'exécution d'une politique d'orthodoxie ultra-libérale, la France a par exemple décidé, dans sa loi de programmation militaire 1995-2000, d'imposer des gains de productivité, c'est-à-dire des diminutions de prix, de 2 % par an aux industriels. Cette direction est d'ailleurs reprise à plusieurs endroits dans le Livre blanc. Des réductions de dépenses peuvent également découler d'une plus grande fiabilité du matériel, soit grâce à sa sophistication, soit par un effet de série.

b) La coopération : une solution évidente ?

Cependant, ces réductions ne sont pas suffisantes et ne permettent pas, dans le climat de crise qui sévit actuellement, de sauvegarder le secteur de l'armement. C'est pourquoi la coopération européenne apparaît à beaucoup comme une solution miracle, ou tout du moins assez favorable pour permettre aux entreprises de subsister durant la période sombre qui s'annonce. Les avantages économiques de la coopération sont en effet nombreux et, du moins théoriquement, très attractifs (82). On peut les classer sommairement en trois parties.

Tout d'abord, la fabrication d'un matériel en coopération fait diminuer les coûts de recherche et développement, c'est-à-dire une grande partie des coûts fixes, puisqu'ils sont divisés par le nombre de participants. De plus, le marché initial étant plus important et garanti - à moins évidemment qu'un des partenaires ne se retire -, la série de production est plus longue, d'où une diminution du prix unitaire. Les économies d'échelle sont en effet importantes, lesquelles sont renforcées par l'effet d'apprentissage - 10 à 20 % de gain à chaque doublement de série (83) - et, lors de la phase d'utilisation, par la mise en commun de certains éléments logistiques - entretien, réparations, pièces de rechange. Les perspectives d'un marché à l'exportation plus important - au moins le marché captif des autres partenaires - est également intéressant pour amortir les investissements en augmentant encore la quantité produite. La coopération permet donc au total d'accéder à une taille critique qu'isolées, les entreprises européennes ne peuvent pas atteindre, et qui leur permet de pouvoir espérer rivaliser avec leurs concurrents américains.

D'autre part, la coopération permet le développement de l'industrie de défense en Europe, d'abord parce que les petits pays qui n'auraient jamais eu un budget suffisant pour mettre en oeuvre de manière autonome un grand programme d'armement peuvent le faire, et ensuite grâce au partage des technologies entre les partenaires, ce qui autorise certains à acquérir des connaissances qu'ils ne possédaient pas jusqu'alors. De plus, la conjugaison des potentiels nationaux est forcément bénéfique pour arriver à une solution technologiquement de pointe.

Enfin, le partage des risques financiers et industriels est un atout non négligeable dans un domaine où l'investissement initial est lourd, les perspectives de profit très aléatoires et les marchés peu sûrs.

Le problème majeur est que la pratique rejoint rarement la théorie. S'il est vrai que l'allongement des séries permet la réduction du prix unitaire, il apparaît au contraire que le coût du développement en coopération augmente sensiblement - on parle d'un coefficient multiplicateur égal à la racine carrée au nombre de participants, c'est-à-dire 100 % de surcoût pour quatre Etats - car des dépenses supplémentaires apparaissent : frais de traduction, de coordination, de contrôle, éloignement géographique... C'est ainsi que l'Eurofighter 2000, avec ses quatre entreprises partenaires et ses 80 milliards de francs de coût de développement, est généralement exhibé par les adversaires d'une coopération trop poussée comme l'exemple de l'échec de celle-ci face aux solutions nationales, ici le Rafale à 30 milliards.

La principale raison de cet échec est l'irrationalité de la division internationale du travail. Exemple type : la volonté de certains partenaires à obtenir dans le projet la charge de réaliser des travaux dans lesquels ils ont peu d'expérience, c'est le « principe d'incompétence » (84). Il est vrai que cela leur permet d'acquérir ce savoir-faire qui leur manque, mais cette logique, totalement contraire à la théorie des avantages comparatifs, perturbe généralement le bon déroulement du programme et contribue de plus à augmenter les surcapacités de production dont souffre déjà l'Europe. De plus, un grand nombre de collaborations, notamment dans le domaine aéronautique avec entre autres le Transall et le Jaguar, ont entraîné la création de chaînes d'assemblage dans tous les pays participants, ce qui multiplie les coûts. Ce concept de juste retour (85), c'est-à-dire d'obtention par chaque Etat d'une partie de la production commune proportionnelle à sa part de financement du projet, est totalement antiéconomique, mais paraît à beaucoup incontournable. Une solution pourrait être son application non plus projet par projet mais à un ensemble de programmes, ce qui diminuerait ses conséquences néfastes. Ce système exige cependant une collaboration suivie.

L'addition des spécifications requises par chaque Etat, si elle n'est pas maîtrisée, conduit non seulement à l'augmentation des dépenses de développement, mais aussi à un allongement des délais. Les divergences franco-allemandes autour de la configuration du projet d'hélicoptère Tigre (86) ont été pour beaucoup dans les treize années de discussions et les surcoûts inhérents. Les dépenses occasionnées par la modification de la version allemande de PAH-2 en UHT était ainsi estimée par le président d'Eurocopter à 200 millions de dollars (87).

On s'aperçoit néanmoins finalement que la coopération doit être globalement positive - 3 % du budget français de la défense d'après un rapport du CHEAr (88) -, car l'augmentation du coût de développement est plus que rentabilisée par le nombre plus important de commandes reçues pour ce matériel, à condition d'une part que le programme ne soit pas abandonné en chemin et d'autre part que les commandes initiales soient maintenues.

2) L'importance de la structure industrielle

a) La fondation d'Eurocopter

Si le Tigre a su résister à la plupart de ces embûches, à part évidemment celles structurellement liées à toute production en coopération, c'est sans doute en grande partie grâce à la structure industrielle adoptée par son fabricant, Eurocopter. On s'aperçoit en effet qu'une grande partie des inconvénients de la collaboration tient à la méfiance réciproque des acteurs, Etats contre Etats et industries contre industries. Cette situation est principalement le fait de la finitude de ces partenariats, chacun reprenant une totale liberté au terme du projet, sans oublier la concurrence qui subsiste dans tous les autres domaines. Dans ces cas-là, il n'est donc pas de l'intérêt de l'entreprise de partager son savoir-faire avec une autre, ou de fermer une chaîne de montage afin d'éviter la duplication des tâches : ce serait donner un grand avantage à l'adversaire qui en profiterait pour d'autres projets. Il ne faut pas oublier d'autre part la rivalité pouvant exister entre le produit commun et un autre fabriqué par une des entreprises partenaires, qui peut préférer favoriser celui-ci plutôt que celui-là, comme cela s'est vu avec la concurrence Jaguar/Mirage F1 pour Dassault ou Lynx/Dauphin pour Aérospatiale.

C'est pourquoi seule une alliance qui paraît durable peut dissiper la méfiance réciproque et donc éviter les nombreux désavantages d'une coopération classique (89). En effet, si les alliances que Bernard Garrette et Pierre Dussauge qualifient de « pseudo-concentration » (90) - c'est-à-dire le développement, la fabrication et la commercialisation d'un produit commun par des entreprises concurrentes - sont nombreuses dans le secteur de l'armement, Eurocopter est un exemple d'intégration poussée qui dépasse la simple juxtaposition de capacités industrielles.

Aérospatiale et MBB (Messerschmidt Bölkow Blohm), filiale de DASA, avaient déjà collaboré un certain temps ensemble - 50 % du chiffre d'affaires d'Aérospatiale en 1985 se faisait en collaboration avec MBB (91) - dans un GEIE (Groupement Européen d'Intérêt Economique) avant de décider de fondre leurs divisions Hélicoptères (92) en février 1992 en créant le GIE Eurocopter International, dévolu à la commercialisation et détenu à parité par les deux sociétés. Cette étape permit la fusion des équipes commerciales, centralisées à La Courneuve. Une deuxième phase vit la filialisation des divisions Hélicoptères qui devinrent respectivement Eurocopter France et Eurocopter Deutschland détenues, de même qu'Eurocopter International, à 100 % par Eurocopter SA, cette dernière société étant possédée directement ou indirectement à 70 % par Aérospatiale et 30 % par DASA-MBB (93).

La raison de ce découpage peu équitable tient à la position relative des deux partenaires en termes d'actifs et de résultats : Aérospatiale contrôlait en 1991 33 % du marché mondial des hélicoptères (27 % en valeur) hors URSS et armée américaine, contre 8 % à MBB (4 % en valeur). Comme les actifs de cette dernière ne représentaient que 14 % de la nouvelle société, elle dut ajouter un droit d'entrée de 250 millions de marks. Le général de Gaulle ne disait-il pas déjà : « Quand, dans une certaine branche, il est opportun d'unir nos inventions, notre argent et nos compétences avec ceux d'un autre pays, nous devons choisir le pays (...) dont le poids ne nous écrasera pas. » (94) ? Le fait que l'entreprise choisie ne soit pas d'une taille supérieure à sa partenaire française est également important pour le maintien de la base technologique nationale. Il faut ajouter que la répartition du capital avantage apparemment Aérospatiale car, « vécue difficilement par les Allemands (...) elle paraît pleinement satisfaire le groupe français » (95).

La nouvelle société devient ainsi le numéro 2 mondial derrière l'américain Sikorsky, ce qu'était d'ailleurs déjà Aérospatiale. La raison de cette alliance, alors que rien ne semblait en montrer l'urgence ni la nécessité pour Aérospatiale, est expliquée par Jean-François Bigay, directeur de la division Hélicoptères d'Aérospatiale puis président d'Eurocopter : « La décennie 90 va voir le renouvellement des flottes militaires européennes. La grande bataille qui s'annonce est la raison d'être de notre alliance avec MBB (...) Ce sont des programmes comme il s'en présente une fois tous les vingt ans, des rendez-vous à ne pas manquer. » Il faut ajouter à cela la crise prévisible qui a depuis frappé le secteur et a fait baisser le chiffre d'affaires de 13 % en 1993 puis de 8,5 % en 1994, sans parler de la transformation du faible bénéfice de 1992 en déficits croissants les années suivantes (96).

b) Les avantages en découlant

L'un des reproches adressés à la coopération est que, soit chaque partenaire s'occupe de tous les stades de la fabrication, ce qui conduit comme il a été vu plus haut à des duplications coûteuses de production, soit il ne s'occupe que d'une partie et perd le savoir-faire dans les autres domaines. Une des solutions possibles (97) est cependant de sélectionner des tâches différentes pour chacune des coopérations auxquelles l'entreprise est partie prenante. Ainsi, la division Hélicoptères d'Aérospatiale - c'est-à-dire aujourd'hui Eurocopter France - réalise actuellement un hélicoptère complet si l'on additionne les parties du Tigre dont elle a la charge avec celles du NH 90. Ce n'est évidemment pas pleinement rationnel économiquement, puisque chaque tâche devrait automatiquement être attribuée à celui qui a le meilleur avantage comparatif, d'où une amélioration progressive de celui-ci. C'est pourtant un premier pas en attendant une division internationale du travail réellement optimale, laquelle est toujours freinée par la volonté de garder une certaine indépendance nationale qui serait écornée par l'abandon d'une polyvalence totale.

D'un autre côté, les maisons mères d'Eurocopter ont soigneusement évité les duplications de production, malgré la présence de trois sites en France et en Allemagne dont la fermeture rapide serait politiquement et socialement extrêmement difficile. C'est pourquoi, si la société garde les trois sites, elle les affecte à des productions différentes, les hélicoptères lourds à Marignane, les légers à Ottobrunn et certains composants comme les pales de rotor en matériaux composites à La Courneuve (98). Cette distinction lourd/léger était d'ailleurs déjà prédominante lorsque ces établissements étaient encore purement nationaux; c'est donc une réelle division internationale du travail qu'ont effectué Aérospatiale et MBB. Ainsi, la direction du programme d'hélicoptère P120 lancé en coopération avec la Chine et Singapour et de l'ALH est confiée à Eurocopter France, tandis qu'Eurocopter Deutschland s'occupe du B.O. 108 (99).

Il est vrai que deux chaînes d'assemblage subsisteront pour le Tigre, à Marignane et à Ottobrunn, ce qui supprime un certain nombre d'avantages de la coopération. Cependant, ce hiatus peut être considéré comme n'étant dû qu'à l'époque à laquelle le contrat de développement du Tigre a été signé, alors qu'Aérospatiale et MBB n'étaient que simples partenaires par le biais de leurs divisions Hélicoptères. Il ne devrait donc pas se répéter pour les coopérations postérieures. D'autres problèmes du même type, comme l'existence de modèles partiellement concurrents tels que le BK 117 de DASA et le Dauphin d'Aérospatiale, seront résolus avec le temps et le renouvellement progressif de la gamme.

De la même façon, Eurocopter a accentué les synergies existant entre ses deux filiales nationales - Eurocopter International étant la structure de commercialisation du groupe - en particulier en matière de recherche, et a créé une quatrième entité, Eurocopter Participations, chargée de regrouper et de rationaliser les filiales généralement à vocation commerciale des deux anciennes divisions Hélicoptères (100).

c) Le contrat de développement du Tigre

Le contrat bilatéral de développement du Tigre (101) a été signé pour dix ans en novembre 1989 entre Eurocopter Gmbh - une filiale d'Eurocopter maître d'oeuvre du Tigre basée à Munich - d'une part et les Etats français et allemand d'autre part. Il comprend la réalisation de la version de base de l'hélicoptère, du développement de l'équipement EUROMEP antichar et de l'intégration de EUROMEP et HAP-MEP dans la version de base, HAP-MEP étant le package spécifiquement réservé à la version Appui-protection du Tigre, donc financé par la France seule. La fabrication de cinq prototypes dédiés au véhicule et au système d'arme est aussi comprise dans l'accord.

Deux autres contrats ont été signés d'un côté entre la France et l'Allemagne et le consortium MTR, rassemblant MTU, Turboméca et Rolls Royce, chargé du moteur MTR 390, et de l'autre entre ces deux mêmes pays rejoints par la Grande-Bretagne et les divisions Missiles de MBB, Aérospatiale et British Aerospace pour le missile Trigat. Le programme Tigre entraîne donc réellement une collaboration poussée entre Aérospatiale et MBB que l'on retrouve dans la conception de l'appareil et de ses missiles, mais aussi entre d'autres grands noms du secteur sans compter la multitude de petites entreprises qui ont noué, pour pouvoir participer au projet comme sous-traitants, des liens transfrontaliers (102).

Un premier accord avait été signé qui stipulait un prix fixe, ce qui est assez inhabituel en Allemagne, le risque devant être partagé entre les Etats et les sociétés. Cependant, on s'aperçut rapidement que ce principe ne décourageait pas vraiment les dépassements de coûts dont les projets en coopération sont coutumiers, comme nous l'avons vu plus haut, et amoindrissait fortement la notion de prix fixe choisie dans le but de responsabiliser les industriels. Le contrat de 1989 entre Eurocopter Gmbh et les deux Etats fut donc approuvé selon le principe des prix fixes, soit 2.237 millions de marks 1986 (103), le risque étant totalement à la charge des industriels. En contrepartie, les Etats promirent à Eurocopter un quart de la marge de risque. Ce système a pour avantages d'une part pour les clients de ne pas craindre la dérive des prix, et d'autre part pour les industriels une plus grande visibilité, car « l'application de plus en plus systématique de prix plafonds et de prix fermes devrait faciliter une diminution des interventions des pouvoirs publics » (104), expliquait en 1988 Carl Peter Fichtmüller, vice-président de MBB et président du groupe Hélicoptères et avions militaires, c'est-à-dire éviter une redéfinition incessante des exigences des Etats. Le contrat est divisé en 111 étapes, pour chacune desquelles un financement minimum est assuré par les gouvernements, tout en étant susceptible de varier en fonction de la date de réalisation, ce qui encourage les industries à des efforts de productivité. Le prix unitaire, non fixé, est par contre en augmentation, les estimations passant de 9,3 millions de dollars pour le HAP et 11,58 millions pour le PAH-2/HAC en 1991 (105) à une fourchette de 11,5 à 12 millions de dollars pour le HAP/UHT et 13,5 à 14 millions pour le HAC en 1994 (106).

Selon le principe du juste retour, les deux Etats, qui prennent en charge la moitié du développement et commandent à peu près le même nombre d'hélicoptères, se sont répartis les tâches de manière équilibrée, Eurocopter France et Eurocopter Deutschland s'occupant chacun de 50 % du plan de charge (107).


(72) Ethan Barnaby KAPSTEIN : « International collaboration in armaments production : a second-best solution », Political Science Quarterly, vol. 106, n° 4, 1991-92, pp. 657-675; voir également Carl Peter FICHTMÜLLER in Assemblée de l'UEO, Commission scientifique et technique : La coopération européenne en matière de recherche et de développement dans le domaine des armements, colloque de Londres les 7 et 8 mars 1988, Paris, 1988, p. 71 - Retour au texte

(73) Bien qu'elle le soit moins politiquement : voir supra - Retour au texte

(74) Livre blanc sur la défense 1994, op. cit. (29), p. 187 - Retour au texte

(75) Jean-Paul HEBERT : « La dérive des prix : facteurs et natures du phénomène », Notes et études documentaires, avril-mai 1995, n° 5009-10, p. 148 - Retour au texte

(76) Le Monde, 26 janvier 1994 - Retour au texte

(77) Jean-Michel BOUCHERON, Programmation militaire 1990-1993, Paris, 1989, p. 281 - Retour au texte

(78) Jean-Paul HEBERT : op. cit. (75), p. 160 - Retour au texte

(79) N. AUGUSTINE : Augustine laws, Penguin Book, 1986 - Retour au texte

(80) « Vers une base industrielle et technologique de défense européenne », Les dossiers du GRIP, octobre-novembre 1993 - Retour au texte

(81) voir supra II A) - Retour au texte

(82) Pour les problèmes économiques de la coopération, voir Assemblée de l'UEO, Commission scientifique et technique : op. cit. (72); Jean-Michel BOUCHERON : op. cit. (77); Pierre DUSSAUGE : « Alliances et coopérations dans l'aérospatial et l'armement : bilan et perspectives dans le contexte de l'après-guerre froide », Economie appliquée, tome XLVI, n° 3, 1993, pp. 117-152; Bernard GARETTE & Pierre DUSSAUGE : Les stratégies d'alliance, Editions d'Organisation, Paris, 1995, 283 p.; Keith HARTLEY & Stephen MARTIN : « Evaluating collaborative programmes », Defence Economics, vol. 4, 1993, pp. 195-211; Jonathan B. TUCKER : « Partners and rivals : a model of international collaboration in advanced technology », International Organization, vol. 45, n° 1, hiver 1991, pp. 83-120 - Retour au texte

(83) Jean-Philippe DEBAS : « Pourquoi la France arnaque la France », Le Nouvel Economiste, n° 991, 7 avril 1995, p. 54 - Retour au texte

(84) M. MATTINGLY : « Conventional armaments co-operation : putting the cart before the horse », NATO Review, vol. 35, n° 5, octobre 1987, pp. 26-30 - Retour au texte

(85) Terme qui reste généralement en français dans les documents en langue étrangère étudiés - Retour au texte

(86) voir supra - Retour au texte

(87) Giovanni DE BRIGANTI : op. cit. (60) - Retour au texte

(88) Louis MARX : « La coopération européenne en matière d'armement permet-elle de pallier les diminutions des budgets de la défense ? », Les Cahiers du CHEAr, n° 29, mars 1995, pp. 103-113 - Retour au texte

(89) Sur les questions de structure industrielle, voir Bruno CLAVERIE : La gestion des consortiums européens, PUF, Paris, 1991, 226 p.; Pierre DUSSAUGE, op. cit. (82); Pierre DUSSAUGE & Bernard GARETTE : « Industrial alliances in aerospace and defence : an empirical study of strategic and organizational patterns », Defence Economics, vol. 4, 1993, pp. 45-62; Bernard GARETTE & Pierre DUSSAUGE, op. cit. (82) - Retour au texte

(90) Bernard GARETTE & Pierre DUSSAUGE, op. cit. (82) - Retour au texte

(91) Bruno CLAVERIE : La gestion des consortiums européens, PUF, Paris, 1991, p. 160 - Retour au texte

(92) En ce qui concerne la création d'Eurocopter, voir « Eurocopter International est né », Air & Cosmos, n° 1331, 13-19 mai 1991, p. 23; « Hélicoptères : nouvel envol », Les Echos, 10 juin 1991; Paul BEAVER : « The Jane's interview : Jean-François Bigay », Jane's Defence Weekly, vol. 18, n° 17, 24 octobre 1992, p. 40; Charles BICKERS : « Helicopter firms move closer », Jane's Defence Weekly, vol. 15, n° 20, 15 mai 1991, p. 852; Olivier DARRASON & Yves BONNET : L'Europe de l'hélicoptère : le NH 90, rapport d'information parlementaire n° 1120, Paris, 1994, 71 p.; Gerard TURBE : « Eurocopter leaps into second place », International Defense Review, vol. 25, n° 4, 1° avril 1992, p. 379 - Retour au texte

(93) voir annexe 7 - Retour au texte

(94) Cité dans Robert GILPIN : France in the age of the scientific state, Princeton University Press, Princeton, 1968, p. 377 - Retour au texte

(95) « Hélicoptères : nouvel envol », op. cit. (92) - Retour au texte

(96) Aérospatiale, Rapports 1992, 1993 et 1994 - Retour au texte

(97) voir annexe 8 - Retour au texte

(98) Bernard GARETTE & Pierre DUSSAUGE, op. cit. (82) - Retour au texte

(99) Jean-Michel BOUCHERON : Paix et défense, Paris, 1992, p. 511 - Retour au texte

(100) Aérospatiale, Rapport 1993, p. 32 - Retour au texte

(101) Sur le contrat, voir Didier DAOUST : « Face-à-face entre Américains et Européens », Avianews International, mai 1991, pp. 20-23; Gilbert DESEVEAUX : op. cit. (31); Philippe GRISON : op. cit. (31); Manuel TORRES & Klaus SCHYMANIETZ : « The Tiger : an example of fruitful collaboration », L'Aéronautique et l'Astronautique, n° 148-149, mars-avril 1991, pp. 98-100; Artur VOLMERIG : « Tiger on the loose : PAH-2 rolled out », op. cit. (31) - Retour au texte

(102) Philippe GRISON : op. cit. (31), p. 39 - Retour au texte

(103) Manuel TORRES & Klaus SCHYMANIETZ : op. cit. (101) p. 98 - Retour au texte

(104) Assemblée de l'UEO, Commission scientifique et technique : op. cit. (72), p. 74 - Retour au texte

(105) Didier DAOUST, op. cit. (101) p. 20 - Retour au texte

(106) Source : DMS/Forecast 1994 - Retour au texte

(107) Cette répartition est intégralement détaillée en annexe 9 - Retour au texte


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