21 mai 2000

Je suis en train de renaître. Lentement mais sûrement.

Mes belles fesses juvéniles (comme se plaisait à les appeler mon ex-copine) sont toutes chaudes et d'une belle teinte dorée à la limite du coup de soleil.

Beaucoup de choses à dire. Par où commencer ? Ordre chronologique, épargnes-moi une décision difficile...

Hier. Magnifique matinée, soleil radieux. Mon confrère de travail se pointe chez moi vers 9h. Après une tournée exhaustive de mon magnifique environnement extérieur, et une beaucoup plus succincte de mon bordel intérieur, nous partons à l'aventure. Quelques heures plus tard, nous arrêtons la voiture en bordure d'une route gravelée et nous en descendons.

Autour de nous, l'atmosphère est chaude, calme, douce... Aucune brise ne souffle, le bleu immaculé du ciel remplit tout l'espace laisser libre par les têtes des épinettes. On n'entend que le chant des oiseaux et, au loin, le son de la rivière qui coule. Nous empruntons un petit sentier qui nous mène à notre site de pêche et là, un spectacle magnifique se dévoile à nos yeux.

Les eaux de la rivière, gonflées par la récente fonte des neiges, coulent sur une épaisseur d'une dizaine de centimètre à peine sur une surface de granite parfaitement uniforme qui hurle "glissade d'eau !" avant de se jeter dans un bassin bouillonnant et de tourner à angle droit pour se continuer sous forme d'une série de petits rapides. À travers le bois, nous longeons le cours d'eau jusqu'à la fin de ces rapides où nous découvrons un bassin plus calme qui semble idéal pour lancer nos lignes. Mon ami me fait remarquer, devant nous de l'autre côté de la rivière, ce qui ressemble à un sentier de castor, et nous découvrons effectivement une dizaine de mètres à notre gauche la hutte de boue et de branchage qu'ils ont construit sur la rive. Comme il n'y a aucun barrage à l'horizon, la présence de cette hutte nous permet donc de conclure que l'eau est suffisamment profonde pour ne pas geler jusqu'au fond en hiver, et donc assez profonde pour lancer nos lignes sans risquer d'accrocher nos hameçons dans le fond trop souvent. Eau claire et profonde, bien oxygénée par les rapides en amont, quelques gros blocs de granite bien placés et suffisamment avancés dans la rivière pour nous permettre de lancer nos lignes sans nous accrocher dans les arbres, c'est décidé: nous avons trouvé notre "spot".

Je compris alors que j'avais trouvé un autre endroit à ajouter à ma liste déjà longue de petits coins de nature paradisiaque.

Les six heures qui suivirent furent magiques. Tout le long de l'après-midi, je m'arrêtais à intervalles réguliers pour m'asseoir sur les rochers et contempler le paysage devant mes yeux, que la progression du soleil dans le ciel transformait d'heure en heure. Mon oeil de photographe était comblé, mais pas mon appareil photo, qui lui était malheureusement demeuré à la maison. Et pour couronner le tout, pas un seul insecte piqueur n'est venu gâcher cette journée inoubliable.

Un moment donné, au milieu de l'après-midi, un peu blasé par l'obstination des truites qui refusaient de mordre, mon regard se porta vers la hutte de castor et je décidai de m'en approcher pour voir s'il y avait quelqu'un à la maison. Je me couchai donc sur l'impressionnante structure et tendit l'oreille, espérant capter quelque bruit qui trahirait la présence du ou des locataires. Mais ce que j'entendis, ce fut la voix de mon compagnon, qui pointait du doigt le segment de rivière où je me trouvais. Et c'est alors que j'aperçu, dans l'eau devant moi, les silhouettes à demi submergées de deux magnifiques castors qui nageaient nerveusement de long en large. De toute évidence ils avaient entendu la commotion provoquée par ma présence au dessus de leur hutte et étaient sorti pour voir ce qui se passait. Ne désirant pas les importuner davantage (après tout, ils étaient chez eux et nous étions les intrus) je retournai donc à mon site de pêche et ils eurent tôt fait de disparaître sous l'eau pour regagner le confort et la sécurité de leur logis.

Voilà ce qui me manquait. Voilà ce que j'avais attendu pendant des mois, passés à endurer les longues nuits et la froideur de l'hiver.

Le voyage de retour fut tout aussi agréable, le soleil couchant rehaussant de sa chaude lumière les paysages magnifiques de la région portneuvoise. Nous nous sommes arrêter en chemin pour manger et jaser de la splendide journée que nous venions de passer. Je suis finalement arrivé chez moi, un peu avant 22h, complètement serein et détendu, et je me suis dirigé tout droit vers mon lit.

Aujourd'hui. Beaucoup moins de choses à raconter. Je me suis levé tard ce matin, après une des meilleures nuits de sommeil que j'ai connu depuis fort longtemps, et j'ai passé les deux premières heures de l'après-midi à offrir mon corps aux merveilleuses caresses de la brise, du soleil et de l'eau de mon lac. Encore une fois la journée était idéale, la température parfaite. l'ambiance sonore était composée de trop de différents chants d'oiseaux pour être dénombrés, assaisonnées par les petits cris perçants de quelques grenouilles audacieuses qui croient que la chance supplémentaire d'attirer une femelle en faisant entendre leur voix en premier contrebalance le risque plus élevé de prédation en plein jour. J'ai passé le reste de la journée à taquiner le poisson dans une rivière à cinq minutes de chez moi avant d'aller rendre visite à mes parents.

Je suis tout chaud en ce moment. Même si elle en est légèrement irritée, ma peau me remercie malgré tout de la merveilleuse expérience sensuelle que je lui ai fait vivre aujourd'hui.

Ce ne sera pas la dernière. L'été ne fait que commencer.


[jour précédent] [retour] [jour suivant]