1 octobre 2000

Mon angoisse se précise. Elle semble prendre forme. Du moins je le pense. Il se peut fort bien que je me trompe. J'espère seulement être sur la bonne voie.

Premièrement: J'ai peur de l'ennuie. C'est évident. Pas tellement de la solitude, mais plutôt de l'ennui. Et comme ces temps-ci je m'ennuie quand je suis seul, alors forcément je crains les moments de solitude. Mais la perspective d'une solitude bien remplie d'activités que j'aime et qui me passionne m'effraie moins. Je ne suis pas encore sûr à cent pour cent de cela. C'est encore flou, mais ça se précise.

Deuxièmement: J'ai peur de Copine. Peur que sa peine et sa souffrance déteignent sur moi. Peur qu'elle me demande encore de jouer auprès d'elle un rôle que je n'ai pas envie de jouer, et qu'elle essaie de me culpabiliser pour ce refus.

Troisièmement: J'ai excessivement peur du temps qui passe. Peur de passer à côté de la vie, peur que chaque seconde que je passe à m'ennuyer soit une seconde perdue, et soit représentative du temps qu'il me reste dans cette vie. Peur de ne jamais connaître l'amour, de ne jamais pouvoir vivre le plaisir de serrer dans mes bras une femme que je désire et que j'aime. Peur de me retrouver vieux et seul, et d'avoir des regrets. J'ai réellement très très peur d'avoir des regrets vers la fin de ma vie, et d'être à la dernière minute pour me décider à vivre, mais de ne plus avoir ni les moyens, ni l'énergie, ni la santé pour le faire.

Quatrièmement: L'état dans lequel je suis est le résultat de plusieurs années (pratiquement toute ma vie en fait) de schémas de pensée néfastes que je me suis incrusté dans le cerveau. Je m'en rend bien compte maintenant.

J'ai dit que les choses se précisaient, pas que j'allais aimer ce que je vois maintenant plus clairement...

Mais je suis capable de regarder mon angoisse dans les yeux, et d'après moi cela constitue déjà un progrès immense.

Mais elle me fait toujours peur, la vache.

Toutes ses réflexions, je les ai eu aujourd'hui. J'ai passé la journée avec Lola. Je suis allé la chercher tôt en après-midi et nous sommes allé marcher en forêt. Nous avons parcouru les mêmes sentiers qu'il y a neuf ans de cela. À cette époque, j'étais en dépression. Et comme à cette époque, elle m'a prise la main. Et nous avons marché ainsi, main dans la main. Pas comme des amoureux (même si cela devait être perçu ainsi par les autres marcheurs que nous croisions), mais comme des gamins, comme le ti garçon et la tite fille qui se tiennent par la main en revenant de l'école, à un âge bien avant que l'éveil de la sexualité commence à jeter la confusion dans leur coeur et leur corps. Nous nous tenions par la main, pour le seul plaisir de nous toucher, d'avoir un contact entre nous, de nous sentir, et pas seulement de nous savoir, là l'un pour l'autre. Sa seule présence me réconfortait tellement. Mon angoisse s'était envolée. Je redécouvrais le plaisir de m'émerveiller devant un champignon, devant un arbre plus que centenaire, devant un petit écureuil, devant ces odeurs de feuilles mortes qui emplissaient l'air. Tellement que je devais lui donner l'impression que je portais peu d'attention à ses confidences. Pardonnes-moi Lola. J'avais l'impression que les neuf ans qui séparent ces deux promenades en forêt n'existaient pas. Notre amitié est comme un instant présent qui se prolonge depuis des années, et qui, je l'espère, se prolongera encore et encore.

J'en ai vraiment marre de ne pas être bien, de ne pas être heureux, de ne pas vraiment pouvoir jouir de la vie, et ce malgré toutes les bonnes choses et les personnes extraordinaires qui m'entourent.

Était-ce l'été des indiens aujourd'hui ? Non. Trop tôt. Pas avant la deuxième semaine d'octobre. Et probablement plus tard cette année, étant donné que tout semble arriver plus tard.


[jour précédent] [retour] [jour suivant]