22 septembre 2000

Révélation aujourd'hui.

J'aime bien quand mes longues périodes de réflexion finissent par aboutir sur quelque chose de concret. Pas vous ?

En fait, je crois bien qu'en fait, je me suis simplement avoué à moi-même quelque chose que je savais depuis longtemps.

Et je tiens pour preuve le fait que j'hésitais même à en parler ici.

Cela concerne ma relation avec Copine. Je vais essayer d'être le plus clair possible tout en préservant son intimité.

Copine et moi nous sommes connus il y a quatre ans. Notre relation fut platonique durant les trois premières années. Nous nous entendions excessivement bien et partagions une passion commune pour la nature et le plein-air. C'était devenu très clair très tôt au début de notre relation que nous ne formerions pas un couple. Pas que nos corps ne nous plaisaient pas mutuellement, mais il n'y avait tout simplement pas ce déclic, cette espèce de chimie entre nous, et nous en étions tous les deux conscients, ce qui était très bien puisque nous étions ainsi sur la même longueur d'onde. En fait notre relation se situait davantage au niveau d'une relation frère-soeur.

Il y a un peu plus d'un an, nous avons commencé à échanger très occasionnellement des faveurs sexuelles. C'était bien au début, et nous semblions tout deux savoir à quoi nous en tenir.

Mais après quelque temps, il devenait évident que Copine commençait à avoir des attentes que je n'étais pas prêt à satisfaire. Je commençai donc à ressentir un malaise face à elle. Je refusais ses invitations à aller chez elle, et lorsque j'y allais, ma visite était presque toujours accompagnée d'une invitation à rester à coucher. La plupart de ces invitations étaient sans doutes tout à fait innocente (il lui était souvent arrivé de m'offrir de rester à coucher lorsque j'avais un peu trop but et n'était pas en état de prendre le volant), mais elles me mettaient quand même mal à l'aise et je les refusais.

Lentement, insidieusement, un malaise a commencé à grandir en moi concernant Copine. Je refusais souvent ses invitations, j'hésitais à faire des activités seul avec elle, je suggérais souvent qu'une de nos connaissances communes nous accompagne. Loin d'être aveugle, elle sentait bien que quelque chose se passait. Lentement, les phrases à double sens, les blagues douteuses, les allusions, les reproches à peine déguisés commencèrent à apparaître dans son discours. Je faisais de mon mieux pour apaiser ses craintes. Après tout, je l'aimais encore beaucoup, elle était toujours pour moi une excellente amie avec qui je partageais plein de choses.

Mais Copine est une femme très vulnérable émotionnellement. Du moins c'est ainsi que je la perçois. Il lui est arrivé très souvent d'éclater en sanglot à la suite d'un commentaire tout à fait banal de ma part, et elle ne se consolait qu'après de longues explications de ma part pour clarifier le fond de ma pensée. Aussi, j'étais très hésitant à lui exprimer clairement l'origine de mon malaise face à notre relation.

Arriva un évènement qui, je l'espérais, allait m'éviter cette lourde tâche. Copine a rencontré un homme. Elle vécu le parfait amour pendant plusieurs semaines. Elle qui avait tant de difficulté à faire confiance aux hommes, pour des raisons sur lesquelles je ne m'attarderai pas, semblait enfin filer un parfait bonheur.

Un soir, le téléphone sonne, assez tard. C'était Copine, en larmes et complètement démolie. Son copain avait eu le coup de foudre pour une autre femme et l'avais quitté. Ça me brisait le coeur de la sentir si malheureuse, et je ne savais que dire ni que faire. Mais en même temps je ressentais de la colère, de la rage de l'entendre brailler comme une fillette hystérique pour une relation de quelques semaines à peine. Et en plus je lui en voulais. Je lui en voulais de me faire subir à moi sa souffrance, de m'imposer un rôle que je n'avais jamais accepté de jouer auprès d'elle, de venir me drainer mon énergie. Vous me trouverez sans doute égoïste et froid d'avoir réagi ainsi face à une amie dans le besoin, mais il y a beaucoup d'autres choses que vous ne savez pas.

Après avoir raccroché, je retournai me coucher (son téléphone m'avait réveillé). Je tournai longtemps dans mon lit avant de m'endormir. Toutes ces émotions se brassaient dans ma tête. La douleur de voir souffrir ma grande amie, ma colère face à son immaturité, ma culpabilité de ne pas me sentir un "vrai ami" pour elle, etc.

Tout cela se passait en mars dernier.

Lorsque j'ouvris les yeux le lendemain matin, je ressentis immédiatement ce malaise, ce mal de vivre que je connaissais bien, l'ayant déjà vécu neuf ans auparavant.

J'étais en dépression.

C'était la goutte d'eau qui avait fait déborder le vase. À bien y penser, il fallait vraiment que je me ferme les yeux pour ne pas voir immédiatement la relation entre ma dépression et la crise que m'avait faite Copine la veille.

Copine finit par se remettre de sa peine, et moi de ma déprime. Notre relation redevint plus ou moins normale. Je mis fin au volet sexuel de notre relation (ce qui était davantage une formalité puisqu'il ne s'était plus rien passé entre nous depuis sa rencontre avec son copain).

Mais notre relation n'est plus la même. Il y a toujours ce non-dit entre nous. Je ressens encore ce malaise face à elle, cette hésitation à faire des activités juste tous les deux. Elle me lance encore régulièrement ses remarques à double sens, me parlant souvent des gens qu'elle a rencontré dans sa vie qui se servaient d'elle juste pour faire la connaissance de ses amies. Et moi, j'ai peur de la blesser en lui expliquant mes craintes, peur qu'elle interprète tout de travers, et je me sens mal de garder tout ça en dedans, et coupable de ne pas être honnête avec elle. Elle se sert encore de moi, elle me draine encore mon énergie avec tous ses problèmes, et je ne veux plus vivre cela.

Copine et moi sommes comme deux arbres qui penchent dangereusement, et qui prennent appui l'un sur l'autre pour se soutenir. Le problème, c'est que nous penchons tous les deux dans la même direction...

C'est ridicule. Nous ne pouvons jouer ce rôle l'un pour l'autre. Je viens de le comprendre, et elle doit le comprendre elle aussi.

Je gardais tout cela en moi depuis plus d'un an.

Juste de me l'avouer à moi-même, et de vous en parler dans cette page, je me sens déjà mieux. Comme si une lourde charge était soudainement retirée de mes épaules.

J'ai pris la décision de lui en parler. Dès notre prochaine rencontre. Il ne sert à rien d'essayer de ménager les susceptibilités de nos amis. La franchise, l'honnêteté sont les seules fondations sur lesquelles on peut construire des relations solides et durables. Je garde ça sur le coeur depuis trop longtemps. Ça me gruge et ça mine notre amitié. J'aime Copine, je tiens à elle et je veux retrouver le plaisir que nous avions à partager nos passions.

Est-il naïf de ma part de nourrir l'espoir que cet aveu à elle et à moi-même puisse finalement me libérer de ce mal de vivre qui me talonne depuis des mois ?


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