4 avril 2001

J'ai eu une révélation aujourd'hui.

Et oui. Une autre.

De combien d'autres révélations aurai-je encore besoin pour me sentir bien dans ma peau ?

Et ne riez pas. C'est sérieux pour moi.

Je crois que j'ai compris, du moins en partie, pourquoi j'envie tant la vie des autres.

C'est que j'ai l'impression que si je ne sais pas faire ou que je n'ai jamais fait toutes ces choses que font les autres, alors je suis indigne d'eux. Je ne regarde même pas si j'aimerais savoir ou faire ces choses, si ça m'intéresse ou non. Tout ce que je vois, c'est que je ne le sais pas ou ne les ai pas faites, et qu'eux, ils les savent et les ont faites.

Dès qu'une personne dans mon entourage est allé dans un pays où je ne suis pas allé, dès qu'elle a lu un livre que je n'ai pas lu, dès qu'elle a vécu une expérience de vie qui m'a échappé, automatiquement, je me sens inférieur à elle.

Il m'est impossible de concevoir qu'une personne qui a beaucoup voyagé durant sa vie puisse s'intéresser à moi qui n'ai presque jamais voyagé. Tout aussi impossible de concevoir qu'une personne très érudite puisse porter le moindre intérêt à ma personne ou à mes écrits. Et encore plus impossible de croire qu'une personne avec un riche passé amoureux et sexuel puisse s'attacher à un nul comme moi dans ce domaine.

Voilà pourquoi plus je lis, plus je regarde la vie des autres, plus j'ai l'impression que ma propre vie est nulle à chier, plus j'ai l'impression d'avoir gaspillé les quarante premières années de ma vie.

Y a-t-il un(e) psychologue dans la salle qui pourrait m'expliquer d'où me vient cette façon totalement relativiste de me définir ? Est-ce à cause d'elle que, sans le regard des autres, j'ai l'impression de ne plus exister, que chaque instant non partagé est un instant qui n'a jamais eu lieu, faute de témoin autre que moi-même ?

Plusieurs de mes lecteur(trice)s ainsi que les gens qui m'entourent ne cessent de me faire remarquer à quel point j'ai changé depuis un an, à quel point j'ai progressé dans mon bien-être et mon épanouissement personnel. Sans vouloir me dénigrer et minimiser le travail que j'ai pu accomplir sur moi-même à date, je crois qu'il serait prématuré d'affirmer que je suis sorti du bois.

Oui, je me sens moins nul qu'avant. Mais pas parce que j'ai vraiment progressé sur le plan de mon estime de moi. C'est plutôt parce que je suis sorti de ma carapace et que je me suis entouré de gens qui m'apprécient, qui me le disent et qui me renvoient une image positive de moi-même. Encore une fois, je me définis en fonction du regard des autres. La seule différence est que ces temps-ci, le regard des autres m'est favorable.

Je n'ai pas vraiment appris à nager. J'ai simplement pilé sur mon orgueil et accepté les bouées qu'on me tendait, l'aide qu'on m'offrait. Si ces bouées venaient à disparaître, je me noierais aussi sûrement et aussi inexorablement qu'il y a un an.

Cela m'amène même à remettre en question la sincérité de l'amour que je porte à ceux qui m'entourent.

Pourquoi est-ce que j'aime Copine, Lolita ou même Nikita ? Est-ce à cause de ce qu'elles sont, ou à cause de l'intérêt qu'elles me portent, et qui me fait sentir que je vaux quelque chose, que je suis quelqu'un en leur compagnie ?

Et le fait que je ressente toujours à la fois plaisir et douleur lorsque j'aime quelqu'un. Cela viendrait-il du fait que mon inconscient, beaucoup moins dupe que moi, me laisse clairement sentir le poids de la culpabilité que je ressens parce que je n'aime pas les autres pour des raisons nobles et désintéressées ?

Pourquoi est-ce que je vous aime, vous tous et toutes que, pour la plupart, je ne connais pas ? N'est-ce pas seulement parce que vous m'aimez vous, que vous me le dites souvent, que vous me dites que mes écrits vous touchent, font une différence dans des vies autres que la mienne et donc acquièrent ainsi une valeur, une raison d'être ?

Ne suis-je donc, au fond, qu'un égoïste incapable de ressentir un véritable amour, un dépendant affectif prêt à dire n'importe quoi (et à y croire) à n'importe quelle personne qui lui offrirait une image positive de lui-même au lieu du reflet de sa propre nullité ?

Pas facile à contempler tout ça. Pas facile...


J'avais vraiment besoin d'une journée comme aujourd'hui. Comme je l'ai dis souvent ici, je carbure au soleil, et la toute petite heure passée dehors ce midi, d'abord à savourer de la bonne tire sur la neige que nous avait préparé les membres de notre club social, puis à prendre une petite marche au soleil en compagnie de cette collègue avec qui je m'entend si bien, a été suffisante pour m'insuffler une énergie nouvelle. Sérieusement, durant toute la deuxième moitié de la journée, je pouvais presque affirmer que je me sentais bien.

Suite aux derniers commentaires de mes lectrices reçus ces derniers jours, j'aimerais faire ici une petite précision.

En fait, j'aimerais plutôt vous rassurez. Et je m'adresse surtout ici à celles qui n'écrivent pas de journal intime, online ou autre, car les autres comprendront très bien ce que je veux dire.

Si l'on se fit strictement à mes écrits, on pourrait avoir tendance à croire que je broie du noir du matin au soir, ou que je suis sur le bord du suicide. Mais vous savez, ce n'est absolument pas le cas. Souvent, un de mes billets ne reflète qu'un état d'âme ressenti durant une toute petite partie de la journée. C'est un instantané, un cliché d'un moment précis qui n'est pas nécessairement représentatif de la journée entière. Ce que j'essais de dire en fait, c'est que généralement je me sens beaucoup mieux que ce que mes pages pourraient laisser croire. Beaucoup de belles choses m'arrivent ces temps-ci. Je passe quelques bons moments avec des amies que j'apprécie et qui me font du bien, les premiers signes du printemps commencent à réchauffer mon coeur et mon âme, je commence à laisser libre cour à des aspects de ma personnalité que j'avais enfouis au fond de moi durant trop longtemps, etc. Bien sûr ces bons moments sont encore trop souvent souillés par le mal de vivre, l'angoisse et les interrogations de toutes sortes, et souvent mes écrits sont simplement le reflet de mon impatience face à mon incapacité à transcender ces angoisses et à en comprendre l'origine.

Et même si les évènements des derniers jours, surtout en ce qui a trait à Lectrice, m'ont frappé un peu dur, je peux vous garantir que l'assurance que j'ai acquise au fil des mois me permettra de retomber sur mes pattes. Je crois en l'avenir, je crois en ma capacité à prendre enfin le contrôle de ma vie, et je me nourris d'un espoir que je refuse tout simplement de perdre.

Alors voilà, je voulais juste calmer quelques unes de vos inquiétudes. Merci de vos messages à mon endroit, merci de votre compassion. Je ne vous dirai jamais assez à quel point votre présence me fait du bien. :-)

Dans un autre ordre d'idée: Je ne sais pas si c'est l'effet du soleil ou de la tire d'érable (peut-être le mélange des deux), mais j'ai vraiment très envie de sexe ce soir... C'est dans des moments comme ceux là où j'apprécierais énormément d'avoir une amante.

Que vais-je faire ?


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