27 février 2001

Billet "sur le vif" ce soir. Vous vous en douterez, cela concerne Consoeur.

Elle était déjà à la salle à dîner ce midi, seule à sa table. Je me suis avancé vers elle, souriant, mon plateau à la main. Le message que m'ont lancé son visage sans expression, son silence, et le très bref regard de glace qu'elle m'a lancé était très clair: "Ne m'approches pas, ne me parles pas, ne viens pas t'asseoir à côté de moi, laisses-moi tranquille".

J'en suis littéralement resté figé sur place pendant quelques secondes, comme un beau con, pour finalement tourner les talons et aller m'asseoir à une autre table avec quelques autres personnes. La seule place libre lui faisait face, mais je n'osais même plus diriger mon regard vers elle.

Quelques autres membres de notre petit groupe habituel entrèrent dans la pièce quelques minutes plus tard pour se diriger vers sa table. Ils furent aussitôt accueillis par une salutation enjouée et un large sourire de sa part.

Vers la fin du dîner, les collègues avec qui j'étais assis avaient quitté et j'étais seul à ma table. Les seules autres personnes présentes dans la salle étaient assises avec Consoeur. Leur conversation allait déjà bon train depuis un bout de temps, et quelques-uns d'entre eux, voyant bien que quelque chose clochait, essayaient de m'inclure dans la conversation. Même Consoeur, après avoir passé un quelconque commentaire, semblait cette fois me regarder dans les yeux comme pour s'enquérir de ma réaction. Mais putin, à quel jeu joue-t-elle ? Elle me traite comme un lépreux lorsque je suis seul avec elle, mais s'empresse de feindre l'innocence et de sauver la face devant les autres dès que nous sommes en groupe ?

Mes collègues commençaient bien à se douter que quelque chose n'allait pas. Et au lieu de se taire, ces cons se sont mis à me lancer à la blague des commentaires du genre: "Ben voyons Laqk, t'es donc bien tranquille ce midi ! Tu ne parles pas ?". Et moi, qui était en train de fondre dans ma chaise, je ne pouvais que me dire intérieurement: "Bordel de merde ! Allez-vous fermer vos saletés de gueules bandes d'imbéciles !? Êtes-vous trop aveugles pour voir ce qui se passe ?". Après quelques minutes, n'y tenant plus, je n'eus d'autre choix que de me lever en annonçant à tous que l'heure de retourner au travail était arrivée pour moi. Je saluai donc tout le monde et quittai la pièce à la hâte, sans même attendre leurs réponses.

Je ne sais pas pourquoi elle me traite de la sorte, pourquoi elle voit en moi l'incarnation de tous les hommes qui l'ont fait souffrir par le passé. Une chose est sûre: je veux qu'elle cesse. Qu'elle cesse de me manquer de respect de la sorte, de me traiter comme si j'étais le plus rejet des rejets, de toujours me prêter des intentions hypocrites et malveillantes, de toujours percevoir dans le plus innocent de mes commentaires une tentative de manipulation ou de déception. Je ne suis pas la personne méchante que ses agissements laissent présumer qu'elle voit en moi, et je ne tolèrerai plus qu'elle me traite comme tel. Je ne sais pas quel genre de vécu et d'expérience douloureuse elle a subit par le passé, mais je refuse de continuer à en faire les frais.

Ce soir, en montant au laboratoire pour remplir les bidons de l'humidificateur comme d'habitude, je m'étais bien dit que cette fois c'en était trop, que j'allais la confronter dans son local et résoudre (tenter, du moins) cette situation abracadabrante et intolérable qui dure depuis plus de deux ans maintenant. Et advienne que pourra. Bien entendu, une fois sur place, j'ai chié dans mes culottes et suis ressorti sans dire mot. Alors je me résignerai donc, une fois de plus, à utiliser le courrier électronique. Une fois de plus, ce sera moi qui ferai les premiers pas. Mon message sera clair. Je n'espère plus rien d'elle: sexe, amour, amitié, ni même une simple camaraderie. Rien. Cependant, j'exigerai qu'elle me traite avec le minimum de respect auquel j'ai droit en tant qu'être humain, et j'exigerai également que nous puissions continuer à entretenir une relation professionnelle appropriée, ce à quoi nous sommes obligés par nos emplois respectifs. Je lui décrirai également en détail toutes les montagnes russes émotionnelles par lesquelles elle m'a fait passé depuis les deux dernières années. Au moins, pour l'un d'entre nous, la situation sera finalement éclaircie.

Je n'ai plus peur des conséquences. Je n'ai plus peur d'aggraver la situation entre nous. Pour la simple raison qu'elle ne peut plus être pire. Nous avions toujours réussi malgré tout à maintenir entre nous une relation de travail correcte, mais maintenant, à la lumière de ce qui s'est passé aujourd'hui, même cela est en péril. Et ça, je ne peux le tolérer. Ma conscience et mes responsabilités professionnelles exigent qu'il en soit autrement. Et si elle est elle-même aussi professionnelle que je le crois, elle ne pourra faire autrement qu'être de mon avis.

Bon. Maintenant je vais aller réinstaller mon ordinateur au complet. Ça me défoule. Comme prendre ma voiture et faire une longue, très longue ballade.


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