25 mars 2001

Beau cadeau hier soir. Il y a de petites pannes de courant ici plusieurs fois par jour depuis cette chute de neige lourde et fondante. Cela ne me dérange plus depuis que j'ai eu la bonne idée de brancher mon ordinateur sur un UPS.

Je venais de me mettre au lit hier soir quand une nouvelle panne de courant se produisit. Cette fois elle se prolongeait, et le signal sonore strident qu'émettait mon UPS pour me signaler la panne m'empêchait évidemment de dormir. Comme je n'allais plus me servir de mon ordinateur du reste de la nuit de toute façon, je décidai de me lever pour tout éteindre. De retour sous mes couvertures, je pris soudainement conscience du silence qui m'entourait. Plus de bruit de ventilateur, plus de pompe à eau d'aquarium, plus de bruit d'humidificateur... le silence, le silence total. Cela faisait un bout de temps que je ne m'étais pas permis de savourer ainsi le silence. J'ai très vite sombrer dans un profond sommeil.

Mais je me suis malheureusement réveillé ce matin avec un mal de tête qui m'a accompagné toute la journée et qui m'embête encore un peu au moment ou j'écris ces lignes. Encore le résultat d'avoir passé deux jours complets devant mon petit écran d'ordinateur (celui à mon travail est plus grand et de meilleure qualité et ménage un peu plus mes yeux). L'unique bière d'hier soir a dû tout déclencher.

Petit échange sur le "chat" cet après-midi avec Lectrice. Le chat n'est peut-être pas sorti du sac, mais il se pointe le nez en tout cas. Après lui avoir mentionné que j'étais très allumé par certains écrits qu'une de mes lectrices m'a fait découvrir, elle me mentionne qu'il y a certaines choses qu'elle aime mieux ne pas savoir. Puis, elle ajoute timidement que, si nous sommes mutuellement dérangés à la pensée des activités érotiques de l'autre, c'est peut-être un signe que des sentiments commencent à naître entre nous...

Sentiments ?

J'ai bien lu "Sentiments" ?

Je lui demande candidement si cela pose problème, et elle me répond, après un long délais:

- Ça me fait peur. Je pensais que mon coffre à sentiment était bien verrouillé depuis longtemps. Apparemment, tu en as trouvé la clé...

Je ne pouvais m'empêcher d'arborer un large sourire à la lecture de ces quelques mots. Mais en même temps, ils faisaient naître un certain malaise. Lectrice a éveillé des choses en moi depuis quelque temps. Beaucoup de choses. Et je me sens presque coupable de ressentir ces choses, mais pas seulement pour elle. Par exemple, j'ignore si quelque chose a changé dans le ton ou la saveur de mes écrits ces dernières semaines, mais quelques-unes de mes lectrices (dont certaines m'écrivent depuis fort longtemps) ont commencé à flirter ouvertement avec moi.

Et vous savez quoi ? Ça me plait. Beaucoup même.

Autre exemple: cette autre lectrice à laquelle je suis allé rendre visite en janvier. Je pense encore à elle régulièrement. Je ressens encore cette complicité et cette ouverture que nous partagions. Quand je ferme les yeux, je revois encore des images de ces moments passés à jaser, à nous ouvrir, à nous offrir l'un à l'autre nus autant d'âme que de corps. Et j'ai toujours envie de la revoir, même si je sens dans le ton de ses courriels qu'elle cherche à me faire comprendre avec tact qu'elle préfère que les choses en reste là entre nous.

Quand à ces autres lectrices, je réalise que si je me permettais de leur proposer une rencontre, certaines d'entre elles seraient sûrement tentées d'accepter. Bien sûr, dans aucun cas je ne m'attend à ce qu'un éventuel rendez-vous avec l'une d'entre elles ne mène à autre chose qu'une simple camaraderie, mais je me plais néanmoins à fantasmer, à me faire dans ma tête de petits scénarios coquins.

Mais là où le bas blesse, c'est que je ne peux m'empêcher de ressentir une certaine culpabilité face à tout cela.

Pourquoi ? À cause de Lectrice, bien sûr.

Je sais qu'il est ridicule de parler d'exclusivité entre nous, d'autant plus que je sais très bien qu'elle ne se gène pas pour continuer ses propres activités sexuelles. Elle-même d'ailleurs m'affirme qu'elle n'a aucun droit d'exiger de moi une quelconque forme de fidélité. Et c'est aussi bien ainsi, car en ce qui me concerne, comment pourrais-je être infidèle à une femme envers qui je n'ai pas encore eu l'opportunité d'être fidèle ?

N'empêche que je me sens mal là-dedans. Je me sens mal d'avoir le goût de flirter, de séduire d'autres femmes alors que c'est Lectrice qui me fait le plus vibrer, que c'est elle qui fait naître toutes ces émotions en moi. Je crois que mes nombreuses années d'abstinence commencent à me travailler les tripes. Encore une fois, j'ai tendance à me culpabiliser parce que j'ose déroger un tantinet des hauts standards de morale et d'étique que je me suis toujours imposé toute ma vie.

Mais tout cela est ridicule. Lectrice et moi ne formons pas un couple. Merde, nous ne nous sommes jamais rencontré ! Et de plus, l'exclusivité doit être réciproque. Donc, au diable les principes rigides et irréalistes. Le seul principe auquel je tiens mordicus, c'est la franchise, l'honnêteté. Je ne fais aucune promesse ni à elle ni à aucune des autres femmes de ma vie, virtuelles ou réelles. Jusqu'à ce que la situation change entre Lectrice et moi, jusqu'à ce qu'elle se décide à m'ouvrir sa porte, je ne considèrerai pas que je lui doit une quelconque exclusivité qu'elle ne me demande même pas de toute façon et qu'elle ne m'offre pas elle-même. Et après notre première rencontre ? Et bien nous traverserons ce pont une fois rendu à la rivière.

D'ici là, je me considère toujours libre comme l'air.


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