20 novembre 2001

J'envie ceux qui souffrent mais qui peuvent mettre un visage sur leur souffrance.

J'ai croisé Copine aujourd'hui au travail. Elle me trouvait pâle. Était-ce dû à l'heure tardive où j'ai finalement pu rejoindre mon lit, ou à cette brève rechute de colite néphrétique qui m'a immobilisé ce matin pendant une bonne demi-heure, la tête dans le bol de toilette, à essayer de vomir avec un estomac vide ?

Finalement, la douleur est repartie comme elle est venue, en quelques secondes à peine.

Je crois que je suis en train de brûler la chandelle par les deux bouts. Vivement la fin de ce mois de novembre infernal que je puisse enfin me reposer et faire des nuits un peu plus normales.

Et comme si je n'avais pas déjà assez de travail comme ça, le disque rigide de l'un de nos serveurs a choisi cette journée pour rendre l'âme, ce qui m'a obligé à rester au boulot jusqu'à 20h.

Alors que je retournais à ma voiture ce soir, je pensais à la journée que je venais de passer. J'ai beau dire à qui veut l'entendre que je ne me définis pas par mon travail, que pour moi l'accomplissement professionnel n'est pas le gage d'une vie réussie, il n'en demeure pas moins que ça fait du bien d'avoir dans sa vie au moins un domaine où l'on excelle, un domaine dans lequel notre talent et nos compétences sont appréciées et reconnues par tous. Aussi cliché que cela puisse paraître, c'est la seule chose qui me fait me sentir utile, qui donne un sens à ma vie ces temps-ci. C'en est quasiment pathétique d'ailleurs.

Pourquoi faut-il absolument se sentir utile pour que notre vie aie un sens ?

C'est d'ailleurs souvent un problème chez les personnes âgées qui, au fil des années, voient leurs amis disparaître et leur famille les déserter. Plus personne n'a besoin d'eux, plus personne ne requiert leurs services. S'ils sont à la retraire, ils ont de plus le sentiment qu'ils n'apportent plus rien à la société.

C'est là une des principales causes de cette angoisse avec laquelle je vis presque constamment. Cette impression que la vie ne se suffit pas à elle-même, que l'ennuie et le malheur sont des états vers lesquels tout être humain tend naturellement, et qu'il doit continuellement lutter pour trouver d'autres idées, d'autres rêves, d'autres raisons de vivre. Comme la vie est dépendante de l'air et l'eau, notre âme est dépendante de ces rêves et de ces projets. Et c'est cette dépendance qui me rebute tant, à laquelle je n'arrive pas à me faire, à m'habituer.

La dépendance entraîne la peur, et la peur entraîne la souffrance.

Bon. Voilà que je me prend pour Yoda maintenant.


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