30 novembre 2001

J'ai vraiment la poisse.

Et en plus, si je m'abandonnais complètement à mes délires paranoïaques, j'en viendrais presque à croire que j'ai été responsable de la mort de quelqu'un ce soir.

Je m'explique.

Vous savez cette collègue dont je parle quelques fois, celle qui revient d'un long voyage ? C'est la même collègue que j'avais présentée à Copine et avec qui elle est devenue amie. Et bien cette collègue a passé la semaine à nous montrer ses photos de voyage, absolument magnifiques d'ailleurs. Cet après-midi, comme je parlais avec elle, j'ai soudain réalisé que Copine aimerait sûrement voir les dites photos. J'ai donc demandé à brûle pourpoint à ma collègue si elle et son conjoint voulaient venir chez moi ce soir. J'allais aussi inviter Copine et nous pourrions tous les quatre parler de leur voyage.

Elle a accepté avec enthousiasme.

Tout le monde devait se retrouver chez moi à 20h.

Vous devez vous demander pourquoi je fais une histoire autour d'une simple invitation à venir prendre un verre chez moi. Sauf que si vous me lisez depuis assez longtemps, vous savez que rien n'est jamais simple avec moi, et que le destin s'acharne toujours à me mettre des bâtons dans les roues dès que j'essais de me sortir de ma sacro-sainte inertie.

Et bien ce soir, le destin s'est particulièrement acharné.

C'était d'abord la pluie verglaçante qui m'inquiétait un peu. En effet, j'habite assez en retrait de la ville et j'avais peur que les routes soient plutôt difficiles et décourage mes amies.

Mais la nature, contrairement à son frère le destin, m'aime et ne me fait jamais de mal. Très tôt en soirée la température a grimpé de quelques degrés, changeant cette pluie verglaçante en pluie ordinaire en rendant les routes tout à fait sécuritaires.

Mais mon soulagement fut de courte durée.

Le téléphone sonna à 19h30. C'était Copine. Elle m'annonçait qu'elle ne pourrait pas venir chez moi, car elle devait aller tenir compagnie à sa meilleure amie.

Celle-ci venait d'apprendre la mort d'un membre de sa famille.

Copine se confondait en excuse, mais je lui ai évidemment assuré que je comprenais sa situation. Je raccrochai donc le téléphone non sans lui faire promettre de transmettre mes plus sincères condoléances à son amie.

Comme la principale intéressée ne venait pas, ma collègue et moi crûment bon de reporter la soirée à une autre fois.

Je pensais bien pouvoir baiser le destin cette fois, en organisant quelque chose à la dernière minute sans lui laisser le temps de réagir. Et bien je suppose qu'il en a vu d'autres, parce que c'est lui qui m'a baiser, et pas à peu près.

Bien sûr, ce n'est pas un drame. Et ce deuil que vit l'amie de Copine est bien pire que de passer pour moi un petit vendredi soir seul chez moi.

Et bien sûr, on a beau parler du destin comme d'une entité douée d'intelligence et d'une volonté propre, habituellement, on n'y croit pas vraiment.

Mais des évènements comme ceux-là sèment le doute.

Et en plus, je me trouve bien égocentrique de ramener comme ça à moi-même ce deuil, de ne penser qu'à mon petit malheur quand en ce moment, de l'autre côté de la ville, une femme que je connais est en train de vivre une des plus horribles expériences de l'existence humaine: la perte de quelqu'un qu'on aime.

J'aurai une pensée pour elle ce soir.

Soyez gentils, faites de même.

Merci.


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