18 août 2002

Mon ami d'enfance et sa copine ont été assez gentils pour m'inviter à les accompagner en camping cette fin de semaine. Samedi était une journée magnifique que nous avons passé à faire du kayak sur la rivière noire dans le parc régional de Chaudière-Appalaches. Il y avait belle lurette que je n'avais pas embarqué sur un de ces engins mais l'expérience m'a confirmé que pour une personne seule, c'est beaucoup plus pratique et agréable que le canot, pour le confort mais surtout par grands vents. Par contre, mais bras m'ont rappelé cruellement qu'il ne s'agit pas du tout du même genre d'effort que le canot. Naturellement, je n'ai pu m'empêcher durant la journée de m'arrêter à un petit quai pour faire saucette dans les eaux sombres et tranquille de la rivière, dont le cours paresseux sinuant entre les arbres me faisait penser à une route et me donnait envie de la parcourir à la nage sur toute sa longueur, ce dont je ne me serais pas privé si j'avais été un meilleur nageur. Seule ombre au tableau: nous devions partager la rivière avec les véhicules à moteur, dont les pilotes se sont néanmoins montrés très courtois en ce qui a trait aux vagues.

Le soir venu, nous avons découvert par pur hasard un camping rustique qui venait tout juste d'ouvrir cette année. Croyez-le ou non, nous y étions complètement seuls. Après le souper, autour d'un bon feu et un petit verre de vin à la main, nous avons discuté, entre autres, d'un couple en canot que nous avons croisé au début de la randonnée et dont la dame était en monokini. C'est alors que mon ami d'enfance a passé un commentaire qui m'a d'abord très surpris, puis carrément choqué. Pour résumer ses paroles tout en en conservant le ton, il a dit en gros qu'un femme au seins tombants et peu esthétiques ne devrait pas avoir le droit de les montrer en public.

J'ai été profondément choqué par cette remarque, mais je n'ai même pas eu le temps de répliquer, car sa blonde, encore plus scandalisée que moi, s'est mise à l'invectiver sans retenue, lui disant qu'elle était scandalisée de l'entendre passer de tels commentaires, qui selon elle (et selon moi aussi) ne sont rien de moins que de la discrimination inacceptable basée sur l'âge et l'apparence physique, ce qui est déjà une des plaies de notre civilisation. Il semble que sa copine, bien qu'elle n'ait commencé à réfléchir sur la question du naturisme que depuis qu'elle me connaît, ce qui veut dire quelques semaines tout au plus, en ait déjà beaucoup mieux compris l'esprit que son copain qui, lui, me connaît depuis plus de vingt ans. Mais cela ne me surprend pas tellement. Mon ami d'enfance, depuis aussi longtemps que je le connais, a toujours eu une façon désagréable de traîner des préjugés assez agaçants, pas seulement en ce qui a trait au naturisme, mais aussi envers les homosexuels et divers autres sujets. C'est un homme assez inflexible dans ses opinions mais qui, heureusement, possède en général de belles valeurs.

Épuisés par notre journée de pagayage, nous nous sommes couchés relativement tôt. J'ai dormi quand même assez bien vu les circonstances car je dors toujours mal dans une tente le premier soir. Le fait d'être seul a sûrement aidé (nous avions apporté deux tentes). Je me suis néanmoins réveillé à quelques reprises, ce qui m'a permis durant la nuit d'apprécier les cris lointains d'une bande de coyotes dans les montagnes qui hurlaient dans la nuit.

À notre réveil ce matin, nous avons tout juste eu le temps de ranger les tentes et le matériel et de nous mettre à l'abris dans la voiture avant que l'orage ne s'abatte sur nous. Nous avons roulé jusqu'au village de Saint-Vallier, où le temps se dégageait à nouveau. Après un copieux déjeuner, nous avons passé le reste de l'avant-midi et le début de l'après-midi à marcher sur les berges du fleuve. Pendant que mon ami d'enfance ramassait des morceaux de verre dépolis par la mer pour un futur projet de bricolage, sa copine et moi avons beaucoup parlé de toutes sortes de sujet: relations humaines, spiritualité, sciences. Plus nous apprenons à faire connaissance et plus je réalise que nous pourrions être de très bons amis.


Mon adresse de courriel devient de plus en plus inutile. Je reçois maintenant quotidiennement une trentaine de pourriels qui réussissent à passer à travers mon filtre. Et ça, c'est sans compter les trois cent à quatre cent messages par semaine que le dit filtre réussi à capturer et rediriger directement dans mon dossier de courrier indésirable. J'inspecte mes messages tellement sommairement avant de tout effacer que j'ai peur de détruire des messages légitimes de lecteurs et lectrices. C'est ce qui a faillit arriver aujourd'hui, alors que j'ai découvert un message qu'une nouvelle lectrice m'a fait parvenir il y a déjà plusieurs semaines.

Inspiré par ce qu'elle m'a écrit, et par mon expérience de la nuit passée avec le hurlement des coyotes, j'ai décidé de vous faire un cadeau, de vous faire partager une partie des sons de la nuit qui m'accompagnent quelques fois alors que je prend le chemin du sommeil, dans l'espoir que vous comprendrez peut-être un peu mieux la magnificence de mon petit coin de paradis.

Enjoy.


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