19 janvier 2002

Pourquoi faut-il absolument que je ne parle que de mon malheur ici ?

Depuis quelque temps je prend la plume virtuelle à reculons. J'hésite à venir écrire ici. Je me dis que mes lecteurs et lectrices vont finir par se désintéresser de moi à force de lire jour après jour les complaintes d'un homme qui a tout pour être heureux et qui ne l'est pas.

Ce journal se voulait être le seul endroit où je pourrais m'épancher entièrement, sans retenue, sans avoir peur de déplaire ou de déranger. Mais je me rend compte que, même ici, j'ai tendance à vouloir m'isoler lorsque je ne file pas, pour ne pas imposer aux autres mon humeur massacrante.

Peut-être n'aurais-je jamais dû commencer ce journal. Peut-être aurais-je dû me contenter de ce que j'avais toujours fait par le passé, c'est à dire écrire un journal papier que personne n'aurais jamais lu. Seulement ainsi pourrais-je me sentir vraiment libre.

J'ai été invité chez une amie d'enfance hier soir. Elle m'a reçu avec un bifteck d'autruche. Cette viande est absolument savoureuse, un véritable délice pour un carnivore comme moi. Vous vous devez absolument de goûter à cela au moins une fois dans votre vie.

Je me suis rappelé la première fois qu'elle m'avait invité dans sa nouvelle maison et m'avait présenté son conjoint. Il y avait également quelques autres invités, et je me souviens m'être dit, en regardant tout ce monde rire et s'amuser, que je me sentais à ma place parmi ces gens, que c'était là exactement ce que je recherchais d'un groupe d'amis.

Je ne me suis pas senti souvent ainsi dans ma vie. En fait, je peux probablement compter ces occasions sur les doigts d'une main depuis les quinze dernières années. Et ce n'est pas une figure de style.

Le peu de temps que j'ai passé avec Lolita la semaine passé m'a fait réalisé une fois de plus à quel point elle et moi vivons dans deux mondes différents. C'est encore plus évident quand cela fait quelque temps que nous ne nous sommes pas vus.

Copine m'a appelé aujourd'hui. J'étais au travail. Je ne l'ai pas rappelé.

Lola m'avait aussi appelé dimanche passé, alors que je me remettais encore de ma grippe. J'ai bien essayé de lui retourner son appel mais elle est toujours connecté à l'Internet.

Je sais que j'ai mieux à offrir. Mieux que ce qui sort de ma bouche ces temps-ci.

Ce matin, je me suis surpris à danser sur place, à parler tout haut et à me faire rire moi-même avec quelques blagues. C'était exceptionnel. Cela m'arrivait tout le temps avant. En fait, je me rappelle que je me disais que si quelqu'un me voyait agir au quotidien quand je suis seul chez moi il penserait sûrement que je suis complètement cinglé.

N'empêche que j'aimais cette folie en moi, jadis. Elle trahissait mon bonheur et ma soif de vivre.

Maintenant, ce que je fais le plus souvent lorsque je suis seul chez moi, c'est pleurer. Pleurer lorsque je regarde un film particulièrement cul-cul, pleurer lorsque j'entend une musique particulièrement touchante, pleurer lorsque je pense à ces longues heures passées à m'ennuyer, que je ne pourrai jamais rattraper, et qui mises bout à bout, finiront par constituer le reste de ma vie.

Et puis j'en ai déjà hyper marre de l'hiver. Et on n'est qu'à la mi-janvier. Ça augure bien.


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