23 juillet 2002

Vendredi matin: départ à 9h30. La traversée de la réserve faunique des Laurentides est chiante à cause de la quantité astronomique de travaux routiers en cours. Je déteste cette attitude de notre gouvernement qui consiste à faire faire intentionnellement (mais sans l'avouer évidemment) des routes de qualité médiocre afin qu'on doivent absolument en faire la réfection aux cinq ans, ce qui donne des jobs aux travailleurs du domaine de la construction. Brillant comme politique de création d'emploi...

Après avoir traversé la région du lac Saint-Jean, je pénètre dans la réserve faunique Ashuapmushuan. Me voici en territoire inconnu. J'adore rouler sur des routes que je parcours pour la première fois. Même si je roule sans musique ni radio ni compagnie, je ne m'ennuis pas. Les paysages sont si magnifiques, les lacs et rivières que je croise si splendides. J'adore la forêt boréale, définitivement. Je m'y sens bien, je m'y sens dans mon élément, je m'y sens chez moi. Je voudrais m'arrêter à chaque plan d'eau pour m'y baigner, explorer, ou le parcourir en kayak ou en canot. Mais à ce rythme, je prendrais une semaine à me rendre à ma destination.

Je m'arrête à une petite halte pour casser la croûte. Une seule table à pique-nique couverte. Comme je m'y attendais, je vois apparaître une horde de mouches à cheval affamées. Mais à ma grande surprise, elles ne s'en prennent pas à moi, mais bien à ma voiture ! Ces mouches sont complètement débiles. Je suis là, en pleine forêt boréale, par une magnifique journée chaude et ensoleillée, à manger en plein air, et aucune mouche ne vient me déranger ! C'est à n'y rien comprendre. Pendant près d'une demi-heure, je regarde une horde d'au moins une centaine de mouches à cheval s'acharner autour de ma voiture, alors qu'un gros sac de cinq litres de sang frais se tient à deux mètre à peine, en toute tranquillité. Seules quelques mouches noires, sans doute plus brillantes, me piquent le fond de la tête. Comme quoi, l'intelligence n'est pas toujours corrélée avec la taille.

Je reprend la route pour finalement faire le plein dans la municipalité de Chapais, où on m'informe qu'il me reste un peu plus de deux heures avant d'arriver à destination. Ici, le paysage ressemble davantage à la forêt ouverte du Grand Nord, à la taïga telle que je la voyais dans les Monts Groulx.

Le reste de la route est excessivement relaxant. Presque aucune circulation dans cette région au relief plat, où la route est à peu près droite sur des segments de plusieurs dizaines de kilomètres à la fois. Je traverse les villages amérindiens de Waswanipi, Desmaraisville et Miquelon pour arriver finalement à ma destination: Lebel-sur-Quévillon. Population: 3557. Durée totale du trajet: neuf heures.

Je suis accueilli chaleureusement par le conjoint d'une de mes collègues de travail, qui habite maintenant la région pour des raisons professionnelles. Croyant bien faire, et n'étant pas au courant de mes problèmes d'anxiété sociale, il s'empresse de me présenter tout le quartier au complet. J'exagère, bien sûr, mais il est quand même vrai que dans ce genre de petite municipalité au milieu de nulle part, tout le monde se connaît. Durant les deux prochains jours, je ne compterai plus le nombre de fois où il se fera saluer par un voisin ou klaxonné par une voiture de passage.

Nous nous sommes finalement retrouvés plusieurs personnes et quelques enfants assis dehors à parler de tout et de rien tout en nous faisant dévorer par les maringouins. J'ai fait un homme de moi et j'ai essayé du mieux que j'ai pu de participer à quelques conversations. Mais la majorité du temps, je restais silencieux à écouter.

Après que la visite soit partie, moi et mon hôte avons terminé la soirée en tabassant les quelques dizaines de maringouins qui avaient réussis à s'introduire dans la maison lorsque les gens gardaient la porte ouverte trop longtemps. Ainsi se termina ma première journée.

Palpitant, non ?

La suite demain, because je tombe de sommeil.


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